Objectif Glasgow 76 : Saint-Etienne-Rangers Glasgow : Les « Scots » sont arrivés (2/3)

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Mardi dernier : Saint-Etienne-Glasgow Rangers :
Quand Garo et Roby jouent les espions (1/3)

Jock Wallace est venu à Saint-Etienne. Il a vu et est reparti à Glasgow. Les Stéphanois n’ont pas gagné contre Nantes (2-2) mais le manager écossais sait à quoi s’attendre ce mercredi 22 octobre à l’occasion du match aller de la Coupe des Clubs Champions. Pour la troisième fois consécutive à domicile, les Stéphanois viennent de concéder le partage des points. L’inquiétude commence à poindre du coté du stade Geoffroy-Guichard… Avant de recevoir les Glasgow Rangers, une victoire aurait rassuré. Aujourd’hui, c’est le doute qui s’est installé.

Dès le samedi matin, Jock Wallace, certainement rassuré par ce qu’il a observé, a regagné son Ecosse natale. L’après-midi, il prenait place sur son banc de touche. A domicile, contre Motherwell, ses certitudes se sont quelque peu estompées. Après la défaite à Avyr (0-3), il a assisté impuissant à la deuxième défaite des siens contre Motherwell (1-2). La mine renfrognée, il n’a fait que très peu de commentaires sur ce nouveau revers, ni cherché la moindre excuse. Est-ce à dire que cette défaite est une bonne chose pour les Stéphanois ? Pas sûr.

« Un Rangers blessé dans son amour-propre n’est jamais aussi dangereux. »

Sandy Jardine

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Bernard Père et Thierry Roland aux commentaires

A Saint-Etienne, la retransmission télévisée sur TF1 du match de Championnat contre Nice a fait couler beaucoup d’encre. Pour cette affiche au sommet de Division 1, le club stéphanois attendait pas moins de 30 000 spectateurs. Au final, ils n’étaient que 12 000 à franchir les portes du stade. Comme résultat,  le club a été sanctionné doublement : la perte d’une bonne recette-guichets (quelques 300 000 francs) et 20 000 supporters en moins pour les pousser à la victoire. Un mois après, jour pour jour, les Verts occupent à nouveau l’écran. Dans un premier temps, le président Rocher, échaudé, était réticent pour renouveler l’expérience. Finalement, un accord a été trouvé le samedi 19 octobre. Le président stéphanois a fini par se rendre à l’évidence : un match de Coupe d’Europe à Saint-Etienne représente une telle exposition médiatique qu’une non-diffusion du match à la télévision aurait été incomprise des Français. C’est la chaîne d’Antenne 2 qui retransmettra intégralement et en direct cette rencontre européenne.

L'Equipe, 20 octobre 1975.
L’Equipe, 20 octobre 1975.

A Saint-Etienne, le mot « victoire » ne prévaut que pour les matches de Coupe d’Europe. Les Verts n’ont plus gagné en Championnat depuis le 27 août. Certes, il y a eu la trêve internationale mais les hommes d’Herbin restent sur six matches de Division 1 sans victoire. L’entraîneur stéphanois en est presqu’à penser que Glasgow arrive à point nommé pour relancer son équipe. Une victoire contre les Ecossais serait la bienvenue d’autant que se profile le derby trois jours après. « Chaque chose en son temps, dit Roger Rocher. N’avons-nous pas pour le moment d’autres chats à fouetter que de songer au Championnat ? Contre Glasgow, nous n’aurons pas le choix. Il faudra que ce soit l’enfer ici pendant 90 minutes. Il est, d’autre part, indispensable que nous fassions très rapidement la différence au score mais je ne suis pas en mesure de vous préciser quelle devra être l’ampleur de cette différence. »

« A l’école, j’étais très bon en dictée, mais j’étais en revanche un piètre calculateur. Je sais seulement que mes hommes sont physiquement prêts. »

Roger Rocher

A l’issue de l’entraînement du dimanche 20 octobre, Jean-Michel Larqué a retrouvé le sourire. Son genou récurrent ne lui pose plus de problème et sa participation au match du lendemain semble acquise. Même son de cloche pour Hervé Revelli. Absent et remplacé par Jean-Marc Schaer contre Nantes, l’avant-centre stéphanois a lui aussi rassuré son entraîneur : « Ca va bien. J’ai préféré me soigner convenablement et ne pas prendre de risques avant la Coupe d’Europe. » Le forfait de l’un de ces deux hommes à la technique certaine serait assurément un coup dur pour Saint-Etienne.

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A l’exception de Christian Sarramagna et Guy Modeste, tous les Stéphanois sont sur le pont.

Ce lundi matin 21 octobre, à Saint-Etienne, le ciel est gris. Il en faut pourtant plus pour décourager les supporters venus nombreux encourager leurs protégés à deux jours du choc européen.

A l’exception de Christian Sarramagna (genou) et Guy Modeste (cheville), tous les joueurs sont présents. Herbin, droit dans son survêtement vert au milieu de son groupe, administre à ses joueurs un entraînement soutenu. Les organismes sont soumis à rude épreuve. Il ne loupe rien des exercices à base de courses ponctuées par de petits matches.

« A ce moment capital de notre avenir, il n’est point question de musarder. »

Robert Herbin

La Une de L'Equipe, 21 octobre 1975.
La Une de L’Equipe, 21 octobre 1975.

Hervé Revelli toujours incertain

Pour Pierre Repellini, l’odeur du parfum européen s’éloigne. Déjà secoué dans un choc bien involontaire avec Jacques Santini avant la rencontre contre Nantes, le défenseur stéphanois connaît à nouveau quelques ennuis malencontreux. Un nouveau choc a de nouveau fait craquer les points de suture. La mine des mauvais jours, il déclare : « Il n’est pas question de compter sur moi ». Alors que tout semblait pour le mieux, Hervé Revelli, lui aussi, grimace. La tendinite à la cheville droite qui le faisait souffrir s’est soudainement réveillée. Moins formel que son coéquipier, il attendra le mercredi matin pour savoir s’il pourra tenir sa place ou la céder à Jean-Marc Schaer.

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Les « Scots » sont arrivés

Lundi à 16 heures, les Ecossais débarquent à Saint-Etienne. Derek Parlane descend le premier de l’avion suivi des seize autres joueurs, du manager William Waddell, de l’entraîneur Jock Wallace et de onze autres dirigeants. La délégation écossaise s’engouffre dans le bus qui les attend à l’aéroport et se dirige vers l’hôtel Astoria à Saint-Etienne. Outre leurs tenues de match et divers effets personnels, les joueurs écossais n’ont pas oublié d’enfouir au fond de leur sac quelques bouteilles de whisky. Les Rangers espèrent arroser la victoire en terre stéphanoise. Et s’ils perdent, ils boiront en pensant à leur future qualification au match retour.

A peine quelques minutes après avoir pris possession de leur chambre qu’ils se lancent à la découverte du centre-ville à pied. Comme les joueurs du Celtic en 1968 -défaits au stade Geoffroy-Guichard (0-2)-, ils ont prévu de finir la soirée dans les pubs stéphanois, quel que soit le résultat du match. Question de culture.

FranceFootball, 21 octobre 1975.
FranceFootball, 21 octobre 1975.

Edouard Wallace est de retour

Dans cette délégation, un visage n’est pas inconnu de Pierre Garonnaire : Edouard Wallace. L’homme qui l’avait guidé lors de son voyage à Glasgow a fait le déplacement avec les Rangers.  Blessé lors de la seconde guerre mondiale alors qu’il combattait avec la marine britannique, cet ancien combattant va servir d’interprète aux Rangers. Originaire de La Terrasse, un quartier nord de de la ville, il conseille aux Stéphanois de s’imposer avec un minimum de trois buts d’écart s’ils ne veulent pas connaître l’enfer lors du match retour à Ibrox Park. Comme le rappelle si bien l’inamovible défenseur Jardine :

« Un Rangers ne part jamais battu d’avance. »

Sandy Jardine

L'Equipe, 22 octobre 1975.
L’Equipe, 22 octobre 1975.

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Robert Herbin ne ménage pas son gardien yougoslave à l’entraînement. Pour conserver des chances de qualification au match retour, Ivan Curkovic devra être au sommet de sa forme.

Ce mardi 22 octobre, le soleil est revenu à Saint-Etienne. Un seul entraînement est au menu. Devant une bonne centaine de supporters -dont quelques Ecossais- Ivan Curkovic est mis à rude épreuve. Herbin le prépare au défi physique que lui promettent les Ecossais. Le Yougoslave a droit à des tirs à bout portant, des centres à répétition. S’il ne veut pas connaître l’enfer, le « grand » Ivan devra être au sommet de ses possibilités, surtout dans les airs. Pour cela, il pourra compter sur son défenseur argentin, Oswaldo Piazza. Avec une pointe d’humour, ce grand supporter de Villeurbanne déclare :

« Je me suis préparé au match contre Glasgow en suivant à la télévision la retransmission de plusieurs rencontres de basket. »

Oswaldo Piazza

Hervé Revelli est le joueur le plus épié. Chacun de ses mouvements est observé comme par crainte d’une blessure. Pendant vingt minutes, sur des centres d’Oswaldo Piazza, il fait admirer sa technique en reprenant tous les ballons qui se présentent à lui. L’homme aux vingt-deux matches européens -un record en France- excelle toujours dans ce genre d’exercice.

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Dominique Rocheteau, Jean-Michel Larqué, Hervé et Patrick Revelli, la ligne offensive stéphanoise est prête à défier les Glasgow Rangers.

Hervé Revelli compte sur Schaer

A la fin de la séance, le buteur de l’ASSE s’approche de son coach et lui susurre à l’oreille qu’il est « OK » pour Glasgow. Un soulagement pour Herbin et son équipe. « Je n’ai plus ressenti de douleur au tendon, dit-il. Alors qu’hier, j’avais encore mal. Il faut dire que je me suis soigné comme un possédé depuis trois jours… Ce matin, j’ai fait de courts sprints et frappé dans la balle sans gêne apparente. Si ça coince au cours du match, un remplaçant tout désigné me tendra les bras : Jean-Marc Schaer et je suis sûr qu’il saura se montrer à la hauteur de la situation. »

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Hervé Revelli est apte pour jouer contre les Glasgow Rangers. Mais en cas de blessure, il sait qu’il peut compter sur Jean-Marc Schaer, son jeune remplaçant.

Avec cette bonne nouvelle, l’entraîneur stéphanois va pouvoir aligner une équipe de niveau européen. La ligne d’attaque composée de l’expérimenté Hervé Revelli, du tranchant Rocheteau et d’un Patrick Revelli totalement retrouvé, n’a rien à envier aux autres formations européennes. Le cadet des Revelli, très heureux de ce qui lui arrive, n’explique pas son regain de forme : « Vous savez, la forme c’est comme la méforme : l’une et l’autre vous tombent dessus puis vous laissent en rade, on ne sait comment ni quand ni pourquoi… »

Dominique Rocheteau s’apprête à disputer son deuxième match européen de sa jeune carrière. A 20 ans, le jeune Charentais, toujours aussi lucide est prêt à défier les Ecossais : « Contre Nantes, nous avons fait en qualité de jeu notre meilleur match de la saison. Vous savez, il suffit que la réussite revienne et tout peut changer. »

Séance vidéo au menu

L’après-midi, au siège du club, les joueurs ont visionné la défaite des Rangers à Ayr (0-3). Robert Herbin ne s’est pas attardé sur la qualité très moyenne des Ecossais. « Il n’est pas question de tergiverser, déclare-t-il. Mon équipe se montre toujours dans les grandes occasions et elle sait passer la surmultipliée au bon moment. Il n’y a pas de raison pour que tradition ne soit pas respectée. »

 

L'Equipe, 22 octobre 1975.
L’Equipe, 22 octobre 1975.

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Le rôle du public

Ce mercredi, le rôle du public du stade Geoffroy-Guichard risque d’être capital, tout du moins déterminant. Au fil des jours, la fièvre verte s’est emparée de la ville. On ne parle que de ce match dans les rues d’ordinaire si calmes. Contre les Rangers, ils seront près de 40 000 à soutenir leurs « Verts », à les pousser à se transcender pour les mener jusqu’au but adverse et faire trembler les filets de Mc Cloy. Mais attention, cette passion débordante peut aussi avoir des effets pervers. Les joueurs stéphanois ne devront pas se laisser griser par cette ambiance des grands soirs. S’ils ne veulent pas partir de Saint-Etienne la peur au ventre et connaître l’enfer d’Ibrox Park, ils devront réciter leur football et inscrire au moins deux buts sans en encaisser un.

En 1968, le Saint-Etienne des Carnus, Mitoraj, Fefeu, Jacquet et autre Bereta, bien que vainqueur 2 à 0 du Celtic au match aller, n’avait pas résisté à l’enfer vert des Ecossais. Au retour, le club stéphanois avait été balayé 4 à 0. Les temps ont changé et Saint-Etienne a acquis aujourd’hui l’expérience nécessaire pour éviter ce genre de mésaventure. Robert Herbin qui était de l’expédition cette année-là, n’aura pas manqué de leur rappeler.

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Après la séance d’entraînement des Stéphanois, les Rangers ont occupé à leur tour le terrain d’honneur du stade Geoffroy-Guichard pour un entraînement qui a duré une bonne quarantaine de minutes.

Mardi matin, Jock Wallace et ses joueurs investissent le stade Geoffroy-Guichard. Si l’entraîneur écossais connaît déjà les lieux, pour ses joueurs, en revanche, c’est une réelle découverte. Une fois le tour du propriétaire effectué, pour eux, les choses sérieuses peuvent débuter. C’est dans une ambiance bon enfant que durant quarante-cinq minutes ils enchaînent échauffement, footing, tirs aux but et petit match.

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Colin Stein, Tommy Mac Lean et Derek Parlane : les trois fers de lance de l’équipe écosaise, posent sur la pelouse du stade Geoffroy-Guichard.

Wallace annonce une équipe défensive

Jock Wallace n’est pas un homme très bavard. Est-ce la défaite contre Motherwell qui l’a contrarié ? Toujours est-il qu’il est peu disert sur l’équipe qui va affronter Saint-Etienne. Ce mardi, en conférence de presse, il s’est contenté de donner les onze joueurs qui débuteront la rencontre. « Je m’attends ce soir à une domination des Champions de France, dit l’entraîneur écossais. Nous jouerons essentiellement en contres et ne croyez surtout pas que nous ne visons que le 0-0 ici. » Afin de préserver leurs chances pour le match retour, il a formé une équipe très défensive (5-3-2) en plaçant son capitaine John Greig devant les deux arrières centraux. Le seul changement par rapport au week-end précédent est le remplacement de McKean par le jeune Alex Miller. Ce dernier aura pour mission de couper les élans de Dominique Rocheteau.

FranceFootball, 21 octobre 1975.
FranceFootball, 21 octobre 1975.

« Saint-Etienne incite au respect »

Sandy Jardine, l’arrière droit des Rangers et de l’équipe nationale écossaise, a pas mal roulé sa bosse. Contrairement à son entraîneur, il n’hésite pas à livrer son sentiment sur son adversaire : « Je ne connais pas très bien le football français. Mais Saint-Etienne incite au respect. On n’arrive pas en demi-finale de la Coupe d’Europe 1974-75 comme par enchantement, par miracle. Je suis donc particulièrement méfiant. Je sais que les Français sont des joueurs malins, astucieux, bons techniciens sur le plan individuel. Vous ne reconnaitrez pas les Rangers au stade Geoffroy-Guichard. Nous y serons transcendés et nous nous accrocherons au maximum. »

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Peter Mc Cloy, le gardien des Rangers, n’espère pas connaître la même mésaventure qu’en Championnat contre Motherwell (1-2).

« Avant de connaître l’enfer écossais, il faut que demain soir, le stade Geoffroy-Guichard soit l’enfer stéphanois. »

Roger Rocher

 

L'Equipe, 22 octobre 1975.
L’Equipe, 22 octobre 1975.
L'Equipe, 22 octobre 1975.
L’Equipe, 22 octobre 1975.

Thierry CLEMENCEAU

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Dès demain :
Saint-Etienne-Glasgow Rangers : Bathenay entretien l’espoir (3/3)

 

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« C’est notre plus belle victoire… »

Quatorze anciens Verts se sont retrouvés au Musée des Verts pour le vernissage de l’exposition « 40 ans après… Retour sur l’épopée des Verts », visible jusqu’au 15 mai 2016. L’occasion pour les instigateurs de la meilleure saison de l’histoire du club de se remémorer les moments qui ont façonné l’une des plus belles pages du sport français. Retrouvez les anciens Verts sur :

ASSE.fr

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Plus de 99 800 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

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Auteur : surlaroutedesverts

Comme Obélix, tout petit, je suis tombé dans le Chaudron. Et je n’en suis jamais sorti. Mon premier souvenir d’un match des Verts remonte au 17 mars 1976. Ce soir-là, Saint-Etienne s’offre une qualification pour les demi-finales de la plus prestigieuse des Coupes d’Europe face au Dynamo de Kiev. Quel plus beau cadeau, le jour de mes 9 ans, que de voir Dominique Rocheteau, Charentais maritime comme moi, faire exploser le stade Geoffroy-Guichard. A travers ce blog, je vous propose de revivre huit décennies de moments forts de l’histoire du club, d’anecdotes croustillantes, de personnages emblématiques et de  matches inoubliables dans une ambiance unique en France…

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