Bastia-Saint-Etienne : Mekloufi retrouve les siens

Ce samedi 2 mai 2015, Saint-Etienne se déplace sur l’île de Beauté pour le compte de la 35e journée de Ligue 1. Contre Bastia, les Verts auront à cœur de conforter leur quatrième place, synonyme de qualification pour l’Europa League. Le 24 novembre 1968, les Stéphanois d’Albert Batteux se déplaçaient pour la première fois de leur histoire à Bastia où évoluaient René Ferrier et Rachid Mekloufi. Récit.

FranceFootball, 26 novembre 1968
FranceFootball, 26 novembre 1968

Le 12 mai 1968, l’AS Saint-Etienne affronte les Girondins de Bordeaux en finale de la Coupe de France. Si Mekloufi a perdu de son efficacité en attaque, Albert Batteux, l’entraîneur stéphanois, se rappelle d’une finale gagnée par Reims contre le Racing (2-0) à Colombes en 1950, où, lui-même, joueur en fin de carrière à Reims, avait été aligné par son entraîneur non seulement pour « services rendus » mais aussi pour ses qualités indéniables. Le flair de Batteux offre à Mekloufi, qui n’a plus remis les pieds à Colombes depuis un certain France-Belgique en 1956, la possibilité de quitter les Verts avec le trophée manquant à son palmarès. Le natif de Sétif, recommandé à Jean Snella en 1954, éblouit de son talent cette finale en inscrivant les deux buts victorieux de son équipe et réussit le match rêvé pour refermer sa belle page stéphanoise. Saint-Etienne remporte ainsi un nouveau titre de champion de France devant Nice et clôt une saison particulièrement riche.

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Dans le même temps, le Championnat de Division 2 livre son verdict : Bastia termine à la première place et accède à l’étage supérieur. Après avoir manqué en 1966-67 l’accession automatique en Division 1, le S.E.C.B. a cette fois atteint son objectif.

La rumeur Mekloufi

Pour faire bonne figure et obtenir des résultats en Division 1, le club corse se met tout de suite en quête de joueurs d’expérience. Et le premier se nomme… Rachid Mekloufi. La rumeur fait son chemin mais le principal intéressé reste évasif sur cette possible destination. Roger Rocher, le président de l’ASSE, ne souhaite pas voir partir Rachid dans un éventuel club concurrent et évoque avec lui la possibilité d’une reconversion au sein du club s’il décidait de mettre un terme à sa carrière professionnelle. Dans son édition du 20 juin 1968, le quotidien L’Equipe relate une conférence de presse du premier dirigeant stéphanois. Ce dernier évoque l’avenir de son joueur. IMG_0657

Le samedi 3 août 1968, c’est la grande rentrée à l’ASSE. Dirigeants, staff et joueurs se retrouvent au stade Geoffroy-Guichard pour un apéritif en guise de premier contact. Pour Mekloufi, de retour de vacances de Tunis, ce rassemblement amical est le dernier. Il prend en effet contact avec Bastia et le Servette de Genève entraîné par un certain Jean Snella. Dans un premier temps, le club suisse a la faveur du président Rocher mais exigerait que le joueur ne lui coûte pas un franc, ce que Rocher refuse naturellement. Le numéro 10 stéphanois repart en vacances en Algérie. Dans son édition du 23 août 1968, L’Equipe annonce le transfert de Mekloufi à Bastia « fait à   99 % ».

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René Ferrier comme intermédiaire

Lucien Jasseron et les dirigeants bastiais ne manquent pas d’idées. Ils demandent à René Ferrier, Bastiais depuis 1965 et ex-coéquipier de Rachid lors de l’obtention du premier titre des Verts en 1957, de contacter le milieu de terrain des Verts afin de tenter de le convaincre de s’installer en Corse. Jules Filippi, le directeur sportif du club corse, reprend contact avec le président Rocher et effectue plusieurs allers et retours à Saint-Etienne avec l’espoir de trouver un accord. Le dimanche 25 août, de retour de vacances, Mekloufi s’envole pour la Corse afin d’y parapher un contrat de quatre ans.

Rachid Mekloufi entouré de Jean-Claude Blanchard à sa gauche et Jean-Pierre Serra à sa droite.
Rachid Mekloufi (au centre) est entouré de l’ex-Rémois  Jean-Claude Blanchard (à gauche) et l’ancien Niçois Jean-Pierre Serra (à droite).

Mekloufi n’est plus Stéphanois mais son cœur est toujours teinté de Vert. Lors de la rencontre de Coupe d’Europe entre l’ASSE et le Celtic, le 18 septembre, il assiste en spectateur passionné, à la victoire de ses ex-coéquipiers (2-0). Quinze jours plus tard, après l’élimination des Verts au Celtic Park (0-4), il déclare : « L’an passé, après le 1 à 0 devant Benfica, nous pensions avoir compris jusqu’où il fallait parfois aller pour se qualifier. La défaite de Glasgow montre que nous ne savons pas encore jouer à ce terrible jeu-là. » Pas de doute, Rachid a toujours la fibre verte.

Mekloufi : « La tension va monter »

Fin novembre, Bastia s’apprête à recevoir pour la première fois de son histoire l’AS Saint-Etienne. Depuis quelques jours, deux hommes sont impatients d’y être. René Ferrier et Rachid Mekloufi, champions de France en 1957 avec l’ASSE, ont quitté les brumes du Forez pour le soleil de l’île de Beauté. Pour eux, recevoir le club qui les a formés reste un honneur. Face à leurs anciens coéquipiers, ils auront à coeur de briller de mille feux. « C’est la première fois que je jouerai contre mes anciens coéquipiers, dit Mekloufi. Pour l’instant, je n’y pense pas tellement. Je me dis que c’est une rencontre comme une autre, qu’il faudra gagner parce que c’est vital pour notre équipe. Mais dans les prochaines heures, la tension va monter. J’aborderai ce match avec un peu plus de conviction, non pas parce que je suis un ancien Stéphanois, mais parce que cette confrontation pour nous, a des chances de marquer un nouveau point de départ. Il faut bien avouer que ce match sortira de l’ordinaire, ne serait-ce que parce que je me trouverai pour la première fois en face de mes amis stéphanois. A Bastia, on ne parle que de cette rencontre. »

Rachid Mekloufi sous le maillot de Saint-Etienne.
Rachid Mekloufi sous le maillot de Saint-Etienne.

Ferrier : « Un pincement au coeur »

Avant de s’engager avec Bastia à l’été 1965, René Ferrier a tout connu avec Saint-Etienne. « Avant de venir à Bastia, je n’avais pas connu d’autre club que Saint-Etienne, où j’ai passé onze ans. Qu’on le veuille ou non, ce n’est pas sans un pincement au coeur que je me produirai, moi aussi pour la première fois, contre mon ancien club. Je crois que l’on peut s’attendre à une grande partie, puisque nous trouverons en face de nous une équipe qui ne triche pas. »

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René Ferrier a joué à l’AS Saint-Etienne de 1954 à 1965. Sous le maillot vert, il a disputé 315 matches officiels.

Carnus retrouve sa place

A Saint-Etienne, Albert Batteux dispose de tout son effectif pour ce déplacement difficile en Corse. Georges Carnus, victime d’une entorse à une cheville, n’a pas disputé les trois derniers matches de son équipe. Néanmoins, il espère être du voyage et succéder à Gérard Migeon dont l’intérim a été particulièrement réussie.

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Georges Carnus, après plusieurs semaines d’absence, retrouve sa place pour le premier match entre Bastia et l’ASSE.

Robert Herbin qui ne souffre plus de problèmes musculaires, réintègre le milieu de terrain aux côtés de Jacquet, Camérini et Larqué. Ce dernier, qui récupère le numéro 10, est bien remis de son voyage au Mexique avec l’équipe de France amateurs. Batteux compte sur son jeune joueur pour redonner du punch à un secteur offensif en mal d’inspiration depuis quelques matches.

N’Doumbé et Bereta écartés

Pour le coach stéphanois, l’heure des choix est venue en attaque. Cinq joueurs se disputent trois places : Fefeu, N’Doumbé, Revelli, Keita et Bereta. Si l’abondance de biens ne nuit pas, Batteux n’est pas complètement satisfait de leur rendement, a tranché : N’Doumbé et Bereta, les deux ailiers, cèdent leur place à Fefeu et Keita. « Je dois faire des roulements, explique l’entraîneur stéphanois. Alors, je commence par celui de mes avants qui m’a semblé le plus émoussé. Cela me permet de faire l’essai à l’aile gauche de Keita qui s’y est avéré très à l’aise. »

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Georges Bereta ne jouera pas le premier Bastia-Saint-Etienne de l’histoire. Albert Batteux, l’a écarté au profit de Fefeu.

Une attaque en panne d’efficacité

A Bastia, c’est la douche froide. Les espérances d’un recrutement prometteur ont laissé place à la déception. Les Corses n’ont glané que 9 points en autant de journées et occupent une piètre 14e place peu conforme avec les ambitions de leurs dirigeants. Le quartet offensif Serra, Blanchard, Mekloufi et Blezziri n’arrive pas à dynamiter les défenses adverses.

L'Equipe, 23 novembre 1968.
L’Equipe, 23 novembre 1968.

Ce forfait de dernière minute contraint Batteux à modifier son milieu de terrain. Les supporters bastiais seront donc privés d’un duel qui s’annonçait très prometteur. En effet, durant une douzaine d’années, Herbin et Mekloufi ont constitué une doublette exceptionnelle au sein du club stéphanois. Le duel entre les deux hommes était attendu. Herbin absent, Camérini aura la lourde tâche de faire déjouer l’ex-meneur de jeu stéphanois.

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Frappé par un deuil familial, Robert Herbin n’a pas pris l’avion avec la délégation stéphanoise.

Comme à l’accoutumée en déplacement, les Stéphanois ont utilisé la voie des airs. Ils ont atterri à Bastia le samedi vers 16 h 30. A leur hôtel, ils ont eu la visite d’un certain… Rachid Mekloufi.

FranceFootball, 24 novembre 1968.
FranceFootball, 24 novembre 1968.
le jeune Claude Papi, joueur péti de talent, est promis à un grand avenir.
Le jeune Claude Papi, joueur pétri de talent, est promis à un grand avenir. – Photo L’Equipe.

Albert Batteux est déçu par ce résultat nul mais reconnaît toutefois : « On a à la fois bien et… mal joué. C’était assez bon dans l’élaboration, mais insuffisant dans la finition, même si nous avons marqué trois buts. » Le Saint-Etienne du premier tiers du Championnat est loin du niveau de celui, plutôt fringant, qui a remporté le doublé Coupe-Championnat six mois plus tôt.

Avant de raccompagner les Stéphanois à l’aéroport, Rachid Mekloufi qui a conservé de nombreuses attaches au sein du club, tente un début d’explication. « Je suis à la fois bien et mal placé pour juger. Cela se comprend. Ce qui m’a frappé chez eux, après le match chez nous, c’est leur absence à peu près complète d’accélérations dans le cours du jeu. L’aspect collectif est toujours aussi fouillé, sérieux, la défense toujours aussi précise dans les renvois, mais ce qui s’élabore à une certaine cadence au centre du terrain se termine à peu près au même rythme devant les buts. Il y a peut-être certains garçons qui accusent leur fatigue à la suite des matches de Championnat, Coupe d’Europe et de l’équipe de France. »

« C’est peut-être moi qui ne convient pas »

Bastia, avec ce nouveau point abandonné sur son terrain, fait du surplace. Mekloufi, la voix posée, tente un début d’explication : « C’est peut-être moi qui ne convient pas exactement au SECB à l’heure actuelle. Je veux dire que je ne suis pas encore très bien adapté au jeu de cette équipe ou réciproquement, ce qui revient au même. J’ai toujours joué, en quelque sorte, dans un triangle, en prenant appui sur l’une ou l’autre des deux têtes de ce triangle. Or, je n’ai pas encore trouvé cette troisième tête. Et cela me dépayse sur le terrain. Il y a des fois où je sens comme un grand vide dans le dos sans même avoir à me retourner. »

L'Equipe, 26 novembre 1968.
L’Equipe, 26 novembre 1968.

« On ne remplaçait pas Mekloufi »

Le 29 juin 1998, en pleine ferveur de la Coupe du monde, Aimé Jacquet, dans le journal L’Equipe, confiait à propos de son ex-coéquipier stéphanois : « Quand Mekloufi a quitté Saint-Etienne, personne ne voulait porter son maillot. Alors, je l’ai pris, j’ai pris ce numéro 10, mais sans songer à faire ce qu’il faisait. On ne remplaçait pas Mekloufi. »

Thierry CLEMENCEAU

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Rencontrer Salif Keita (à gauche) et Rachid Mekloufi (à droite), deux légendes stéphanoises des années 50 et 60, quel beau moment. Merci Messieurs.

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photo : asse.fr

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depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

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Metz-Saint-Etienne : dernier test avant Cologne

Ce samedi 14 mars 2015, l’AS Saint-Etienne se déplace à Metz. Après leur victoire contre Lorient (2-0), les hommes de Christophe Galtier iront au stade Saint-Symphorien avec la ferme intention de s’y imposer. Le 11 septembre 1971, les Verts d’Albert Batteux répétaient leurs gammes à Metz avant de recevoir Cologne quatre jours plus tard en Coupe UEFA. C’était aussi l’occasion pour le gardien André Castel de disputer son premier match sous ses nouvelles couleurs. Récit.

Le mercredi 1er septembre 1971, Saint-Etienne s’impose 4 à 0 face à Angoulême lors de la 5e journée de Division 1. Malgré l’ampleur du score, l’équipe d’Albert Batteux y laisse quelques forces vives. Georges Bereta, blessé à une cheville, quitte ses partenaires en boitillant. Dans les dernières minutes du temps réglementaire, c’est le tour de Samardzic de se faire une entorse du genou.

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L’Equipe, 8 septembre 1971.

Pour compléter ce tableau, Gérard Migeon, le gardien stéphanois, termine la rencontre avec une belle entorse à la cheville droite. Plâtré dès le lendemain, sa participation contre Cologne en Coupe UEFA semble très compromise.

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L’Equipe, 4 septembre 1971.

Salif Keita, l’homme en forme

Après un premier match difficile à domicile contre Nîmes (1-3), les Stéphanois sont en progression constante. Bien que défaits à Nantes (4-3, 2e j.), ils restent sur trois victoires consécutives : contre Reims (9-1), Sochaux (2-0) et  Angoulême (4-0). En cinq rencontres, Salif Keita a inscrit 7 buts et partage la première place du classement des buteurs avec le Nîmois Jacky Vergnes.

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L’Equipe, 11 septembre 1971.

Metz veut faire trinquer les Verts

A Metz, ce match contre les Verts est attendu comme une réhabilitation. Jacques Favre et ses joueurs n’ont toujours pas digéré la défaite subie contre Nancy (0-1) dans le derby lorrain. Ils espèrent bien faire trinquer les Verts qui n’ont plus connu la défaite depuis le 31 décembre 1961 (6-0). Pour changer le cours de l’histoire, l’entraîneur messin compte sur les retours de Zvunka, Sondergaard et Jeitz. Mais le plus attendu est celui de Nestor Combin. A lui seul, l’ancien Lyonnais est capable de faire basculer une rencontre.

Jacques Favre espère beaucoup du retour de Nestor Combin à la pointe de l'attaque messine.
Jacques Favre, l’entraîneur messin, espère beaucoup du retour de Nestor Combin pour dynamiser l’attaque messine.

 Après-midi télé pour les Stéphanois

Arrivés le samedi en fin de matinée, la délégation stéphanoise se repose l’après-midi à son hôtel. Au menu : une rencontre du Championnat d’Europe de basket opposant l’équipe de France à la Roumanie suivie de quelques résumés de matches de Bundesliga. Albert Batteux, de son côté, est tout heureux de converser avec une vieille connaissance « rémoise ». Roger Piantoni a fait le court déplacement de Nancy pour venir saluer son ancien partenaire de la grande époque rémoise.

Faute de bus, les Stéphanois arrivent en taxis

Saint-Etienne n’est plus le champion de France en titre mais l’affiche fait toujours recette. Ce samedi 11 septembre, 19 050 spectateurs garnissent les travées du stade Saint-Symphorien.

Il est 20 h 30, les deux équipes pénètrent sur la pelouse. Pourtant, cette rencontre a bien failli débuter avec plusieurs minutes de retard, voire être ajournée. En effet, le car qui devait conduire les joueurs stéphanois de leur hôtel au stade accusait un retard assez conséquent. Les joueurs stéphanois ont dû se résoudre à prendre des taxis. Alors que tous les véhicules étaient arrivés, un seul manque à l’appel : celui qui emmène le docteur Minasso, Keita, Parizon et Castel. Finalement, tout rentre dans l’ordre et Batteux est rassuré.

Il ne fallait pas arriver en retard

Le match débute sur un coup de théâtre. Sur l’engagement, Bereta, libre de tout marquage, s’enfonce dans le camp messin et sert Parizon qui n’a aucune difficulté à tromper Schuth. Après dix secondes de jeu, les Stéphanois mènent déjà 1 à 0 ce qui fait dire à Merchadier : «Les Messins ne touchèrent le ballon que pour le replacer au centre ».

Sous la houlette du duo très complémentaire Larqué-Bereta, et d’un Keita totalement libéré, les Verts imposent leur griffe sur ce match. « Nous nous entendons merveilleusement avec Jean-Michel, explique Bereta. Keita est heureux que je sois « derrière » car j’essaie de lui donner de bons ballons ».

André Castel (assis à côté de Christian Sarramagna) dispute ce 11 septembre 1971, son premier match avec l'AS Saint-Etienne.
André Castel (assis à côté de Christian Sarramagna) dispute ce 11 septembre 1971, son premier match avec l’AS Saint-Etienne.

Keita sur sa lancée

Metz tente de réagir par Combin et Bauda mais Castel veille aux grains et justifie la confiance placée en lui par les dirigeants stéphanois. Quelques minutes avant la mi-temps, Herbin sert Keita qui inscrit le deuxième but de Saint-Etienne (0-2, 35e). L’international malien conforte ainsi sa place de meilleur buteur de Division 1.

A la reprise, les Messins jouent leur va-tout. Nastouri et Bourgeois par deux fois et Atamaniuk inquiètent Castel. Mais Keita, sur un nouveau caviar d’Herbin, refroidit un peu plus les velléités mosellanes (0-3, 52e).

Les Stéphanois, décidément insatiables, trompent une quatrième fois Schuth par le jeune Patrick Revelli sur un action personnelle de Parizon (0-4, 70e). L’addition aurait pu être encore plus lourde si Keita n’avait pas vu son coup franc renvoyé par la transversale de Schuth.

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Salif Keita (ici avec Georges Bereta et Albert Batteux), auteur de deux nouveaux buts, conforte sa place de meilleur buteur de Division 1.

Bereta admiratif

A l’issue de cette soirée, l’international malien s’octroie la première place du classement des buteurs avec neuf réalisations. A 25 ans, il est le véritable leader d’attaque et apporte toute son expérience à ses jeunes coéquipiers que sont Parizon (21 ans), Revelli (20) et Sarramagna (19). Bereta, très admiratif dit de lui : « Il pourrait très certainement jouer au Brésil, il n’y a que lui pour pouvoir faire ce qu’il fait. »

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L’Equipe, 13 septembre 1971.

A quatre jours de recevoir Cologne en Coupe UEFA, les Verts ont retrouvé de leur éclat. L’alchimie entre les « anciens » et les jeunes pousses du club s’est opérée. Larqué, Herbin, Bereta et Keita s’affirment comme des leaders techniques. Lucien Jasseron a dit un jour qu’il suffisait dans une équipe de quatre leaders techniques pour que tout le monde suive. Saint-Etienne semble les avoir trouvés.

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FranceFootball, 14 septembre 1971.

Thierry CLEMENCEAU

 

André Castel chez les Verts

« Lorsqu’on est venu me dire à Nantes que M. Garonnaire souhaitait me voir pour me faire signer à Saint-Etienne, j’ai d’abord cru à une mauvaise plaisanterie. » André Castel, le nouveau gardien stéphanois n’en revient toujours pas. « Pensez, il était plus de 23 heures ! J’avais joué un match l’après-midi avec Laval contre Le Mans et j’étais couché. Je ne pouvais croire qu’un club comme Saint-Etienne puisse s’intéresser à moi. Enfin, je me suis levé et j’ai rejoint M. Garonnaire à son hôtel. Là, il m’a effectivement confirmé la nouvelle. J’ai mis un certain temps, je l’avoue, à réaliser. Pour moi, c’était tellement inespéré, inattendu, un rêve. »

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André Castel

Une nouvelle ère s’ouvre à Saint-Etienne

A Saint-Etienne, l’intersaison 1970-71 marque le début d’une nouvelle ère. Les expérimentés Carnus, Bosquier, Camérini, Durkovic et Hervé Revelli quittent le club. Pour les remplacer, Roger Rocher, en accord avec Albert Batteux, son entraîneur et Robert Herbin, son capitaine, décide de faire confiance aux jeunes du centre de formation. Sont ainsi promus : Alain Merchadier, Pierre Repellini, Christian Synaeghel, Christian Sarramagna, Jacques Santini et Gérard Migeon.

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La nouvelle génération stéphanoise : de d. à g. : Alain Merchadier, Christian Sarramagna, Christian Synaeghel, Gérard Migeon, Patrick Revelli, Jacques Santini et Pierre Repellini.

L’inquiètude du président Rocher

Les rencontres amicales d’avant-saison sont plutôt encourageantes avec notamment deux victoires sur Lyon (6-2) et Newcastle (2-1). Mais la lourde défaite encaissée face à Bratislava (1-5) fait l’effet d’une douche froide. Roger Rocher et Albert Batteux comprennent très vite que leur équipe est trop inexpérimentée. C’est ainsi que le défenseur central grenoblois Daniel Sanlaville est engagé pour seconder Merchadier. Désireux de posséder deux bons gardiens de but, le staff stéphanois recherche également une doublure à Gérard Migeon.

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Gérard Migeon, le jeune gardien stéphanois, fait partie de la génération montante.

« Notre préférence va à Castel »

Le junior Ollivain, malgré des qualités évidentes, est jugé encore un peu tendre pour la Division 1. Rocher demande alors à Pierre Garonnaire, le recruteur attitré des Verts, de prendre contact avec plusieurs gardiens. Sur les trois noms que lui présente ce dernier, Rocher jette son dévolu sur André Castel. « Notre préférence va à Castel, actuellement à Laval qui est désireux de venir chez nous. Il nous reste à nous mettre d’accord avec lui. » dit le président stéphanois. Rachid Mekloufi, de passage à Saint-Etienne conforte le président stéphanois dans son choix : « Vous pouvez le prendre. D’abord parce que c’est un excellent gardien. Ensuite parce qu’il a la baraka. » Il se souvient encore d’un Saint-Etienne-Nantes (3-3) au stade Geoffroy-Guichard le 9 octobre 1966. Ce jour-là, Castel avait effectué un grand match malgré ses trois buts encaissés.

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André Castel s’impose dans les airs, lors d’un match entre Nantes et les Girondins de Bordeaux.

Alors qu’il a débuté la saison en National avec Laval, Castel fait un voyage éclair à Saint-Etienne. L’entrevue avec les dirigeants stéphanois se passe bien et les deux parties se mettent d’accord sur les modalités du futur contrat. Pourtant, il repart à Laval sans donner son accord. Il ne souhaite pas quitter la Mayenne sans que son club lui ait trouvé un remplaçant. Ce qui sera fait avec la signature de Jacques Rose.

Dans l’ombre de Daniel Eon

Il part l’esprit libéré et paraphe, à 28 ans, un contrat de 2 ans avec l’AS Saint-Etienne. Après une absence de près de deux ans en Division 1, ce gardien audacieux s’apprête à vivre une nouvelle aventure. Son rôle de remplaçant ne le perturbe nullement d’autant qu’il a connu pareille situation à Nantes. De 1964 à 1967, il a vécu dans l’ombre de Daniel Eon, le titulaire du poste. Pourtant, l’occasion de s’affirmer lui sera donnée le 10 octobre 1964 lors d’un Nantes-Nîmes. « C’était mon premier match en Division 1 et je n’étais pas très fier. Un trac sournois me paralysait et Nîmes l’avait emporté 2 à 0. A 70%, j’étais responsable de ces deux buts encaissés et je ne souhaitais qu’une chose : prouver que c’était un accident et que je valais beaucoup mieux. Hélas, l’occasion ne m’en fut pas laissée car le dimanche suivant, Daniel, rétabli, reprenait normalement son poste. Et c’est comme cela que pendant longtemps, j’ai attendu et espéré. »

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André Castel, le nouveau gardien stéphanois, a été chaudement recommandé par Rachid Mekloufi au président Roger Rocher.

« Ils m’ont chaudement recommandé à Saint-Etienne »

José Arribas et les dirigeants nantais ne lui font que rarement confiance. Après Eon, c’est au tour de Fouché de le supplanter dans les cages nantaises. « Je ne leur en veux absolument pas, concède volontiers le néo-Stéphanois, d’autant qu’ils m’ont chaudement recommandé à Saint-Etienne. »

Son statut d’ «éternel» remplaçant le pousse à quitter Nantes en novembre 1970 pour signer un contrat amateur à Laval. Il ne restera que six mois en National mais cela le réconciliera avec le football.

Le coup de fil de Pierre Garonnaire constitue pour lui une opportunité de sortir de l’ombre. « On répète souvent qu’un gardien arrive à pleine maturité vers 28 ou 30 ans. Je n’ai plus de temps à perdre. J’ai progressé en confiance, en stabilité. Il me semble que j’ai plus de sûreté et de présence, que je commande mieux ma défense. A Nantes, j’étais trop jeune pour m’imposer. »

« Je me sens Stéphanois à part entière »

Son adaptation à Saint-Etienne se déroule normalement. « Mes nouveaux dirigeants m’ont réservé un accueil chaleureux et ont tout mis en oeuvre pour faciliter mon intégration, concède-t-il. Dès mon arrivée, M. Batteux m’a exposé avec une grande franchise ce qu’il attendait exactement de moi. Je me sens Stéphanois à part entière. J’ai un peu la sensation de débuter ici une seconde carrière. Contrairement à ce que je craignais, le passage du National à la Division 1 s’est effectué sans heurts. »

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André Castel profite de la blessure de Gérard Migeon pour s’imposer dans les buts stéphanois. En 1970-71, il dispute 26 rencontres.

Durant cette saison de transition pour les Verts, Migeon se blesse à plusieurs reprises. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, Castel profite de l’aubaine et dispute 26 rencontres dont les deux de Coupe d’Europe contre Cologne.

Migeon part, Curkovic arrive

Lors de l’intersaison suivante, Migeon, bien qu’encore lié avec Saint-Etienne pour quatre ans, demande à quitter le club.

Castel a enfin l’opportunité d’être le numéro 1 en Division 1. C’est sans compter sur l’arrivée d’un grand gardien en provenance de Yougoslavie : un certain Ivan Curkovic. Déçu, il accepte malgré tout de repartir pour une saison comme remplaçant. Mais las de cirer le banc de touche, il quitte définitivement Saint-Etienne en janvier 1973.

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Gérard Migeon, assis à côté de Salif Keita, quitte l’AS Saint-Etienne pour Toulon à la fin de la saison 1971-72.

Avec Nantes, André Castel avait fait ses grands débuts en professionnel contre Nîmes (0-2). Avec Saint-Etienne, il a disputé son dernier match… à Nîmes le 27 mai 1972. Comme avec Nantes, il connut également la défaite (0-4).

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L’Equipe, 15 décembre 1972.

Thierry CLEMENCEAU

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Bordeaux – Saint-Etienne : le réalisme stéphanois

Ce dimanche 15 février 2015, Saint-Etienne se déplace à Bordeaux pour le compte de la 25e journée de Ligue 1. Le 24 octobre 1970, les Verts d’Albert Batteux, victorieux de l’OM une semaine plus tôt, étrennaient leur nouveau statut de leader du Championnat de Division 1. Récit.

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Stade municipal de Bordeaux. Collection personnelle.

Le 17 octobre 1970, le match nul réalisé par Bordeaux à Nîmes (1–1) est arrivé à point nommé. Ce partage des points récolté dans le Gard a redonné confiance aux Girondins dont le prochain adversaire n’est autre que l’AS Saint-Etienne, l’actuel leader du championnat de France. Ce rendez-vous, Bordeaux compte bien le mettre à profit pour se retrouver pleinement face au nouveau leader stéphanois.

Michelena assure l’interim

Au stade municipal, la location bat son plein. « Sûrement la meilleure depuis le début de la saison  » clame-t-on au siège des Girondins. Chez les gardiens, côté bordelais, Rigoni, en phase de reprise et Montès, toujours indisponible, sont les deux seuls absents de cette rencontre au sommet. Michelena assure l’interim.

Au poste d’arrière gauche, Rostagni, blessé à une cuisse et absent dans le Gard, effectue son grand retour. Présent lors de l’opposition entre professionnels et amateurs mise en place en milieu de semaine par André Gérard, l’entraîneur girondin, il a été préféré à Grabowski. Texier, également forfait à Nîmes et en délicatesse avec un genou réintègre le groupe. Son bon match à Nîmes, ponctué par un but, lui assure une place dans le groupe même si Burdino est maintenu au milieu de terrain.

Débuts de Giresse à domicile

A Nîmes, un international Juniors a fait ses grands débuts dans le Championnat de Division 1. Le jeune et très prometteur Alain Giresse (18 ans), a gagné la confiance de son entraîneur. Doté d’une belle frappe de balle, ce meneur de jeu effectue donc ses grands débuts devant ses supporters du stade Municipal.

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A tout juste 18 ans, Alain Giresse fait ses grands débuts à domicile devant le public du stade municipal.

Enfin, en attaque, Petyt et Wojciak sont en concurrence de même que Ruiter, le meilleur buteur girondin avec cinq buts, a toujours bien réussi contre Saint-Etienne. En milieu de semaine, il s’est blessé à l’entraînement, ce qui profite à son coéquipier Jensen, pourtant peu prolixe devant le but.

Saint-Etienne se déplace en leader

Saint-Etienne se présente à Bordeaux en leader du Championnat. Sa victoire contre son grand rival marseillais (2-1, 4e succès consécutif) lui laisse entrevoir des jours heureux. Même si les Verts jouent à gagne-petit, l’essentiel pour eux est bien de gagner. Ce déplacement en Gironde, les Stéphanois l’ont préparé dans la sérénité. Pour la première fois depuis le début de la saison, Albert Batteux et ses joueurs ont bénéficié d’une semaine complète de repos.

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Herbin joue sous infiltrations

Robert Herbin, blessé à la jambe droite depuis de longues semaines, ne devait pas prendre part à ce déplacement. « Il me faut du repos pour guérir cette jambe droite. Tout se tient, et mon genou a plié, parce que je souffre d’une talonnade et d’un muscle adducteur. Heureusement que Broissart pourra me remplacer à Bordeaux. »

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Robert Herbin est titulaire malgré sa blessure à la cuisse droite qui l’oblige à jouer sous infiltrations.

Un message qu’Albert Batteux avait parfaitement entendu. Dans le Sud-Ouest, il comptait titulariser l’international José Broissart pour faire souffler Herbin. Mais voilà, dans le match au sommet contre l’OM gagné 2 à 1, le genou de Broissart a lâché. En l’absence d’Aimé Jacquet, « Roby », qui use déjà d’infiltrations, est donc à nouveau titulaire au milieu de terrain.

Georges Polny, remplaçant depuis trois matches, mais oh combien précieux par sa polyvalence, s’est claqué à la cuisse droite à l’entraînement. Il est forfait.

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Albert Batteux, l’entraîneur stéphanois, compte de nombreux blessés ce qui l’oblige à titulariser Robert Herbin, malgré la blessure de ce dernier.

La concurrence Parizon-Samardzic

En attaque, Batteux a eu beaucoup de mal à choisir entre Patrick Parizon et Spasoje Samardzic. Souvent mis en concurrence cette saison pour le poste d’ailier droit, ces deux joueurs de valeur n’ont pas retrouvé le niveau qui était le leur lors de la précédente saison. Après le dernier entraînement, le choix de l’entraîneur stéphanois s’est porté sur le Yougoslave qui se voit là accorder une nouvelle chance. Enfin, Salif Keita, déjà auteur de neuf buts, est bien présent malgré une douleur persistante à un genou.

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Contrairement à la saison précédente, Patrick Parizon a du mal à confirmer. Il est en concurrence avec le Yougoslave Samardzic.

La veille de leur départ pour la Gironde, tous les joueurs ont été vaccinés contre la grippe, à commencer par Roger Rocher qui a donné l’exemple.

Les Membres Associés avec les Verts

Les Verts sont leaders mais ce n’est pas pour cela qu’ils jettent l’argent par les fenêtres. Pour obtenir la réduction de 50 % proposée par Air Inter via Orly sur le prix des billets, les dirigeants ont invité quatre supporters « Membres Associés » pour que le nombre de vingt passagers soit réuni. Comme à leur habitude, les Stéphanois ont décollé le samedi pour Bordeaux. 

Pierre Bernard et Robert Péri sont bien là

Ce dimanche 24 octobre, l’affiche entre Bordelais et Stéphanois n’a pas le même engouement que les précédentes confrontations en raison du classement des Bordelais (18e avec 7 points). Pourtant, 11 601 spectateurs payants se sont acquittés de leur ticket d’entrée. Parmi ceux-ci, Pierre Bernard, revenu s’installer dans la région bordelaise. L’ancien gardien tricolore a serré nombre de mains avant le coup d’envoi, ce qui démontre qu’il n’a rien perdu de sa popularité. Autre visage connu : celui de Robert Péri. L’Angoumoisin, de retour d’un déplacement à Reims avec son équipe, est de retour pour la première fois au stade municipal pour venir encourager ses anciens coéquipiers.

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Pierre Bernard, ancien Girondin et Stéphanois, a fait le déplacement au stade Municipal. Entre les deux clubs, son coeur balance.

De la domination bordelaise…

La première mi-temps est à l’avantage des Girondins. A la 15e minute, Carnus, le gardien stéphanois, détourne une belle frappe tendue de Jensen. Les joueurs de Gérard abusent de longs ballons, ce qui facilite la tâche de la défense stéphanoise. Malgré sa bonne volonté, Jensen est toujours aussi inefficace et le duo Petyt-Wojwciak bute sur les latéraux Farison et Durkovic.

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Spasoje Samardzic, préféré à Parizon, tente une incursion dans la défense girondine.

… au but de Salif Keita

A la 44e minute, les Verts se créent enfin leur première véritable occasion. A la suite d’un une-deux Samardzic-Revelli puis d’un échange entre Keita et Revelli, le ballon parvient sur l’aile gauche à Sarramagna. Le Basque centre pour le Malien dont la frappe fait mouche (0-1, 44e). Le réalisme stéphanois a encore frappé : leur seul tir cadré se transforme en but. Leur premier coup d’essai est donc un véritable coup de maître. C’est sur cet avantage que M. Verbeke siffle la mi-temps.

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Jean-Michel Larqué se joue de deux défenseurs bordelais pour aller de l’avant et porter l’estocade.

Keita encore et toujours

Onze minutes après la reprise, Saint-Etienne tue le suspense. Bien servi par Jean-Michel Larqué, Salif Keita, encore seul au point de penalty, envoie le ballon dans les filets de Michelena (2-1, 56e).

Le score est lourd pour Bordeaux. A la 65e minute, Jensen, peu à son avantage, est remplacé par Texier. Ce changement semble donner un coup de fouet à l’attaque girondine. A cinq minutes du terme de la rencontre, Giresse en chef d’orchestre, adresse un ballon à Texier qui se transforme en passeur. Ce dernier délivre un ballon en cloche pour Burdino qui réduit le score (1-2, 85e). Il reste cinq minutes aux hommes de Gérard pour égaliser. Giresse puis Wojciak se lancent à l’assaut des cages stéphanoises mais Carnus s’emploie à préserver la victoire stéphanoise.

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Alain Giresse face à Robert Herbin ou le choc des générations.

« Bordeaux vaut mieux que son classement  »

Au coup de sifflet final, Albert Batteux ne cache pas sa satisfaction :  « J’appréhendais beaucoup cette rencontre car je savais que certains de mes joueurs étaient en condition physique précaire. Ceci dit, je reconnais que mon attaque a été assez « junior » devant les Girondins, mais l’essentiel est atteint. Bordeaux vaut assurément mieux que son classement. » Un sentiment que partage son défenseur central Bernard Bosquier : « Que les Girondins continuent de jouer comme ils l’ont fait devant nous et ils remonteront. »

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Christian Sarramagna tente d’échapper à deux défenseurs bordelais

« Il ne faut pas trop chercher à dominer Saint-Etienne »

André Gérard est doublement déçu. Il a tout d’abord cherché à récupérer le ballon de la rencontre. Sans succès à son grand désappointement.  Ensuite, bien sûr, par la tournure du match et le résultat : « Saint-Etienne est une équipe qu’il ne faut pas trop chercher à dominer, car alors, ses « contres » peuvent être meurtriers. Mais évidemment, je ne saurais reprocher à mes joueurs le forcing qu’ils ont fait en fin de match. Il fallait tenter le tout pour le tout. C’était 3-1 ou 2-2. »

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Malgré la défaite, Alain Giresse a réussi ses grands débuts à domicile devant le public du stade municipal.

Alain Giresse, pour sa première à domicile, a été le meilleur des onze Bordelais. Il est à l’orée d’une longue et brillante carrière. Le quotidien L’Equipe ne s’y trompe pas en titrant : « Alain Giresse, le Bordelais, un nouveau Guillas ».

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L’Equipe, 27 octobre 1970.

Salif Keita, de son côté, arbore un large sourire. Auteur d’un beau doublé, il venait de donner la victoire aux Stéphanois mais il avait également eu la bonne surprise de se voir remettre par Michel Dhrey le film de son but historique inscrit deux semaines plus tôt à Rennes.
En quittant le stade, Francis Camérini a franchi les portes du vestiaire adverse pour aller saluer Rostagni. Ils se sont remémoré leurs jeunes années au Cavigal de Nice, club où ils ont débuté tous les deux.

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La Une du quotidien L’Equipe, 26 octobre 1970.

Le « Ouf ! » de Georges Bereta

Dans l’autre match au sommet, les Marseillais, en déplacement à Lyon, ont pulvérisé les Lyonnais à domicile (4-1). Georges Bereta, blessé à la cuisse droite depuis le match contre Rennes, avait pris place dans la tribune de presse. A l’annonce de la victoire des Stéphanois en Gironde par le haut-parleur, il poussa un grand « Ouf ! » de soulagement. Le mano a mano entre les deux premiers de la Division 1 se poursuit pour le plus grand intérêt du Championnat.

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L’Equipe, 27 octobre 1970

Thierry CLEMENCEAU

 

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Stade municipal de Bordeaux. Collection personnelle.

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photo : asse.fr

Plus de 70 000 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts
depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

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Saint-Etienne-Toulouse : En 1937 déjà…

Dimanche, l’AS Saint-Etienne reçoit Toulouse à 14 heures au stade Geoffroy-Guichard. Trois jours après leur match nul en Ligue Europa contre Dnipropetrovsk (0-0), les coéquipiers de Loïc Perrin retrouvent la Ligue 1. En 1937, l’ASSE accueillait pour la première fois le club haut-garonnais. Retour sur ce match d’avant-guerre. En 1992, contre Toulouse, Maurice Bouquet a inscrit l’un des plus beaux buts de sa carrière. Bonne lecture.

 

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Photo : Nos Sports.

Le dimanche 3 octobre 1937, l’AS Saint-Etienne reçoit le Toulouse FC pour le dernier match de la phase aller de la poule Sud de la Deuxième Division. Après sa victoire à Montpellier (3-1), club contre lequel les joueurs de la Cité Rose s’étaient lourdement inclinés 5-0, les Stéphanois partagent la première place avec Nice.

Pasquini, le grand absent

L’ossature de cet outsider toulousain, dirigé par M. Cazal, est composée d’anciens « Dauphins » sétois parmi lesquels on peut citer Blanco, Camarata, Sintès, Monsallier, Stévanovitch et Chalvidan.

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L’Auto du 3 octobre 1937

M. Vago, l’entraîneur stéphanois, a fait le choix de Guillard au détriment de Favier pour garder les buts. En revanche, il doit se passer de son attaquant Pasquini, alors que Beck, est légèrement grippé. Le jeune Varraud, grand espoir et pur produit stéphanois, fait ses grands débuts en Vert.

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André Guillard, le gardien stéphanois. Photo : Nos Sports.

Charbit en lever de rideau

En ce dimanche d’automne, près de 6 000 spectateurs se sont déplacés au stade Geoffroy-Guichard laissant la somme de 37 246 francs aux guichets. En lever de rideau, la réserve stéphanoise était opposée à l’équipe de Côte Chaude, un quartier situé à l’ouest de Saint-Etienne. C’est l’occasion de retrouver Max Charbit, le demi stéphanois, qui après avoir été en conflit avec ses dirigeants, a signé une nouvelle licence avec l’ASSE.

Les Verts frappent d’entrée contre le TFC

D’entrée, les coéquipiers de Rolhion prennent le jeu à leur compte. Dès la 5e minute, Roux, l’attaquant des Verts, bien servi par Hermann, trompe son homonyme méridional (1-0). Il inscrit par la même occasion, son premier but sous le maillot vert. Les Stéphanois usent et redoublent de passes courtes qui gênent considérablement les Toulousains. Hermann, le demi-centre autrichien des Verts, élimine deux adversaires et loge le ballon sous la barre de Roux qui ne peut que constater les dégâts. Après une demi-heure de jeu, les hommes de Vago mènent déjà 2 à 0.

Quelques minutes plus tard, Roux, à la lutte avec Laurent, s’écroule au grand dam du défenseur toulousain. M. Vézolles, l’arbitre de la rencontre, siffle un coup franc en faveur du premier buteur de la soirée. Biéchert l’exécute pour Beck, plutôt discret jusqu’alors. D’une belle tête, il inscrit le troisième but des Verts. La mi-temps survient sur le score logique de 3 à 0.

Tax inscrit son 30e but avec Saint-Etienne

A la reprise, le scénario ne varie pas, les Verts enfoncent définitivement leurs hôtes par Beck qui réalise un doublé. Tax alourdit un peu plus l’addition en reprenant de la tête un centre de Roux (5-0). Il porte ainsi son total de buts sous le maillot stéphanois à 30.

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L’Auto du 4 octobre 1937

Les Verts seuls leaders

Sans un hors-jeu contestable du jeune Varraud, Roux aurait même pu inscrire son deuxième but de la soirée. Avec cette victoire, Saint-Etienne s’empare seul de la première place avec 9 points devant Alès et Nice (7).

Beck : premier Stéphanois titulaire en équipe de France

Le lendemain, Gaston Barreau, le directeur de l’équipe de France, dévoile l’équipe qui sera amenée à jouer contre les Suisses. A cette occasion, il a décidé d’abandonner la tactique du W.M. Yvan Beck sera confiné dans un rôle de relayeur au poste d’inter-droit. C’est la première fois que l’AS Saint-Etienne aura un joueur titulaire en équipe de France. Charbit avait failli connaître cette joie mais il était resté sur le banc. Beck retrouve les Tricolores deux ans après les avoir quittés. Il évoluait alors à Sète. Il s’agit d’une belle récompense pour ce joueur qui évolue en Deuxième Division.

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L’Auto du 5 octobre 1937

 

♦ Le coin des anecdotes ♦

 

Le chef d’œuvre de Bouquet

Le 22 août 1992, Saint-Etienne reçoit Toulouse en Division 1. Maurice Bouquet s’échauffe longuement derrière les buts de Joseph-Antoine Bell. Le public du stade Geoffroy-Guichard, qui l’apprécie énormément, scande son nom et souhaite le voir sur le terrain. A 21 minutes de la fin, Jacques Santini, l’entraîneur stéphanois, décide de remplacer Moravcik, fatigué, par Bouquet. Dans la minute qui suit, il s’illustre déjà en lançant Molnar qui obtient un corner. Sur celui-ci, la défense toulousaine renvoie le ballon sur Gérald Passi qui sert « Momo » à 30 mètres. Le remplaçant de Lubo ne se pose pas de questions et envoie un bolide qui ricoche sur l’arête intérieure droite des buts gardés par Pédemas. Les Verts s’imposent 3-2.

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Premier but en Division 1 pour Aimé Jacquet

Le 28 mai 1961, Saint-Etienne s’impose 1-0 devant Toulouse au stade Geoffroy-Guichard. A la 78e minute, Roussel, le gardien toulousain, hésite à quitter sa ligne de but pour se porter au devant d’une balle haute expédiée par Ferrier, en position de demi-gauche. Quand il se décide à y aller, il se heurte à Aimé Jacquet, en position d’avant-centre. Le gardien toulousain relâche le ballon qui file doucement derrière sa ligne. Jacquet inscrit alors son premier but avec l’équipe professionnelle stéphanoise.

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Aimé Jacquet, inscrit son premier but en Vert contre Toulouse. Il permet à Saint-Etienne de s’imposer 1-0.

 

Le chiffre : 1

Le 2 avril 1997, l’AS Saint-Etienne a perdu l’un de ses présidents historiques : Roger Rocher. Le samedi 5 avril, les Verts ne peuvent faire mieux qu’un match nul (1-1) face au Toulouse FC. Avant la rencontre, les quelques 10 000 supporters stéphanois présents au stade Geoffroy-Guichard sont invités à rendre un dernier hommage à l’homme à la pipe et honorer par une minute de silence celui qui a contribué à la gloire du club. « Merci pour votre passion des Verts » peut-on lire sur l’une des banderoles qui fleurissent dans les tribunes.

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Roger Rocher, l’homme de plusieurs décennies glorieuses des Verts.

 

La photo

Patrice Lestage

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Patrice Lestage à joué à l’AS Saint-Etienne de 1977  à 1983. Après deux ans passés à Tours sous les ordres de Guy Briet, il rejoint le Toulouse Football Club où il reste six saisons (1985-1991).

 

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Déjà plus de 54 000 visiteurs au Musée des Verts en neuf mois.

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Saint-Etienne-Reims : Totale éclipse of the « Heutte »

 

 

Dimanche 17 août 2014, l’AS Saint-Etienne reçoit le Stade de Reims. Un joueur, international de surcroît, a évolué dans les deux clubs : François Heutte. Recruté à l’intersaison 1964, peu de temps après son ami Maryan Wisnieski, il fait ses grands débuts avec les Verts le 15 août 1964 contre Cologne. Son passage chez le champion de France en titre, n’est pas à la hauteur de ses espérances et de celles de ses… dirigeants. Bonne lecture.

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François Heutte avec le maillot du Racing CP lors d’un match contre Monaco.

Juin 1964, le RC Paris descend en Division 2. François Heutte, l’attaquant parisien, ne souhaite pas évoluer ailleurs qu’en Division 1. Patiemment, il attend dans sa chemiserie du XVIIe arrondissement d’éventuelles propositions. Parmi les pistes évoquées, l’une mène à Saint-Etienne. Jean Snella n’a pas oublié celui qu’il voulait déjà enrôler en 1957. Cette année-là, le Normand, vice-lauréat du concours du plus jeune footballeur en 1955, avait le choix entre le Stade de Reims qui venait de faire l’acquisition de Roger Piantoni pour 25 millions de francs, le LOSC ou l’AS Saint-Etienne. Mais Rouen, le club où il s’est révélé, se montre gourmand et exige pas moins de 20 millions pour son jeune attaquant.

Le président rémois Henri Germain, faute de liquidités, renonce à l’engager. L’ASSE, tout auréolé de son titre de champion de France, propose 17 millions pour enrôler cet élément d’avenir. Mais c’est au LOSC qu’il opte pour un peu plus de 16 millions de francs. Le Normand représente alors le deuxième plus gros transfert de cette intersaison derrière Roger Piantoni.

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Le 11 août 1964, le quotidien L’Equipe titre : « Heutte à Saint-Etienne : tout a été très vite« . Le club stéphanois, qualifié pour la Coupe d’Europe des Clubs Champions, doit parer au plus pressé s’il veut que son nouvel attaquant soit qualifié pour cette compétition européenne.

Le 10 août, aux alentours de 13 heures, le joueur du RC Paris, âgé de 26 ans, débarque à Saint-Etienne. Il a juste le temps de signer son contrat et de repartir illico pour Paris vers 18 heures. « Nous avons été dans l’obligation d’agir très rapidement », déclare Roger Rocher, le président des Verts.

Le RC Paris qui demandait 270 000 F. pour le rachat du contrat de son joueur, le cède finalement pour environ 200 000 F. Une aubaine.

A Saint-Etienne, il occupera un appartement loué par un ancien de la maison verte, Georges Peyroche. A contrario, celui qu’il occupait à Epinay-sur-Seine, en région parisienne, a été loué à Henri Biancheri, le néo-racingman.

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Alors que l’on attendait plutôt un inter dans le rôle de stabilisateur du milieu de terrain tenu par René Domingo avant sa grave blessure à Valenciennes, c’est donc, après Wisnieski, transfuge de Gênes, un nouvel attaquant international qui signe pour le club forézien. Le champion de France s’offre ainsi une aile droite nouvelle pour la saison 1964-65.

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Les Espoirs 1955-56 réunis sous le maillot vert

Avec Wisnieski, Heutte, Herbin, Mekloufi, Ferrier et Richard Tylinski, toute la promotion d’Espoirs 1955-56 est ainsi reconstituée dans l’équipe stéphanoise. Heutte comme Wisnieski ont aussi l’avantage de connaître la plupart de leurs nouveaux coéquipiers pour les avoir côtoyés au Bataillon de Joinville.

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François Heutte (au premier rang à gauche) joue au babyfoot au Bataillon de Joinville sous l’œil de Roland Guillas (de face, avec le survêtement France).

Bien que reparti à Paris pour saluer une dernière fois ses anciens coéquipiers, le Normand, à la demande de Jean Snella, s’entraîne à Colombes. L’entraîneur stéphanois compte bien utiliser son joueur au plus vite, à commencer par le match amical du 15 août à Vichy contre Cologne, l’une des meilleures équipes européennes et champion d’Allemagne 1964.

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Maryan Wisnieski et François Heutte, deux internationaux à Saint-Etienne.

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Dans l’Allier, devant 5 339 spectateurs, les Stéphanois obtiennent un match nul honorable. Comme convenu, François Heutte joue les quarante-cinq premières minutes sur l’aile droite à la place de Robert Herbin, déplacé au poste de demi.

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Heutte au côté de Wisnieski et Ferrier à Vichy contre Cologne le 15 août 1964.

Saint-Etienne-Cologne : 1-1. Buts.- Saint-Etienne : Guy (68e) ; Cologne: Muller (24e).
Saint-Etienne : Bernard – Cassado, Tylinski (Sbaiz), Polny – Herbin (Bordas), Ferrier, Wisnieski, Heutte (Herbin), Guy, Mekloufi, N’Doumbé. Entr.: Snella.
Cologne: Schumacher – Potts, Weber, Regh – Benthaus, Sturm – Thielen, Schaeffer (Horning), Muller, Overath, Zézé. Entr.: Knoepfle.

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L’Equipe du 17 août 1964

Snella : « Heureux de les avoir »

Wisnieski et Heutte, deux individualistes réunis sous le maillot vert, ne manquent pas de talent. Pourtant, ils ne font pas l’unanimité aux yeux des supporters. Jean Snella n’est pas de cet avis et fonde même de grands espoirs en eux. Dans l’hebdomadaire FranceFootball du 18 août 1964, il déclare : « Je suis très heureux de les avoir. Je les connais tous les deux depuis fort longtemps, avant même qu’ils aient été Juniors. Wisnieski, quoique souvent discuté, a quand même été 34 fois international et il est dans la pleine force d’âge.
Quant à Heutte, qu’on avait mis à l’index, je veux lui faciliter ses débuts chez nous au maximum. Je le laisserai jouer comme il l’entend, à la place où il veut. J’ai énormément confiance en lui. Il doit retrouver un rayonnement d’international, et à 27 ans bientôt, sa carrière, pour moi, ne fait que commencer. »

Malgré cette confiance indéfectible, Heutte semble quand même poser problème, notamment vis-à-vis du rôle de Robert Herbin, bien plus à l’aise en attaque qu’en demi. En deuxième mi-temps contre les Allemands à Vichy, dès que le duo Herbin-Mekloufi a été reconstitué, l’équipe stéphanoise a repris sa marche en avant, réalisant de beaux mouvements offensifs. La complicité des deux joueurs ne souffre d’aucune contestation. Cela n’a d’ailleurs pas échappé à leur entraîneur ainsi qu’à Roger Rocher.

Blessé à Casa, sa rentrée est différée

Fin août, les Verts disputent un tournoi international à Casablanca. Plusieurs joueurs reviennent blessés de ce périple au Maroc dont Heutte, touché à la cheville droite. Cette blessure retarde ses grands débuts en championnat avec l’ASSE.

Ses premiers pas en Division 1 sous le maillot vert, il les réalise au stade Marcel-Saupin contre Nantes lors de la deuxième journée de championnat. Il occupe alors le poste d’inter gauche. Défaits 4-1, Heutte et ses coéquipiers sombrent. Se ressentant de sa cheville blessée à Casa, il est forfait pour le premier match de Coupe d’Europe des Clubs Champions contre les Suisses de la Chaux-de-Fonds. Titularisé par Snella au retour, il ne peut éviter l’élimination des siens.

3 victoires en 14 matches…

Les résultats ne sont pas au rendez-vous. La crise couve à l’ASSE. En quatorze matches (toutes compétitions confondues), les Stéphanois n’ont remporté que trois petites victoires depuis le début de la saison.

François Heutte, malgré ces piètres résultats, est ravi de jouer à Saint-Etienne : « L’entraînement est formidable varié, intéressant. En trois quarts d’heure, je fais plus de travail qu’en une heure et demie au Racing. Tout est basé sur le changement de rythme. »

Le derby pour lancer sa saison

Malgré tout, entre blessures et inefficacité, l’adaptation du Normand semble plus difficile que prévue. Le 25 octobre, il réussit son match le plus accompli : son réveil correspond à celui de son équipe qui écrase l’Olympique Lyonnais (6-0). Lors de ce derby, il inscrit un doublé. FranceFootball lui accorde la note exceptionnelle de 6 étoiles. Henri Guérin, le sélectionneur national, présent au match lance alors :  » Ah ! Si le François Heutte de cet après-midi pouvait être celui de tous les dimanches ! »
Heutte, après sa performance de premier plan déclare : « J’ai maintenant compris que, pour bénéficier des passes de Mekloufi, il faut partir du côté opposé à celui de Rachid semble s’engager. »

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Photo L’Equipe

Malheureusement, la joie est de courte durée. Le week-end suivant, à Angers, le Stéphanois est à nouveau supervisé par Guérin en prévision du match international contre la Norvège. Sa prestation en demi-teinte ne convainc pas le sélectionneur qui lui préfère le Valenciennois Bonnel pour remplacer Combin.

Après la seizième journée de championnat, Saint-Etienne, le champion de France en titre, est classé à un point des derniers que sont Lille, Angers, le Stade Français et Toulon.

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Jean Snella souhaitait déjà la venue de François Heutte en 1957.

Snella se justifie

Dans L’Equipe du jeudi 10 décembre, Jean Snella dresse le bilan du mauvais début de saison stéphanois.
« Nous ne voulons pas nous plaindre et gémir sans cesse en invoquant la malchance. Pourtant, les excuses ne nous manquent pas. Je crois pourtant que si nous en sommes là, c’est parce que nous traînons comme un boulet notre piteuse élimination de la Coupe d’Europe. Certes, nous n’étions pas, comme on l’a écrit, un grand champion de France et nous avons su profiter au mieux des défaillances de nos adversaires les plus dangereux pour nous attribuer un titre que nous étions loin d’espérer, alors que nous venions de quitter la seconde division. C’est ce qui nous a incités à renforcer notre équipe en engageant Heutte et Wisnieski, au cours de l’intersaison afin de représenter la France en Coupe d’Europe. Hélàs, ces deux joueurs n’ont jamais pu s’exprimer, à mon avis, parce que Mekloufi débuta la saison avec une angine, puis fut blessé au genou. Heutte, entorse d’une cheville, avait dû stopper son entraînement. Bref, nous avons été éliminés sans gloire d’une Coupe d’Europe sur laquelle nous avions basé notre saison et dont nous attendions beaucoup.

Je crois surtout en la valeur de Heutte et de Wisnieski qui n’ont que 27 ans et totalisent près de soixante sélections en équipe de France. Ou alors il faudrait admettre que ceux qui les ont sélectionnés, comme Paul Nicolas et Albert Batteux, s’étaient trompés sur leur valeur. D’ailleurs, ils n’ont pas joué à Sedan et notre équipe n’a pas été plus efficace pour cela, ce qui démontre qu’ils ne sont pas responsables de la stérilité actuelle de notre ligne d’avants. »

Le 20 décembre, lors de la réception de Monaco, alors qu’il n’est plus titulaire depuis près d’un mois, Snella relance son international en l’incorporant d’entrée de jeu. Les Verts s’imposent 2-0 et Heutte inscrit le premier but.

Heutte heureux à Saint-Etienne

Le 24 décembre, avant de partir passer les fêtes en famille à Paris, il déclare à Pierre Legalery, le correspondant de L’Equipe à Saint-Etienne : « Je ne regrette pas d’être venu à Saint-Etienne où j’ai trouvé l’excellent climat et la chaude ambiance qui me manquaient à Paris. Bien sûr, j’ai eu la malchance tout d’abord d’être blessé au début de la saison, puis d’être intégré dans une équipe qui n’avait pas retrouvé son équilibre. M. Snella l’a d’ailleurs compris et m’a demandé de rester sur la touche en attendant que tout aille mieux.

Dimanche, j’ai repris ma place dans cette équipe et nous avons battu Monaco. Une fois de plus, M. Snella s’était montré compréhensif à mon égard, me donnant le numéro 8. J’ai en effet les numéros 7 et 11 en horreur. Je crois que la période d’adaptation est terminée et que je vais pouvoir m’intégrer davantage dans une équipe qui, peu à peu, redevient ce qu’elle avait été la saison dernière. Je n’ai que 27 ans et je veux tout sacrifier à ma carrière de footballeur qui peut, à mon avis, aller au-delà de 35 ans. »

Rachid Mekloufi sous le maillot de Saint-Etienne.
Sur le terrain, Rachid Mekloufi s’entend de mieux en mieux avec Heutte.

Son début d’année est plutôt convaincant. Snella semble avoir trouvé la bonne formule. Son association avec Rachid Mekloufi est aussi redoutable que le duo qu’il forme avec Guy.

La Coupe de France pour sauver une saison décevante

Après vingt-quatre journées, Saint-Etienne accuse dix points de retard sur le leader du moment Bordeaux. A dix journées de la fin du championnat, le titre semble hors de portée. Seule la Coupe de France peut sauver une saison bien loin des attentes du club ligérien.

Le 7 mars, malgré une victoire en huitièmes de finale de la Coupe de France contre Rouen au Parc des Princes (1-0), l’attaque stéphanoise demeure toujours un problème aux yeux de Jean Snella.

NIMES-ST ETIENNE (1-0)
François Heutte ne peut empêcher la défaite contre Nîmes (0-1) en championnat.

Mekloufli est moins rayonnant qu’en 1963-64

Dans une interview accordée à Jean-Philippe Rethacker pour FranceFootball, il concède à ce sujet : « Rachid (Mekloufi) n’est plus aussi décisif que l’an dernier. Il reste au milieu de terrain, il appelle moins le ballon en profondeur et marque moins de buts. Il n’a pas retrouvé sa confiance en lui, ni le moral qui lui permettaient d’être rayonnant sur le terrain.

Pour François, c’est un autre problème. Je suis obligé de l’utiliser à l’aile droite en ce moment bien qu’il ait réalisé d’excellents matches au centre il y a quelques temps. Mais je n’ai pas d’ailier droit. François est un garçon trop timide, trop craintif encore. Contre les Rouennais, il a réussi d’excellents débordements pourtant. Mais il s’est laissé trop souvent oublier à l’aile en première mi-temps. . Car, je crois qu’il  s’est isolé plus qu’on ne l’a isolé, Et puis, s’il est très redoutable balle au pied, il ne parvient pas encore à bien se placer et à bien appeler la passe du partenaire. »

En demi-finale de Coupe, les Verts affrontent Rennes. Heutte retrouve un Parc des Princes qu’il connaît bien.

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L’Equipe du 30 avril 1965

Trente ans après leur première finale, les Rennais, vainqueurs 3-0 de Stéphanois dépassés, ont mis fin à leurs dernières illusions de sauver leur saison.
L’ASSE termine le championnat à la septième place. Guy termine meilleur buteur du club avec 17 réalisations. Heutte est auteur de 10 buts (dont 2 doublés) pour 28 matches disputés.

Les caisses du club sonnent creux

C’est l’heure des comptes. Saint-Etienne accuse un déficit qui s’élève à près de 50 millions de francs. Pour Charles Paret, le directeur sportif de l’ASSE, la descente du Racing et de Reims ont porté préjudice au club. Ces deux formations, après Lyon, faisaient rentrer de grosses recettes dans les caisses. Ce manque à gagner, ajouté à une élimination précoce en Coupe d’Europe contre la Chaux-de-Fonds, oblige l’ASSE à tirer les enseignements d’une saison ratée.

Heutte souhaite quitter le Forez

De son côté, François Heutte n’envisage pas de continuer l’aventure en Vert. Le Red Star, pour remplacer Groschulski, s’intéresse de près à l’ex-Racingman. Ce dernier ne serait pas contre retrouver la région parisienne où il a gardé son magasin de chemises à Paris. Les Audoniens, à court de liquidités, souhaitent un prêt avec option d’achat ; les dirigeants stéphanois veulent un transfert définitif.

Rouen, à son tour, entre dans la danse. Mais c’est avec un autre club que l’affaire semble la mieux engagée.

ENTRAINEMENT FRANCE
François Heutte n’a pas réussi à s’imposer à Saint-Etienne. Pour relancer sa carrière, il souhaite quitter le club stéphanois.

Le Red Star, Lille, Rouen souhaitent l’engager

Le 17 août, date butoir pour les clubs pour réaliser un transfert, les dirigeants stéphanois et audoniens doivent se rencontrer pour discuter des modalités de la venue de François Heutte au Red Star. Après deux mois de tractations, il ne manque plus que la signature du joueur.

Les dirigeants lillois font le déplacement à Paris pour rencontrer leurs homologues stéphanois. Les Nordistes souhaitent revoir celui qui avait marqué de nombreux  buts sous le maillot lillois de 1957 à 1959. Après s’être mis d’accord avec le joueur qui a eu l’assurance de pouvoir à nouveau tenir un commerce, il reste à trouver un accord avec les dirigeants stéphanois.

ENTRAINEMENT FRANCE
François Heutte a le choix entre le Red Star, Lille et Rouen, le club de ses débuts.

18 h 50 : un accord est trouvé avec Lille

Celui-ci intervient à 18 h 50. Le compte-à-rebours est lancé : sitôt la signature apposée en bas du contrat, l’enveloppe est postée pour que le joueur puisse débuter sous ses nouvelles couleurs le dimanche suivant.

Le Red Star ne décolère pas

Les dirigeants audoniens se sentent lésés. Furieux de voir partir le joueur dans le Nord, ils décident de faire appel devant le Comité directeur de la Ligue nationale. En offrant 40 000 francs aux dirigeants stéphanois (contre 20 000 de la part des Lillois), ils pensent conclure le transfert. Ils portent l’affaire devant la Ligue nationale.
Le 22 août 1965, l’instance suspend le joueur jusqu’au 17 septembre. Elle accuse ce dernier d’avoir touché une prime à la signature, ce qui aurait fait pencher la balance en faveur du club lillois.

Roger Rocher, étonné, déclare : « Si l’on doit condamner Heutte pour avoir touché une prime à la signature, il faut en faire autant pour tous les joueurs. Car, à qui fera-t-on croire qu’aucun autre n’a demandé et obtenu cette prime ? »

FRANCE-ESPAGNE (1-1)
Son départ de Saint-Etienne se règle à la Ligue nationale.

 « Je comptais beaucoup sur M. Snella pour me pousser »

En France, quand un joueur est transféré d’un club à l’autre, contrairement à la Belgique, par exemple, il ne peut toucher de prime à la signature.
Finalement, Heutte, une fois sa suspension purgée, peut donc à nouveau porter les couleurs lilloises où il n’est que prêté par l’AS Saint-Etienne. Après sa saison en demi-teinte dans le Forez, il espère relancer sa carrière dans le Nord.

Pour FranceFootball daté du 5 octobre 1965, il revient sur son année stéphanoise qu’il considère comme un « échec mais pas total. Je comptais beaucoup sur M. Snella pour me pousser. Pour Saint-Etienne, on peut le dire, l’équipe a moins bien marché que l’année précédente. Dans ce cas-là, je ne pense pas que Maryan Wisnieski et moi-même ne pouvions apporter quelque chose. Cette année, elle tourne mieux. »

Heutte et Guy ouvrent une chemiserie

Il n’est pas le seul à avoir rejoint le Nord. André Guy a également fait ses valises. Les deux hommes qui s’apprécient beaucoup, tant sur le terrain qu’en dehors, ont investi ensemble dans un magasin de chemises et d’articles de sport près du centre de Lille.

En juin 1966, François Heutte ne souhaite pas revenir à Saint-Etienne où il ne se plaisait pas. Il quitte Lille et le Nord pour la Champagne et le Stade de Reims où il est à nouveau prêté. Il évolue au côté de Kopa qu’il a côtoyé à plusieurs reprises en équipe de France.

REIMS
François Heutte (accroupis, le dernier en partant de la droite) avec le maillot rouge et blanc du Stade de Reims.

En juin 1967, au terme de son prêt, le club stéphanois le place définitivement sur la liste des transferts.

Le 2 juillet 1967, François Heutte confie à Victor Peroni pour l’hebdomadaire FranceFootball : « C’est maintenant, à trente ans que je commence à comprendre à quel point je suis sans doute passé à côté d’une grande carrière, parce qu’au fond jusqu’à maintenant, j’ai toujours manqué de maturité. Je suis peut-être trop longtemps resté un « grand enfant », le junior qui en 1955 à Colombes s’entraînait avec l’équipe des Espoirs contre l’équipe de France sous les yeux de Paul Nicolas et Albert Batteux. »

Après un essai avec Chaumont entraîné par Pierre Flamion, il signe un dernier contrat avec le club haut-marnais. Heutte quitte définitivement le club stéphanois.

                                                                                                                Thierry Clemenceau

 

La vidéo bonus de l’INA

10 décembre 1961 – Match amical France-Espagne à Colombes : à la 13ème minute, François HEUTTE ouvre le score après deux tirs de Guy Van Sam repoussés par le gardien de but espagnol José Araquistain.

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Vous reprendrez bien quelques bulles…

11 + 1 = 12 matches nuls

Le 3 décembre 1957, Saint-Etienne (5e) reçoit le leader Reims au stade Geoffroy-Guichard. Après quinze journées de championnat, les Verts sont toujours invaincus. A l’issue de la rencontre, les deux équipes se quittent sur un 0-0 de bonne facture. Si les Rémois gardent la tête du championnat, les Verts, avec ce douzième partage des points, gagnent une place (4e) et sont ex aequo avec le voisin lyonnais.

ST ETIENNE-REIMS (3-1)
Domingo et les Stéphanois, champions des matches nuls.

Quand Kopa faillit être Stéphanois

M. Roger Rocher, président de Saint-Etienne depuis dix ans, aurait pu avoir dans son effectif un dénommé Raymond Kopa. Le Rémois aurait pu en effet devenir Stéphanois bien avant Albert Batteux qu’il a connu à Reims.

En effet, alors que Kopa débutait à Angers, un émissaire de Saint-Etienne -qui n’était pas encore Pierre Garonnaire- avait été dépêché à Angers pour superviser un « petit attaquant » dont on commençait à parler. L’envoyé « spécial » stéphanois revint avec deux noms couchés sur son calepin mais celui de Kopa n’y figurait pas.

 

La première de Monsieur Guigne

Le 24 août1952, l’arbitre du match Saint-Etienne-Reims (2-6) se nomme M. Guigne. C’est sa première saison à ce niveau de la compétition. Malgré son inexpérience en Division 1, il dirigea les débats avec autorité… ce qui est normal puisqu’il était gendarme de son métier.

 

Le Stade de Reims en huit dates

Lors de la remontée du Stade de Reims en mai 2012, le quotidien L’Equipe est revenu sur les grandes dates qui ont marqué l’histoire de ce club.

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45 000 visiteurs au musée des Verts en sept mois.

Abbes : la patience récompensée (3/4)

Claude Abbes est sélectionné pour la Coupe du monde en Suède. Comme en 1954, il part avec le statut de remplaçant. Pour cet avant-dernier volet consacré au gardien stéphanois, je vous propose aujourd’hui de revivre la première partie de la Coupe du monde de l’équipe de France. Bonne lecture.

L'équipe de France au grand complet.
L’équipe de France au grand complet.

Le 13 mai 1958, l’équipe de France prépare activement la Coupe du monde qui se déroulera en Suède. Une semaine avant son départ pour Stockholm, Albert Batteux, l’entraîneur des Bleus, procède à une revue d’effectif contre une sélection parisienne. Ce jour-là, le gardien n’est ni Colonna ni Abbes mais Taillandier. Les Bleus, peu convaincants, s’imposent 2-1 au Parc des Princes.

Abbes, seul Stéphanois sélectionné

Pourtant, le mercredi 22 mai, à l’annonce des 22 -à l’exception de Kopa, vainqueur avec le Real Madrid de la Coupe des Clubs Champions- qui s’envoleront pour la Suède une semaine plus tard, les trois gardiens se nomment Remetter, Colonna et… Abbes. Comme en Hongrie en 1954, lors de la Coupe du monde en Suisse, le gardien stéphanois est convoqué pour la phase finale de cet évènement mondial.

FF 20 MAI 1958
Dessin extrait de l’hebdomadaire FranceFootball daté du 20 mai 1958

Le 19 mai, les heureux élus se retrouvent à 20 heures pour un dernier dîner sur le sol français. Claude Abbes, arrive à la brasserie du Roule en taxi, comme la majorité de ses camarades à l’exception des Rémois, partis fêter leur victoire en Coupe à Reims.

MAGAZINE FRANCE
Remise des équipements de la Coupe du monde.

Le lendemain, ce sont donc 26 hommes (Paul Nicolas, le docteur Copin, les deux entraîneurs, Albert Batteux et Jean Snella, le masseur Louis Hainaut et les 21 joueurs) qui décollent de l’aéroport d’Orly à 10 heures.

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Photo L’Equipe

A bord du Vicker d’Air-France, l’équipe de France est la première nation a toucher le sol de l’aéroport de Bromma à 14 h 45. Le premier Français à sortir de l’avion est Paul Nicolas.

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Ils sont accueillis par une délégation suédoise parmi laquelle Brorr Mellberg, l’ancien coéquipier de François Remetter à Sochaux, reconverti dans l’import-export.

« Nous salutons l’équipe française ! »

A peine le temps d’apercevoir la capitale suédoise qu’ils la quittent en car direction Kopparberg, leur lieu de villégiature. Située à 270 kilomètres de Stockholm, cette petite bourgade qui signifie « la montagne du cuivre » est composée de chalets en bois. Elle ressemble, toute proportion gardée, à la station de sports d’hiver de Megève. Visiblement, les Français sont attendus avec impatience. A l’entrée du village, une banderole porte l’inscription : « Nous salutons l’équipe de France. »

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Banderole de bienvenue à Kopparberg pour la délégation française. Photos L’Equipe.

Cinq heures de vol et cinq autres de bus plus tard; les Français sont contents de gagner leurs appartements.

Claude Abbes le matheux

Le lendemain est consacré à la détente. Les Rémois en profitent pour aller pêcher le saumon pendant que d’autres s’adonnent à la lecture ou aux prises de photos-souvenirs. Claude Abbes, lui, se replonge encore et toujours dans ses bouquins de mathématiques. Le héros malheureux de Wembley, après une interruption de plus de dix ans, ne comprend pas que l’on puisse arrêter ses études pour le football. Il estime que les deux sont compatibles. A Saint-Etienne, il se levait deux heures avant l’entraînement pour potasser ses cours.

Dans la chambre n° 21 de l’hôtel Laxbrogarden, le « matheux » révise sous l’oeil amusé de Roger Marche, son compagnon de chambre.

Dessin L'Equipe.
Dessin L’Equipe.

C’est de Suède, le samedi 24 mai que Claude Abbes fête ses 31 ans.

Quelques jours plus tard, à cinquante kilomètres de Kopparberg, c’est dans la petite ville de Nora que les Bleus s’imposent 12-0 contre une sélection locale. Les douze réalisations sont toutes l’oeuvre de Rémois dont quatre de Piantoni et quatre de Fontaine.

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De gauche à droite : Wisnieski, Fontaine, Kopa, Piantoni et Vincent.

Les Bleus régalent

Le 26, pour garder le rythme, Batteux et Snella mettent sur pied un petit match entre les sélectionnés. Sitôt le petit déjeuner avalé, un bus mis à la disposition des Français durant leur séjour par les cheminots de la région emmènent joueurs et entraîneurs à Nora, un hameau situé à cinquante kilomètres de Kopparberg. A cette occasion, les Bleus pulvérisent le record d’affluence de cette petite bourgade qui datait de 1944. Avec 1 818 spectateurs payants, la délégation française empoche au passage 40 % de la recette soit la coquette somme de 150 000 francs. Les Bleus s’imposent 12-0, tous les buts sont l’oeuvre de Rémois. « Fonthine« , comme l’écrit la presse suédoise (alias Fontaine), se fait remarquer en inscrivant quatre buts, soit le même nombre que Piantoni. Remetter garde les buts et nul doute que pour Nicolas, c’est lui qui débutera le Mondial.

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Abbes joue avec les Suédois

Dans l’après-midi, ceux qui n’ont pas joué le premier match disputent une rencontre contre une sélection de 5e division. Claude Abbes et Colonna se partagent le poste de gardien de but. Score final : 15-0. Paul Nicolas, pour permettre à Abbes de disputer les 90 minutes, le fait jouer une mi-temps avec l’équipe adverse. Contre ses coéquipiers, il encaisse pas moins de six buts.

En deux rencontres, les hommes de Batteux ont donc inscrit la bagatelle de 27 buts. Paul Nicolas est tout sourire et pour cause : sa délégation est, selon une enquête, la plus courtoise de toutes celles qui l’ont précédée à Kopparberg. Leur popularité se mesure aussi par le nombre de lettre et cartes postales qu’ils reçoivent à leur hôtel.

Le 29 mai après-midi, les tricolores prennent la destination de Vasteraas. Après la reconnaissance du terrain où ils disputeront leur match contre la Yougoslavie le 11 juin, une petite opposition est programmée.

Le lendemain, Raymond Kopa, tout auréolé de la victoire du Real Madrid en Coupe des Clubs Champions, rejoint ses partenaires.

Raymond Kopa a rejoint ses compatriotes en Suède. En arrière-plan, Claude Abbes est affûté.
Raymond Kopa a rejoint ses compatriotes en Suède. En arrière-plan, Claude Abbes.

Claude Abbes, buteur inattendu

Rien n’est laissé au hasard chez les Bleus. Dans l’optique de rencontrer leur futur adversaire qu’est l’Ecosse, ils partent s’entraîner dans la petite ville d’Orebro, située à 80 kilomètres de leur camp de base. Pas de doute, le match contre les Britanniques aura bien lieu dans le stade Eyravallen. Sur les portes, on peut lire : « Franckrike-Skottland« . Jonquet et Marche ont la surprise de retrouver leur ex-partenaire du Stade de Reims, Lundquist, venu voir les hommes de Batteux s’entraîner. Une opposition contre l’équipe locale est au menu des Bleus. Claude Abbes évolue dans les buts puis au poste inhabituel… d’ailier droit. Il participe à la fête en inscrivant la bagatelle de trois buts. Les Français s’imposent 13-1.

Détente dans le camp français

Le 3 juin, la délégation française au grand complet, quitte, avec un petit pincement au coeur, Kopparberg pour Finspang, une petite ville de 10 000 âmes. Si le lieu a changé, en revanche, les Bleus peuvent toujours s’adonner à la pêche, le ping-pong ou la pétanque pour occuper leur temps libre entre deux entraînements. Claude Abbes, fidèle à ses habitudes, s’évade dans ses livres.

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Photo L’Equipe

Festival de buts contre le Paraguay

Le 8 juin, la France lance parfaitement sa Coupe du monde contre le Paraguay. A Norrkoeping, François Remetter garde les buts et les tricolores réalisent une performance de premier plan en s’imposant 7-3. Just Fontaine inscrit à cette occasion ses trois premiers buts.

FRKANCE-PARAGUAY (7-3)
L’équipe de France vainqueur du Paraguay (7-3). En haut (de g. à d.) : Kaelbel, Penverne, Jonquet, Marcel, Remetter, Lerond. Accroupis : de g. à d. : Wisnieski, Fontaine, kopa, Piantoni, Vincent.

 

Vidéo INA : le 8 juin 1958, la France bat le Paraguay : 7-3.

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Les réservistes dont Abbes, disputent le lendemain une rencontre contre l’équipe locale. Le remplaçant de Remetter joue… en attaque aux côtés de Colonna et Albert Batteux. Ils s’imposent 2-0.

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Programme du match France-Paraguay du 8 juin 1958 (collection personnelle de Philippe Gastal, conservateur du Musée des Verts)

Jamais deux sans trois !

Cinq jours plus tard, pour leur deuxième match, les hommes de Batteux et Snella se mesurent à la Yougoslavie qu’ils n’ont plus battu depuis huit ans. Il faut dire que la victoire contre le Paraguay a fait naître beaucoup d’espoirs. Lors des deux précédentes Coupes du monde, les Yougoslaves se sont chaque fois imposés contre les Français.

Jamais deux sans trois. A Vaesteraas, les Yougoslaves s’imposent 3-2 et demeurent invaincus face aux Bleus. Au cours de ce match, Remetter rencontre quelques difficultés et n’est pas exempt de tous reproches sur les trois buts yougoslaves.

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Just Fontaine inscrit un nouveau but dans cette Coupe du monde.

Vidéo du match Yougoslavie-France : 3-2.

Les Bleus pleurent Gaston Barreau

A leur retour à l’hôtel, la délégation française apprend la disparition d’une grande figure du football français. En effet, Gaston Barreau, président du Comité de sélection, s’est éteint dans sa 75e année. Il venait d’apprendre la victoire des Bleus contre le Paraguay. Une minute de silence est observée.

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Gaston Barreau pose dans son bureau.

Paul Nicolas, Alex Thépot et Albert Batteux échangent leurs impressions sur cette défaite. François Remetter et Lerond sont sur la sellette. Le nom de Colonna est même évoqué pour lui succéder. Il est en concurrence avec Abbes.

Remetter condamné un vendredi 13

Le vendredi 13, Paul Nicolas annonce à François Remetter que Claude Abbes sera le titulaire au poste de gardien pour le match décisif contre l’Ecosse. Bien qu’il s’y attendait un peu, pour le gardien sochalien, tout s’écroule. Il sait que sa Coupe du monde est terminée.

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Ecosse-France (1-2). Ce x, Claude Abbes dispute son premier match en Coupe du monde.

« Content de pouvoir jouer »

Devant les attaquants écossais, l’athlétique Claude Abbes, semble le plus apte à contrer ces derniers. Le Stéphanois possède une longueur d’avance sur Colonna pour faire ses grands débuts en Coupe du monde. Plusieurs facteurs plaident en faveur du Stéphanois notamment la meilleure fin de saison que celle du portier rémois. Aussi, lors des matches d’entraînement, Abbes a paru plus affûté. « C’est un périlleux honneur, dit le Stéphanois, mais je suis tout de même bien content de pouvoir jouer. »

En 1954, il faisait partie de l’équipe de France qui avait disputé la Coupe du monde en Suisse. Les Bleus y avaient disputé deux matches pour autant de défaites et Abbes n’avait pas disputé la moindre minute de jeu.

De son côté, Jean Snella, le mercredi précédent, a fait le déplacement à Norrkoeping pour décortiquer le jeu écossais. Ses carnets de notes sont remplis et seront disséqués avec Albert Batteux.

Battre l’Ecosse pour prendre le quart

En six confrontations, la France n’a battu l’Ecosse qu’à une seule reprise en 1948 (3-0).

ECOSSE-FRANCE 1-2
Albert Batteux, l’entraîneur des Bleus avant Ecosse-France (1-2).

Le 15 juin, à Oerebro, les hommes d’Albert Batteux s’imposent 2-1 et se qualifient pour les quarts de finale grâce à deux buts de Kopa (21e) et Fontaine (45e). Ce dernier, auteur de son 6e but, est déjà l’une des grandes révélation de cette Coupe du monde.

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Claude Abbes, par son assurance et son autorité, en a donné par la même occasion à ses défenseurs. A la fin du match, tous les joueurs se précipitent vers leur gardien pour le féliciter. La rentrée du portier stéphanois a été concluante. Contrairement à Remetter, le facteur chance a été de son côté. En repoussant les charges répétées de Mudie et Baird, il a sauvé à plusieurs reprises les Bleus d’une égalisation écossaise en fin de rencontre.

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Oerebro. – La guerre des goals n’a pas eu lieu au sein de l’équipe de France. Remetter, même été le premier à féliciter Abbes pour son bon match. Photo L’Equipe.

« Comment ne serais-je pas fou de joie? »

Dans L’Equipe du 16 juin, il ne cache pas sa satisfaction sur la qualification des Bleus : « Je suis revenu en équipe de France sur une victoire, et quelle victoire, puisque c’est celle qui nous assure notre place en quart de finale ! Comment ne serais-je pas fou de joie ? Nous avons joué aujourd’hui avec un moral extraordinaire. Nous nous sommes tous battus. (…) Je ne pouvais rien sur le but que j’ai concédé. Il fallait bien que je sorte au-devant de Baird. Mais je n’ai pas vu le penalty sifflé contre nous par l’arbitre en première mi-temps. J’ai eu, bien sûr, de la chance sur ce penalty mais je crois qu’il était un peu injustifié.« 

Thierry Clemenceau

NICOLAS ABBES
L’Equipe du 16 juin 1958

Vidéo du match Ecosse-France : 1-2.

A suivre : Claude Abbes, l’un des « héros de Suède »

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La Coupe du monde en bleu et vert

Le Musée des Verts se met à l’heure de la Coupe du monde en proposant une exposition unique dans laquelle des objets d’exception racontent  l’épopée des Bleus 98.

La scénographie du Musée des Verts a été conçue autour de 8 salles d’exposition dont une de 135 m2 consacrée aux expositions temporaires. Jusqu’au 10 octobre 2014, l’épopée de l’équipe de France championne du monde est au cœur d’une magnifique exposition temporaire consacrée à la Coupe du monde et à l’histoire qu’ont écrite des Verts d’hier et d’aujourd’hui dans cette compétition.

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Du fameux carnet noir d’Aimé Jacquet aux manches coupées des maillots de Fabien Barthez en passant par des documents jusque-là confidentiels et des photos inédites prises par Jean Bibard et Stéphane Meunier dans l’intimité des vestiaires ou de Clairefontaine, l’exposition réunit de très nombreux objets soigneusement conservés par Philippe Tournon, l’incontournable chef de presse de l’équipe de France.

En plus de la collection de Philippe Tournon, laquelle comprend des maillots, billets, programmes et fanions, le Musée des Verts a rassemblé des pièces appartenant à de grands témoins :
– Henri Emile, entraîneur adjoint d’Aimé Jacquet ;
– Dominique Rocheteau, Coordinateur sportif de l’ASSE et 49 fois international de 1975 à 1986 ;
– Fabrice Grange, entraîneur des gardiens de l’équipe de France de 2006 à 2012 et membre du staff technique des Verts depuis 2012.

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C’est également l’occasion de mettre en avant l’ASSE avec Aimé Jacquet, entraîneur de l’équipe championne du monde et ambassadeur à vie du club mais aussi le stade Geoffroy-Guichard, terre de football par excellence qui a abrité des matches de la Coupe du monde 1998.

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Le Musée des Verts, inauguré le vendredi 20 décembre 2013, a déjà accueilli plus de 38 000 visiteurs. L’ASSE est le premier club de football français à ouvrir un musée. Impulsée par le Conseil général de la Loire, la création de cet espace exceptionnel de 800 m2 répond à la volonté de l’ASSE de valoriser son histoire, de promouvoir ses valeurs et de satisfaire la passion de tous ses supporters. Elle s’inscrit dans le projet de rénovation du stade Geoffroy-Guichard, porté par Saint-Étienne Métropole. Ce projet exprime une volonté partagée de voir vivre un ensemble muséal unique autour d’un club de football mythique.

Claude Abbes : le héros du Heysel (1/4)

La Coupe du monde bat son plein au Brésil. En 1958, lors de l’épopée suédoise, à l’instar de Stéphane Ruffier aujourd’hui, un seul Stéphanois figurait parmi les 22 Bleus. Je vous propose aujourd’hui de vous faire revivre la première sélection de Claude Abbes en 1957. Bonne lecture.

 

En cette deuxième quinzaine d’octobre 1957, les Français attendent fébrilement que MM. Paul Nicolas et Albert Batteux annoncent la liste des internationaux français convoqués pour affronter l’équipe nationale de Belgique. Le match du dimanche 27 octobre au stade du Heysel s’annonce très lourd de conséquences. En effet, jamais un Belgique-France n’aura eu une telle importance. Le vainqueur gagnera son ticket pour la Coupe du monde qui aura lieu en Suède du 8 au 29 juin 1958.

Epidémie de grippe en Europe

Les sélectionneurs français sont préoccupés par deux choses : la méforme de certains de ses internationaux et surtout la grippe qui sévit en Europe.

Quand la liste des 22 est annoncée, un seul joueur de l’AS Saint-Etienne est retenu : Claude Abbes. Le gardien stéphanois, excellent avec son club, a été appelé pour suppléer, en cas de forfait de dernière minute, Dominique Colonna, le titulaire.

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Claude Abbes, le gardien stéphanois, et ses célèbres pulls qui font office de maillot, lors d’un match au stade Geoffroy-Guichard (photo : L’Equipe)

Depuis le 23 octobre, les Bleus sont réunis à Rueil, dans leur lieu de villégiature.

Mais deux jours après leur arrivée, la psychose de la grippe continue à exercer ses ravages sur l’équipe de France. A midi, Dominique Colonna est pris d’une forte fièvre. Un peu plus tard, Pierre Cahuzac, se plaint d’une douleur au genou. En début de soirée, Ujlaki ressent les mêmes symptômes que le gardien tricolore. Pour ces trois-là, le match de Bruxelles s’éloigne.

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Première cape à 30 ans

Claude Abbes, de son côté, même s’il se tenait prêt, n’y croyait plus vraiment. A 30 ans, il va enfin connaître sa première sélection en équipe nationale. « Dire que j’y croyais à cette sélection serait exagéré, explique le néo-international dans L’Equipe daté du 25 octobre. J’ai eu 30 ans au mois de mai, pas mal de malchance et des concurrents très sérieux. Ainsi, lorsque l’équipe des Espoirs battit le Luxembourg par 8 buts à 1, je devais en faire partie, mais je me suis cassé le bras quelques jours avant.

En revanche, j’ai failli jouer la Coupe du monde 54. J’étais seulement le 4e gardien de la liste, mais les trois autres furent un moment indisponibles ! Mais Remetter put quand même tenir le poste. C’est peut-être ce qui m’arrivera encore dimanche. En tout cas, je le souhaiterai, si cela pouvait remettre Dominique plus vite sur pied. » Tout cela dit avec une bonne humeur et un sourire perpétuel. »

Pour fêter la première sélection de leur gardien, les joueurs stéphanois ont offert au futur ingénieur en électronique un « Traité en mathématiques ».

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Billet du match Belgique-France du 27 octobre 1957 au stade du Heysel. (collection personnelle de Philippe Gastal, conservateur du Musée des Verts)

Seul gardien de métier au Heysel

En Belgique, il sera le seul véritable gardien français de la délégation puisque le Sedanais Pierre Bernard, également convoqué, est alité avec 39 de fièvre et a dû déclarer forfait. Si le Stéphanois venait à se blesser, il serait alors remplacé par le Sedanais Célestin Oliver, un joueur de champ. Du statut de remplaçant, Abbes devient le titulaire indispensable et surtout irremplaçable. Dans L’Equipe du 26 octobre 1957, Paul Nicolas ne dit-il pas sur le ton de la plaisanterie : « Je ferai venir demain matin une balle de coton pour mettre Abbes dedans. ». Et Albert Batteux de surenchérir : « Le gardien stéphanois est actuellement le joueur le plus cher sur le marché ! »

BELGIQUE-FRANCE
L’équipe de France : debout : Kaelbel, Oliver, Zitouni, Penverne, Abbes, Lerond. Accroupis : de g. à d. : Brahimi, Marcel, Bruey, Leblond, Vincent.

Ce dimanche 27 octobre, le stade affiche complet : les 80 000 places ont trouvé preneurs. Abbes connaît l’enjeu de ce match et ne veut pas se rater.

Le plat pays qui est le sien

Au cours des 47 précédentes confrontations entre les deux nations, les « coqs » français ont été plumés à 20 reprises (contre 17 victoires). Dans ce plat pays cher à Jacques Brel, les Bleus n’ont ramené que 5 petites victoires.

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Programme du match Belgique-France du 27 octobre 1957 au stade du Heysel. (collection personnelle de Philippe Gastal, conservateur du Musée des Verts)

Le nouveau gardien des Bleus ne laisse rien au hasard. La couleur fétiche de son maillot est le jaune et le staff tricolore a oublié ce petit détail. Abbes, la veille du match court tout Bruxelles pour trouver le maillot adéquat.

BELGIQUE-FRANCE (0-0)
Au stade du Heysel, Claude Abbes connaît enfin sa première sélection en Bleu.

Pour cette 48e confrontation entre les deux nations, l’équipe de France ne brille pas. Elle obtient un triste 0-0 qui lui assure pourtant l’essentiel : une participation à une Coupe du monde. Pour sa première sélection, le gardien stéphanois a été le meilleur joueur français. A lui seul, il décourage adversaires et spectateurs acquis à la cause des Belges. Tout au long du match, il est brillant dans ses interventions, plonge à plusieurs reprises dans les pieds des attaquants belges Delire et Orlans et quand il manque son intervention, c’est Zitouni, son défenseur, qui le supplée. Il ne peut rêver meilleurs débuts sous le maillot tricolore. A la fin de la rencontre, Armand Penverne, le capitaine tricolore, félicite son gardien qui a su résister aux assauts belges et conservé sa cage inviolée. M. Helge, l’arbitre de la rencontre, déclare qu’Abbes est le meilleur gardien français qu’il n’ait vu.

BELGIQUE-FRANCE
Le gardien français, comme ses coéquipiers, est concentré pendant les hymnes. Une place en Coupe du monde est en jeu.

« Le plus heureux des gardiens »

Dans L’Equipe du 28 octobre, Paul Nicolas, le patron de l’équipe nationale est satisfait de son gardien et ne le cache pas : « Pour moi, la défense a été, dans son ensemble, remarquable. Abbes a été parfait dans le buts. Il a effectué des interventions d’une netteté totale. »

De son côté, le principal intéressé avec son accent chantant confie : « Durant les trois jours qui avaient précédé la rencontre, j’étais nerveux comme un gamin, malgré les apparences. Et quelques instants avant la rencontre, cet état fébrile a rapidement disparu. Voyez-vous, j’ai joué devant la Belgique comme je l’aurais fait avec Saint-Etienne contre une autre équipe de club et je crois que c’est cela qui m’a sauvé. (…) Bref, je suis aujourd’hui le plus heureux des gardiens. »

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FranceFootball consacre sa Une aux deux « Bleus » que sont Abbes et Bruey.

Sur la pelouse du Heysel, celui que les supporters stéphanois surnomment Yachine, a conquis de haute lutte ses galons en Bleu. En moins de trois jours, Claude Abbes est passé du rang de joyeux remplaçant à celui de vedette du match de l’année.

BELGIQUE-FRANCE
Lors de ce Belgique-France (0-0), Claude Abbes sauve les Bleus à plusieurs reprises.

« Ma chance, c’est d’être allé de Béziers à Saint-Etienne »

« Ce ne fut certainement pas un beau match mais ils se sont qualifiés pour la « vraie » Coupe du monde. C’est l’essentiel. Après tout, c’était pire qu’un match de Coupe : un véritable match de barrage. Et on sait ce que ça veut dire. Et puis, Abbes était là, et bien là. Ca n’a rien d’étonnant : il y a des années qu’il est très bon. » L’homme qui prononce ces paroles n’est autre que l’habituel gardien titulaire et ami du Stéphanois, un certain… Dominique Colonna. Il est venu attendre les Bleus à la Gare du Nord. Le héros de Bruxelles descend du train tout sourire. Lui qui a connu tant de mésaventures déclare : « Je me suis cassé le bras, le pied droit, les deux index. Ces deux derniers sont d’ailleurs encore déformés et ça me gêne… pour donner les cartes ! Il est vrai que je n’avais pas encore beaucoup de métier quand j’ai eu ces blessures. Car si on me considère presque comme un « vieux » avec mes trente ans, je suis quand même un jeune professionnel, car j’ai débuté tard, à 24 ans. Ma chance, c’est d’être allé de Béziers à Saint-Etienne. J’y ai appris beaucoup et j’ai surtout trouvé un climat moral exceptionnel. Je crois que ce climat joue un rôle encore plus important pour le gardien que pour n’importe quel autre équipier. »

Belgique-France : 0-0. 80 000 spectateurs. Arbitrage : M. Helge (Danemark).

Belgique : Leysen – Dries, Nelissen, Van Brandt – Mees, Mathonet – Piters, Givard, Delire, Vandenberg, Orlans.

France : ABBES – Kaelbel, Zitouni, Lerond – Penverne, Olivier – Brahimi, Marcel, Bruey, Leblond, Vincent.

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Photos et légendes : L’Equipe.

A suivre : Claude Abbes, le « héros de Wembley »

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La Coupe du monde en bleu et vert

Le Musée des Verts se met à l’heure de la Coupe du monde en proposant une exposition unique dans laquelle des objets d’exception racontent  l’épopée des Bleus 98.

La scénographie du Musée des Verts a été conçue autour de 8 salles d’exposition dont une de 135 m2 consacrée aux expositions temporaires. Jusqu’au 10 octobre 2014, l’épopée de l’équipe de France championne du monde est au cœur d’une magnifique exposition temporaire consacrée à la Coupe du monde et à l’histoire qu’ont écrite des Verts d’hier et d’aujourd’hui dans cette compétition.

Du fameux carnet noir d’Aimé Jacquet aux manches coupées des maillots de Fabien Barthez en passant par des documents jusque-là confidentiels et des photos inédites prises par Jean Bibard et Stéphane Meunier dans l’intimité des vestiaires ou de Clairefontaine, l’exposition réunit de très nombreux objets soigneusement conservés par Philippe Tournon, l’incontournable chef de presse de l’équipe de France.

En plus de la collection de Philippe Tournon, laquelle comprend des maillots, billets, programmes et fanions, le Musée des Verts a rassemblé des pièces appartenant à de grands témoins :
– Henri Emile, entraîneur adjoint d’Aimé Jacquet ;
– Dominique Rocheteau, Coordinateur sportif de l’ASSE et 49 fois international de 1975 à 1986 ;
– Fabrice Grange, entraîneur des gardiens de l’équipe de France de 2006 à 2012 et membre du staff technique des Verts depuis 2012.

C’est également l’occasion de mettre en avant l’ASSE avec Aimé Jacquet, entraîneur de l’équipe championne du monde et ambassadeur à vie du club mais aussi le stade Geoffroy-Guichard, terre de football par excellence qui a abrité des matches de la Coupe du monde 1998.

Le Musée des Verts, inauguré le vendredi 20 décembre 2013, a déjà accueilli plus de 38 000 visiteurs. L’ASSE est le premier club de football français à ouvrir un musée. Impulsée par le Conseil général de la Loire, la création de cet espace exceptionnel de 800 m2 répond à la volonté de l’ASSE de valoriser son histoire, de promouvoir ses valeurs et de satisfaire la passion de tous ses supporters. Elle s’inscrit dans le projet de rénovation du stade Geoffroy-Guichard, porté par Saint-Étienne Métropole. Ce projet exprime une volonté partagée de voir vivre un ensemble muséal unique autour d’un club de football mythique.

 

Moravcik, la bonne affaire

La Coupe du monde au Brésil a débuté depuis une semaine. Cette compétition est l’occasion pour quelques joueurs de se révéler. En 1990, lors du Mondiale organisé par l’Italie, Lubomir Moravcik, le stratège gaucher de l’équipe tchécoslovaque, montrait au monde entier l’étendue de son talent. En lui faisant signer un pré-contrat, les dirigeants stéphanois, à la recherche d’un meneur de jeu, avaient eu le nez creux. Récit d’un transfert réussi pour les Verts.

PRESENTATION ST ETIENNE

« Nous allons prendre notre temps pour choisir le meneur de jeu qui nous a fait tant défaut la saison passée. » Ces paroles sont prononcées par André Laurent, le président de l’AS Saint-Etienne fin juin 1990. Christian Sarramagna, le remplaçant de Robert Herbin, et son staff ne veulent pas se tromper. Pour ce poste à vocation offensive, Bernard Bosquier s’est renseigné sur le joueur marseillais Philippe Vercruysse. Mais le prix demandé par l’OM et le salaire du joueur ont refroidi les ardeurs stéphanoises. Le club cherche un bon technicien mais ne souhaite pas dépenser l’argent qu’il ne possède pas.

Deux joueurs pour une place

Deux joueurs se retrouvent en balance. Fabian Vasquez, un Argentin de 27 ans, qui évoluait précédemment au Velez-Sarsfield. Elu meilleur joueur de son pays en 1987, il est arrivé dans le Forez pour un essai en compagnie d’Oswaldo Piazza, l’ancienne gloire des Verts. Il est en concurrence avec un international tchécoslovaque : Lubomir Moravcik. Inconnu ou presque du public français avant la Coupe du monde disputée en Italie, ce joueur de 25 ans est un bon dribbleur doté d’une excellente frappe. Bernard Bosquier, le directeur sportif du club, le suit depuis près d’un an.

 Moravcik dans le Top 10

Dans le quotidien régional La Tribune-Le Progrès daté du 29 juin 1990, l’ancien défenseur des Verts dans les années 60 évoque la future recrue du club : « Moravcik coûte trois fois plus que Vasquez au plan du transfert. Je connais Moravcik depuis un an (…) Actuellement, il y a une surenchère (…) Nous avons un précontrat avec Moravcik. Maintenant, il faut voir avec les dirigeants de Nitra. Si l’accord est respecté, l’affaire se réalisera à mon avis. On a vu Moravcik au « Mondiale ». Il fait partie des dix meilleurs joueurs. »

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Lubomir Moravcik, auteur d’un bon Mondiale italien, a fait étalage de son talent au monde entier.

Quart de finaliste avec la Tchécoslovaquie au Mondiale

Si Fabian Vasquez est un inconnu en France, Lubomir Moravcik, en revanche, ne l’est plus depuis le début du Mondiale. Après des matches de poules convaincants, la Tchécoslovaquie ne s’incline qu’en quarts de finale contre l’Allemagne (0-1), le futur vainqueur de l’épreuve. Lors de cette rencontre, Moravcik, l’un des meilleurs passeurs depuis le début de la compétition, est expulsé stupidement (la deuxième exclusion de sa carrière à ce jour) pour avoir jeté sa chaussure en l’air en signe de protestation suite à une faute de Littbarski (70e). M. Helmut Kohl, pas le chancelier allemand (!) mais l’arbitre autrichien de la rencontre, sort le carton rouge et lui indique le chemin des vestiaires. Pour lui, la Coupe du monde s’arrête à cet instant.

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Lubomir Moravcik (accroupis, le deuxième en partant de la gauche), a réalisé, avec la sélection de Tchécoslovaquie, un excellent Mondiale italien.

MM. Laurent et Bosquier se déplacent en Italie

Le 1er juillet, jour de ce match, André Laurent et Bernard Bosquier, le directeur sportif, prennent la direction de l’Italie, plus précisément de Milan où se dispute la rencontre. Au menu des deux dirigeants stéphanois : ce fameux quart de finale de la Coupe du monde. Il faut dire que l’équipe nationale tchécoslovaque n’a plus participé à un grand rendez-vous depuis le Mundial espagnol en 1982.

PRESENTATION ST ETIENNE
Bernard Bosquier (à g.) pose avec André Laurent, son président (au centre) et Christian Sarramagna, le nouvel entraîneur des Verts (à d.).

Mais avant d’assister à ce match, ils rencontrent le vice-président du club de Nitra. Le temps presse. Les bonnes prestations de Moravcik font monter la cote du joueur du Plastika Nitra. Lors de ce Mondiale, Venglos, le sélectionneur, le fait évoluer sur le côté droit, Chovanec et Kubic, occupent l’autre aile.

Les dirigeants du FC Nitra n’ont qu’une parole et le précontrat signé avant le Mondiale est respecté. La somme annoncée pour cette transaction est de 7,5 millions de francs payables en deux fois si les dirigeants stéphanois le souhaitent.

A l’issue de cette entrevue, André Laurent se veut rassurant mais reste néanmoins prudent sur le sujet.

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Lubomir Moravcik, le meneur de jeu qui manque à Saint-Etienne.

Moravcik en Vert pour 4 ans

Ce n’est que le mercredi 11 juillet que le petit gaucher tchécoslovaque, après une semaine de vacances bien méritée (il n’en avait pas pris depuis quatre ans en raison de ses études et de son service militaire), débarque à Saint-Etienne. Dans les salons du stade, il signe un contrat de quatre ans en faveur des Verts. Selon les dires du futur petit stratège stéphanois (1,70 m, 68 kg), le montant du transfert avoisine finalement le million de dollars (soit environ 6 millions de francs). Nitra réalise une opération juteuse. Pour en arriver là, les dirigeants stéphanois ont dû traiter avec la société internationale de marketing et sponsoring sportif « Télé-Mundi » dont l’agent n’est autre que Anton Ondrus, l’ancien joueur international (63 sélections) qui a évolué à Thonon-les-Bains.

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Lubomir Moravcik. à la sortie du tunnel du stade Geoffroy-Guichard

La révolution de velours favorise les mutations

Avant la révolution de velours, un joueur tchécoslovaque ne pouvait quitter son pays avant l’âge de 30 ans. Ondrus a fait ses valises à l’âge de 32 ans et 45 sélections. Moravcik, lui, pourra donc exprimer son talent en dehors des frontières de son pays dès l’âge de 25 ans, comme dix de ses compatriotes sur les vingt-deux présents à la Coupe du monde. Autre évolution majeure de cette révolution, Moravcik a obtenu sa lettre de sortie quatre jours seulement après la signature de son contrat.

 Vidéo Youtube : Le magicien du Forez.

 

La belle opération de Bosquier

Saint-Etienne réalise donc l’un de ses plus beaux transferts. Pas moins de huit clubs et non des moindres : Arsenal, Dortmund, Southampton, les Glasgow Rangers, Kaiserslautern, Gijon, la Fiorentina et Parme, excusez-du peu ! s’étaient renseignés. Bernard Bosquier, de son côté, est soulagé : lui qui a dû batailler avec de nombreux intermédiaires plus ou moins honnêtes, réalise son premier « gros » coup pour les Verts.

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Recommandé par Ondrus à Bosquier, Moravcik, après plus de huit de mois de tractations, signe à Saint-Etienne.

Un effectif renouvelé à 60 %

Moravcik rejoint ainsi un autre héros du Mondiale italien, le Camerounais Jean-Claude Pagal. Avec les arrivées de Kastendeuch, Lambert et Cyprien, entre autres, le club stéphanois met un terme à un recrutement estival tant quantitatif que qualitatif. Christian Sarramagna, en renouvelant son effectif à 60 %, a la sensation d’avoir investi « juste ». En revanche, Vasquez qui effectuait le stage d’avant-saison à Beauzac (Haute-Loire), n’a pas été retenu.

 

Mais qui est réellement ce Slovaque révélé lors du Mondiale italien?

Footballeur de père en fils

Lubomir Moravcik est né le 22 juin 1965 à Nitra. Il est le fils de Jan Moravcik, un ancien joueur de football de Nitra durant une dizaine d’années. Contrairement à Lubomir, Jan jouait plutôt défenseur ou milieu de terrain.

Gamin, Lubo, comme on le surnomme, pratique le tennis et le hockey sur glace pour le simple plaisir de jouer. Mais c’est vers le football qu’il se dirige. Milan Lesicky découvre cette pépite à Nitra. Fier de sa trouvaille qui joue aussi bien avec son pied droit que le gauche, il avoue à propos de son jeune protégé : « Un joueur comme on en repère 1 sur 10 000« . Très jeune, il décroche un titre de champion de Slovaquie avec son équipe de minimes du Plastika Nitra. Malgré son évolution au fil des années, il ne connaît pas les joies des sélections nationales de jeunes.

Première sélection le 11 novembre 1987

A l’âge de dix-huit ans, ses qualités techniques, au-dessus de la moyenne, lui ont permis de se faire une place dans l’équipe première de son club. Le stratège devient rapidement l’idole de la ville située à 80 kilomètres au nord-est de Bratislava. Sa réputation conjuguée à son talent dépassent peu à peu les frontières du pays. A 21 ans, ils lui valent même d’être convoqué chez les Olympiques avec lesquels il dispute dix matches pour un but inscrit contre la Finlande. Il honore sa première sélection avec les A le 11 novembre 1987 lors d’un Tchécoslovaquie-Pays de Galles (2-0).

En 1989, le club de Las Palmas lui fait les yeux doux mais Lubomir résiste aux sirènes du Sud.

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Lubomir Moravcik n’hésite jamais à aller au charbon comme ici lors d’un Saint-Etienne-OM.

Fidèle à Nitra

Très attaché à sa ville natale située en Slovaquie, il ne se voit pas non plus évoluer au Sparta ou aux Bohemians de Prague qui, elles, sont en Tchéquie. Aussi, avant de songer aux suites à donner à sa carrière, il souhaite terminer ses études d’ingénieur agronome. Parallèlement à son apprentissage footballistique, il fait des études à l’Ecole technique du bâtiment.

Avec Nitra, il dispute deux matches de Coupe d’Europe contre Cologne pour autant de défaites. L’aventure en UEFA s’arrêtera dès le premier tour.

Son transfert à Saint-Etienne permet à Nitra, premier club tchécoslovaque à avoir adopté officiellement le statut pro depuis l’automne précédent, de réaliser un opération juteuse tout comme le joueur. Dans ce club, l’international -il compte 20 sélections- gagne 8 000 couronnes, soit 1 600 francs mensuels, auxquels il faut ajouter les primes. En comparaison, en qualité d’ingénieur, il aurait gagné 3 000 couronnes soit 600 francs mensuels.

Dans le Forez, Moravcik, désormais rejoint par sa femme et son fils, occupe une villa où a résidé également le Marocain Mustapha El-Haddaoui, à Terrenoire, dans la banlieue stéphanoise. Le cadre très verdoyant lui rappelle sa ville natale.

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Document : Musée des Verts.

L’homme est studieux

L’homme est déterminé. Pour s’adapter au plus vite et donner sa pleine mesure, il s’astreint quotidiennement à une heure de français et ne se défait jamais de son manuel de français pour compléter ses heures de cours. Il est secondé par son ami et interprète Georges Hron, psycho-sociologue au CHR de Saint-Etienne. Il apprend très vite la langue de Molière. Il faut dire qu’il a quitté il y a peu de temps l’école avec son diplôme en poche.

Vidéo Youtube : Les exploits de Lubo Moravcik :

 

Enfin, pour l’anecdote, Eric Cantona est indirectement à l’origine de la venue du futur numéro 10 stéphanois. En inscrivant le but qui a privé les Verts de la finale de la Coupe de France le 26 mai 1990, il a précipité le départ de Robert Herbin. Si ce dernier était resté en place, Moravcik n’aurait sans doute jamais mis les pieds dans le Forez. En effet, le « Sphinx » avait estimé que plusieurs joueurs dans son équipe pouvaient se transformer organisateur. Bernard Bosquier, malgré sa quête d’un meneur de jeu depuis huit mois, ne trouvait guère d’échos vis-à-vis de son entraîneur. Le Hongrois Bognard, qui avait trouvé un accord avec l’ASSE, las d’attendre, avait fini par s’engager avec le Standard de Liège.

Pierre Haon (à g.) et Rob Witschge, joueurs malheureux de la demi-finale contre Montpellier (0-1).
Pierre Haon (à g.) et Rob Witschge, joueurs malheureux de la demi-finale contre Montpellier (0-1).

Qu’importe, Saint-Etienne a trouvé le meneur de jeu qui lui fait défaut et le public du stade Geoffroy-Guichard est prêt à s’enflammer pour sa future idole… A Nitra, Lubo portait le numéro 6, en sélection, il évolue avec le 11 et à « Sainté », il évoluera avec le numéro 10, comme celui d’un certain Michel Platini, meneur de jeu une décennie avant son arrivée… et idole de Moravcik.

Th. Clemenceau

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Michel Platini, l’idole de Lubomir Moravcik.

 

LES  B O N U S  :

MAG: PORTRAIT : LUBOMIR MORAVCIK (1/2) :

 

MAG: PORTRAIT : LUBOMIR MORAVCIK (2/2) :

 

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Pierre Bernard : la modestie au service du football (suite)

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Pierre Bernard, une recrue de choix pour l’AS Saint-Etienne.

 

Juin 1963. Le championnat a rendu son verdict : Nîmes termine sixième . L’annonce du possible départ de leur entraîneur Kader Firoud laisse les joueurs dans l’expectative. Tout comme celui programmé de leur gardien Pierre Bernard. Ce dernier, à 31 ans, est toujours ambitieux. Et d’ambition, l’AS Saint-Etienne, présidé par Roger Rocher n’en manque pas. Les Verts sont de retour en Division 1 et ne souhaitent pas y faire de la figuration. Le moral est au beau fixe dans le Forez. Jean Snella, de retour au club après quatre ans d’absence, c’est la promesse de lendemains enchanteurs. L’un de ses premiers transferts s’appelle… Pierre Bernard.

L'Equipe daté du 8 juillet 1964
L’Equipe daté du 8 juillet 1964

A l’image de son entraîneur, l’homme est tranquille et ses gestes toujours mesurés. Il peut décourager l’approche, tant par sa gentillesse que par sa froideur. Sportivement et psychologiquement, le mentor stéphanois sait ce qu’un tel élément peut apporter à son équipe. Les Verts sont armés pour effectuer une belle saison : un gardien de haut niveau et huit internationaux. De Herbin à Ferrier, sans compter Mekloufi, chacun espère retrouver en cette équipe, celle qui avait conquis le premier titre en 1957.

Le 24 août, en Coupe de la Ligue, les Verts font match nul contre Grenoble (2-2). Roland Guillas, l’ancien Stéphanois, se rappelle au bon souvenir de son ancien club en inscrivant les deux buts isérois. Lors de cette rencontre, Pierre Bernard ne termine pas le match suite à une blessure à son épaule.

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Fin août, le club du président Rocher négocie le transfert d’un deuxième Bernard. Toulouse ne serait pas contre laisser Jacky rejoindre son frère dans le Forez. Finalement, le transfert ne se fera pas.

Le 1er septembre, Pierre Bernard, le plus précis des gardiens français depuis Darui, fait ses grands débuts en Vert contre Valenciennes (1-1).

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L’Equipe 2 septembre 1963

A près de 32 ans, le nouveau gardien stéphanois garde une belle cote de popularité comme le confirme son déplacement avec l’équipe de France à Sofia. Mais l’homme ne parle jamais au hasard. Ses observations ne manquent rarement d’intérêt : « La première fois que j’ai joué contre les Bulgares, c’était un match un peu particulier pour moi puisqu’il s’agissait de ma première cape en équipe de France. On avait gagné 3-0. »

Un gardien qui fait l’unanimité

Dans le Forez, il ne tarde pas à faire l’unanimité. Après un Racing-Saint-Etienne, Roger Rocher, son président, ne tarit pas d’éloges à son encontre : « Bernard nous a fait une partie époustouflante. C’est lui qui a fait basculer le match. »

Le19 janvier 1964, il fait partie de l’expédition à Valenciennes. Dans le Nord, René Domingo, le capitaine des Verts, se fracture la jambe et doit mettre un terme à sa carrière. Pierre Bernard, quant à lui, se blesse. La défense stéphanoise est décimée.

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L’Equipe daté du 21 janvier 1964

 Lors d’un match Lyon-Lens une semaine plus tard, Kader Firoud, présent dans le Rhône, lâche à Snella : « Pierre Bernard a déjà rapporté au moins dix points à Saint-Etienne, j’en suis ravi pour lui et pour l’ASSE qui a été aussi mon club. »

Fin février, après un match à Angers, celui qui joue toujours avec des chaussures trop grandes « pour ne pas se blesser les pieds » déclare le plus sérieusement du monde : « Je ne crois plus aux terrains mascotte depuis que j’ai pris huit buts à Angers avec Nîmes alors que ce terrain m’avait toujours réussi.

« Il n’est pas prouvé que je sois meilleur que Pierrot »

Chez les Bleus, Pierre Bernard a toujours dû composer avec la concurrence de très bons gardiens. Après Remetter et Taillandier, son copain Marcel Aubour, grand espoir français, pointe le bout de son nez. Ce joyeux luron tempère pourtant : « Il n’est pas prouvé que je sois meilleur que Pierrot qui n’a pas démérité en équipe de France. Si je devais prendre sa place dans ces conditions, ça me ferait quelque chose. Je crois que pour l’équipe de France, j’ai le temps. »

Le jeune espoir fait référence au match des Bleus le 23 mai 1964. Ce jour-là, Bernard, capitaine de surcroît, se loupe en voulant dégager du poing un ballon tourbillonnant, il concède ainsi un but de débutant. « J’ai pris une savonnette, comme l’on dit dans le jargon des gardiens de but, c’est-à-dire que la balle, assez facile pourtant à capter, m’a filé entre les doigts comme une savonnette vous échappe sous la douche« , déclare-t-il après coup. Décidément, il ne gardera pas un souvenir impérissable de ses voyages au-delà du rideau de fer, que ce soit à Sofia ou à Budapest. Malgré cette bourde, il reçoit la médaille d’or de la FFF au cours du banquet qui clôture ce déplacement.

Le 31 mai, Saint-Etienne chute lourdement à Sedan mais devient, dans le même temps, champion de France. C’est également le premier titre pour le gardien des Verts.

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L’Equipe daté du 1er juin 1964

Vidéo : l’AS Saint-Etienne est champion de France pour la seconde fois de son histoire.                     http://youtu.be/BYpZ0WrzAUI

« Il est franc et modeste, trop modeste même« 

Dans l’hebdomadaire FranceFootball daté du 9 juin 1964, Jean Snella présente fièrement ses champions 64. De son gardien, il dit : « Bernard, je le connaissais bien puisque j’avais déjà eu affaire à lui en équipe de France B. Il est très franc et modeste, trop modeste même. En sélection, j’avais déjà remarqué qu’il limitait ses ambitions et qu’il ne croyait pas assez en lui. Même encore maintenant qu’il a acquis la notoriété en sélection et qu’il a fait ses preuves, il a tendance à douter de lui-même (…) Cela dit, il a été le gardien de but de grande classe dont nous avions besoin, dont toute grande équipe a besoin pour remporter des succès. (…) Dans la vie, d’autre part, il s’est épanoui, s’est ouvert plus franchement, s’est même mis à chahuter avec ses camarades. C’est un garçon très sociable, qui fait la part des choses, qui comprend les gens, qui est intelligent. Bien sûr, il n’a pas un commandement à la Da Rui, mais sa présence est suffisante pour imposer le respect à ses coéquipiers. (…) Pourtant, au début de la saison, son transfert avait été un peu discuté car on estimait que le montant était trop élevé pour un gardien. Mais j’estimais qu’à un poste clé, il fallait acquérir les services d’un homme de grande classe pour lequel on pouvait consentir des sacrifices. »

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Jean Snella en grande discussion avec Pierre Bernard.

A 33 ans, la carrière de Pierre Bernard semble définitivement terminée depuis Budapest. Avec ses deux prénoms, Pierre Bernard s’est fait un nom dans le football mais n’était-il peut-être n’était-il pas destiné à l’exportation.

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Le 14 mars 1965, Saint-Etienne s’impose à Lyon (1-0) lors du derby. Ce jour-là, Pierre Bernard est héroïque et fournit un match de premier ordre. Guérin ne s’y trompe pas et le convoque pour affronter l’Autriche.
Une première pour lui ou… presque. Dans L’Equipe du 24 avril 1965, il confie à Jean-Paul Oudot : « La réussite, cela ne s’explique pas. Cela vient, cela passe… Je n’ai jamais joué contre les Autrichiens. Ou plus exactement depuis… 1949. C’était un France-Autriche Juniors. Comme le temps passe… »

Début avril 1965, Saint-Etienne affronte Valenciennes au stade de Gerland en Coupe de France. Ce jour-là, sous les yeux du sélectionneur Henri Guérin, il réalise l’un de ses meilleurs matches de sa carrière. Sa prestation époustouflante permet aux Verts de se qualifier pour le tour suivant. Le sélectionneur français lui accorde à nouveau sa confiance.
Fin septembre, les hommes de Jean Snella se déplacent à Angers. Le gardien stéphanois effectue encore des prouesses. A croire que depuis ses huit buts encaissés avec Nîmes en 1962, un sentiment de revanche l’habite.

21 comme le nombre de ses sélections

A trente-trois ans et deux mois, il connaît sa dernière sélection avec les Bleus le 24 mars 1965 contre l’Autriche (1-2). A l’issue de cette rencontre, son compteur en équipe de France restera à jamais bloqué sur le chiffre 21.

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Contre l’Autriche, Pierre Bernard connaît sa dernière sélection en Bleu.

 

Vidéo INA : le match France-Autriche : 1-2.

 

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Le 18 janvier 1966, dans un entretien accordé à l’hebdomadaire FranceFootball, il consent : « Avec les années, je suis devenu plus détendu, plus optimiste aussi. Je n’ai jamais été exubérant mais il faut comprendre que j’étais réservé et un peu timide. Je ne suis pas ainsi avec les gens que je connais bien. »

Retour sur une carrière bien remplie

Il revient aussi sur sa carrière et les clubs pour lesquels il a joué : « Je crois que j’ai connu quatre clubs très différents, mais qui, tous les quatre, ont eu de bonnes périodes. J’ai joué le titre avec Nîmes, j’ai gagné la Coupe avec Sedan et le championnat avec Saint-Etienne. Je ne suis pas mécontent mais on peut toujours faire mieux. ». Sur son passage en équipe de France : « J’ai participé à une série noire, du temps de M. Verriest. On ne gagnait jamais, on était malchanceux. J’ai été pris dans le nettoyage qui a suivi. Mais il n’y a qu’une chose importante, la valeur du terrain… Ce n’est pas parce que je ne suis plus le numéro 1 que je suis forcément le quinzième ou le vingtième. »

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Pierre Bernard, le gardien à la casquette.

Jamais un mot plus haut que l’autre

S’il n’est pas à un tournant de sa carrière, il pense forcément à l’avenir et notamment la fin de sa vie de joueur. « C’est dur si on a un tempérament de vedette mais je ne l’ai jamais eu… » Le ton est posé, pas un mot n’est plus haut que l’autre. Il n’exprime aucun regret, ni la moindre déception. Il n’en veut à personne : « Pourquoi donc en voudrais-je à quelqu’un ? Même pas à M. Guérin... » Ainsi est Pierre Bernard.
Impassible telle une statue sur son piédestal, en ce début de l’année 1966, quelque chose a changé chez lui. La carapace dans laquelle il s’était enfermée s’est fêlée. L’homme s’est métamorphosé. Il respire désormais le calme et la sérénité. Il le consent volontiers : « A partir d’un certain moment, je suis comme les jolies femmes, je ne dis plus mon âge. » A 34 ans, on pourrait le croire sur le déclin. Lui préfère penser qu’il peut encore jouer deux-trois saisons au plus haut niveau.

Fin mars 1966, lors d’un déplacement à Nantes, Pierre Bernard mesure encore un peu plus sa cote de popularité. Les spectateurs, amassés au bord du terrain, lui réclament des autographes. La scène se révèle insolite.

MAGAZINE ST ETIENNE
Jean Snella présente l’équipe 1967. De g. à d. : Pierre Bernard, Bernard Bosquier, Jean Snella, Hervé Revelli et Robert Herbin.

Le 28 septembre, Toulouse fête Bernard, pas le Stéphanois mais Jacky, le benjamin de la famille Bernard. Pour ce jubilé exceptionnel, « Pierrot » renforce l’équipe toulousaine qui reçoit au Stadium le Real Madrid, champion d’Europe en titre. Malgré l’absence du Rémois Kopa, l’ex-Madrilène, le club du président Doumeng peut compter sur la présence d’un autre Stéphanois : Rachid Mekloufi. Pour les frères Bernard, cela constitue une première et un grand moment d’émotion : ils sont enfin réunis sous un même maillot… le temps d’un match.

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Scène de joie dans le vestiaire stéphanois. Pierre Bernard est accroupis à droite de Robert Herbin.

Le 11 juin 1967, Saint-Etienne s’impose 3-0 sur le terrain d’Angers et devient le trentième champion de France depuis l’instauration du championnat professionnel. C’est le deuxième titre de champion de Pierre Bernard sous le maillot vert.

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L’équipe championne de France 1967 : en haut, de g. à d. : Jacquet, Bosquier, Sbaïz, Bernard, Polny, Gonzales. En bas : de g. à d. : Fefeu, Herbin, Revelli, Mekloufi et N’Doumbé.

Vidéo INA :

Retour de l’équipe championne de France à Saint Etienne : http://www.youtube.com/watch?v=HkqOl30G5oQ

L’appel des States ?

En 1963, Jean Snella effectue son grand retour à Saint-Etienne. Pierre Bernard, ses grands débuts. En 1967, l’entraîneur stéphanois quitte les Verts. Bien que son destin ne soit pas lié à celui de son entraîneur, le gardien stéphanois, à 35 ans, s’interroge sur la suite à donner à sa carrière. En fin de contrat, il est sollicité par un club de Division 2, mais plus surprenant, par des clubs américains.
L’AS Saint-Etienne commence un nouveau cycle. Albert Batteux arrive dans le Forez, il est bientôt rejoint par deux internationaux : le stadiste Georges Carnus et Vladimir Durkovic (50 sélections en équipe de Yougoslavie).

Bien que faisant toujours partie du gotha des gardiens français, Bernard ne succombe pas aux sirènes américaines et s’engage avec l’équipe francilienne du Red Star FC qui vient de fusionner avec… Toulouse. Le prestige du gardien international promet d’attirer les foules à Saint-Ouen.

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Pierre Bernard, au milieu des joueurs du Red Star.

Le plus ancien joueur professionnel français en activité

Il est le plus ancien joueur professionnel français en activité, devançant de quatre jours seulement un autre ancien international : le Strasbourgeois Raymond Kaelbel, né le 31 janvier 1932. En revanche, ce dernier a fait ses premiers pas en professionnel à l’âge de dix-huit ans contre vingt au néo-audonien.
Sur son rôle de gardien, Pierre Bernard évoque sans détour son évolution : « La tâche du gardien de but aujourd’hui est infiniment plus aisée que celle du gardien en 1957. A mes débuts professionnels, la plupart des équipes jouaient le WM, c’est-à-dire avec trois arrières. Le gardien devait prendre des risques énormes quand les attaquants adverses se présentaient à cinq ou six. Maintenant, le jeu s’est considérablement durci et renfermé en défense. Et le gardien a dû évoluer et réfléchir. On lui demande d’être efficace, non d’être spectaculaire. »

RED STAR
Pierre Bernard au centre, le nouveau gardien des Audoniens du Red Star.

De retour à Geoffroy-Guichard

Saint-Etienne, Bernard ne va pas s’en absenter très longtemps. Dès le mois de septembre 1967, il y fait son grand retour. En effet, la mini-trêve imposée par les matches internationaux a permis au Red Star et à l’ASSE de conclure une rencontre amicale à Geoffroy-Guichard. Ce déplacement a permis également au désormais ex-joueur de l’ASSE d’effectuer son déménagement définitif de Saint-Etienne à Paris.

L’attention des joueurs stéphanois

Le 13 février 1968, les Verts affrontent Malakoff en Coupe de France. Les Stéphanois investissent le vestiaire occupé habituellement par le Red Star où évolue leur ancien gardien. Sur le tableau noir de Jean Avellaneda, l’entraîneur audonien, Herbin et tous les joueurs stéphanois écrivent un petit mot à l’adresse de leur ancien coéquipier. Bernard, qui n’a laissé que des bons souvenirs dans le Forez, est touché par cette inattendue attention. Lors des déplacements de l’ASSE, il jouait très souvent au bridge avec Herbin, Sbaïz et Jean Oleksiak entre autres.

A propos de son ancien club, il déclare : « Si l’année prochaine, l’équipe réussit une belle saison, Saint-Etienne deviendra un super club, car il est supérieurement organisé sur tous les plans. »

 

Robert Herbin, l'une des rares satisfactions stéphanoises de ce match.
Robert Herbin et ses coéquipiers laissent une trace de leur passage à Saint-Ouen.

Un jubilé pour clore une belle carrière

A 38 ans, il met un terme à sa carrière professionnelle à la fin de la saison 1969. De ses débuts professionnels aux Girondins de Bordeaux en 1952 à son dernier match avec le Red Star en 1969, il a disputé 470 matches en Division 1.
Le Red Star offre à son capitaine un jubilé à la hauteur de son talent. 18 000 spectateurs sont présents au stade de Paris pour applaudir une dernière fois leur joueur. Pierre Bernard a invité pour ce jour de fête, Jacky Bernard, le benjamin de la famille et Rachid Mekloufi qu’il a côtoyé lors de son passage à Saint-Etienne. Le Red Star s’incline devant le Sporting de Lisbonne (1-0).

Pierre Bernard lors de son jubilé. La fête est à la hauteur du talent de l'international.
Pierre Bernard lors de son jubilé. La fête est à la hauteur du talent de l’international.

A Bordeaux, il retrouve son grand ami Guillas

Il se reconvertit comme représentant régional pour une célèbre marque d’articles de sport aux trois bandes. Il rejoint son grand ami Roland Guillas.
Bien que retraité des terrains, il continue à jouer occasionnellement avec les anciens internationaux. En octobre 1973, il dispute à Brive avec les anciens Bleus, un match contre les vieilles gloires hongroises. Ses coéquipiers se nomment alors R. Tylinski, Goujon ou Kopa.
Il n’oublie pas aussi de se rendre à Geoffroy-Guichard pour assister à des matches et revoir ses anciens partenaires où il revoit d’autres anciens Verts, tels Claude Abbes.
Pierre Bernard nous a quittés le 28 mai 2014 à l’âge de 82 ans.

Th. Clemenceau

 

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FranceFootball daté du 20 décembre 1960

Saint-Etienne-Ajaccio : Jour de fête

 

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http://museedesverts.fr/

Samedi soir, l’AS Saint-Etienne accueille l’AC Ajaccio pour le compte de la 38e et dernière journée du championnat de Ligue 1. Après sa belle victoire à Nantes, en cas de victoire, les hommes de Christophe Galtier espèrent monter sur la troisième marche du podium. Mais ils ne sont pas les seuls maîtres de cérémonie.

En 1967, les Verts d’Albert Batteux n’avaient pas fait de sentiment en s’imposant 4-0, trois jours après leur élimination en Coupe des Clubs Champions contre le Benfica d’Eusébio. Ce jour-là, un joueur faisait ses grands débuts au stade Geoffroy-Guichard : Salif Keita. En 1999, les hommes de Robert Nouzaret reçoivent les Corses. S’ils ne peuvent faire mieux qu’un match nul (2-2), ils retrouvent la Division 1. Enfin, tous les taxis mènent à Geoffroy-Guichard. Salif Keita et Adrien Ponsard ne diront pas le contraire… Bonne lecture.

 

Intouchables

Dimanche 3 décembre 1967. Saint-Etienne-Ajaccio : 4-0.
Trois jours après sa courte victoire contre Benfica (1-0), insuffisante pour la qualification en Coupe des Clubs Champions, les Verts reçoivent l’AC Ajaccio en championnat.

En quittant le stade le vendredi matin, Albert Batteux fait la moue. Le match musclé contre les Portugais a laissé des traces. En effet, pas moins de six de ses joueurs sont blessés. Le docteur Nicolas et le soigneur Minasso s’évertuent donc à soigner les éclopés, à savoir N’Doumbé, Bereta, Bosquier, Mitoraj, Jacquet et Revelli. Batteux ne peut également oublier que Herbin est toujours blessé. Seul rayon de soleil dans ce paysage obscurci pour l’entraîneur stéphanois, la naissance de sa petite fille. Il est grand-père pour la première fois.

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Pour Bernard Bosquier et quelques joueurs stéphanois, le match contre Benfica a laissé des traces.

C’est donc une équipe très éprouvée qui affronte l’AC Ajaccio. Les joueurs Corses, de leur côté, sont à Saint-Etienne depuis le jeudi. Ils ont profité de ce séjour pour assister au match contre Benfica. Albert Muro, l’entraîneur ajaccien, et ses hommes en ont aussi profité pour superviser leurs adversaires du week-end.

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Document : Musée des Verts

Des absences compensées

9 002 spectateurs ont fait le déplacement, malgré le froid, pour voir les Verts disputer leur troisième match en sept jours. Après Metz (4-0) et Benfica (1-0), quel sort allaient-ils réserver à Ajaccio ? Bien qu’handicapée par l’absence d’un tiers de son équipe (Herbin, Jacquet, Fefeu et Revelli), l’équipe stéphanoise joue d’entrée de jeu avec détermination. Les rares velléités ajacciennes sont contenues sans grande difficulté par le duo Bosquier-Durkovic.

La jeunesse au pouvoir

Au milieu, deux jeunes joueurs se font remarquer : Jean-Michel Larqué et Francis Camerini. Seulement âgés de 20 ans, les deux complices de l’équipe de France Juniors alimentent en bons ballons leurs attaquants dont un certain Salif Keita. Le Malien effectue contre Ajaccio ses grands débuts à Geoffroy-Guichard. Rapide et doté d’une technique hors pair, il fait souffrir ses adversaires.

Salif Keita affronte sa sélection avec les Verts.
Contre Ajaccio, Salif Keita effectue son premier match à Geoffroy-Guichard, son deuxième sous le maillot vert.

Dès la 25e minute, sur un centre millimétré de Bereta, Mitoraj ouvre le score de près (1-0, 25e). Les tentatives de Larqué et N’Doumbé font passer quelques frayeurs aux Ajacciens. Après la pause, Keita continue son festival. Après une série de dribbles qui laissent deux défenseurs corses sur place, il embarque Baratelli et loge la balle au fond des filets (2-0, 54e). Quatre minutes plus tard, c’est au tour de Larqué, d’un tir canon, d’envoyer Baratelli chercher le ballon au fond des filets (3-0, 58e).

Mekloufi dans un jour « sans »

Si Mekloufi, le capitaine des Verts, se montre particulièrement maladroit dans la finition, Bereta, ne se fait pas prier pour dribbler à son tour trois défenseurs ajacciens et y aller de son petit but (4-0, 75e). Après une telle démonstration de puissance et d’efficacité, les champions de France s’installent confortablement en tête du championnat. Comme à son retour de Lisbonne deux semaines plus tôt, les Verts se sont imposés aisément sans trembler.

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Albert Batteux, félicite Georges Bereta et Salif Keita, deux des buteurs stéphanois.

Keita réussit ses débuts à « G.G. »

Cette rencontre a surtout montré que l’ASSE possède un réservoir de jeunes performants et de qualité. N’Doumbé pour son second match de la saison n’a pas déçu. Jean-Michel Larqué a fait apprécier sa belle technique et sa vision du jeu a fait merveille. Quant à Francis Camérini, incorporé au Bataillon de Joinville, il jouait son premier match avec les Verts cette saison. L’ex-transfuge du Cavigal de Nice (comme Herbin) semble avoir atteint la maturité. Enfin, le jeune malien Salif Keita, pour ses grands débuts en match officiel à Geoffroy-Guichard, a séduit. Deux mois après avoir foulé pour la première fois la pelouse du stade en lever de rideau. Ses dribbles dévastateurs et son but annoncent des jours heureux.

Buts.- Mitoraj (25e), Keita (54e), Larqué (58e), Bereta (74e).
Saint-Etienne : Carnus – Durkovic, Mitoraj, Bosquier, Polny – Larqué, Camerini – N’Doumbé, Keita, Mekloufi, Bereta. Entr.: Batteux.
Ajaccio : Baratelli – Vanucci, Brucato, Devaux, Moise – Risso, Girod – Munoz, Sansonetti, Marcialis, Touré. Entr.: Muro.

 

Un taxi pour Geoffroy-Guichard

Après sa prestation de grande classe contre Ajaccio, Jean-Paul Oudot, l’envoyé spécial dans le journal L’Equipe, retrace, dès le mardi 5 décembre, l’arrivée de Salif Keita à Saint-Etienne.

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L’Equipe du 5 décembre 1967

Vidéo INA  : Albert Batteux évoque l’arrivée de Salif Keita à Saint-Etienne. Il loue aussi ses grandes qualités.

 

 

Nuit d’ivresse

1er mai 1999. Saint-Etienne-Ajaccio : 2-2.

Le 24 avril, Saint-Etienne quitte le stade Francis Le Basser avec un sentiment de frustration. Malgré leur match nul (1-1) à Laval, les hommes de Robert Nouzaret ne peuvent encore officialiser leur accession parmi l’élite. Lille vient en effet de s’imposer à Ajaccio (2-0). Bien qu’ils possèdent onze points d’avance sur les Nordistes ( 4e), les Verts ne sont pas encore assurés du sacre. Il faut donc attendre une semaine supplémentaire.

Objectif remontée

Pour la fête du muguet, l’équipe entraînée par Robert Nouzaret accueille… l’AC Ajaccio. Dans L’Equipe du 25 avril, l’entraîneur stéphanois a prévenu : « Plus le droit de décevoir« . Un petit point suffira aux Stéphanois pour retrouver sa place parmi l’élite. Le président Bompard surenchérit : « Il nous manque mathématiquement un point, cela nous autorise donc à un nul en quatre matches. Si on ne marque pas ce point, on ne mérite pas de monter en D1, mais on va le marquer. »

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Le président Alain Bompard attend l’officialisation de la remontée en Ligue 1 depuis plusieurs semaines.

Pour préparer la venue des Corses à Geoffroy-Guichard, Nouzaret a même programmé un match amical contre Dijon en Côte d’Or le mardi soir. Une rencontre finalement annulée pour éviter toute pression inutile. La dernière victoire à domicile remonte au 20 mars contre Lille (3-2). Depuis, Nice est venu s’imposer dans le Chaudron (2-0), ce qui a quelque peu refroidi les ardeurs. Ajaccio, de son côté, reste sur trois revers à l’extérieur. En début de semaine, l’attroupement devant les guichets du stade laisse présager que le match se jouera à guichets fermés.

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Les fans des Verts se sont arrachés les derniers billets pour participer à ce Saint-Etienne-Ajaccio.

Côté stéphanois, Nestor Subiat (7 buts), claqué à Laval, manque à l’appel. C’est Samba N’Diaye (arrivé de Nantes au Mercato d’hiver) qui est appelé à le suppléer pour former le duo d’attaque avec Patrick Revelles (actuel meilleur du club avec 12 buts).

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Les supporters stéphanois ont répondu présent pour cette grande soirée au stade Geoffroy-Guichard. Ils étaient 35 350 à soutenir leurs protégés.

L’ambiance des grands soirs

Ce 1er mai 1999, le stade Geoffroy-Guichard est plein à craquer pour célébrer ses héros. 35 350 supporters sont prêts à s’enflammer pour le moindre exploit, la moindre envolée des siens. Les drapeaux s’entremêlent, les chants résonnent comme aux plus beaux jours. Tous espèrent la consécration. C’est sûr, cette fois, les petits hommes Verts ne peuvent gâcher la fête. Sarr s’y emploie dès la 6e minute. Sur un corner de Revelles, il place sa tête hors de portée de Klein, le portier ajaccien (1-0, 6e).

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Les joueurs sortent du tunnel du stade de Geoffroy-Guichard, Patrick Guillou et Lucien Mettomo en tête.

A la 25e minute, Faderne égalise suite à une belle glissade de Janot (1-1, 25e). Malgré des tentatives de Sablé, Ferhaoui ou N’diaye, les Verts ne parviennent pas à « corser » l’addition avant la pause. Les supporters, durant ce quart d’heure de pause, peuvent découvrir « La marche verte« , un nouvel hymne à la gloire de leurs protégés, entonné par deux chanteurs locaux.

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Gilles Leclerc, l’expérience au service des Verts.

Au retour des vestiaires, les Verts veulent offrir la victoire à leurs supporters, pour les remercier d’avoir toujours été là dans les moments difficiles depuis trois ans. Ils ont souffert avec leurs joueurs sans pour autant les abandonner.

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Le capitaine stéphanois Kader Ferhaoui mène ses troupes vers la Division 1.

Revelles envoie les Verts au paradis

Il faut attendre la 84e minute : Revelles, accroché par Maroselli, obtient un penalty. Il se fait lui-même justice et délivre le « peuple vert » (2-1e, 84e). Ce n’est pas l’égalisation de Prso (2-2, 89e) qui change le cours de l’histoire. Certes, les Verts n’ont pas gagné, mais qu’importe. Ils obtiennent l’essentiel : leur billet pour la Division 1.

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Les Verts retrouvent la Division 1. Les Stéphanois se congratulent.

A trois journées de la fin, ils ne peuvent plus être rejoints par Lille, battu à domicile par Amiens (1-0). L’AS Saint-Etienne connaît donc sa troisième remontée en Division 1 de son histoire après celles de 1963 et 1986.

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Scène de liesse au coup de sifflet final.

Au coup de sifflet final, c’est la délivrance. Les supporters envahissent la pelouse, s’embrassent, communient avec leurs joueurs. Une trentaine de personnes finissent même aux urgences du CHU de Saint-Etienne pour avoir escaladé les grillages posés pour la Coupe du monde un an plus tôt.

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Les joueurs stéphanois communient avec leur fidèle public.

Jusqu’au bout de la nuit

Les Magic Fans, habitués de la tribune Nord, ne s’y étaient pas trompés, eux qui avaient déployé avant le match une banderole sur laquelle on pouvait lire : « La légende est de retour« . Pour les joueurs, le staff et de nombreux supporters, la nuit est courte : dîner et Karaoké lancent les festivités. Un peu plus tard dans la nuit, les joueurs arrosent la montée dans un établissement nocturne de la ville.

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Gérard Soler (de dos) tombe dans la bras de Robert Nouzaret, l’entraîneur stéphanois.

Les réactions se succèdent

Les réactions sont nombreuses dans le monde français du football. A commencer par les ex-Verts. Dominique Rocheteau : « Cette saison, j’ai vu les Verts une fois à Geoffroy-Guichard, c’était contre le Red Star. C’était fabuleux. J’ai retrouvé l’ambiance stéphanoise. ». Pour Dominique Bathenay : « Cela fait plaisir à la France entière (…) Je suis content pour tous ceux qui ont fait des efforts depuis deux ans. »

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Bertrand Fayolle est l’une des grandes révélations stéphanoises de la saison avec Adrien Ponsard.

Michel Platini : « C’est bien pour Saint-Etienne, pour les Stéphanois, pour la région. Là-bas, le foot est une vraie tradition. » Pour Daniel Leclercq, l’entraîneur de Lens : « Saint-Etienne, c’est un stade et une passion qui méritent la D1. ». Enfin, pour Bernard Bosquier : « Je suis très heureux pour cette ville car elle manquait au foot français. »

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Explosion de joie dans le vestiaire stéphanois après le match nul entre les Verts et Ajaccio (2-2), synonyme de remontée en Division 1.

De Kader à Adrien

Le trio Bompard-Soler-Nouzaret a donc réussi son pari : l’alchimie entre les trentenaires (Captain Ferhaoui en tête, Leclerc, Fichaux, Robert ou encore Subiat) et les « enfants du pays » tels Adrien Ponsard (natif de Firminy) débarqué du Puy alors en Division d’Honneur, Bertrand Fayolle, chauffagiste de son métier quelques temps avant, arrivé de l’Etrat, également pensionnaire de DH, sans oublier l’infatigable international Juniors Julien Sablé et le besogneux Patrick Guillou, idolâtré par Geoffroy-Guichard. Après avoir connu la relégation en 1996, frôlé le dépôt de bilan et la descente en National, ce 1er mai, c’est toute une ville qui a retrouvé sa fierté.

Buts.- Saint-Etienne : Sarr (6e), Revelles (84e, s.p.) ; AC Ajaccio : Faderne (25e), Prso (89e).
Saint-Etienne : Janot – Guillou (Zanotti, 75e), Leclerc, Mettomo, Potillon – Ferhaoui (cap.), Sablé, Fichaux, Sarr – Revelles, N’Diaye (Ponsard, 69e). Entr. : Nouzaret.
Ajaccio : Klein – Toursel, Burle (cap.) (Bibi, 19e), Maroselli, Colling, Féron – Petit, De Luca (Prso, 56e), Bonnal, Granon – Faderne. Entr.: B. Gentili.

 

Un taxi pour Geoffroy-Guichard (2)

A l’instar de Salif Keita, l’histoire d’Adrien Ponsard est peu banale. Encore joueur de l’USF Le Puy en 1998, le jeune attaquant de l’AS Saint-Etienne passe de la Division d’Honneur à la Division 2 en moins d’un mois. Le meilleur buteur du dernier championnat d’Auvergne (30 buts lors de sa dernière saison en Haute-Loire) profite d’un concours de circonstances incroyable.

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Adrien Ponsard, du Puy à l’ASSE.

Après un stage d’avant-saison à Albertville, les hommes de Robert Nouzaret peaufinent leur préparation au Puy-en-Velay. Adrien Ponsard sert de chauffeur aux joueurs stéphanois. Tous les matins, il les emmène de leur hôtel au centre d’entraînement et vice-versa. Durant ce séjour, Robert Nouzaret, en guise de remerciements, accepte de disputer un match amical contre l’équipe locale au stade Massot. Adrien Ponsard se fait alors remarquer en inscrivant un but à Jérôme Alonzo. L’attaquant Nestor Subiat étant indisponible suite à claquage à une cuisse contre Valence, les dirigeants foréziens, sur les conseils de Maurice Bouquet et Alain Blachon, alors entraîneurs du Puy et ancien milieu des Verts, proposent un contrat pro d’un an à « Titi » Ponsard. Une telle aubaine ne se refuse pas.

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Adrien Ponsard, devenu en quelques mois, la coqueluche de Geoffroy-Guichard.

A 23 ans, il fait ses grands débuts avec l’ASSE le 22 août 1998 contre Guingamp (0-0) à Geoffroy-Guichard en remplacement de Fabrice Lepaul à l’heure de jeu. Mais c’est au stade de l’Aube contre Troyes, une semaine plus tard, qu’il inscrit son premier but en professionnel (1-1). Au fil des matches, il devient la coqueluche du public stéphanois. A la boutique des Verts, les maillots floqués « Ponsard » s’arrachent comme des petits pains. Assurément, Saint-Etienne a déniché un oiseau rare.

 

Courts métrages

Le prix du danger

Le 6 août 1969, Saint-Etienne accueille Ajaccio en championnat. A la mi-temps, les Verts mènent 2-0 grâce à des buts signés Hervé Revelli (10e) et Samardzic (15e).  En seconde mi-temps, M. Poncin, l’arbitre du match, interrompt une première fois la rencontre. Hervé Revelli, blessé dans un choc avec un défenseur ajaccien, est évacué hors du terrain.

Quelques minutes plus tard, Bernard Bosquier, le défenseur stéphanois, envoie un boulet de canon hors de portée de Dominique Baratelli, le gardien corse. Pourtant, l’homme en noir refuse le but de « Bobosse ». En effet, en même temps qu’il armait sa frappe, M. Poncin siffle. Stupéfaction dans les tribunes. une bouteille en verre, en provenance des tribunes atterrit sur la pelouse.  Malgré ce contre-temps, les Verts, grâce à un nouveau but de Bereta (87e) s’imposent 3-1.

A la fin du match, Charles Paret, le secrétaire du club stéphanois, explique : « Voilà une bouteille qui nous coûte cher. Elle nous prive d’un but et nous vaudra une amende de 500 F. » C’est le tarif… Et s’il y a récidive, l’amende sera portée à 2 000 F. »

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Document : Musée des Verts

 

 The artist

Le 3 décembre 1967, Salif Keita réchauffe les spectateurs du stade Geoffroy-Guichard en produisant un véritable récital pour son premier match devant son public. Les Verts s’imposent 4-0 avec un but du grand Salif.

Le 19 juin 1971, le Malien se transforme cette fois en magicien. Saint-Etienne est à la lutte avec l’OM pour le titre de champion de France à une journée de la fin. Josip Skoblar et Salif Keita se tirent la bourre pour l’obtention du titre de meilleur buteur de Division 1.

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Georges Bereta déborde Marius Trésor, le défenseur ajaccien. L’ailier gauche stéphanois est l’un des principaux pourvoyeurs de ballons de Keita.

Pour leurs adieux à domicile, les Stéphanois accueillent les Ajacciens. Keita, rejoint le Marseillais en tête du classement en inscrivant quatre buts. Bien aidé par ses coéquipiers, il réalise une véritable performance. Avant le dernier round, Keita et Skoblar sont à égalité avec 41 buts chacun. Le record de Gondet qui était de 36 buts (1966), tombe. L’écart entre les deux premiers et le troisième n’a jamais été aussi grand (16 buts).  Après sa performance, Keita reçoit nombre de lettres en provenance d’Afrique où l’on peut lire sur les enveloppes : « Salif Keita, le dieu Saint-Etienne« .

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Salif Keita réussit quatre buts et rejoint Josip Skoblar en tête du classement des buteurs de Division 1.

Au terme de ce championnat 1970-71, Marseille remporte le championnat et Skoblar termine meilleur buteur avec 44 buts devant… Salif Keita (42). Après 22 journées, le Yougoslave de Marseille avait pris une avance confortable de 7 buts (25 contre 18). Mais le Malien de Saint-Etienne revient dans son sillage en inscrivant le 24 mars 4 buts contre les Corses de… Bastia. C’est donc la dernière journée qui les a départagés.

Le 3 juillet 1971, Salif Keita reçoit le premier Ballon d’Or africain décerné par FranceFootball.

Vidéo INA : La remise du Ballon d’Or à Salif Keita.  http://youtu.be/e2Nyj0kjtXY

Th. Clemenceau

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Document : Musée des Verts.