Objectif Glasgow 76 – Nantes-Saint-Etienne : les héros étaient fatigués

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A Saint-Etienne, cette semaine restera longtemps gravée dans les mémoires. Ce 17 mars au soir, alors que se jouait une pièce en trois actes au stade Geoffroy-Guichard, un homme connaissait également un beau succès au théâtre de la ville. Après avoir été ovationné par les 700 personnes présentes, et alors que le rideau était tombé, Claude Piéplu réapparaissait sur la scène pour annoncer le score du match. « Saint-Etienne 3, Kiev 0. C’est un beau score » dit la voix des Shaddoks, sûr de son effet.

La ferveur qui s’est emparée de la France ce mercredi soir n’est pas prête de retomber. Et pour cause. Dès le samedi, les héros de Kiev ont rendez-vous à Nantes pour une affiche haute en couleurs. En effet, le hasard du calendrier leur propose un difficile déplacement chez leur dauphin au classement de la Division 1. L’enjeu semble déjà capital : si les Stéphanois s’inclinent au stade Marcel-Saupin, ils abandonneront alors leur place de leader au profit de Nantais devenus très ambitieux.

Au stade-Vélodrome, Dominique Rocheteau, auteur des deux buts stéphanois, n'est pas sorti indemne.
Dominique Rocheteau est forfait pour le déplacement à Nantes. Il sera remplacé par Jean-Marc Schaer.

Avant de s’envoler pour l’Ouest de la France, les Stéphanois doivent d’abord songer à panser les plaies et elles sont nombreuses. La débauche d’énergie fournie contre Kiev inquiète Robert Herbin. Une question taraude l’entraîneur stéphanois : dans quel état de fraîcheur ses joueurs vont-ils aborder cette rencontre importante pour la suite du Championnat ? Ses joueurs auront-ils la force de se transcender une deuxième fois en soixante-douze heures ? Même s’il ne veut pas l’avouer, il semble assez dubitatif sur la question. L’exemple de Dominique Bathenay, le jeudi matin, est là pour attester de sa moue. Malgré tous les efforts des kinés Chavanne et Filhol, le lendemain de la rencontre héroïque, le milieu de terrain stéphanois s’est endormi sur la table de massage. Un signe qui ne trompe pas.

Cascade de forfaits à Saint-Etienne

Contre Kiev, Christian Sarramagna n’a joué que quarante-cinq minutes. Remplacé à la mi-temps par Patrick Revelli, le Basque souffre d’une entorse de la cheville. Sa participation au match de samedi est d’ores et déjà exclue comme le confirme le docteur Poty. « Sarramagna souffre d’une entorse pas très méchante. Il ne jouera pas samedi à Nantes. Larqué a pris un coup à la cuisse droite avec hématome. C’est l’incertitude pour samedi. Farison est atteint à la crête iliaque. Là aussi, plus spectaculaire que grave. Cela compromet pourtant sa participation au match de Nantes. »

A ces trois indisponibilités, est venu s’ajouter un quatrième forfait : héros de la 112e minute contre Kiev, Dominique Rocheteau est lui aussi contraint de renoncer.

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NANTES EN BREF

A Nantes, on se félicite de la venue de Verts quatre jours après leur exploit européen. Ce samedi soir, au stade Marcel-Saupin, plus qu’une rencontre de football, c’est la première place du Championnat qui est en jeu. Après leur match nul à Sochaux (1-1), José Arribas a tout de suite mis sous pression ses joueurs :

« Maintenant, les gars, il faut surtout penser que nous recevons Saint-Etienne dans trois jours. »

José Arribas

Collection Panini 76.
Collection Panini 76.

Désormais à un point des Stéphanois au classement (38 contre 37), une victoire des coéquipiers d’Henri Michel leur permettrait de détrôner provisoirement le leader du Championnat. Yves Triantafilos attend ses anciens coéquipiers de pied ferme. Le 6 novembre 1974, alors pensionnaire de l’ASSE, il qualifiait les Verts contre Hajduk Split (5-1) pour les quarts de finale de la Coupe d’Europe. Mais ces exploits appartiennent désormais au passé.

Aujourd’hui, il défend les couleurs nantaises et jouer un mauvais tour à ses anciens partenaires ne serait pas pour lui déplaire : « Pourquoi ne songerions-nous pas au titre ? dit « Tintin ». Certes, Saint-Etienne a sans doute plus d’expérience que Nantes et peut-être un plus de réserves, mais les Nantais ont un esprit beaucoup plus offensif et l’ambiance du club est très bonne. Je suis désormais parfaitement intégré à Nantes où le jeu est agréable. Il serait stupide de dire que je vais chercher à battre Saint-Etienne à moi tout seul. Je suis contre de tels points de vue. »

L'Equipe 20 mars 1976.
L’Equipe 20 mars 1976.

Un rythme de champion

Depuis le 26 novembre, date de sa dernière défaite, l’équipe de José Arribas tourne à un rythme de champion. Depuis fin novembre, elle a glané 19 points et inscrit la bagatelle de 26 buts. Elle possède la meilleure attaque de Division 1 avec 53 buts.

C’est donc une équipe gonflée à bloc qui attend Saint-Etienne. Et comme le dit en souriant Yves Triantafilos : « Samedi soir, ce sera le grand combat ». Les Verts sont prévenus.

Contrairement à son homologue stéphanois, José Arribas peut compter sur l’ensemble de son effectif. Robert Gadocha, un moment incertain en raison d’un problème à un mollet, est partant certain.

Depuis une semaine, les billets se vendent comme des petits beurres aux guichets du stade. Depuis une quinzaine de jours, il n’y a plus une seule place assise à vendre. Effet coupe d’Europe oblige, sur les 16 000 places debout que contient le stade Marcel-Saupin, 13 000 ont déjà trouvé preneurs. Une première dans la cité de Jules Verne. Les dirigeants du FCN espèrent bien que ce samedi, le record de spectateurs qui date du 18 avril 1970 à Nantes sera battu. Ce jour-là, Nantes recevait Angers en Coupe de France.

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En prélude de ce Saint-Etienne-Nantes, les spectateurs ont pu apprécier une rencontre de Division 3 riche en buts entre Nantes (2e) et Concarneau (4e). Grâce à leur large victoire 5 à 2, les jeunes Nantais ont montré l’exemple à leurs aînés en s’emparant de la première place du groupe Ouest. Pas très rassurant pour les Stéphanois.

Double record pour le FC Nantes

Il est 20 h 30, le stade Marcel-Saupin a mis ses habits de fête. 26 744 spectateurs se sont acquittés du précieux sésame pour assister à cette rencontre au sommet. Ce record d’affluence pour un match de football à Nantes a généré un autre record : celui de la billetterie. Pas moins de 645 020 F. ont été encaissés aux guichets du stade.

Le public nantais a réservé une belle surprise aux joueurs de Saint-Etienne. A l’énoncé par le speaker des onze joueurs stéphanois, un tonnerre d’applaudissements retentit dans le stade comme pour mieux saluer leur exploit européen.

L'Equipe, 22 mars 1976.
L’Equipe, 22 mars 1976.

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NANTES-SAINT-ETIENNE : 3-0

Spectateurs : 26 744. Recette : 645 020 F. Arbitre : M. Verbecke. Buts.- Bossis (8e), Gadocha (66e), Rampillon (74e).

Nantes : Bertrand-Demanes – Osman, Bargas, Rio, Bossis – Michel, Tusseau, Rampillon – Gadocha, Triantafilos, Amisse. Entr. : Arribas.
Saint-Etienne : Curkovic – Janvion, Piazza, Lopez, Repellini – Santini, Bathenay, Synaeghel – Schaer, H. Revelli, P. Revelli, Vesir. Entr. : Herbin.

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L'Equipe, 22 mars 1976.
L’Equipe, 22 mars 1976.

La large victoire nantaise (3-0) sur son hôte stéphanoise relance totalement l’intérêt du championnat. Outre le point de bonus, les Canaris s’assoient dans le fauteuil de leader en compagnie de Sochaux. Ils poursuivent leur étonnante série de douze matches sans défaite composée de sept victoires et cinq nuls.

Robert Gadocha trompe Ivan Curkovic et inscrit le deuxième but nantais contre Saint-Etienne.
A la 66e minute, Robert Gadocha trompe Ivan Curkovic et inscrit le deuxième but nantais contre Saint-Etienne.

Nice, victorieux de Marseille, occupe la troisième place à égalité de points avec l’AS Saint-Etienne (38 points). Comme le craignait Robert Herbin, ses hommes ont payé lourdement les efforts consentis contre Kiev, notamment en deuxième mi-temps.

L’apport des jeunes Schaer et Vesir à la pointe de l’attaque n’aura pas suffi. Ce dernier, pour sa première titularisation chez les Verts, fulminait d’avoir encaissé une aussi large défaite. Après la rencontre, Jean Larqué, le père de Jean-Michel, a fait remarquer à son ancien junior que sur cette même pelouse, son fils y avait fait lui aussi ses débuts. Il n’avait pas été plus heureux puisque les Verts avaient perdu 5 à 0. C’était le 26 mars 1966.

Une défaite salvatrice ?

FranceFootball, 23 mars 1976 © Dessin de Robert Déro. Collection particulière.
FranceFootball, 23 mars 1976 © Dessin de Robert Déro. Collection particulière.

Paradoxalement, cette défaite serait-elle annonciatrice d’un nouveau trophée ? Le 22 mars 1975, les Stéphanois s’inclinaient 3 à 0 à Metz. Le 14 juin, victorieux de Lens (2-0) à domicile, ils décrochaient leur huitième titre de Champions de France. Certes, on en est pas encore là mais l’ampleur du score n’inquiète pas plus que ça Robert Herbin. « Nantes a fait un très bon match. Nos joueurs se sont bien battus et finalement, il ne m’ont pas déçu. Ils ne pouvaient soutenir un rythme intensif durant quatre-vingt-dix minutes. »

Pierre Garonnaire a déjà les pensées vers Eindhoven. Beau joueur, il préfère mettre l’accent sur la qualité du jeu à la nantaise : « Cette défaite n’est pas catastrophique et il n’y a rien à dire. Il faut reconnaître que José Arribas possède une bien belle équipe. »

L'Equipe, 22 mars 1976.
L’Equipe, 22 mars 1976.

Dans le vestiaire nantais, Henri Michel avait le sourire des bons jours. Outre la victoire incontestable des siens, il tient d’abord à féliciter ses adversaires pour leur match européen. « Ce qu’ils ont fait devant Kiev est formidable. Nous savions qu’ils étaient fatigués et nous n’avions pas à faire de sentiment. Cette victoire relance le championnat et nous redonne confiance. »

Patrick Revelli n'a pas marqué à Nantes. Yves Triantafilos et Patrice Rio sortent vainqueurs du sommet de la Division 1.
Patrick Revelli n’a pas marqué à Nantes. Yves Triantafilos et Patrice Rio sortent vainqueurs du sommet de la Division 1.

Yves Triantafilos, bien qu’heureux de la victoire des siens, comprend ce qu’ont pu ressentir ses anciens coéquipiers : « En deuxième mi-temps, explique-t-il, tout le monde semblait souffrir, à part Janvion qui m’a encore étonné. »

« Ce sont des hommes, pas des machines. Ils étaient morts. Je les voyais renoncer les uns après les autres. Cela ne m’a pas étonné. »

Yves Triantafilos

Cette victoire contre Saint-Etienne confirme les ambitions nantaises. La place de leader du FC Nantes donne des ailes à José Arribas : « Oui, nous pouvons jouer le titre, bien que je considère toujours le jeu de Saint-Etienne supérieur. Avec Yves, nous ne perdons plus sur notre terrain. S’il ne marque pas beaucoup de buts, il occupe constamment deux défenseurs, ce qui permet à Rampillon d’être plus libre. »

A Nantes, les héros de Kiev étaient fatigués. Ils ont une petite dizaine de jours pour se refaire la cerise et préparer dans les meilleures conditions la venue d’un autre gros poisson du gotha européen : le PSV Eindhoven.

Thierry CLEMENCEAU

 

Et pendant ce temps-là…

Les amateurs de Saint-Etienne n’ont pas fait meilleure figure que les professionnels. En déplacement à Vichy, les hommes de Robert Philippe, renforcés par Alain Merchadier mais orphelins de Lacuesta, Vesir et Schaer, ont été balayés 3 à 0. Cette défaite les relègue à la septième place au classement.

Johnny Rep, le Hollandais du FC Valence, est en observation à l’hôpital pour une dizaine de jours. Au cours de la rencontre de Liga qui a opposé Valence à Saragosse, il a reçu un coup au niveau des reins. L’auteur de la faute s’appelle… Bastos. Ca ne s’invente pas.

Salif Keita, l’ancienne panthère stéphanoise, pense à sa reconversion. A la fin de son contrat avec le FC Valence, il envisage sérieusement de revenir en France pour y effectuer des études. Parallèlement, il aimerait rejouer dans un club de 2e, voire de 3e Division. Mais « en aucun cas en première », assure-t-il.

Gérard Migeon, auteur de prouesses avec l’OM depuis plusieurs semaines, est sur le point de prolonger son contrat avec le club phocéen. Co-propriétaire avec Bernard Bosquier d’un magasin de vêtements dans le centre-ville de Marseille, il souhaite s’établir définitivement dans la cité phocéenne.

Depuis qu’Aimé Jacquet a repris en mains l’équipe première de l’OL, les progrès au classement sont notoires. Victorieux des Lillois de Georges Peyroche (3-0) en Championnat, les deux anciens Stéphanois se retrouveront pour une double confrontation en Coupe de France. Contrairement à son homologue lillois, Jacquet disposera de plus de temps pour préparer ces deux rencontres. Le derby prévu le 30 mars a été reporté pour que Saint-Etienne puisse préparer au mieux son match aller contre Eindhoven programmé le 2 avril. « Je regrette que le derby contre Saint-Etienne ait été ajournée, regrette l’entraîneur lyonnais. Ce report m’oblige à conclure des matches amicaux qui ne valent évidemment pas les rencontres officielles. »

Robert Pintenat, le joueur sochalien et futur avant-centre des Bleus, ne tarit pas d’éloges à l’encontre des joueurs stéphanois : « Après ce que Saint-Etienne vient de réaliser en Coupe d’Europe, il serait injuste que les Stéphanois ne soient pas de nouveau champions de France. Ce sont les meilleurs sans discussion possible. Ce qu’ils ont fait devant Kiev, aucune autre équipe française ne l’aurait fait. »

Th.C.

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Le Chaudron se visite aussi

Le Musée des Verts a fêté son deuxième anniversaire. Vous pouvez visiter le stade Geoffroy-Guichard. Le billet d’entrée combiné « stade Geoffroy-Guichard/Musée des Verts » permettra aux supporters de visiter le stade et le musée le même jour ou de visiter le musée ultérieurement, votre ticket étant valable un an à compter de la date d’achat.

Pendant une heure, les supporters des Verts pourront découvrir les coulisses du Chaudron au cours d’une visite guidée exceptionnelle: salle de presse, vestiaire de l’ASSE, couloir d’accès au terrain avec la mythique inscription « Ici, c’est le Chaudron », bord de pelouse, salon des Présidents… Ils pénétreront ainsi dans les lieux habituellement réservés aux joueurs, staffs, dirigeants et officiels.

Rénové dans le cadre des quatre rencontres de l’Euro 2016 programmées à Saint-Etienne, le stade Geoffroy-Guichard appartient à la communauté d’agglomération Saint-Etienne Métropole. Cette rénovation est l’œuvre des architectes de Chaix & Morel et Associés et une réalisation de la société Léon-Grosse. Geoffroy-Guichard est un stade mythique mais désormais également design et écologique.

TARIFS
Plein tarif :
15€.
Tarif réduit : 12€ (+ de 60 ans, -18 ans, étudiants, PMR, demandeurs d’emploi, CE de 20 personnes et plus, groupes de 10 personnes et plus).
Etablissements scolaires et clubs de football amateurs : 10€.
Pack « famille » (2 adultes + 2 enfants) : 42€.

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« C’est notre plus belle victoire… »

Quatorze anciens Verts se sont retrouvés au Musée des Verts pour le vernissage de l’exposition « 40 ans après… Retour sur l’épopée des Verts », visible jusqu’au 15 mai 2016. L’occasion pour les instigateurs de la meilleure saison de l’histoire du club de se remémorer les moments qui ont façonné l’une des plus belles pages du sport français. Retrouvez les anciens Verts sur :

ASSE.fr

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Plus de 113 000 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

http://www.museedesverts.fr

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Auteur : surlaroutedesverts

Comme Obélix, tout petit, je suis tombé dans le Chaudron. Et je n’en suis jamais sorti. Mon premier souvenir d’un match des Verts remonte au 17 mars 1976. Ce soir-là, Saint-Etienne s’offre une qualification pour les demi-finales de la plus prestigieuse des Coupes d’Europe face au Dynamo de Kiev. Quel plus beau cadeau, le jour de mes 9 ans, que de voir Dominique Rocheteau, Charentais maritime comme moi, faire exploser le stade Geoffroy-Guichard. A travers ce blog, je vous propose de revivre huit décennies de moments forts de l’histoire du club, d’anecdotes croustillantes, de personnages emblématiques et de  matches inoubliables dans une ambiance unique en France…

2 réflexions sur « Objectif Glasgow 76 – Nantes-Saint-Etienne : les héros étaient fatigués »

  1. c’était une époque magique où les stades étaient chaleureux, les joueurs plus attachés à leur club qu’à ler compte en banque
    bref, bel article

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