Objectif Glasgow 76 : Yves Triantafilos : entre exploits et regrets

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La semaine dernière :
RDA-France : Janvion et Bathenay, les nouveaux Bleus 

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« Yves Triantafilos est fait pour nous rendre les plus grands services, comme il l’a fait d’ailleurs devant Split ou Chorzów, où il nous a sauvés à lui tout seul. » Ces paroles de Robert Herbin appartiennent désormais au passé. Depuis le mercredi 24 septembre, le désormais ex-joueur de Saint-Etienne appartient au FC Nantes. Depuis quelques jours, son transfert était dans l’air, il est aujourd’hui officiel. Pour le joueur originaire de Montbrison, c’est la deuxième fois qu’il quitte l’AS Saint-Etienne. Retour le parcours d’un joueur atypique.

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Yves Triantafilos, à l’entraînement en juillet 1975.

 

 

Né le 27 octobre 1948 à Montbrison dans la Loire, d’un père hellène, Yves Triantafilos fait partie d’une famille de footballeurs. Jean-Pierre, son aîné, a porté les couleurs de l’AS Saint-Etienne comme défenseur avant de faire les beaux jours de Cannes durant une saison puis ceux de Thiers, club de CFA entraîné par René Gardien. « Nous sommes une famille de footballeurs, dit « Tintin ». Mon père qui était entraîneur m’apprenait à frapper dans le ballon à la maison quand j’avais cinq ans. Comme c’était dans la cuisine, ma mère n’était pas tellement contente… » Ses parents tiennent une épicerie à Sail-sous-Couzan, tout près de la boucherie de la famille Jacquet. « Mon frère jouait au foot avec « Mémé » (Jacquet) sur le trottoir » se souvient Yves.

Le petit Triantafilos cire les bancs de l’école comme tous les gamins de son âge mais il préfère taper dans un ballon. « J’ai passé mon CAP d’ajusteur à dix-sept ans. J’étais bon pour l’usine. Je suis devenu joueur de football sans rien oublier. »

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 Pourquoi « Tintin » ?

« Ca vient de mes parents. Le surnom de « Tintin » vient en fait de mon père qui s’appelait Constantin. Tout est parti de là en fait. Ensuite, on a appelé ma mère « la mère Tintin ». Je n’aime pas ce surnom mais il faut s’y faire. »

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En 1956, Saint-Etienne donnait un coup de jeune à son équipe et lançait dans le grand bain une jeune génération d’espoirs stéphanois. Jean Snella se séparait de Jacques Foix et Koczur Ferry pour promouvoir les frères Tylinski, Peyroche ou encore Ferrier.

Près de dix ans plus tard, Snella souhaite rajeunir son effectif et débuter un nouveau cycle. Pour cela, il se sépare des chevronnés René Ferrier et André Guy pour donner leur chance aux jeunes Barek, Hervé Revelli, Jacquet, Bereta, Polny et… Triantafilos. 

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René Domingo et Jean Snella présentent la génération 1966. Accroupis de g. à d. : Yves Triantafilos, Georges Polny, Fernand Barek, Aimé Jacquet, Hervé Revelli et Georges Bereta.

Débuts avec les professionnels à Rouen

Le 12 février 1967, l’équipe Juniors de l’AS Saint-Etienne rencontre l’AS Gironde à Béziers en coupe Gambardella. Les jeunes Stéphanois se qualifient en s’imposant 5 à 1. Yves Triantafilos inscrit trois des cinq buts de son équipe. Quelques jours plus tard, il marque à nouveau avec l’équipe de France Juniors contre le Congo à Paris. Il n’en faut pas plus à Jean Snella pour lui donner sa chance le week-end suivant. Le jeune stéphanois est en pleine forme et piaffe d’impatience de faire ses débuts avec les professionnels.

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Frédéric N’Doumbé blessé et André Fefeu incertains, Snella le convoque pour le déplacement à Rouen en Championnat.  Jeune joueur athlétique (1m78, 75 kg), il possède un excellent jeu de tête et une frappe de balle d’une violence invraisemblable qui n’est pas sans rappeler celle de Bernard Bosquier. Son style de baroudeur fait parfois penser à un autre avant-centre sorti de la pépinière stéphanoise : Hervé Revelli. René Domingo qui le connaît bien, l’a vu débuter. Il l’a eu sous sa coupe lorsqu’il évoluait en Juniors et en amateurs. Pour lui, « il doit acquérir plus de constance dans l’effort, mais ses qualités sont grandes. Je pense que dans un an, il sera mûr pour le football professionnel. »

A Rouen, les Stéphanois s’imposent 1 à 0 grâce à un but d’Aimé Jacquet (85e).

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Rouen-Saint-Etienne : 0-1 (0-0)

Spectateurs : 8 192. Recette : 49 937 F. Arbitre: M. Suszeck. But.- Jacquet (85e).
Rouen : Duchene – Largouet, Sénéchal, Morel, Poulain – Druda, Gosselin – Lekkak, Dortomb, Beck, Dos Santos. Entr.: Vernier.
Saint-Etienne : Bernard – Mitoraj, Sbaiz, Herbin, Polny – Jacquet, Mekloufi – Fefeu, Triantafilos, Revelli, Bereta. Entr.: Snella.

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Au stade Robert-Diochon, il disputera  son seul match officiel avec l’équipe professionnelle. Cela lui suffit cependant pour inscrire une première ligne à son palmarès : champion de France 1967.

Avec les Juniors à Istanbul

En mai 1967, il dispute le Tournoi de l’Union Européenne à Istanbul avec l’équipe de France Juniors. Dans la capitale turque, « Tintin » est en quelque sorte le régional de l’étape. Son père est natif d’Istanbul et son oncle et sa tante y habitent toujours. Les Juniors tricolores se classent 4e et Triantafilos inscrit 5 buts. Il est désigné meilleur joueur français. La presse turque l’encense et Radio Istanbul lance même qu’il aurait sa place dans l’équipe de Turquie. Tous les feux semblent au vert pour lui.

Le Bataillon de Joinville

En juin 1967, Albert Batteux remplace Jean Snella. Le passage de témoins entre les deux techniciens freine quelque peu la progression du Stéphanois. Albert Batteux ne semble pas aussi convaincu des qualités de son jeune joueur que ne l’était son prédécesseur.

Il pense alors devancer l’appel et rejoindre le Bataillon de Joinville pour y effectuer son service militaire. Finalement, c’est en novembre de cette même année qu’il incorpore le B.J. Il y côtoie des joueurs comme Molitor, Grava ou Goueffic.

Il revient à Saint-Etienne plein d’espoirs mais rapidement, il ne sent pas une grande confiance de la part des dirigeants stéphanois. Il demande alors à être prêté à l’équipe de l’Armée française alors pensionnaire de la Division 2.

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Photo : Football Magazine.

Aux Jeux Olympiques de Mexico

En octobre 1968, il participe avec l’équipe de France aux Jeux Olympiques de Mexico. Lors des matches de préparation, il se démarque en inscrivant plusieurs but dont deux contre l’Ethiopie (5-1). Lors de la cérémonie d’ouverture, il est victime d’une insolation puis d’une grippe. Durant ces Olympiades, il est le seul joueur français à ne disputer aucun match. Il profite malgré tout des moments magiques que peuvent procurer un tel évènement pour assister aux exploits de Colette Besson, Bob Beamon ou encore Dick Fosbury.

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Une de Football Magazine – Novembre 1968.

Direction l’USG Boulogne

A l’été 1969, il revient à la case départ mais très vite, il comprend que sa progression ne passera pas forcément par Saint-Etienne. Il se met en quête d’un club et quitte son club formateur pour l’US Boulogne et les durs combats de la Division 2. Il y signe un contrat de quatre ans pour 5 millions d’anciens francs. Célibataire, il habite un studio dans un petit village au bord de la côte, à l’ouest de Boulogne.

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L’Equipe, 21 juin 1969.

« Pour réussir, il faut jouer. Et à Saint-Etienne, je n’ai joué qu’un seul match en équipe professionnelle : à Rouen. J’étais contracté et ça n’avait pas très bien marché malgré l’opinion optimiste de l’entraîneur. J’ai donc continué à jouer en équipe amateurs. J’avais l’impression de perdre mon temps, de ne plus progresser. »

Le 15 août 1969, alors que Saint-Etienne se fait surprendre par le club brésilien de Curitiba (0-1) lors du traditionnel match amical à Vichy, Yves Triantafilos débute officiellement sous ses nouvelles couleurs.

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L’Equipe, 16 août 1969.

Pas toujours reconnu à sa juste valeur

Pour sa première saison à l’USGB, il marque 14 buts mais ne peut empêcher son équipe de descendre à l’étage inférieur. La saison suivante, une douloureuse blessure musculaire l’empêche de s’entraîner la semaine mais solide comme un « roc », il participe quand même aux matches du week-end, même sur une jambe. Il profite d’une mini-trêve pour aller consulter un spécialiste. « J’ai fini par m’arrêter quinze jours en profitant d’une coupure du championnat. J’ai consulté un professeur à Lille qui m’a dit que je frappais trop fort pour ma musculature. » Mais il en faut plus pour déstabiliser cette force de la nature : « Je suis un faux placide. Je bouillonne intérieurement. Je suis capable de m’emporter contre le public ou contre un adversaire, surtout quand la réussite n’est pas de mon côté. » Il conclut sa deuxième saison dans le Nord en inscrivant vingt buts. Malgré cela, le public local, un peu trop exigeant, ne lui est pas toujours reconnaissant.

Un buteur qui coûte cher

Sa réussite à Boulogne ne laisse pas indifférent les recruteurs français et européens. Lille, Lyon, quelques clubs belges s’intéressent à cette denrée rare qu’est un chasseur de buts. Daniel Lengrand, son entraîneur à l’USGB, n’entend pas se séparer de sa perle rare. « Un avant-centre se juge sur le nombre de buts qu’il marque dans une saison. Tintin vaudra Guy le jour où il ne se découragera plus et sera convaincu que sa minute viendra au cours d’un match s’il se bat sans relâche », dit-il pour essayer de retenir une saison supplémentaire son buteur. Depuis deux ans, sa cote ne cesser de grimper. Son départ semble donc inéluctable. Après avoir réclamé 8 millions à Nancy, Boulogne en réclame plus de 30 en cette fin juin pour laisser partir son buteur.

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L’US Boulogne : Debout; Langrand (ent.), Vasseur, Legrand, Navarro, Baudet, Becart, Bolton, Micheline, Lawniczak. Accroupis : Natouri, Muller, Mazuy, Triantafilos, Francisco, Kocik, Drouet.

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 Une passion pour les voitures

Yves Triantafilos est un passionné de voitures. Il aime la vitesse et les courses. A Boulogne, on le croise souvent au volant d’une Gordini. Un jour, au cours de la reconnaissance du rallye du Touquet, il manque un virage à 90 degrés et se retrouve dans un jardin potager. Pendant que le Boulonnais d’adoption constate quelques égratignures et hématomes, sa voiture commence à prendre feu. Il s’en sort avec les mains brûlées et une voiture détruite. « J’avais risqué un très grave accident et failli ne plus jamais Jouer au football. dit-il. Comme j’aime le football plus encore que les courses automobiles, j’ai fait une croix sur les voitures de sport : j’ai acheté une DS d’occasion et je roule en père tranquille. »

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Retour sur la terre de ses ancêtres

A l’été 1971, l’Olympiakos le Pirée, club le plus populaire de Grèce, souhaite construire une grande équipe avec l’apport de joueurs renommés d’origine grecque jouant à l’étranger. Le club a déjà recruté le demi centre Persidis (Vienne) et l’ailier gauche international Espoirs hongrois Papadimitriou. Ces deux joueurs coûtent 30 millions d’anciens francs chacun. Mais le club piréen ne s’arrête pas là et fait les yeux doux à deux joueurs opérant en France. Romain Arghirudis, l’avant-centre de l’OGC Nice et… Yves Triantafilos. Pour ces deux joueurs, ce serait un retour sur les terres de leurs ancêtres.

L'Equipe, 7 juillet 1971.
L’Equipe, 7 juillet 1971.

Pour quitter la Côte d’Opale pour les rues bouillantes du Pirée, Triantafilos a dû racheter les deux années de contrat qu’il lui restait à effectuer, comme le précise M. Depreux, le président de l’USG Boulogne. « Triantafilos ira effectivement à Olympiakos la saison prochaine. Mais nous n’avons pas touché un sou du transfert puisqu’il venait de racheter son contrat à Boulogne pour la somme de 2 500 francs. »

Photo : Football Magazine.
Olympiakos Le Pirée (Photo : Football Magazine, juillet 1972).

« Tout est franc »

Il dispute son premier match amical début août contre l’équipe anglaise de Stoke City. Devant 30 000 spectateurs, il se permet le luxe de tromper d’un tir à la limite de la surface de réparation l’immense gardien international d’Angleterre, Gordon Banks. L’Olympiakos s’incline 2 à 1 mais le joueur reçoit une ovation monstre à sa sortie du terrain. Après quelques mois en Grèce, il fait un premier constat : « Les matches là-bas, sont durs. C’est la règle, pas de sournoiserie. Tout est franc. En France, c’est différent d’un match à l’autre. Le public ne réagit pas de la même manière. Les joueurs doivent apprendre à ne pas se laisser influencer. »

FranceFootball, 25 juillet 1972.
FranceFootball, 25 juillet 1972.

« Tintin » comme un poisson dans l’eau

Sous le maillot rouge et blanc rayé verticalement, Triantafilos et Arghirudis sont adulés par les supporters locaux. Leurs noms sont même évoqués pour une intégration en équipe nationale grecque. Un livre intitulé « Yves, Yves » voit le jour en librairie. A Athènes, il rencontre sa future épouse et acquiert un magasin de vêtements « pour rester près des gens », dit-il.

Garonnaire à Athènes

La réussite du gamin de Montbrison est suivie de près à Saint-Etienne. En décembre 1973, son nom est évoqué au sein du staff stéphanois pour un retour au bercail. A l’intersaison 1972, Robert Herbin a remplacé Albert Batteux. Il souhaite s’appuyer sur les jeunes recrutés par Pierre Garonnaire pour élever le club au plus haut rang européen. Pour encadrer cette jeunesse débordante d’enthousiasme mais qui a les défauts de ses qualités, Herbin envisage de les faire progresser avec des joueurs confirmés. Le retour d’Hervé Revelli est un premier signe fort. Celui de Triantafilos s’inscrirait également dans cette ligne tracée par l’entraîneur stéphanois.

Pierre Garonnaire effectue un voyage éclair à Athènes pour convaincre l’ex-pensionnaire de la maison verte de revenir à ses premières amours. Triantafilos ne ferme pas la porte mais l’Olympiakos refuse catégoriquement de le laisser partir.

Début juin 1973, l’Olympiakos réalise le doublé et remporte le titre devant le PAOK et le Panathinaikos. Cela faisait sept ans que le club du Pirée attendait ce titre. Au cours de cette saison, le nouveau champion de Grèce ne connaît qu’une seule fois la défaite (27 victoires pour 6 nuls). L’ancien Stéphanois inscrit 16 buts.

Saint-Etienne ne lâche pas l’affaire

Dans le courant du mois de juin, Saint-Etienne revient une nouvelle fois à la charge pour récupérer celui qu’il avait formé dans les années 60. Cette fois, l’affaire semble bien engagée. Quelques jours avant la finale de la Coupe de France, Pierre Garonnaire, accompagné de M. Paret, s’envole direction Athènes. Au terme d’un voyage de trois jours, les deux envoyés spéciaux de l’ASSE reviennent à Saint-Etienne avec un accord écrit du joueur et du président de l’Olympiakos. « Ce ne fut pas une petite affaire, disent en chœur les deux hommes, car les supporters d’Olympiakos étaient opposés à ce départ. »

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Yves Triantafilos, buteur adulé en Grèce (Photo : Football Magazine, juillet 1972).

Pour appuyer leurs propos, Charles Paret est revenu avec les journaux de la capitale grecque qui ont fait leurs gros titres sur un éventuel départ de leur buteur. Dans les rues d’Athènes, Pierre Garonnaire est pris à partie à plusieurs reprises par les supporters qui n’apprécient guère sa présence. Triantafilos doit intervenir pour que le recruteur des Verts regagne la France sans la moindre égratignure.

« Tintin » après un exil de cinq années, va retrouver le stade Geoffroy-Guichard. Cette fois, c’est sûr. La nouvelle est rendue officielle le dimanche 1er juillet. Ce retour s’accompagne de celui d’Hervé Revelli, parti depuis deux ans à l’OGC Nice.

L'Equipe, 4 juillet 1973.
L’Equipe, 4 juillet 1973.

Retour à Saint-Etienne ?

« C’est à ma demande, dit fièrement Robert Herbin, qu’il a été engagé. Il avait formulé le désir de revenir à Saint-Etienne, lorsqu’il a retrouvé à Athènes Georges Bereta et Jean-Michel Larqué venus avec l’équipe de France jouer en Grèce. Je pense qu’il apportera plus de poids à notre ligne d’avants qui en a manqué cette saison. Il se complètera bien avec les frères Revelli. »

L'Equipe, 2 juillet 1973.
L’Equipe, 2 juillet 1973.

Saint-Etienne attend celui que Robert Philippe avait formé puis laissé partir et qui revient par la grande porte. Herbin a déjà son dispositif tactique en tête. Il souhaite confier à Hervé Revelli le numéro 10 au côté de Jean-Michel Larqué. Le souci, c’est que fin juillet, Triantafilos n’est toujours pas revenu à Saint-Etienne.

L'Equipe, 10 juillet 1973.
L’Equipe, 10 juillet 1973.

Inquiet de l’absence prolongée de sa future recrue, Pierre Garonnaire effectue trois-aller-retours à Athènes. Il veut savoir où est passé le joueur qui aurait dû rejoindre ses partenaires depuis le 7 juillet. Pendant que le recruteur stéphanois se trouvait à Athènes, Triantafilos était lui à Sail-Sous-Couzan où il venait de passer trois jours.

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L’Equipe, 21 juillet 1973.

La colère de Roger Rocher

Les dirigeants stéphanois, à commencer par Roger Rocher, goûtent modérément la plaisanterie. « Je ne comprends pas la drôle d’attitude de Triantafilos, peste le président stéphanois. C’est lui qui avait exprimé le désir de revenir jouer à Saint-Etienne auprès de Larqué et Bereta. Nous avons pris contact. Il nous a précisé ses conditions par lettre et lorsque nous les avons acceptées, il est venu à Genève signer le contrat le liant pour cinq ans à notre club. Il nous avait même demandé quelques jours de vacances supplémentaires et devait rejoindre nos joueurs au stade Geoffroy-Guichard le 7 juillet. Il est probable qu’il a eu depuis quelques difficultés pour quitter la Grèce mais il aurait dû venir me les exposer, je les aurais peut-être comprises. Il est possible qu’il restera à l’Olympiakos bien que nous ayons demandé sa lettre de sortie à la Fédération de Grèce et envoyé la photocopie du contrat qu’il a signé pour notre club. »

L'Equipe, 25 juillet 1973.
L’Equipe, 25 juillet 1973.

Le temps des regrets ?

En novembre, le club grec, à son tour, perd la trace de son attaquant. Ce dernier regretterait-il déjà de ne pas avoir rejoint les Verts à l’intersaison ? Alerté de ce nouvel épisode, Pierre Garonnaire se dit que cette fois, s’il retrouvait son joueur, il allait peut-être le convaincre définitivement de revenir à Saint-Etienne. La présence de « Tintin » aux avant-postes de la formation stéphanoise constituerait un sérieux renfort pour la deuxième partie de saison. En vain.

(Photo : Football Magazine, juillet 1972).
(Photo : Football Magazine, juillet 1972).

104 buts en trois ans

De retour à l’Olympiakos, Triantafilos retrouve ses partenaires en même temps que le chemin des filets. Au terme de sa troisème saison en Grèce, il inscrit 24 buts en autant de matches disputés. Après avoir fait la course en tête une bonne partie de la saison, il termine deuxième meilleur buteur derrière Antoniadis.

A l’intersaison 1974-75, Saint-Etienne souhaite renforcer son attaque. Pas rancunier, Roger Rocher revient à la charge pour tenter de récupérer celui que son club a formé. Mais échaudé par les tergiversations du joueur l’été précédent, les dirigeants stéphanois engagent également des pourparlers avec le Zaïrois Kakoko, au cas où… Inutile. La France lui manque et Yves Triantafilos est bien décidé à regagner Saint-Etienne.

« Là-bas, je suis devenu un véritable joueur de football »

Avant de quitter l’Olympiakos, il remporte un nouveau titre de champion de Grèce.  Sur l’ensemble de ses trois saisons passées en Grèce, son bilan est flatteur : 2 titres de champion et 104 buts inscrits. Il a également disputé six matches de Coupe d’Europe et 44 rencontres amicales contre les plus grandes formations européennes parmi lesquelles l’Ajax, le Partizan Belgrade ou encore Leeds. « Là-bas, je suis devenu un véritable joueur de football, confesse-t-il. J’ai connu une folle ambiance, les supporters inconditionnels, les grands matches, et j’ai gagné tous les titres. J’ai vécu comme un roi, fréquenté tous les milieux, découvert des gens passionnants. »

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L’Equipe, 3 juillet 1974.

« Même le président Rocher a changé »

A son arrivée, il ne reconnaît plus le club qu’il avait quitté en 1969. « Tout a changé. Les installations et l’entraînement beaucoup plus dur et plus physique qu’au temps de M. Batteux. Mais de cela je ne me plains pas, bien au contraire. Car j’ai besoin qu’on me bouge. Même le président Rocher a changé. Je le trouve beaucoup plus serein et plus décontracté qu’il y a quelques années. Je pense que si Herbin a insisté pour que je revienne, c’est qu’il estimait que, avec les qualités qui sont les miennes, je pouvais apporter quelque chose, du poids, par exemple, à l’attaque stéphanoise. »

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A son retour à l’ASSE, Yves Triantafilos ne reconnaît plus le club de ses débuts.

« Je suis timide, un solitaire aussi »

Son retour à Saint-Etienne n’est toutefois pas aussi idyllique qu’il l’avait imaginé. Peu en réussite lors des premiers matches amicaux, il inscrit ses deux premiers buts lors d’un match de Coupe d’Eté contre l’Austria Vienne (4-0). Au final, il ne lui aura fallu que 521 minutes sous le maillot vert pour ouvrir son compteur-buts. « En Grèce, il m’avait fallu trois mois pour réussir mon premier but, dit-il en souriant. Il me fallait cela pour être en confiance. On me faisait un peu la gueule. Je n’étais pas en réussite. Il me fallait gagner la confiance de mes camarades. Je suis timide, un solitaire aussi. »

En Championnat de France, il inscrit son premier doublé lors de la 4e journée contre Nîmes (4-0). La suite est moins heureuse pour l’ancien buteur de l’Olympiakos. Il a du mal à s’intégrer à l’équipe. Malgré d’évidentes qualités de buteur, son jeu ne colle pas toujours avec celui de ses coéquipiers.

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Les joueurs stéphanois se détendent en jouant au billard. De gauche à droite : Bathenay, Larqué, Triantafilos et Bereta.

Souvent confiné à un rôle de remplaçant peu conforme avec son nouveau statut, il évite de s’en offusquer en public. Malgré sa déception, il continue de travailler à l’entraînement avec l’intime conviction que son heure viendra. Celle-ci sonne au moment opportun. Le 23 octobre 1974, en huitièmes de finale aller de la Coupe des Clubs Champions, les Verts sont sévèrement battus 4 à 1 à Split.

« C’était à prendre ou à laisser »

Quinze jours plus tard, lors du match retour, les Verts font une partie de leur retard en inscrivant trois buts en quatre-vingt minutes. Ils ne sont plus qu’à un petit but de la prolongation. Il reste dix minutes à jouer, Herbin apporte un peu de sang frais à son équipe. Il remplace Repellini par Triantafilos qui se positionne immédiatement aux avant-postes au côté d’Hervé Revelli. Dans un match qui sent la poudre, ce n’est pas vraiment un cadeau. « C’est vrai qu’on ne peut pas dire que Roby m’ait fait un cadeau mais c’était à prendre ou à laisser, dit le futur héros du soir. Je ne suis pas homme à jeter le manche après la cognée. » Les supporters du stade Geoffroy-Guichard ne vont pas attendre longtemps pour vérifier les dires du « Grec », comme le surnomment ses coéquipiers depuis son retour d’Athènes.

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Football Magazine, avril 1975.

« Si on ne qualifie pas là, on ne se qualifiera jamais »

A la 82e minute, Patrick Revelli centre pour son frère Hervé qui, intuitivement, laisse passer. « Tintin » profite de l’aubaine pour déclencher une frappe croisée imparable. Le stade explose de joie. Grâce à ce but précieux, les Stéphanois arrachent la prolongation. Habitué aux rencontres de haut niveau avec l’Olympiakos, il conseille ses coéquipiers en même temps qu’il les pousse à se surpasser. « Maintenant, il faut les piétiner. Je ne veux plus en voir un debout à moins de trente mètres de nos buts. Vous avez compris ? Si on ne qualifie pas là, on ne se qualifiera jamais », leur dit-il pour mieux se convaincre qu’un exploit est à portée de main.

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 « Je me demande encore… »

104e minute. Hervé Revelli profite d’un mauvais dégagement de Meskovic pour filer vers le but du gardien yougoslave. Il est stoppé irrégulièrement à vingt-cinq mètres des cages adverses. Coup franc pour les Verts. Bereta adresse une petite passe pour Triantafilos qui fait apprécier sa frappe de mule. « Je me demande encore comment le ballon a pu traverser le mur », dira-t-il après coup. Ce but du 5 à 1, qualificatif pour les quarts de finale, redonne le sourire au héros d’un soir. « Je sais que j’ai eu de la chance, même si j’ai su la saisir. »

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Yves Triantafilos inscrit deux buts contre Hajduk Split. Il devient le héros de ce 8e de finale retour gagné par les Verts 5 à 1.

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Saint-Etienne-Hajduk Split : 5-1 (4-1 a.p.)

Spectateurs : 26 381. Arbitre : M. Paterson (ECO). Buts. – Saint-Etienne : Larqué (36e), Bathenay (61e), Bereta (71e, s.p.), Triantafilos (82e, 104e) ; Hajduk Split : Jovanic (60e).
Saint-Etienne : Curkovic – Janvion (Santini, 81e), Piazza, Lopez, Repellini (Triantafilos, 79e) – Bathenay, Larqué, Synaeghel – P. Revelli, H. Revelli, Bereta. Entr.: Herbin.
Hajduk Split : Meskovic – Kurtela, Buljan, Dzoni, Rozic – Boljat, Muzimic, Jovanic (Luketin, 80e) – Zungul (Salov, 105e), Jerkovic, Surjak. Entr.: Ivic.

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Une de L'Equipe, 8 novembre 1975.
Une de L’Equipe, 8 novembre 1974.

« Nom d’un chien… »

Le lendemain, quand il regarde pour la première fois ses buts à la télévision, il n’en revient pas. « Nom d’un chien, je ne m’étais pas rendu compte de la puissance de mon tir. Même en Cadets, je tirais aussi fort mais je ne m’en rendais pas plus compte qu’aujourd’hui. C’est un geste naturel que je ne travaille pas particulièrement. »

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 L’anecdote

Deux jours avant cette rencontre qui appartient désormais à la légende des Verts, Yves Triantafilos était grippé. Fraîchement débarqué de Dusseldorf, son beau-frère lui administre une potion que le premier venu n’aurait pas bu. « Quel remède ! J’ai dormi dix heures et sué toute ma fièvre. On n’est pas là pour s’écouter pleurer ! » dit-il.

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L'Equipe, 18 janvier 1975.
L’Equipe, 18 janvier 1975.

« Tintin » entretient l’espoir

Le 5 mars 1975, les Verts disputent leur quart de finale aller de Coupe d’Europe à Chorzów. Cela faisait douze ans qu’une équipe française n’avait atteint ce niveau de la compétition dans une coupe européenne.

Contre les Polonais, Saint-Etienne donne encore des frayeurs à ses supporters. Menée 3 à 0 après 27 minutes de jeu, l’équipe trouve les ressources suffisantes pour revenir à 3 à 2. Triantafilos, associé aux frères Revelli, inscrit le deuxième but des Verts (84e). Herbin et ses joueurs repartent de Pologne avec une courte défaite mais l’attaquant stéphanois sait que son but risque de peser lourd au match retour. Son travail de sape sur le front de l’attaque et le pressing qu’il a exercé en font, une fois de plus, l’un des hommes-clés de son équipe. « Je suis content d’avoir marqué ce but à Chorzów. Non seulement parce qu’il nous place dans une position extrêmement favorable avant le match retour, mais aussi parce que depuis quelque temps, en Championnat, je commençais à douter de mon efficacité. »

Quinze jours plus tard, les Verts s’imposent difficilement 2 à 0 au stade Geoffroy-Guichard. Roger Rocher est aux anges : pour la première fois depuis seize ans, un club décroche sa qualification pour les demi-finales de la Coupe d’Europe des clubs champions.

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Contre Ruch Chorzów, Yves Triantafilos a participé activement à la qualification des Verts.

« Le Grec » est devenu le spécialiste des grandes occasions européennes. « Il ne faudrait pas croire que je choisis mes matches. Avant le match aller à Chorzów, j’étais bien concentré, plein d’influx. Je pense que ça s’est traduit dans mon jeu. En fait, le problème se pose surtout à l’extérieur, car au stade Geofffroy-Guichard, nous savons tous qu’il n’y a pas d’autre objectif envisageable au départ que la victoire. L’adversaire ne gagne pas à Saint-Etienne : c’est le mot d’ordre.  »

« Un avant-centre valable »

Pour lui, ce retour en grâce est une véritable rédemption. « Personne ne croyait tellement en moi à Saint-Etienne lorsqu’on m’a laissé partir pour Boulogne. Au lieu de considérer cela comme une condamnation définitive, j’y ai puisé une certaine forme de stimulation. Puisqu’il fallait que je fasse mes preuves, eh bien, je les ferais en Division 2 ou 3, en France ou ailleurs. En équipe de France Juniors 1967, au Bataillon de Joinville qui jouait alors en Division 2, je marquais des buts et j’ai toujours eu la conviction que je pouvais être, sinon un attaquant exceptionnel, du moins un avant-centre valable capable de faire une carrière professionnelle honnête. »

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L’Equipe, 19 mars 1975. © Dessin de Robert Déro. Collection particulière.

L’aventure européenne s’arrête à Munich

Saint-Etienne n’est plus qu’à une marche de la finale. Mais avant de prétendre la disputer, il faut franchir l’obstacle munichois. Yves Triantafilos, que rien ne semble arrêter, est confiant : « Saint-Etienne est une équipe qui sait ce qu’elle veut. Elle travaille. C’est une équipe sérieuse. J’ai toutes les raisons de l’aimer. Saint-Etienne en finale ? Tous les espoirs sont bons. » A domicile, ils ne peuvent faire mieux que 0 à 0. A Munich, quinze jours plus tard, la bonne volonté ne suffit pas et les Verts s’inclinent 2 à 0. Pour Triantafilos et les siens, l’aventure européenne s’arrête en Bavière.

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Football Magazine, août 1975.

Sélectionné par Stefan Kovacs

Dans son livre « Football total », Stefan Kovacs décrit le Stéphanois en ces termes : « Triantafilos, que j’avais admiré lorsqu’il jouait à Olympiakos et qui passait pour le meilleur centre-avant de Grèce avec Antoniadis, est lent, ce qui l’empêche sans doute d’atteindre le « top-niveau ».

Ses bonnes prestations en Coupe des Clubs Champions auraient-elles fait changer d’avis le sélectionneur des Bleus ? Le 18 mars 1975, le « Grec » figure dans la liste des joueurs retenus pour la rencontre amicale France-Hongrie du 26 mars. Il rejoint Paris avec ses coéquipiers Hervé Revelli, Alain Merchadier et Christian Lopez qui est appelé comme lui pour la première fois chez les Bleus. Bien qu’heureux d’être appelé pour la première fois chez les A, cette sélection ne lui fait pas tourner la tête pour autant, même s’il en retire une certaine fierté. « L’équipe de France, ce n’était pas chez moi une idée fixe, mais c’est vrai que ça me fait plaisir d’être ainsi distingué. Je bénéficie peut-être de la « vogue » stéphanoise. et je pense aussi qu’il y a en France pas mal de bons avants centres, mais au bout du compte, ça prouve quand même que je n’avais pas la grosse tête quand je pensais, à 19 ans, que je valais peut-être un petit peu mieux que la Division II… »

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Le 26 mars 1975, Yves Triantafilos honore sa première sélection avec les Bleus contre la Hongrie.

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FRANCE-HONGRIE : 2-0

Spectateurs : 25 000 spectateurs environ. Arbitre : M. Ohmsen. Buts.- Michel (56e), Parizon (63e).
France : Charrier – Lopez (Merchadier, 83e), V. Zvunka, Trésor, Bracci – Huck (Papi, 70e), Michel, Guillou – Triantafilos, H. Revelli (Parizon, 60e), Bereta.
Hongrie : Meszaros – Kolar, E. Dunai, Horvath, J. Toth – Balint, Kocsis, Pinter – Fazekas, Bene, L. Nagy (Gass, 59e).

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Face aux Hongrois, Triantafilos a été moins actif, moins pesant sur les défenses qu’il ne l’est avec Saint-Etienne. Il a rappelé le joueur qui revenait de Grèce et qui a mis longtemps à s’imposer à l’ASSE. Autre équipe, autre jeu, d’où une certaine adaptation. Kovacs lui reproche notamment d’avoir trop jouer en arrière, de ne pas avoir pris ses responsabilités pour éliminer son garde du corps et tenter sa chance au but. Des reproches qui semblent le condamner pour quelque temps.

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L’équipe de France contre la Hongrie : Debout : de g. à d. : Lopez, Trésor, Zvunka, Bracci, Guillou, Charrier. Accroupis : Michel, Huck, Triantafilos, H. Revelli, Bereta (cap.).

Première rumeur de transfert

Début mai, les premières rumeurs de transferts parcourent l’hexagone. A Saint-Etienne, il se murmure que les dirigeants verraient d’un bon œil l’arrivée de l’Angevin Marc Berdoll ou du Rémois Christian Coste. Si l’un de ces deux transferts devaient se confirmer, il pousserait vers la sortie Yves Triantafilos.

FranceFootball, 6 mai 1975.
FranceFootball, 6 mai 1975.

Le 15 juillet, il reprend l’entraînement avec ses partenaires. L’effectif est inchangé mais plusieurs jeunes ont intégré le quotidien des joueurs stéphanois parmi lesquels Dominique Rocheteau et Jean-Marc Schaer, soit deux attaquants. Débarrassé de ses problèmes aux adducteurs, il semble très affûté.

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Le 22 août 1975, Yves Triantafilos (à droite), inscrit les deux buts contre Lens (2-0). Cela ne suffit pas à en fait un titulaire discutable à l’AS Saint-Etienne.

« Adressez-vous à mon entraîneur »

Le 23 août, Saint-Etienne s’impose 2 à 0 devant Lens. Le « Grec » inscrit les deux buts. De quoi le ravir. Pourtant, à sa sortie du terrain, à un journaliste qui lui demande s’il est satisfait de sa prestation, il répond laconiquement : « Adressez-vous à mon entraîneur, Il est mieux placé que moi pour répondre. » Trop souvent remplaçant à son goût, cette situation ne peut le satisfaire pleinement. Préféré à Patrick Revelli en début de saison, il perd à nouveau sa place contre Copenhague. Rocheteau blessé, Herbin lui  préfère Synaeghel sur le flanc gauche. Cette fois, c’en est trop. Il demande alors à quitter club.

Quand, à la mi-septembre, Nantes, à la recherche d’un attaquant, sonde le club pour s’attacher ses services, dans un premier temps, le Stéphanois réserve sa réponse.

L'Equipe, 24 septembre 1975.
L’Equipe, 24 septembre 1975.

De Saint-Etienne à Nantes

Le 24 septembre, au terme d’une deuxième entrevue avec le président Louis Fonteneau et Robert Budzinski, il paraphe un contrat de quatre ans avec Nantes. Transféré du club grec de l’Olympiakos Le Pirée à l’ASSE pour 500 000 F., le président Rocher n’a pas été trop gourmand pour accéder au désir de son joueur. Le transfert est négocié sur la base de 400 000 F. « Nous ne faisons pas une affaire financièrement, assure le président de l’ASSE. Triantafilos a largement amorti son transfert chez nous en marquant des buts décisifs en Coupe d’Europe. »

« Tintin » est assoiffé de revanche. Nantes cherchait un avant-centre et Triantafilos une place de titulaire. Sous les ordres de José Arribas, il espère relancer sa carrière et confondre ceux qui doutent de lui.

L'Equipe, 25 septembre 1975.
L’Equipe, 25 septembre 1975.

Le transfert d’Yves Triantafilos au FC Nantes, s’il peut surprendre, ne fera pas que des malheureux sur la scène européenne. Ruch Chorzów et Hajduk Split, adversaires potentiels des Verts en Coupe des Clubs Champions, ne se plaindront certainement pas de ne plus croiser leur bourreau de la campagne 1974.

A Saint-Etienne, son départ ne suscite aucun commentaire. Le silence est de mise. Tout juste Pierre Garonnaire, l’homme qui était allé le chercher en Grèce, déclare-t-il :

« J’espère qu’on n’aura pas à le regretter »

Thierry CLEMENCEAU

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La suite de sa carrière s’inscrit désormais en jaune et vert.

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40 ans après, Yves Triantafilos se souvient…

« J’ai quitté Saint-Etienne pour le Bataillon de Joinville et je considère encore que c’était une chance. On faisait son armée tout en continuant à jouer au football. Quand je suis revenu à Saint-Etienne, l’équipe d’Albert Batteux était déjà bien en place et je sentais que je n’y avais plus ma place. Je suis alors parti à Boulogne. J’y suis resté deux ans avant de m’exiler en Grèce à l’Olympiakos. J’ai toujours eu un goût prononcé pour les voyages. Je peux dire aujourd’hui que c’était mes trois plus belles années de ma carrière. Je marquais but sur but. C’est là-bas que je me suis fait véritablement un nom. J’ai failli revenir à Saint-Etienne deux ans plus tard mais l’affaire ne s’est pas faite. Quand Pierre Garonnaire est venu me chercher l’année suivante, cette fois, j’ai dit ok. Pour moi, c’était un retour aux sources. J’étais parti de Saint-Etienne presque incognito, je suis revenu avec une belle notoriété à mon actif.

De tous les joueurs qu’il a côtoyés à Saint-Etienne, un homme l’a réellement marqué : Rachid Mekloufi. « Il faisait le poids. Aux entraînements, il me conseillait, c’était notre maître. Au milieu, il était bien entouré avec Herbin et Jacquet. »

A l’intersaison 1975, je n’avais nullement l’intention de quitter l’ASSE. Mais le fait de cirer le banc plus souvent qu’à mon tour a fini par me lasser. Je me suis fait une raison et quand la proposition nantaise est arrivée, j’ai sauté sur l’occasion pour signer dans un club qui me ferait confiance. Quinze jours plus tard, j’étais de retour au stade Geoffroy-Guichard. Le public a bien compris mon départ et pour mon retour j’ai eu droit à une belle ovation. Ca faisait chaud au cœur. »

Th.C.

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Pendant ce temps-là…

 Contre Montferrand, l’équipe réserve de Saint-Etienne, emmenée par un Larios des grands jours,  s’est imposée 4 à 2. Larios (20e), Vézir (41e, 85e) et Schaer (70e) ont été les buteurs stéphanois. Hormis le gardien Esad Dugalic, les Stéphanois ont évolué sans joueurs issus des rangs professionnels. Cette rencontre était suivie par Jean-Michel larqué tout heureux de voir qu’un autre joueur né à Pau comme lui, flambait sous le maillot vert. Roger Rocher, également présent, se réjouissait, quant à lui, de voir que sa politique de jeunes portait à nouveau ses fruits. L’équipe entraînée par Robert Philippe occupe poursuit son ascension et occupe la 4e place à égalité de points avec Lyon (8).

 Johnny Rep devrait effectuer son grand retour dans le championnat hollandais. En proie à des difficultés d’adaptation à Valence en Espagne, l’Ajax souhaiterait un transfert. Son départ en Espagne avait rapporté 120 millions A.F. au club d’Amsterdam.

Th.C.

 

 

Dans quelques jours :
 Saint-Etienne-Nantes : en pensant aux Glasgow Rangers

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« C’est notre plus belle victoire… »

Quatorze anciens Verts se sont retrouvés au Musée des Verts pour le vernissage de l’exposition « 40 ans après… Retour sur l’épopée des Verts », visible jusqu’au 15 mai 2016. L’occasion pour les instigateurs de la meilleure saison de l’histoire du club de se remémorer les moments qui ont façonné l’une des plus belles pages du sport français. Retrouvez les anciens Verts sur :

ASSE.fr

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Plus de 99 000 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

http://www.museedesverts.fr

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Auteur : surlaroutedesverts

Comme Obélix, tout petit, je suis tombé dans le Chaudron. Et je n’en suis jamais sorti. Mon premier souvenir d’un match des Verts remonte au 17 mars 1976. Ce soir-là, Saint-Etienne s’offre une qualification pour les demi-finales de la plus prestigieuse des Coupes d’Europe face au Dynamo de Kiev. Quel plus beau cadeau, le jour de mes 9 ans, que de voir Dominique Rocheteau, Charentais maritime comme moi, faire exploser le stade Geoffroy-Guichard. A travers ce blog, je vous propose de revivre huit décennies de moments forts de l’histoire du club, d’anecdotes croustillantes, de personnages emblématiques et de  matches inoubliables dans une ambiance unique en France…

4 réflexions sur « Objectif Glasgow 76 : Yves Triantafilos : entre exploits et regrets »

  1. Bonjour Thierry , merci pour ce superbe article qui nous apprends beaucoup de choses sur Tintin ,pardon Yves !!! Il est incontestablement un élément marquant de la légende verte, avec ses deux buts contre Split ,son but à Chorzow,et le pénaty qu’il provoqua au match retour transformé par Hervé Revelli.
    L’orsqu’il fut transféré à Nantes ,je me souviens d’un article de presse (peut être France Football ) ou il déclara être bien mieux dans ce club, car à St-Etienne c’était l’usine !!!! celà avait un peu choqué à l’époque ,mais ce n’est pas très important ,merci encore Tintin .

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    1. Bonjour Michel. Yves Triantafilos au quitté Sainté quinze jours seulement avant d’y revenir avec les Canaris. Il n’avait plus la confiance de Robert Herbin et il souhaitait jouer, donc il a préféré s’exiler une seconde fois. Je l’ai eu au téléphone vendredi dernier. Homme charmant et disponible. Il m’a parlé de son goût pour les voyages d’où ses trois ans à l’Olympiakos. C’était une force de la nature sur un terrain. Dans mon prochain blog, vous pourrez lire son retour à Sainté avec Nantes, ses impressions d’avant-match également. Comment il appréhendait ce retour. Amicalement Vert. Thierry.

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  2. Avant toute chose Merci !

    C’est un pan de ma jeunesse ; en France on ne peut pas imaginer la popularité de Yves Triantafilos en Grèce. Un cargo pétrolier appartenant au Président de l’Olympiakos Le Pirée, Nikos Goulandris a été baptisé Yves tout comme un des meilleurs chevaux à l’hippodrome du Phalère…
    Un acteur comique, très populaire, Nikos Stavridis, supporteur de l’Olympiakos terminait souvent ses tirades par un YYYYves retentissant !
    Il a formé avec Romain Arghiroudis et Georges Delikaris (probablement le meilleur joueur grec de tous les temps, surnommé le George Best grec) une attaque de feu !

    Enfin une petite rectification : Olympiakos a joué deux rencontres amicales en quelques jours contre Stoke City.

    Le fameux but de Tintin (Yves-Yves pour les grecs) de 25 mètres environ à été inscrit lors de la 2ème rencontre (1-0 pour l’Olympiakos) et non la première (1-2).

    J’y étais !

    Bravo pour vos articles

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    1. Bonjour Spyridon. Merci pour votre commentaire et merci également pour votre précision concernant les matches contre Stoke City. « Le Grec » était adulé à l’Olympiakos. Sa cote de popularité était incroyable. D’ailleurs, comme je le raconte, quand Pierre Garonnaire a effectué le déplacement pour le convaincre de signer à Saint-Etienne, il a connu quelques problèmes dans les rues d’Athènes. Si vous avez gardé le billet ou le programme du match -sait-on jamais-, surtout envoyez-le moi par mail. Je le rajouterai volontiers à l’article. Amicalement Vert. Thierry

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