Caen – Saint-Etienne : une victoire pour le maintien

Ce dimanche 1er février 2015, l’AS Saint-Etienne se déplace à Caen pour le compte de la 23e journée. Le 18 mars 1989, les Verts, malgré un recrutement prometteur, stagnent dans la deuxième partie du classement de Division 1. Entre deux candidats au maintien, ce match au stade de Venoix semble prometteur.

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André Laurent, le président de l’ASSE (en costume) pose avec deux de ses recrues estivales : Laurent Fournier et Alain Geiger. A gauche : John Sivebaek.

Fournier, Geiger, renforts de choix

En août 1988, Robert Herbin et son staff nourrissent de réelles ambitions pour leur club. En enrôlant Laurent Fournier et Alain Geiger, entre autres, les Verts se sont renforcés qualitativement. Mais un début de Championnat catastrophique (treize premiers matches sans la moindre victoire) est venu contrarier les plans du club stéphanois. Il a fallu attendre le 1er octobre et la réception de Toulon pour voir les Verts enfin gagner un match (2-1). A neuf journées de la fin, il occupe une peu glorieuse 15e place.  Avec 29 buts inscrits, son attaque est peu prolifique. Sa défense a déjà encaissé 42 buts, ce qui en fait d’elle l’une des plus perméables de D1.

Après des débuts laborieux, les Verts ont courageusement redressé la barre lors des matches retour. L’opération maintien est en bonne voie mais les rumeurs les plus folles circulent déjà du côté du stade Geoffroy-Guichard. Alors qu’on en est encore aux balbutiements en matière de transferts pour la saison 1989-90, Robert Herbin, l’entraîneur des Verts, est annoncé du côté de Nice en remplacement de Nenad Bjekovic présumé en froid avec M. Innocentini, son président.

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Robert Herbin, l’entraîneur de l’ASSE, semble menacé par la saison manquée de son équipe.

La rumeur Aimé Jacquet

Pour remplacer l’actuel entraîneur des Verts, une rumeur fait état de contacts entre Saint-Etienne et Aimé Jacquet, écarté des Girondins de Bordeaux par Claude Bez, son président, quelques semaines auparavant. Pour celui originaire de Sail-sous Couzan, ce serait un véritable retour aux sources.

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Du côté du stade Geoffroy-Guichard, la possible venue d’Aimé Jacquet, remercié par les Girondins de Bordeaux, se répand comme une traînée de poudre.

Si André Laurent, absent de Saint-Etienne pour raisons professionnelles, Bernard Bosquier, le directeur sportif de l’ASSE, dément formellement d’éventuels contacts. « Il n’y a rien. Aimé Jacquet est mon ami. Je lui ai simplement téléphoné pour le réconforter lorsqu’il a été licencié », affirme le directeur sportif stéphanois.

L'Equipe, 16 mars 1989.
L’Equipe, 16 mars 1989.

De son côté, le désormais ex-entraîneur de Bordeaux ne dit pas autre chose : « Je n’ai absolument aucune demande de Saint-Etienne. Il n’y a eu aucun contact. C’est de l’affabulation. Si un prochain jour, je viens à Saint-Etienne, ce sera pour déjeuner avec des amis. »

Castaneda poussé vers la sortie

L’AS Saint-Etienne doit également gérer un autre problème de taille : celui de son gardien de but. Arrivé en juin 1987 en provenance d’Angers, Jean-Pascal Beaufreton a détrôné Jean Castaneda dans la cage stéphanoise. Le « doyen » des Verts qui a rejoint le club au milieu des années 70 en provenance de l’Olympique de Saint-Etienne est en fin de contrat avec l’ASSE. Il ne sait pas de quoi son avenir sera fait. Ses relations avec Herbin ne sont pas des meilleures et après avoir tout connu avec son club de coeur, l’ex-capitaine déchu se dirige tout droit vers la sortie au terme du Championnat. Après la rencontre contre Nantes et la bonne performance de Jean-Pascal Beaufreton, une petite phrase de Bernard Bosquier n’est pas passée inaperçue : « Je crois que Saint-Etienne a trouvé un bon gardien. »

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Jean Castaneda, en concurrence avec Jean-Pascal Beaufreton, n’a plus la confiance de se dirigeants. Pour lui, la fin de l’aventure stéphanoise est proche.

Les Caennais sont en forme

Mais avant de gérer les éventuels mouvements, les Verts préparent leur 30e match de Championnat à Caen. L’actuel relégable (18e avec 28 points) vient de connaître la défaite à Sochaux lors de la dernière journée. Ce revers, s’il laisse un goût amer aux Normands, n’efface aucunement leur bonne série de trois victoires et un match nul (toutes compétitions confondues). Robert Nouzaret, l’entraîneur du SM Caen, promet une équipe offensive (4-3-3) contre les Stéphanois au stade de Venoix.

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Robert Nouzaret, l’entraîneur caennais, espère que son équipe reprendra sa marche en avant contre Saint-Etienne.

Graham Rix, le métronome

Comme son adversaire du soir, le SM Caen a connu un début de saison difficile en s’inclinant six fois consécutivement. Arrivé en début de saison, Nouzaret a connu quelques sueurs froides et bien failli refaire ses valises rapidement. Finalement, la sagesse de ses dirigeants l’a emportée. « Chez nous, comme à Saint-Etienne ou Laval, dit l’entraîneur normand, il n’y a pas de salades. On ne parle que football. Ce sont des clubs qui restent sereins et c’est grâce à cette politique qu’on a la chance de pouvoir se battre jusqu’au bout. » Avec Stein et Rix, ses deux « British» , ses joueurs mouillent le maillot, ce qui n’est pas pour déplaire au public de Venoix. Les Verts sont prévenus.

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Les Caennais comptent beaucoup sur Graham Rix, l’un des deux Anglais du SM Caen.

Geiger et Chaouch toujours absents

Pour ce déplacement, Herbin peut compter sur le retour de son Danois John Sivebaek, de retour de suspension. En revanche, le Suisse Alain Geiger et le Marocain Mohamed Chaouch, à court de compétition, ont dû déclarer forfait. Pour compenser ces absences, l’entraîneur stéphanois a réservé une petite surprise en titularisant le jeune Philippe Durieu. Incorporé deux fois dans le groupe des pros cette saison, pour lui, ça sera un véritable baptême du feu. A 20 ans, ce joueur de caractère, très à l’aise en défense et bon relanceur, aura la lourde tâche de marquer Graham Rix.

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Philippe Durieu, va connaître à Caen sa première titularisation sous le maillot vert.

Record de spectateurs à Venoix

14 016 spectateurs -dont un bon millier de supporters stéphanois- assistent à cette rencontre, ce qui constitue le record de spectateurs au stade Venoix. Malgré leur saison en dents de scie, Saint-Etienne fait toujours recette.

Les Verts subissent les assauts caennais

Durant la première demi-heure, les Verts sont pris à la gorge. Littéralement étouffés par des Caennais déchaînés, les Stéphanois sont assiégés dans leur moitié de terrain. A la 15e minute, sur un coup-franc concédé par Courrault sur Lebourgeois, à l’entrée de la surface de réparation, Rix, d’une belle frappe travaillée, trompe Beaufreton qui relâche le ballon dans ses propres filets (1-0, 15e). Il faut attendre le dernier quart d’heure pour voir Saint-Etienne sortir la tête de l’eau et se montrer dangereux. Tour à tour, Fournier, Tibeuf et Morice manquent l’égalisation pour quelques centimètres.

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La première demi-heure des Caennais a rappelé quelques souvenirs d’Outre-Manche à John Sivebaek, le solide défenseur danois de l’AS Saint-Etienne. 

Tibeuf remet les pendules à l’heure

La deuxième mi-temps débute sur les mêmes bases. A la 50e minute, Garande, excellent depuis le début, sert Fournier sur l’aile droite. Le milieu stéphanois adresse un centre pour Tibeuf qui égalise au deuxième poteau (1-1, 50e).

Les Caennais, sonnés, ne sont pas au bout de leurs surprises. Moins d’une minute après, Morice sur l’aile gauche, cette fois, sert Tibeuf qui, après un beau contrôle orienté, trompe Montanier (1-2, 51e).

L'Equipe, 20 mars 1989.
L’Equipe, 20 mars 1989.

Premier hat-trick pour Tibeuf

Saint-Etienne a désormais la mainmise sur le match. Les Verts enfoncent définitivement le clou à la 64e minute. Fournier, lance Tibeuf dans le dos des défenseurs caennais. Le Breton se retrouve seul face à Montanier et ne laisse pas passer l’occasion d’inscrire un hat trick (1-3, 64e).

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Philippe Tibeuf, en inscrivant son premier hat-trick de sa carrière, compte 9 neuf à son actif.

A l’entame du dernier quart d’heure, les Caennais reprennent espoir par Lebourgeois qui trompe Beaufreton (2-3, 79e). Le gardien stéphanois, pas irréprochable sur les deux buts, doit sortir le grand jeu trois minutes plus tard pour détourner magistralement un bolide de Domergue (82e).

Au coup de sifflet final, Nouzaret, quelque peu abattu, a du mal à comprendre un tel renversement de situation : « Cette victoire frôle le hold-up. On a disputé 45 minutes d’un niveau de haut de tableau concrétisé par un seul but. Je n’ai jamais vu un tel début de match depuis que je suis ici. »

Bernard Bosquier a lui aussi été surpris par le pressing caennais durant la première demi-heure : « Nous avons pensé au pressing subi en coupe d’Europe contre le Celtic de Glasgow. C’est la première fois que je vois une équipe débuter un match de championnat de France de cette manière. »

« Durieu a joué avec intelligence et abnégation »

Philippe Durieu, pour sa première titularisation en D1, a parfaitement contenu l’Anglais Rix qui ne s’est montré dangereux que sur coups de pied arrêtés. Bosquier ne tarit pas d’éloges pour la dernière pépite stéphanoise : « Le jeune Durieux a bien tenu sa place en jouant bien au football, avec intelligence et abnégation. C’est très bien à l’heure où on met en place une structure de recrutement à l’échelon de la région puisqu’il est Stéphanois d’origine. »

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Bernard Bosquier, le directeur sportif stéphanois a apprécié la bonne prestation de Philippe Durieu.

Philippe Tibeuf, auteur du premier hat-trick de sa carrière ne cache pas sa satisfaction : « Ce qui est très agréable, c’est que ce triplé, mon premier, effectivement, depuis que j’ai commencé à jouer en pro à Guingamp, s’est accompagné d’une nouvelle victoire pour Saint-Etienne. Et croyez-moi, nous avions raison de croire que ce serait dur à Caen. Car pendant une demi-heure, on s’est fait bousculer. »

Un match digne de la Premier League

« Bousculer », c’est également ce qu’ont dû subir les joueurs d’Herbin. Attendus par les supporters stéphanois enthousiastes après cette victoire, ils ont eu bien du mal à se frayer un chemin pour rejoindre leur car, garé à quelques 200 mètres de leurs vestiaires. John Sivebaek se demande encore comment il a réussi à monter les premières marches du car sans y laisser sa cravate. Le Danois, transfuge de Manchester United, n’a pas été surpris par le rythme imposé par les Caennais : « En Premier League, c’est comme cela de la 1ère à la 90e minute. »

Avec cette victoire, Saint-Etienne, toujours invaincu en 1989, classé avant-dernier à mi-parcours, vire en tête lors cette phrase retour. Après cette 30e journée, les Verts ont pris 26 points en onze rencontres. Depuis le début des matches retour, ils ont enregistré 8 victoires, 2 nuls pour une seule défaite.

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L’Equipe, 21 mars 1989.

Beaufreton et Tibeuf récompensés

Dans la semaine, Beaufreton et Tibeuf ont reçu la traditionnelle « panthère du mois » décernée par les supporters Membres Associés qui récompensent les deux meilleurs Stéphanois du mois.

Photo : ASSE-Actualités.
Photo : ASSE-Actualités.

Jean Castaneda, après un entretien en tête-à-tête avec André Laurent, a vu sa situation clarifiée. « Il reste un an de contrat à Castaneda, mais nous le laissons libre. Herbin compte maintenant sur Beaufreton et nous engagerons un gardien remplaçant, probablement un joueur de seconde division, de bonne moralité, pouvant bien encadrer les jeunes.»

Thierry CLEMENCEAU

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photo : asse.fr

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Plus de 70 000 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts
depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

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Saint-Etienne-Paris-SG : deux ans déjà

« Putain deux ans », comme disait un futur président de la République dans les Guignols. Christian, tu nous manques !

Le 25 janvier 2013, l’AS Saint-Etienne perdait l’un de ses plus grands supporters… et moi un ami. Le « môme », c’est au 10 de la rue du Faubourg-Montmartre qu’il avait débuté sa carrière avant de continuer ses gammes à Issy-les-Moulineaux. Depuis le printemps 2009, c’est à l’Angle à Boulogne-Billancourt qu’il éclairait nos journées de ses petites phrases bien à lui.

Comme tous les matins, aux alentours de 7 h 30, Christian arrivait au journal, comme tous les matins, il feuilletait L’Equipe toujours à la recherche de la moindre info « verte ». Il ne pouvait en être autrement, pensez donc !

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Blog L’Equipe.

Ensuite seulement, il faisait le tour des étages pour distribuer les quotidiens et autres hebdos aux différents services du journal.

Quand j’arrivais à mon tour au bureau du courrier, la poignée de mains d’usage était de circonstance. Les premières paroles étaient teintées de Vert. Pensez donc ! Chacun apportait au moulin de l’autre les dernières infos récoltées ici et là.

« Je le sens bien, il a du mordant »

Dès le mois de mars, les premières rumeurs de transferts nous mettaient en effervescence. Plus elles étaient farfelues, plus elles alimentaient nos conversations. On supputait, on se projetait déjà dans la saison d’après. Il arrivait même parfois que nous ne soyons pas d’accord sur tel ou tel choix des dirigeants stéphanois. Christian pouvait facilement s’enflammer sur un nouveau joueur : « Je le sens bien, il a du mordant. » Quand un jeune, tout droit sorti du centre de formation, faisait ses premiers pas en pros, il me sortait sa phrase magique : « Il me plaît bien ce môme. »

« Tu verras, cette année, on ne va pas être mal »

Une ou deux victoires lors des matches amicaux d’avant-saison et l’Ami me lâchait avec un optimisme sans faille : « Tu verras, cette année, on ne va pas être mal ». En bon supporter que je suis, j’avais envie de le croire même si souvent, la raison rattrapait la passion.

Un ange passait

Le 16 janvier 2013, au lendemain de la victoire des Verts en demi-finale de la Coupe de la Ligue contre Lille, inutile de vous décrire nos visages ce matin-là. Pensez donc, nos Verts qualifiés pour une finale, ça faisait 31 ans que l’on attendait ça. On n’allait pas bouder notre plaisir, quand même ! Après un débrief rapide de la rencontre, on se projetait déjà à Saint-Denis, on établissait des stratégies pour récupérer les précieux sésames qui nous ouvriraient les portes du Stade de France. On s’y voyait déjà quoi… jusqu’à ce 25 janvier au matin où tout a basculé. Comme tous les matins, Christian distribuait inlassablement ses quotidiens… Un ange passait.

Une victoire pour le souvenir

Depuis, Saint-Etienne a remporté la finale de la Coupe de la Ligue contre Rennes (1-0). Tu sais, ce 20 avril 2013, tu étais en bonne place dans les tribunes du SDF. Assis entre François Morinière, un autre grand supporter des Verts, et l’ancien capitaine de la première équipe de France en 1957, l’épatant « Bill » Domingo. Devant toi, un défenseur que tu as tant admiré : Christian Lopez et toute sa bande de 76. Sans oublier Rachid Mekloufi, Salif Keita ou Georges Bereta, tous venus pour l’évènement. Pensez donc ! Il ne pouvait en être autrement.

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Le Stade de France, le 20 avril 2013. Photo L’Equipe.

Aujourd’hui, les Verts sont qualifiés pour les huitièmes de finale de la Coupe de France. Contre le Red Star, je t’aurais imaginé, les yeux brillants, me dire en me montrant tes clés de voiture : « C’est comme si on y était… » Cela allait de soi !

Fin décembre 2013, l’AS Saint-Etienne a aussi ouvert son Musée. Nombre d’objets, témoins du passé glorieux du club y sont exposés. Pas moins de 64 000 visiteurs s’y sont déjà pressés. Avec toi, le Musée aurait compté, à n’en pas douter, un visiteur de plus.

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Le Musée des Verts.

« Lui, c’est ma cote aujourd’hui… »

Quelques joueurs ont quitté l’ASSE, d’autres sont arrivés. Pour certains, tu m’aurais dit, en bon parieur que tu étais : « Lui, c’est ma cote aujourd’hui… »

Aujourd’hui, ce 25 janvier 2015, Saint-Etienne reçoit le Paris-SG pour le compte de la 22e journée de Ligue 1. Je sais déjà qu’avec ton fils, à qui tu dois beaucoup manquer, chacun avec son écharpe autour du cou, lui avec celle aux couleurs bleu et rouge, toi, avec celles aux couleurs vertes, vous auriez vibré devant votre petit écran.

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La Une du journal L’Equipe, 25 janvier 2015.

Et lundi matin, comme chaque lendemain de rencontre de l’ASSE, on aurait refait le match, disséqué les buts et les actions manquées. Au lieu de cela, on se dira que ça fait déjà deux ans que tu as pris de la hauteur pour mieux veiller sur tes Verts.

Ce soir, je compte sur toi pour faire mentir les pronostics qui annoncent une victoire du Paris-SG. Te connaissant, tu aurais forcément parier un petit billet sur ton équipe favorite. On ne se refait pas…

Et comme tu nous disais toujours avant de partir : « Ad’taleur ».

Thierry CLEMENCEAU

 

Top 10 des transfuges stéphanois vers le PSG

Le PSG qui se rend ce dimanche à Saint-Etienne (21h) compte deux anciens stéphanois dans son effectif. Blaise Matuidi et Zoumana Camara ne sont que les derniers d’une longue tradition de recrutement parisien dans le Forez.

http://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Top-10-des-transfuges-stephanois-vers-le-psg/530353

 

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Plus de 64 000 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts
depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

 

Tours – Saint-Etienne : un grand pas vers le titre

Ce mercredi 21 janvier 2014, l’AS Saint-Etienne se déplace à Tours à l’occasion des seizièmes de finale de la Coupe de France. Le vendredi 29 mai 1981, Platini et sa bande se déplaçaient au stade de la Vallée du Cher pour tenter de consolider leur place de leader avant la 38e et dernière journée de Championnat. Bonne lecture.

 

Le 26 mai 1981, Saint-Etienne se déplace à Sochaux pour y disputer un match en retard de la 33e journée de Division 1. A deux journées de la fin, les Verts comptent un point de retard sur le FC Nantes mais aussi un match en retard.

« Nous avions tous l’espoir d’un faux pas des Verts »

Du côté des Canaris, joueurs, dirigeants et supporters connaissent l’importance du résultat de cette rencontre. A commencer par Jean Vincent, l’entraîneur du FCN : « Bien sûr, nous étions tous à l’écoute de la radio pour le match Sochaux-Saint-Etienne, et sans vouloir l’avouer, nous avions tous l’espoir d’un faux pas des Verts assez peu convaincants ces derniers temps. » Dans le Doubs, Herbin et ses joueurs se sont imposés 2 à 1 et rapprochés un petit peu plus de leur dixième titre de champions de France.

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Jean Vincent, l’entraîneur nantais, espérait un faux-pas des Stéphanois à Sochaux.

Trois jours plus tard, c’est à Tours qu’ils doivent consolider cette première place. Durant toute la semaine, les dirigeants tourangeaux ont dû refuser plus de 10 000 demandes de billets pour ce dernier rendez-vous de la saison à domicile. Le record d’affluence pour un match de football au stade de la Vallée du Cher est plus que battu. Pour le club du président Royer, un petit point, synonyme de maintien, suffirait à leur bonheur. Mais voilà, en face, ce sont les Verts qui se présentent. Après un passage à vide, ils reviennent en forme au bon moment. Aussi, les Stéphanois veulent effacer les déboires du match aller et leur défaite (1-2) au stade Geoffroy-Guichard. Ce faux-pas avait cependant été salutaire pour les Verts puisque trois jours plus tard, ils allaient écrire l’une des plus belles victoires d’un club français en Coupe d’Europe en s’imposant 5 à 0 à Hambourg.

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Michel Platini, ici face à Hambourg. La défaite contre Tours au match aller au stade Geoffroy-Guichard (1-2) avait été salutaire pour les Verts. Trois jours plus tard, ils s’imposaient en Allemagne (5-0) en Coupe d’Europe.

La der de Phelipon à domicile

Pierre Phelipon, l’entraîneur tourangeau, s’apprête à vivre une soirée particulière. Face à Saint-Etienne, il va diriger pour la dernière fois à domicile le FC Tours qu’il avait fait monter en D1 lors de la saison 1979-80.

Mais avant de tourner cette page, il compte bien jouer un mauvais tour à Saint-Etienne. A l’issue du dernier entraînement, il affirme : « Nous allons faire le maximum pour terminer sur un coup d’éclat, pour le public qui le mérite bien, et aussi pour assurer définitivement notre sécurité. »

Onnis-Ferrigno : 34 buts à eux deux

Pour mener à bien sa mission « maintien », il pourra encore compter sur Delio Onnis, le meilleur buteur de Division 1. L’Argentin, avec 24 buts inscrits (contre 17 à Michel Platini), compte bien rajouter quelques unités à son compteur. Mais les Verts devront se méfier d’un autre joueur : Bernard Ferrigno. Auteur de dix réalisations, c’est lui qui avait inscrit, au match aller, le but vainqueur au stade Geoffroy-Guichard (2-1). « C’est le plus beau souvenir de ma carrière ».

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Bernard Ferrigno, auteur du deuxième but de Tours au stade Geoffroy-Guichard (1-2), compte bien rééditer sa performance du match aller.

Surpris au match aller, Patrick Battiston, vient de recevoir la panthère du mois d’avril décernée par les membres Associés récompensant le meilleur joueur du mois, ne souhaite pas laisser beaucoup d’espaces à son adversaire. « Ferrigno est non seulement un bon technicien mais il est très rapide. Je me méfierai de lui, il faut le surveiller autant que Delio Onnis. »

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ASSE-Actualités.

La petite phrase de Forissier

A Saint-Etienne, les joueurs sont concentrés sur cet avant-dernier rendez-vous de la saison en Championnat. C’est peut-être pour cela qu’ils sont restés mesurés après leur succès à Sochaux. A moins qu’ils aient retenu la petite phrase du kiné Gérard Forissier : « La joie est la chose la plus importante pour le maintien de la santé, surtout si elle est intérieure. »

Jeudi matin, Roger Rocher, le président de l’ASSE, arborait un large sourire dans le vestiaire après l’entraînement. Mais il sait, par expérience, que le Championnat n’est pas encore joué et que seule la victoire sera belle à Tours. « Nous ne sommes pas prétentieux, et c’est pour cela que nous ne parlons pas de faire la fête avant d’avoir le titre en poche. »

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Avec le forfait de Jacques Zimako, blessé, Yves Colleu retrouve une place sur le banc au côté de Thierry Oleksiak.

A l’exception de Zimako, qui se ressent d’une élongation, Herbin n’a eu aucun blessé à déplorer au retour de Sochaux. Le forfait du Néo-Calédonien fait le bonheur d’Yves Colleu qui retrouve une place sur le banc au côté de Thierry Oleksiak.

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Jacques Zimako, blessé lors du déplacement à Sochaux, est absent à Tours pour l’avant-dernière journée de Championnat.

Garonnaire sillonne l’Europe

Pierre Garonnaire n’est pas à Tours « parce qu’il est fatigué » dit laconiquement Rocher. En fait, depuis plusieurs semaines, le recruteur des Verts sillonne l’Europe à la recherche d’un attaquant axial. Le départ annoncé de Jacques Zimako et la perspective de disputer la Coupe des clubs champions oblige le club stéphanois à se renforcer en attaque. Cet oiseau rare -mais cher- ne s’appellera pas Burgsmuller.

L'Equipe, 25 mai 1981.
L’Equipe, 25 mai 1981.

Larqué, Revelli, Guillas et… Astre

Un lever de rideau est organisé avant cette 37e et avant-dernière journée de Division 1. Le Variétés Club de France, dans lequel figurent les anciens Stéphanois Jean-Michel Larqué, Hervé Revelli ou encore Roland Guillas, donne le change aux anciennes gloires tourangelles. Guillas, 45 ans, que l’on surnommait le Petit Kopa du temps de sa splendeur, n’a rien perdu de ses qualités. Mais les 22 000 spectateurs (21 595 exactement) peuvent aussi admirer un autre virtuose du ballon… Plus habitué à apprivoiser un ballon ovale, Richard Astre, surnommé le Petit Mozart du rugby, participe également à la fête.

Une de L'Equipe, 29 mai 1981.
Une de L’Equipe, 29 mai 1981.

Platini met les Verts sur orbite

Poussés par un public survolté, les Tourangeaux font passer les premiers frissons à la défense stéphanoise. Bien lancé par Besnard, Ferrigno, à l’extrême limite du hors-jeu, se retrouve seul face à Castaneda. Le remplaçant du grand Curkovic, bien inspiré, écarte le danger. Cette alerte a le don de provoquer un sursaut chez les Verts. Après un quart d’heure de jeu, Bellus, après un bel échange avec Zanon sur le côté gauche, centre pour Roussey au deuxième poteau qui remet pour Platini. Le numéro 10 stéphanois, d’une tête judicieuse, lobe Sidaine, le remplaçant de Jean-Noël Dusé (0-1, 15e).

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Auteur du premier but, Michel Platini ouvre la voie à ses partenaires.

Rep double la mise

Dès lors, les Verts développent un jeu fait d’appels de balle et privent ainsi leurs adversaires de ballons. A la 24e minute, les Tourangeaux ont bien cru à l’égalisation mais c’était sans compter sur Castaneda qui, d’une belle détente, sort un ballon qui semblait prendre le chemin de sa lucarne. De plus en plus pressants, les coéquipiers d’Onnis se montrent de plus en plus ambitieux dans leurs initiatives. Pourtant, à la 38e minute, Platini, qui a retrouvé toutes ses sensations, adresse une longue ouverture millimétrée dont il a le secret pour Rep qui ne rate pas l’occasion d’inscrire le second but des siens (0-2, 38e). Il a suffi de deux actions aux Stéphanois pour anéantir les efforts courageux mais trop désordonnés des Tourangeaux. La mi-temps survient sur cette avance confortable pour les leaders de la D1.

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Johnny Rep, auteur du deuxième but stéphanois sur une passe lumineuse de Michel Platini, est félicité par ses coéquipiers.

Nantes dans la roue des Verts

Dans le même temps, du côté du stade Bonal à Sochaux, Nantes mène 2 à 1. Mathématiquement, les Verts ne sont donc toujours pas champions de France. Tout relâchement serait donc préjudiciable à la fête prévue face à Bordeaux. Assis sur le banc de touche, il en faut plus à Roger Rocher qui ne se départit rarement de son large sourire, la pipe vissée à la bouche.

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Le Tourangeau Patrice Augustin, a tout essayé face aux Verts. Sans succès.

En seconde période, Tours par Delio Onnis, toujours en quête du point synonyme de maintien, se rue à l’assaut des buts de Castaneda mais Lopez et l’arrière-garde stéphanoise paraissent bien infranchissables. Comme en première mi-temps, à trop se découvrir, les locaux s’exposent aux contres de leurs adversaires. A la 69e minute, sans un arrêt-réflexe de Sidaine, Rep aurait pu s’octroyer un doublé.

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Delio Onnis, le meilleur buteur de Division 1, tente de réduire le score sous les yeux de Gérard Janvion, le défenseur stéphanois.

Quelques minutes plus tard, Ferrigno que Battiston surveille comme le lait sur le feu, s’écroule dans la surface de réparation. M. Didier, l’arbitre de la rencontre, estime que le penalty n’est pas justifié au grand dam des onze Tourangeaux.

Roussey crucifie les Tourangeaux

A un quart d’heure de la fin, à trop s’exposer, ils concèdent même un troisième but. A la suite d’un une-deux entre Roussey et Platini, le jeune attaquant des Verts met fin au suspense (0-3, 76e). Le réalisme stéphanois a encore frappé. L’équipe d’Herbin n’avait plus inscrit trois buts dans une rencontre depuis le 14 mars et son large succès contre Monaco (5-1, 29e j.).

A trois minutes de la fin, Dehon, après un exploit personnel, se débarrasse de deux défenseurs adverses et s’en va battre Castaneda d’un tir superbe (1-3, 87e). A la dernière minute, Saint-Etienne obtient un coup franc. En pareille occasion, le tireur s’appelle Michel Platini. Son tir, renvoyé par la transversale le prive de son 19e but.

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Jean Castaneda, auteur de plusieurs arrêts décisifs, s’incline à la 87e minute sur une frappe de Philippe Dehon.

« Les Stéphanois étaient les plus forts »

Pour Saint-Etienne, il ne reste plus qu’une marche à franchir pour inscrire un dixième titre à son palmarès. En revanche, Tours devra aller chercher son maintien à Laval, un concurrent direct, lors de la dernière journée. Pierre Phelipon, après cinq années passées dans le Cher, rêvait d’une meilleure sortie. Après la victoire des siens contre Metz (3-2, 36e j.), il s’était vu annoncer la non-reconduction de son contrat par M. Royer, le maire de Tours et président du club. « Il n’y a vraiment rien à dire quant au résultat, ni quant au score : les Stéphanois étaient certainement les plus forts. »

MAGAZINE ST ETIENNE
Roger Rocher a le sourire. La victoire au stade de la Vallée du Cher laisse présager une belle fin de saison.

Autre départ annoncé, celui de Jean-Noël Dusé. A 32 ans, l’habituel gardien titulaire du FC Tours est plus amer quant à son éviction : « Phelipon et moi, on nous traite comme des pestiférés. Vous trouvez que c’est une façon de remercier les gens qui ont aidé à faire monter le club en Division 1, vous ? »

Les Verts peuvent avoir le sourire

Dans le vestiaire stéphanois, l’ambiance est plus détendue. Robert Herbin a constaté une fois encore que son équipe est plus à l’aise à l’extérieur qu’au stade Geoffroy-Guichard : « Cette victoire à Tours, trois jours après celle obtenue à Sochaux, m’a démontré que nos joueurs avaient parfaitement récupéré et possédaient encore d’énormes ressources, tant en défense qu’en attaque. Les Stéphanois ont réalisé un bon match, très sérieux, intelligent et plein d’à-propos. Il était important de prendre deux points ce soir surtout afin d’avoir un très grand moral mardi prochain pour le match contre Bordeaux qui sera finalement décisif pour l’attribution du titre. Ce match contre Bordeaux, nous allons le considérer comme un match de Coupe d’Europe. Ce fut un très beau match et le mérite en revient aussi à Tours qui n’a jamais fermé le jeu et qui a su apporter sa contribution au spectacle. »

« Je suis en partie rassuré »

Roger Rocher, quant à lui, est heureux mais reste mesuré : « Bien sûr que je suis en partie rassuré mais il y a encore un match et je vous assure qu’il va falloir le jouer. D’autant que Bordeaux a toujours bien réussi chez nous. Néanmoins, nous avons une petite revanche à prendre car pour la première journée de Championnat en juillet dernier, nous nous étions fait balayer en Gironde (3-0). »

A Sochaux, Nantes comme Saint-Etienne trois jours plus tôt, s’est imposé 4 à 2. Grâce à cette victoire, l’incertitude demeure sur l’issue de Championnat 1980-81. Personne ne s’en plaindra.

Thierry CLEMENCEAU

L'Equipe, 30 mai 1981
Une de L’Equipe, 30 mai 1981

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Rennes – Saint-Etienne : le blé en herbe

Ce dimanche 18 janvier 2015, l’AS Saint-Etienne se déplace à Rennes pour le compte de la 21e journée de Ligue 1. Le 18 mars 1972, Albert Batteux et ses hommes se déplaçaient en Bretagne sans son buteur Salif Keita. Avec une équipe rajeunie, les Verts ont fait mieux que se défendre. Récit.

 

Salif Keita aime jouer au stade de la Route de Lorient à Rennes. Il a déjà inscrit quatre buts sur cette pelouse en autant de matches joués. Ce 18 mars 1972, Albert Batteux, l’entraîneur stéphanois, va devoir revoir son dispositif offensif. Le Malien, revenu de la Coupe d’Afrique des nations blessé, ne devrait pas faire partie du voyage en Bretagne. Victime d’un coup sur la malléole de la cheville lors du match Togo-Mali en Coupe d’Afrique des nations, il est rentré à Saint-Etienne mais n’a pu s’entraîner.

L'Equipe, 17 mars 1972.
L’Equipe, 17 mars 1972.

Après avoir reçu les soins du masseur André Minasso, le buteur stéphanois doit se rendre à l’évidence : « Il est plus prudent que je ne joue pas samedi. Certes, je marche maintenant normalement, mais lorsque je démarre, je ressens encore une douleur qui m’enlèverait une partie de mes moyens.» Sage décision pour le Malien qui fait la course en tête du classement des buteurs avec le Marseillais Josip Skoblar (23 buts contre 21).

ST ETIENNE-RENNES (1-0)
Salif Keita, qui a participé à la Coupe d’Afrique des nations avec le Mali, est rentré à Saint-Etienne blessé. Il est forfait pour le déplacement à Rennes.

Une attaque décimée

Albert Batteux doit aussi composer avec une autre absence pour ce déplacement : celle de Patrick Parizon. Pour remplacer les deux joueurs sur la touche, il a la bonne idée le mercredi d’organiser une opposition entre les professionnels et les amateurs. Ces derniers, bien que moins expérimentés, ne s’inclinent seulement que 4 à 2. Chez les vaincus, deux joueurs retiennent particulièrement son attention : les jeunes Jacques Santini et Patrick Revelli.

ST ETIENNE-FEYENOORD (0-0)
Autre absent de marque dans le onze stéphanois, Patrick Parizon (à droite), assis au côté de Robert Herbin, est forfait pour le déplacement en Bretagne.

Jacquet, perdu pour le football, mais…

Autre satisfaction : Aimé Jacquet semble retrouver toutes ses sensations. Victime vingt-deux mois plus tôt d’une déchirure au tendon d’Achille, le corps médical le disait perdu pour le football au point que l’AS Saint-Etienne ne lui avait pas renouvelé son contrat. Réduit au chômage, le milieu de terrain stéphanois ne s’est jamais découragé pour autant. Certain qu’il pouvait revenir à son meilleur niveau, il n’a jamais ménagé ses efforts. Incorporé dans l’équipe amateurs durant 45 minutes par Batteux, il s’est montré l’égal des meilleurs stéphanois de l’équipe « première ». Devant ce retour fulgurant, Roger Rocher décide même de lui offrir un nouveau contrat…

Aimé Jacquet avec Georges Bereta (à gauche)
Aimé Jacquet (à droite) assis dans le vestiaire avec son coéquipier Georges Bereta (à gauche).

L’incertitude André Betta

Rennes, 4e au classement, compte un point de plus que son adversaire du jour (31 contre 30). Pour Jean Prouff et ses joueurs, l’objectif avoué est une place qualificative pour une Coupe d’Europe. Pour cela, l’entraîneur breton hésite encore à incorporer André Betta, absent depuis six semaines. Même à court de condition, sa présence rassure ses coéquipiers. Malgré une nette baisse de régime, les Rennais espèrent bien se relancer et faire tomber un concurrent direct pour une place sur le podium de la Division 1.

RENNES-ST ETIENNE (1-0)
Gérard Farison, le défenseur stéphanois, fait les frais de la réorganisation de son équipe par Albert Batteux, l’entraîneur de l’ASSE.

Batteux recompose son attaque

C’est donc sans Keita et Parizon que les Verts s’envolent pour Rennes et la Bretagne le samedi dans la matinée. Avec ces deux absences préjudiciables, l’entraîneur stéphanois a dû revoir totalement son dispositif offensif : Patrick Revelli glisse à l’aile droite et cède sa place au jeune amateur Jacques Santini. Le numéro 10 laissé vacant par Keita sera porté par Jean-Michel Larqué. Toujours au milieu de terrain, Batteux a préféré l’expérimenté Bereta au jeune Synaeghel, relégué au rôle de douzième homme.

PRESENTATION ST ETIENNE
Debout (de g. à d.) : Alain Merchadier, Christian Lopez et Pierre Repellini. Accroupis (de g. à d.) : Jacques Santini, Patrick Revelli et Christian Sarramagna. La relève stéphanoise est prête.

En défense, le Yougoslave Samardzic blessé à un genou, n’est pas encore apte à reprendre la compétition. Le jeune Christian Lopez qui avait disputé un match le mercredi avec l’équipe de France Militaire a rassuré son entraîneur sur sa fraîcheur physique et tiendra finalement sa place au côté de Sanlaville. Enfin, Gérard Farison malgré de bonnes prestations, cède sa place au revenant José Broissart au poste d’arrière droit.

Christian LOPEZ
Christian Lopez, international militaire, est l’une des valeurs montantes de l’ASSE.

Saint-Etienne meilleure attaque de Division 1 avec l’OM

Saint-Etienne, invaincu depuis quatre matches, espère bien inscrire un cinquième succès consécutif en Championnat. Avec 55 buts inscrits, à égalité avec le leader marseillais, les Verts possèdent la meilleure attaque de D1. Comme pour les Rennais, l’objectif du club du président Rocher est d’accrocher une place en Coupe d’Europe. Seules les quatrièmes premières places sont qualificatives.

Aubour tout vêtu de noir

A leur entrée sur le terrain, les deux équipes sont applaudies par les 16 687 spectateurs présents au stade de la Route de Lorient. Au grand dam des supporters rennais, Betta ne figure pas sur la pelouse. Prouff a finalement renoncé à l’inscrire sur la feuille de match pour mieux le préserver. Marcel Aubour, le gardien rennais, malgré l’absence de Salif Keita, sa bête noire, est vêtu tout de noir. S’agit-il d’une prémonition ?

EQ 20 MARS
L’Equipe, 20 mars 1972.

Saint-Etienne s’impose logiquement à Rennes 4 à 2 au terme d’un exceptionnel festival offensif.  Et pourtant, tout n’a pas été facile pour des Verts rejoints deux fois à la marque par des adversaires déchaînés. Mais voilà, si Rennes a fait un bon match, Saint-Etienne en a réalisé un qualifié d’ « exceptionnel ». Jean Prouff, l’entraîneur breton, ne s’y trompe pas : « Ah ! comme j’aurais voulu être neutre pour jouir totalement du spectacle. »

Batteux : « Normal qu’ils éclatent ensemble »

A la fin de cette rencontre forte en intensité, Albert Batteux, sollicité de toutes parts, donnait un début d’explication à ce succès. Pour lui, cette démonstration stéphanoise est due en partie aux progrès constants des jeunes de l’ASSE : « Ils ont progressé ensemble, il était normal qu’ils « éclatent » ensemble. » Sur le terrain, ils étaient cinq à avoir participé à la dernière finale du Championnat de France amateurs contre Nantes en juin 1971. A commencer par Jacques Santini. Originaire de Fesches-le-Châtel (Doubs), le jeune et très clairvoyant attaquant stéphanois qui avait la lourde tâche de faire oublier Keita, inscrit ses deux premiers buts en Division 1. L’absence du Malien a ainsi permis à Santini de confirmer toutes ses qualités.

ST ETIENNE-REIMS (2-1)
Jacques Santini, pour sa première titularisation en Division 1, a inscrit un doublé.

Autre grande satisfaction de la soirée : Christian Sarramagna. A Rennes, le jeune Basque a accompli un match quasi parfait. Sur son aile gauche, ses centres et sa force de frappe ont fait sensation. Enfin, Patrick Revelli s’est révélé comme un titulaire en puissance. Jusque-là considéré surtout comme le frère d’Hervé, il s’impose désormais par sa propre personnalités et ses qualités inhérentes.

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France Football, 21 mars 1972.

Herbin-Larqué-Bereta : trio majeur

Derrière ce trio d’attaquants qui totalisent à peine 60 ans à eux trois, Jean-Michel Larqué fait presque déjà figure d’ancien. Âgé de 24 ans, il constitue avec Bereta et Herbin, un trio au milieu qui n’a pas son équivalent en France.

EQ 20 MARS (2)
L’Equipe, 20 mars 1972.

De retour à Saint-Etienne à 1 heure du matin, les joueurs ont rendez-vous à 10 heures au stade Geoffroy-Guichard. Au programme : un léger décrassage pour les uns, des soins avec André Minasso pour les autres.

Keita : « Mon absence porte bonheur »

Salif Keita, le grand absent de cette soirée rennaise, n’a pas oublié de venir féliciter ses partenaires. « J’arrive à croire que mon absence porte bonheur à l’équipe avec laquelle je ne joue pas. Dès ma blessure au Cameroun, l’équipe du Mali a gagné et voilà que vous remportez trois victoires consécutives sans moi, dont deux sur terrains adverses. »

Larqué fait un voeu

Jean-Michel Larqué, le meilleur des 22 acteurs de la veille, était heureux ce dimanche matin. Après sa prestation de haut niveau, il déclarait : « Mon rêve serait d’être une seule fois titulaire à part entière en équipe de France. J’ai été remplaçant une quinzaine de fois, je suis rentré dans l’équipe au cours des matches en Norvège et en Autriche à la suite de blessures de camarades, mais je ne me suis jamais aligné au garde-à-vous dès la présentation des équipes. »

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France Football, 21 mars 1972.

Le 11 juin 1972, Larqué débute pour la première fois un match avec l’équipe de France en tant que titulaire. Contre l’Amérique du Sud, en amical, les Bleus s’imposent à Salvador sur le score sans appel de 5 à 0.

 Thierry CLEMENCEAU

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Saint-Etienne-Paris-SG : Bon anniversaire M. Rocheteau

Ce mardi 13 janvier 2015, l’AS Saint-Etienne reçoit le Paris-SG en Coupe de la Ligue. Parmi les nombreux joueurs qui ont joué dans les deux clubs, mon coup de cœur ne pouvait s’appeler que Dominique Rocheteau. Le vice-président du conseil de surveillance du club fêtera ce mercredi ses 60 ans.

Le 31 mai 1989, Ce Charentais maritime mettait un terme à sa carrière professionnelle. Avant de disputer son dernier match sous le maillot du TFC, il avait accepté de revenir sur une carrière bien remplie.  Je vous laisse découvrir ou redécouvrir l’entretien accordé le 30 mai 1989 à Michel Nait-Challal pour le quotidien L’Equipe. Bonne lecture.

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Musée des Verts.

Rocheteau et ses débuts

«  J’ai disputé mon premier match pro avec Saint-Étienne en 1973 contre Nancy. J’avais alors dix-sept ans et je ne me rendais pas compte de l’événement. Il est vrai qu’à l’époque j’allais encore au lycée. Je me souviens de la joie éprouvée lorsque le soir après les cours, j’allais m’entraîner seul avec Robby (Herbin). Je n’ai pas oublié le trac qui m’a envahi au moment de pénétrer dans l’arène de Geoffroy-Guichard. Un trac qui ne m’a jamais quitté depuis. J’étais heureux mais en même temps pas très fier. J’avais peur de ne pas être à la hauteur. De ne pouvoir tenir les 90 minutes de la rencontre. Après, il ne restait que la joie immense d’avoir disputé mon premier match chez les pros. »

L'Equipe, 3 avril 1974.
L’Equipe, 3 avril 1974.

Rocheteau et ses grandes émotions

«  II y eut surtout celles provoquées par le match contre Kiev. Un match fou. Trois jours plus tôt, je m’étais blessé face à Nice. Pourtant, j’avais tout fait pour ne pas manquer cette rencontre. Le kiné m’avait dit : « Tu peux jouer, mais au fil des minutes tu vas ressentir les effets de ta contracture. » Cela s’est passé comme prévu. Lorsque je marque durant les prolongations, j’ai l’impression de ne plus avancer. Pourtant, après ce but, je ne sens plus rien. Je cavale comme un dément vers le public. Ce jour-là j’ai compris que la force de certaines émotions pouvait effacer les plus fortes douleurs. Dans le registre des moments forts, je citerai aussi la finale de la Coupe de France remportée avec le P-SG face à Saint-Étienne. Je marque le but égalisateur dans la dernière minute des prolongations, et le public envahit le stade. Quelle joie ! Quel plaisir aussi cette première sélection en équipe de France contre le Real. Je marque deux buts et Larqué n’a jamais cessé de m’encourager. »

ST ETIENNE-DYNAMO KIEV
Le 17 mars 1976, Dominique Rocheteau inscrit le troisième but de Saint-Etienne contre Kiev en quart de finale de la Coupe des Clubs Champions.

Rocheteau et ses clubs

«  II y eut Saint-Étienne à son épopée. Pourtant, je n’ai pas apprécié ces moments à leur juste valeur. J’étais jeune et la réussite a été instantanée. J’ai en fait beaucoup plus apprécié le titre et la Coupe de France remportés avec le P-SG. Sans doute parce qu’auparavant j’étais passé par des moments difficiles. Le bonheur n’est pas un don du ciel. Il faut l’arracher. D’autre part, je dois avouer ne pas avoir été très à l’aise dans la folle période d’idolâtrie vécue à Saint-Étienne. Elle m’a empêché d’être moi-même. C’est à Paris que je me suis totalement exprimé. Tant sur le terrain que dans la vie. Toulouse, mon dernier club. Un grand regret sur le plan des résultats, mais des bons moments avec les joueurs. »

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France Football, 30 mai 1989.

 

Vidéo INA

Antenne 2. Portrait de l’attaquant vedette de Saint-Etienne Dominique ROCHETEAU, à la veille de la demi-finale de Coupe d’Europe contre Eindhoven.

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Rocheteau et ses qualités

«  Cela m’est difficile d’en parler. Disons que j’ai toujours possédé un bon dribble, un bon sens du jeu et du but. Mais ma qualité principale c’est peut-être une très forte volonté de réussir. On peut y ajouter une certaine forme de spontanéité dans le jeu. Une spontanéité qui manque sans doute à la génération de joueurs façonnés par les centres de formation. La qualité de qui j’aurais aimé posséder? Le physique d’un joueur comme Gullit. Cela m’aurait sans doute facilité la tâche. »

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Unes de L’Equipe Magazine.

Rocheteau et les galères

« J’ai été un footballeur comblé Seule la fin de la période stéphanoise a été délicate pour moi. J’étais souvent blessé et une fois arrivé au P-SG, il m’a fallu modifier mon jeu de manière sensible. Autre déception : mon Championnat d’Europe raté alors que l’équipe de France atteignait une sorte d’apogée. Je me suis senti terriblement frustré de ne pas faire partie intégrante de cette équipe. Cela dit, ma passion du football m’a toujours permis de surmonter ces crises morales. »

 

Vidéo INA

Antenne 2 Midi. Reportage et interview de Dominique ROCHETEAU à propos de son parcours de joueur de football, son passage de Saint-Etienne au PSG et son statut d’icône du football français.

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Rocheteau et l’argent

« Sur ce plan j’estime avoir bien mené ma carrière. Et je trouve logique, compte tenu de la brièveté de la carrière d’un joueur pro, que celui-ci perçoive un bon salaire. Sans doute, dans certains cas, serait-il souhaitable d’étaler dans le temps les sommes importantes accordées aux joueurs. Cela leur serait bénéfique ainsi qu’au club. Reste que je ne comprends pas pourquoi on s’offusque des salaires accordés aux footballeurs alors que l’on ne trouve rien à redire sur ceux perçus par les golfeurs, tennismen ou pilotes de F1. »

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Unes de France Football.

Rocheteau et le milieu foot

« Hormis l’excès qui accompagna le périple stèphanois en Coupe d’Europe, je me suis assez bien intégré au milieu. Sans doute parce que ma passion du jeu me faisait oublier le contexte. Après tout, ce qui tournait autour du foot, ce n’était pas moi Reste que je n’ai jamais apprécié tout ces gens qui n’approchaient le football que pour en tirer profit. De la même manière, j’ai toujours détesté la violence imbécile de certains supporters. D’ailleurs, je hais la violence sous toutes ses formes. »

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Unes de divers magazines parmi lesquels France Foot2, Miroir du Football.

Rocheteau et l’équipe de France

« Je pense que c’est lors de la Coupe du monde 1982 en Espagne que je me suis le mieux exprimé avec l’équipe de France. Par contre, j’ai vécu ma plus mauvaise période lors du Championnat d’Europe 1984. Mon meilleur souvenir en Bleu ? Sans doute le match contre les Pays-Bas qui nous envoyait en Argentine. Pourquoi ce match ? Parce qu’il nous opposait à un grand pays de football et qu’il existait une passion extraordinaire autour de cette rencontre. J’aimerais beaucoup qu’une nouvelle équipe de France puisse connaître toutes ces sensations. Mais je suis conscient que cela passe par un changement dans notre football. Il faut rendre aux gens le plaisir de revenir au stade en leur offrant un spectacle plus créatif, un jeu plus offensif. Il faut réhabiliter l’image du football qui en a pris un certain coup récemment. Une mauvaise image dont vous, les médias, êtes en partie responsables. »

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France Football, 30 mai 1989.

Rocheteau et l’amitié

« Si mes meilleurs amis n’appartiennent pas au monde du football, c’est que j’ai toujours éprouvé le besoin d’enrichir mon existence avec autre chose que le football. Pour moi, il était vital de baigner dans une autre atmosphère. Reste que j’ai de très bons copains dans ce milieu. »

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Rocheteau et son départ

« Au début de la saison, je savais que c’était la dernière. Je me suis donc préparé à cet arrêt. Il est vrai pourtant qu’à l’heure actuelle, je pense surtout à la façon d’appréhender ma vie sans le football. Pourtant je ne suis pas stressé. Sans doute parce que je sais que je continuerai à jouer. Sans enjeu, rien que pour le plaisir. Cette perspective rend mon départ plus facile. »

 

Vidéo INA

Emission Lunettes noires pour nuits blanches

Antenne 2. Dans la discothèque parisienne Le Palace, Thierry ARDISSON s’entretient avec Dominique Rocheteau pour évoquer sa carrière de footballeur et ce qu’il fait depuis, ses penchants politiques, la « Rocheteau-mania », la Californie, la musique…

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Rocheteau et son avenir

« D’abord les vacances dans la maison que je viens de faire construire près de Royan. Puis un projet professionnel dont je ne peux encore annoncer la teneur. Je pourrai vous en dire plus dans une quinzaine de jours. Mais ce nouveau job s’exercera au sein du milieu football. »

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Photo : L’Equipe

 

B O N U S

Dans les pas de Dominique Rocheteau (1ère partie)

Dans les pas de Dominique Rocheteau (1ère partie)

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Reims-Saint-Etienne : Jour de retrouvailles

Une minute de silence avant Reims – ASSE

En hommage aux victimes de l’attentat commis dans les locaux du journal Charlie Hebdo, le match Reims-Saint-Etienne comme l’ensemble des rencontres de Ligue 1 et Ligue 2 seront précédés, ce week-end, d’une minute de silence.

 

Ce samedi 10 janvier 2015, l’AS Saint-Etienne se déplace à Reims pour le compte de la 20e journée de Ligue 1. Le 22 mars 1971, à l’occasion d’un déplacement des Verts en Champagne, Albert Batteux affronte pour la première fois le club dont il a été l’entraîneur durant les heures de gloire. Récit.

Le 17 mars 1955, l’équipe de France, alors dirigée par Albert Batteux, s’impose contre l’Espagne (2-1) en match amical. Raymond Kopa, l’attaquant rémois, éblouit cette rencontre de son talent. Un journaliste anglais, présent ce jour-là, décerne au Français le surnom de « Napoléon du football français ». Au stade Chamartin à Madrid, devant 125 000 spectateurs, la belle prestation des Français fit dire à Albert Batteux, fraîchement intronisé à la tête des Bleus : « La Suède a commencé là. »

Raymond Kopa porté en triomphe après la victoire des Bleus au stade Chamartin à Madrid (2-1) sous l'oeil d'Albert Batteux.
Raymond Kopa porté en triomphe après la victoire des Bleus au stade Chamartin à Madrid (2-1) sous l’oeil d’Albert Batteux (à gauche) et Jean Vincent.
L'Equipe, 17 mars 1951.
L’Equipe, 17 mars 1951.

Le 17 mars 1971, soit seize ans plus tard, jour pour jour, l’équipe de France, dirigée par Georges Boulogne, obtient un valeureux match nul à Valence (2-2) en amical.

La confiance de Georges Boulogne

Hervé Revelli, son avant-centre, en proie depuis quelques mois à un manque de réalisme avec Saint-Etienne, fait taire les critiques en inscrivant les deux buts tricolores. La persévérance de Boulogne à lui faire confiance a fini par payer. « Il y a peu de tireurs comme Hervé lorsqu’il est en forme et en confiance. Je sais que je m’entête envers et contre tous à son sujet, mais s’il y a une chance de retrouver un jour le super-Revelli, je ne veux pas la laisser échapper. Cette race de joueurs est beaucoup trop rare. »

Hervé Revelli retrouve le moral en Amérique du Sud

La confiance, c’est surtout lors de la tournée en Amérique du Sud avec les Bleus début janvier1971 que Revelli l’a retrouvée. La principale critique adressée au buteur stéphanois était son manque d’efficacité, celle qui faisait de lui le meilleur buteur de Division 1 en 1967 et 1970. Loin de se décourager, il a préféré faire le dos rond et attendre des jours meilleurs. « Cette tournée m’a fait du bien, surtout au point de vue moral. Elle m’a redonné une confiance que parfois j’étais sur le point de perdre. Or, lorsqu’on retrouve la confiance, le reste revient tout naturellement. »

ESPAGNE-FRANCE (2-2)
Le 17 mars 1971, Hervé Revelli inscrit un doublé face à l’Espagne à Valence.

Carnus, Bosquier, Bereta et Revelli, les quatre Stéphanois présents à Valence, n’ont guère eu le temps de savourer ce valeureux match nul. Le champagne, ça sera pour plus tard. Secrètement, ils espèrent bien faire sauter les bouchons dès le samedi 20 mars à Reims, là où Saint-Etienne doit disputer son prochain match de championnat.

Déjà en 1951…

Le stade Auguste-Delaune, les Verts y détiennent un record. Le 25 février 1951, Les joueurs de Jean Snella s’étaient imposés contre Sedan en huitièmes de finale de la Coupe de France (3-1). Ce jour-là, 22 046 spectateurs avaient assisté à la victoire stéphanoise, ce qui constitue le record d’assistance pour un match de football à Reims.

La venue du Champion de France, associée à la belle performance d’Hervé Revelli en Espagne font que la vente de billets pour ce match s’est intensifiée les dernières 48 heures précédant le match. Pour cette affiche entre deux grands noms du football français, des dispositions exceptionnelles ont été prises : 2 000 chaises ont été ajoutées au bord de la piste et des praticables d’une contenance de 4 000 places ont été installés.

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L'Equipe, 20 mars 1971.
L’Equipe, 20 mars 1971.

Le retour de Batteux contre Reims

Albert Batteux, l’entraîneur stéphanois, s’attend donc à revivre l’ambiance des grands soirs qu’il a bien connue durant ses grandes heures rémoises. Depuis son départ de Champagne en 1963, c’est la première fois qu’il revient pour y affronter l’équipe de sa ville natale. «J’étais déjà revenu bien souvent à Reims et notamment avec Grenoble, et aussi, à l’occasion de la Coupe de France, avec Saint-Etienne pour affronter Sedan, mais jamais encore pour retrouver le Stade de Reims. »

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L’Equipe, 22 mars 1963.

Les Rémois invaincus à domicile

La venue du Champion de France constitue une bonne occasion pour les Champenois de redorer leur blason. Depuis la trêve hivernale, les hommes d’Elie Fruchart ont subi deux défaites en championnat (à Bordeaux et Nice) et se sont fait éliminer en seizièmes de finale de la Coupe de France par le Red Star (1-0). Cette mauvaise série n’altère nullement le moral des joueurs qui restent invaincus à domicile depuis le début de la saison.

Galic rétabli après une blessure contre Nîmes et Dakic, débarrassé d’une appendicite naissante, l’entraîneur rémois dispose de tout son effectif et n’a que l’embarras du choix pour composer son équipe. Après un dernier entraînement le matin même du match, Brucato, Herbet et leurs coéquipiers se sont retirés dans un hôtel de la périphérie rémoise.

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Patrick Parizon (à droite) assis dans le vestiaire au côté de Robert Herbin, est incertain pour le match à Reims.

Les internationaux sont de retour

A Saint-Etienne, Albert Batteux a retrouvé sa douzaine d’internationaux éparpillés dans les différentes sélections, à l’exception de Patrick Parizon. Hervé Revelli a reçu les félicitations de ses partenaires après sa démonstration de réalisme à Valence.

L’entraîneur stéphanois a réuni ses joueurs pour leur parler du match qu’ils s’apprêtent à disputer à Reims. Il a tenu à les rassurer sur un point bien précis : son grand retour à Reims. Pour lui, pas question de faire du sentimentalisme : « Je leur ai dit que pour moi, il n’y avait qu’une équipe qui comptait, celle de Saint-Etienne. »

Après la trêve internationale, Albert Batteux retrouve ses nombreux internationaux et peut diriger une séance d'entraînement classique.
Après la trêve internationale, Albert Batteux retrouve ses nombreux internationaux et peut préparer le déplacement à Reims sereinement.

« Bébert» renonce à prendre la route

Pourtant, pour son grand retour en Champagne, «Bébert» avait envisagé de partir dès le vendredi après-midi avec son épouse en voiture pour profiter un peu plus de sa famille. Finalement, il s’est ravisé et s’est envolé en avion spécial avec les douze joueurs convoqués et son staff.

Le samedi matin, après une heure dix de vol, la délégation stéphanoise atterrit à 11 h 25 sur le sol rémois. Patrick Parizon, qui avait joué le jeudi la rencontre entre Espoirs français et espagnols (1-0) à Montpellier, a fait le déplacement malgré une grosse fatigue. Rentré à Saint-Etienne après le match en voiture avec Pierre Garonnaire, l’ailier droit des Verts espère tout de même tenir sa place. Dans le cas contraire, Samardzic le remplacerait.

Une amitié de vingt ans

Raymond Kopa ne veut pas rater les retrouvailles avec Albert Batteux. Leur amitié n’a pas pris une ride depuis plus de vingt ans. Absent le matin pour rendre un dernier hommage à un ami à Troyes, l’ancien buteur rémois est revenu sitôt les obsèques pour retrouver Batteux et ses joueurs, logés à l’hôtel Crystal. Kopa n’est pas le seul à venir converser avec son ami. Sont également présents Paul Sinibaldi, André Jacowski ou encore Simon Zimny, tous très heureux de revoir leur ami.

Entre Raymond Kopa (à gauche) et Albert Batteux (à droite), c'est une amitié de plus de vingt ans qui les lie.
Entre Raymond Kopa (à gauche) et Albert Batteux (à droite), c’est une amitié de plus de vingt ans qui les lie.

A l’heure de la sieste pour les joueurs, Batteux et Kopa auxquels s’est invité Roger Rocher, échangent sur le football. Kopa, très à l’aise, lance même aux deux hommes : « Vous savez, si jamais vous estimez ne plus avoir besoin de Revelli, ne vous gênez pas, nous le prendrions volontiers.»

L'Equipe, 23 mars 1971.
L’Equipe, 23 mars 1971.

Nouveau record pour les Verts

La foule des grands soirs s’est donnée rendez-vous au stade Auguste-Delaune. Malgré une erreur d’une radio périphérique annonçant la tenue du match pour le dimanche, ce sont bien 23 079 spectateurs qui ont pris place. Ce nombre constitue le record d’affluence pour un match de football à Reims. Vingt ans après, les Verts font tomber le précédent record en Champagne. Le trésorier du club rémois se frotte les mains : 14 millions d’anciens francs sont rentrés dans les caisses du club, du jamais vu à Reims.

La partie n’a commencé que depuis deux minutes que Revelli pour Saint-Etienne fait passer les premiers frissons dans le stade. Bien servi par un autre international, l’ailier gauche Georges Bereta, il reprend le ballon d’une magnifique tête horizontale contrée in extremis.
Les Rémois, à leur tour, tentent d’inquiéter Carnus par Herbet, Dakic et Blanchard, bien remis de son opération à un genou.

Robert Herbin à la lutte avec un défenseur rémois.
Robert Herbin à la lutte avec un défenseur rémois.

Parizon titulaire et buteur

Le jeu est alerte et peu après le premier quart d’heure de jeu, Bosquier, pour les Stéphanois, adresse un ballon à Larqué qui s’enfonce sur l’aile gauche. Alors qu’il peut lancer Bereta, il se retourne et adresse un centre parfait pour Parizon, finalement titulaire. L’ailier droit des Verts, d’une belle tête, voit le ballon faire trembler les filets de Darmenia (0-1, 17e). Les hommes de Batteux pratiquent un jeu limpide au point que le public rémois se surprend à applaudir certaines séquences adverses.

Richard remet les pendules à l’heure

Les Rémois, loin de se décourager, se lancent à l’assaut des buts adverses et sont récompensés dix minutes plus tard par Richard qui surgit comme un diable pour placer une tête victorieuse (1-1, 27e). En dix minutes, la machine verte vient de se dérégler et leur jeu léché semble plus besogneux.

En deuxième mi-temps, Carnus et Darménia sont souvent mis à contribution. A la 80e minute, Bereta est victime d’une faute. Avec sa patte gauche magique, il tire lui-même le coup-franc pour Herbin qui sert Keita, peu en vue jusqu’à cette action. Le Malien, à l’extrême limite du hors-jeu, redonne l’avantage aux Stéphanois, au grand dam des spectateurs médusés (1-2, 80e).

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Penalty ? Non, but !

Il reste une poignée de secondes à jouer, Reims jette ses dernières forces dans la bataille. Sur une ouverture de Herbet, Galic pénètre dans la défense stéphanoise, frappe au but mais est crocheté. L’arbitre siffle d’abord le penalty qui s’impose avant de se raviser puisque l’attaquant rémois vient d’égaliser (2-2, 90e). La joie des Rouge et Blanc contraste avec la déception des Verts. A Reims, les Verts ont montré deux visages : séduisants en première mi-temps, plus laborieux en seconde.

L'Equipe, 22 mars 1971
L’Equipe, 22 mars 1971

Albert Batteux n’a laissé que des bons souvenirs à Reims. A la fin du match, très entouré, il serre de nombreuses mains et donne des accolades. La nouvelle selon laquelle l’avion spécial qui doit ramener les champions de France ne serait pas en mesure d’atterrir à Saint-Etienne ne semble nullement froisser l’ancien entraîneur rémois. A 19 heures, Pierre Garonnaire, l’intendant-recruteur des Verts, a été prévenu par téléphone qu’il y avait 30 centimètres de neige à Saint-Etienne. L’avion stéphanois qui doit décoller à 23 heures, n’atterrirait donc pas à Saint-Etienne mais à Lyon.

L'Equipe, 22 mars 1971.
L’Equipe, 22 mars 1971.

Kopa, jamais très loin de son ami, lui lance : « Tu as vu, ce match de Reims. On a joué contre vous comme jadis, presque toutes les équipes essayaient de le faire contre nous. C’est normal. C’est maintenant devant Saint-Etienne qu’on cherche à réussir son meilleur match.»

Roger Rocher se demande s’il ne va pas reprendre son avion avec ses troupes sans son entraîneur. Ce dernier, de retour sur sa terre natale, est en effet très occupé à répondre aux nombreuses sollicitations de sa famille et de ses nombreux amis. Après ces moments de retrouvailles, Albert Batteux repart à Saint-Etienne avec un petit pincement pour continuer à écrire l’histoire glorieuse du club.

THIERRY CLEMENCEAU

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Roger Roger et Henri Germain, respectivement présidents de Saint-Etienne et Reims, sont en grande conversation sous le regard attentif de Pierre Garonnaire.

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Plus de 63 500 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts
depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

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Saint-Etienne-Nancy : le condamné se rebiffe (3e partie)

Le 13 mai 1962, alors que l’ASSE s’apprête à rejoindre la Division 2 pour la première fois depuis son accession en 1938, René Domingo et ses coéquipiers disputent la finale de la Coupe de France contre le FC Nancy au stade Yves-du-Manoir à Colombes. Aujourd’hui, je vous propose de revivre le dernier des trois volets consacrés à cette finale. Bonne lecture.

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La Une de France Football, 15 mai 1962.
La Une de France Football, 15 mai 1962.

Les épouses de joueurs, privées de leurs maris depuis quelques jours, retrouvent les vainqueurs de la Coupe de France 1962 pour le début des festivités.

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Photo extraite de Football Magazine, juin 1962.

Après un passage au 10 rue du Faubourg Montmartre, au journal L’Equipe, la folle nuit stéphanoise se poursuit par le Lido, situé sur les Champs-Elysées. La direction du célèbre cabaret parisien leur réserve le plus bel accueil qui soit. Assis aux premières loges, ils profitent pleinement du spectacle tout en strass et paillettes que peut offrir ce genre d’établissement.

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Après leur passage au journal L’Equipe, joueurs et dirigeants stéphanois ont commencé les festivités au Lido.

La suite de la soirée se déroule dans une grande brasserie alsacienne du côté des Halles, dans le centre de Paris. Ce lieu où l’on déguste d’excellentes soupes à l’oignon, Herbin, Polny, Guillas, Ferrier, Tylinski et toute la joyeuse bande stéphanoise, chemise blanche, cravate bordeaux et costume gris foncé où l’écusson du club trône en bonne place, prend possession des lieux.

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L’Equipe, 15 mai 1962

Une rencontre impromptue avec Charles Trenet et Marlène Dietrich, déjà sur les lieux, va donner à la soirée un tour encore plus festif.

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Entre deux festivités, Georges Polny et ses coéquipiers esquissent quelques pas de danse.

Le chanteur populaire, surnommé « le Fou chantant», ne se fait pas prier pour entonner la chansonnette réclamée par les joueurs stéphanois. « La mer » reçoit tous les suffrages auprès des vainqueurs du jour.

 

Charles Trenet en compagnie de Marlène Dietrich, ont fêté la victoire des Stéphanois dans un restaurant des Halles à Paris.
Charles Trenet en compagnie de Marlène Dietrich, ont fêté la victoire des Stéphanois dans un restaurant des Halles à Paris. Photo extraite du livre La fabuleuse histoire de Saint-Etienne.

 

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L’Equipe, 15 mai 1962

Marlène Dietrich, très accessible et visiblement heureuse de cet imprévu, se prête volontiers au jeu des dédicaces. Les hommes de Wicart profitent pleinement de ce moment insolite, eux qui d’ordinaire, se prêtent également au jeu des signatures. Le capitaine René Domingo, très ému, profite de l’instant pour immortaliser la scène avec la célèbre comédienne blonde. « Dame Coupe » s’invite alors sur la photo prise… par la personne, chargée du vestiaire de l’établissement. La soirée, comme de coutume, s’éternise jusqu’aux premières lueurs du matin.

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Le temps d’une soirée, le président Roger Rocher oublie les déboires de la descente en Division 2.

Pour les héros de la Coupe, l’heure est venue de regagner la gare de Lyon pour fêter la victoire avec tous les Stéphanois. Acclamés par les supporters présents dans la gare parisienne, ils finissent par s’engouffrer dans le train qui doit les ramener à la gare de Châteaucreux. Le contrôleur, surpris par cette ferveur, en oublie même de demander les billets aux joueurs stéphanois.

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C’est au bord des belles Floride que les vainqueurs de la Coupe de France communient avec leurs supporters dans les rues de Saint-Etienne. Photo : L’Equipe.

A leur arrivée en gare de Saint-Etienne, les dirigeants de l’ASSE ne s’attendent à une telle réception. Une foule immense les attend sur le quai. La délégation emmenée par Roger Rocher a du mal à se frayer un chemin jusqu’à la sortie où un camion mis à la disposition par la société du président stéphanois et transformé en char pour l’occasion les y attend.

La Régie Renault a elle aussi dépêché trois « Floride » de type « S » décapotables, l’une bleue, l’autre blanche et la troisième rouge pour fêter l’évènement.

Bau-lu, Bau-lu, Bau-lu !…

Les vainqueurs de la Coupe de France 1962 peuvent commencer leur tour de ville, comme ils l’avaient promis à leur président en cas de victoire. Les préposés chargés de la sécurité sont sur le qui-vive. « Heureusement que Saint-Etienne ne gagne pas tous les jours la Coupe de France !« , lâche l’un d’eux.

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Les joueurs de Saint-Etienne et leurs dirigeants font une halte au monument aux morts avant de poursuivre leur parcours au journal Le Progrès.

Au fur et à mesure que le cortège avance, tant bien que mal, la foule se fait de plus en plus nombreuse. Pas un Stéphanois ne veut manquer le retour victorieux de ses joueurs. Après un dépôt de gerbes au monument aux Morts, le convoi file place d’Orient au siège du Progrès où une réception en son honneur l’y attend. Domingo, présente alors la Coupe à la foule dans l’allégresse la plus totale. On voit des bouquets de fleurs jaillir en direction des vainqueurs de Nancy. Jean-Claude Baulu, est réclamé sur l’air des lampions.

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Photo : L’Equipe

Les festivités se poursuivent ensuite à l’Hôtel de Ville où M. Fraissinette, le maire de Saint-Etienne les attend pour une réception officielle.

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Les vainqueurs de la Coupe de France 1962 sont reçus à l’Hôtel de Ville par M. Fraissinette, le maire de la ville de Saint-Etienne. Photo : L’Equipe.
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L’Equipe, 15 mai 1962.

Après les festivités, Roger Rocher, le jeune et dynamique président stéphanois, se fixe plusieurs objectifs. Le premier d’entre eux, bien sûr, est la remontée immédiate en Division 1. Il doit également songer à réorganiser la direction sportive du club, garder les meilleurs éléments de son effectif, peu amènes à vouloir évoluer en Division 1 comme Herbin ou Ferrier. Enfin, relancer la politique de jeunes du club qui avait permis aux Tylinski, Herbin, Peyroche, Mekloufi et Njo-Léa, entre autres, d’obtenir de beaux résultats.

Thierry CLEMENCEAU

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Chaque joueur de l’ASSE, vainqueur de la finale de la Coupe de France 1962, s’est vu remettre une bouteille de Champagne. Photo : Musée des Verts.

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Exclusif : Michel Platini au Musée des Verts

 

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Saint-Etienne-Nancy : le condamné se rebiffe (2e partie)

Le 13 mai 1962, alors que l’ASSE s’apprête à rejoindre la Division 2 pour la première fois depuis son accession en 1938, René Domingo et ses coéquipiers disputent la finale de la Coupe de France contre le FC Nancy au stade Yves-du-Manoir à Colombes. Aujourd’hui, je vous propose de revivre le deuxième des trois volets consacrés à cette finale. Bonne lecture.

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Ce dimanche 13 mai 1962, le temps est gris au stade Yves-du-Manoir à Colombes. Seulement 30 484 spectateurs assistent à cette 45e finale de Coupe de France qui oppose Saint-Etienne à Nancy. Cela constitue la plus faible affluence pour une finale à Colombes depuis la guerre. La faute en revient en partie aux supporters stéphanois qui ont décidé de bouder l’évènement.

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Le programme officiel de la 45e finale de Coupe de France. Musée des Verts.

Si les supporters lorrains, venus en masse, n’ont pas connu le moindre problème pour trouver leur place dans le stade, il n’en a pas été vraiment de même pour leurs joueurs. Devant le refus du service d’ordre de leur ouvrir les grilles du vieux stade Yves-du-Manoir, le chauffeur du bus, quelque peu désemparé, a dû faire trois fois le tour du stade. Pour mettre fin à cette situation pour le moins rocambolesque, les Nancéiens ont dû demander l’intervention d’un adjudant-chef, originaire de Nancy, pour qu’enfin, les portes de la finale leur soient ouvertes.

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Le ballon de la finale. Musée des Verts.

Le Général de Gaulle n’a pas connu ce genre de mésaventure pour assister à sa deuxième finale de l’épreuve. Arrivé avec un petit quart d’heure de retard, il a pu prendre place au côté de M. Maurice Herzog, son Haut-commissaire à la Jeunesse et aux Sports. Plusieurs personnalités sont également présentes : M. de Fraissinette, le maire de Saint-Etienne ou encore le député M. Neuwirth,

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L’Equipe, 14 mai 1962.

 B.B., Peyroche et Snella soutiennent l’ASSE

Avant cette finale, les Stéphanois ont reçu de nombreux témoignages d’encouragements de proches ou de vedettes comme Brigitte Bardot, mais aussi d’anciens joueurs du club comme le Strasbourgeois Georges Peyroche. Jean Snella, l’ancien entraîneur de l’ASSE (1950-1959) y est aussi allé de son petit mot et a tenu à leur souhaiter bonne chance.

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René Domingo et Stéphane Brezniak, respectivement capitaines de l’AS Saint-Etienne et du FC pour le FC Nancy, présentent tour à tour leur équipe au général de Gaulle, comme la tradition l’exige. Enfin, les deux hommes s’échangent des présents en guise de souvenirs. Brezniak offre à René Domingo une magnifique assiette en céramique, ce qui fait dire à Mario Zatelli, un brin optimiste : « Saint-Etienne n’aura pas tout perdu s’il ne gagne pas la Coupe ! »

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Il est un peu plus de 15 heures à Colombes. Le match peut enfin commencer. Dès la première minute, Ferrier fait passer des frissons dans le public lorrain. Mais Nancy, a rapidement la mainmise sur le match et Viaene se procure les occasions les plus dangereuses. A la 12e minute, il envoie le ballon sur la barre d’Abbes. Bien que diminué à la suite d’un choc avec Sbaiz (14e), ce même Viaene, sur une jambe, continue de bousculer la défense stéphanoise. Cela faillit bien payer à la 31e minute. L’ailier droit lorrain manque d’un rien d’ouvrir le score mais Abbes, le gardien des Verts, lui ferme bien l’angle de tir. Loin de se décourager, l’attaquant de pointe le plus incisif des Lorrains, frappe à nouveau les montants stéphanois (41e). Saint-Etienne s’en sort bien mais éprouve les pires difficultés à sortir le ballon. Ils tentent de répondre par Herbin qui place sa tête de peu à côté du but de Ferrero.

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Charles de Gaulle, le président de la République, est attentif au déroulement du match entre Saint-Etienne et Nancy.

La mi-temps est sifflée sur ce score nul de 0-0. La finale retransmise à la télévision, provoque quelques soucis aux téléspectateurs. En effet, les maillots des 22 acteurs, vus en noir et blanc, sont identiques sur le petit écran. La seule distinction possible repose sur les chaussettes quelques peu différentes. Celles des Stéphanois comportent un liseré blanc sur la partie montante.

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Ginès Liron, n’est pas en réussite. Par trois fois, il frappe les poteaux de Ferrero, le gardien nancéien.

La deuxième mi-temps semble être profitable aux hommes de Wicart. Ils se montrent plus volontaires et au fil des minutes, jouent avec assurance. Ginès Liron se permet même le luxe de frapper à trois reprises sur les montants de Ferrero. Malgré ces tentatives, le score est toujours de 0 à 0.

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Adamczyk, l’arrière droit de Nancy se blesse dans un choc avec Oleksiak. Sa blessure va être préjudiciable à son équipe.

On joue la 82e minute. Sur l’une de leurs rares contre-attaques, Nancy par le jeune Chrétien trouve la tête de Florindo incroyablement démarqué à quatre mètres des buts d’Abbes. L’Argentin, probablement surpris de se retrouver dans une situation aussi favorable, écrase son tir. Les hommes de Zatelli viennent de laisser passer leur seule occasion dangereuse de cette deuxième mi-temps.

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René Ferrier devance son coéquipier Jean Oleksiak de la tête sous l’œil attentif d’Adamczyk, le défenseur nancéien. Photo : L’Equipe.

Il reste moins de cinq minutes à jouer et les 30 000 spectateurs entrevoient la perspective de la prolongation. C’est le moment que choisissent Guillas et Herbin pour porter le danger dans le camp adverse. Baulu, le régional de l’étape, reçoit le ballon et devant le manque d’opposition, fonce vers le but de Ferrero pour inscrire le premier but de cette finale (1-0, 87e). Incroyable quand on sait que quelques secondes auparavant, Ferrier, fou de rage, venait de crier : « Alors Jean-Claude, tu joues au ballon ou au c…ornichon ? »

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A la 87e minute, Jean-Claude Baulu, le régional de l’étape, inscrit le but libérateur pour les Verts. Photo L’Equipe.

Une minute après le but de Baulu, M. Barberan accorde un coup franc aux Nancéiens à 25 mètres du but adverse. Tous les Stéphanois tremblent et se rappellent que deux ans plus tôt, exactement à la même minute et au même endroit, Biancheri avait égalisé pour Monaco. Ce but avait ensuite permis au club de la Principauté de remporter le trophée. Cette fois, c’est Muro qui s’élance. Sa frappe terrible échoue sur Abbes.

 Vidéo : les principaux extraits de la finale.

 

Le paradoxe stéphanois

Pour la première fois dans l’histoire du football français, une équipe condamnée à descendre en deuxième division remporte la Coupe de France. Paradoxalement, Saint-Etienne doit probablement sa victoire… à sa descente en Division 2. Crispés par la peur de perdre en Championnat, les matches de Coupe de France leur ont permis de s’exprimer à leur juste valeur. Cette victoire est une véritable revanche sur eux-mêmes.

Pour la seconde fois de leur histoire, les joueurs nancéiens repartent en Lorraine sans le précieux trophée. Collot, d’habitude si enjoué, ne peut cacher l’énorme déception qui l’habite : « J’ai participé, il y a neuf ans, à la première édition. Contre Lille, notre chance n’était pas celle de dimanche… et puis j’étais plus jeune. Une occasion pareille, nous ne la retrouverons pas de sitôt ; en tout cas moi. Saint-Etienne était à notre portée. Je ne vous le cache pas : ma déception est très grande. »

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René Domingo, le capitaine stéphanois, brandit la première Coupe de France remportée par l’AS Saint-Etienne.

René Domingo, en capitaine courageux, gravit une à une les marches qui le séparent du général de Gaulle. Contrairement à la finale disputée en 1959 où Le Havre et Sochaux n’avaient pu se départager (2-2, a.p.), le président de la république va pouvoir remettre la Coupe de France au vainqueur de l’épreuve. « Ma treizième saison à l’ASSE se termine par une belle journée. Même si l’avenir est plus sombre, ça a du bon. Tenez, je suis sûr que Jean Snella doit être lui aussi ravi. » En remettant la Coupe à Domingo, le président a ses mots : « Je crois que la meilleure équipe a gagné. Vous avez tous fait un bon match, mais je pense qu’il faut féliciter tout particulièrement votre gardien de but. »

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L’Equipe, 14 mai 1962.

Claude Abbes est un footballeur comblé. Troisième de la Coupe du monde 58, champion de France 57 et vainqueur de la Coupe Drago 58 avec l’ASSE, il peut désormais s’honorer d’avoir également à son palmarès une Coupe de France. Il termine sa carrière professionnelle sur une bonne note. « Ca me donne envie de faire une saison de plus mais cela ne m’empêchera pas de participer au prochain stage des moniteurs à Reims. Tout de même, j’ai eu terriblement peur quand Muro a tiré un coup franc à trois minutes de la fin. »

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René Domingo, le capitaine heureux des Verts, est félicité par Just Fontaine, venu assister à la finale.

« C’est le plus beau jour de ma vie »

Richard Tylinski est fou de joie : « C’est formidable, formidable. C’est le plus beau jour de ma vie. » Gines Liron, est aux anges : « J’étais pourtant au bord du découragement. Trois tirs sur la barre, c’en est au moins deux de trop pour un seul joueur. » Roland Guillas, lui aussi, apprécie ce succès : « On ne l’a pas volé et ça fait du bien, surtout après des épreuves si déprimantes. »

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Richard Tylinski, suivi par Roland Guillas, descend aux vestiaires avec la Coupe de France.

Jean-Claude Baulu, la mascotte des Verts, auteur de 7 buts en 6 matches de Coupe de France est l’incontestable buteur de cette Coupe de France 1962. Né à Colombes, marié à Colombes, Baulu avait promis d’y revenir pour disputer la finale. Promesse tenue. Dans le vestiaire, il raconte à qui veut l’entendre l’action qui amène le but victorieux : « Cette balle, je la reçois de Ferrier,. Je la passe à Herbin, qui me la renvoie… Ferrier voulait sans doute que je la lui passe, car il se met à m’engueuler ! Ca me vexe ! Je me dis : Ah, je joue mal, ah ! je suis un… Eh ben ! On va voir ! Je fonce… et je tape. La balle passe entre les jambes de Ferrero ! Formidable ! »

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Unique buteur de la finale, Baulu est le plus heureux des Stéphanois. Il remporte la Coupe de France dans la ville qui l’a vu grandir.
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L’Equipe, 15 mai 1962.

Avec ce trophée, René Ferrier, du haut de ses 25 ans, est désormais le Stéphanois le plus titré : champion de France amateur et professionnel, vainqueur de la Coupe Drago et de France, champion du monde militaire, seize fois international A.

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L’Equipe, 14 mai 1962.

« La Coupe, ça fait quand même plaisir »

Roger Rocher, le jeune président de Saint-Etienne, évoque sa première année de présidence : « Avec notre équipe, nous pensions faire un bon parcours en Championnat 1961-62 et obtenir une place d’honneur ; or… nous descendons en Division 2. Quelle désillusion. Je ne veux pas citer de noms. Je dirai simplement que ma ligne d’avants m’a beaucoup déçu, qu’en revanche, mes demis m’ont donné beaucoup de satisfactions. Si, je vais lâcher un nom : Polny fut une véritable révélation. Mon meilleur souvenir ? Avoir vu, pour ma première année de présidence, mon équipe gagner la finale de la Coupe. »

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René Domingo, le capitaine stéphanois, portés par ses joueurs, heureux après leur victoire contre Nancy (1-0) en finale de la Coupe de France 1962.

Dès demain, 

revivez les festivités qui ont suivi la finale de la Coupe de France 1962. 

Revivez la préparation de la finale de la Coupe de France 1962
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depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

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Saint-Etienne-Nancy : le condamné se rebiffe (1ère partie)

Ce dimanche 4 janvier 2015, l’AS Saint-Etienne accueille l’AS Nancy-Lorraine pour les 32e de finale de la Coupe de France. Ce premier post est l’occasion pour moi de vous présenter tous mes bons vœux. Que cette nouvelle année soit couronnée de succès pour les Verts. Avec les grands rendez-vous qui nous attendent, j’espère satisfaire encore plus votre curiosité sur l’histoire de l’AS Saint-Etienne.

 

Le 13 mai 1962, alors que l’ASSE s’apprête à rejoindre la Division 2 pour la première fois depuis son accession en 1938, René Domingo et ses coéquipiers disputent la finale de la Coupe de France contre le FC Nancy au stade Yves-du-Manoir à Colombes. Aujourd’hui, je vous propose de revivre le premier des trois volets consacrés à cette finale. Bonne lecture.

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Les objets de la finale. Musée des Verts.

Le 8 mai 1962, le FC Nancy fête Bruno Ferrero. Il est 11 heures dans la grande salle du Café-Glacier, place Stanislas à Nancy, quand le gardien reçoit des mains du docteur Pierre Weber, député-maire de la ville, l’Oscar Byrrh qui récompense le meilleur joueur de Division 1 du mois d’avril.

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Le Miroir des Sports, 14 mai 1962.

Le lendemain, au siège du club lorrain, tout près de la majestueuse place Stanislas, un autre docteur, Boileau, et Mario Zatelli, respectivement président et entraîneur du FCN, préparent la finale de la Coupe de France contre Saint-Etienne dans la joie et la bonne humeur.

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Mario Zatelli (à droite), assis à côté de Lucien Leduc, a l’expérience pour conduire le FC Nancy à la victoire en finale de Coupe de France.

Mario Zatelli lie son destin à Nancy

C’est en 1959 que les deux hommes ont lié leur destin. A la recherche d’un entraîneur pour son club pensionnaire de la Division 2, le docteur Boileau pense immédiatement à Mario Zatelli. Invité par le président nancéien à venir lui rendre visite dans sa villa à Sainte-Maxime, l’ancien joueur de l’OM donne son accord pour rejoindre Nancy en tant qu’entraîneur. Depuis sa prise de fonction, le méridional n’a cessé de faire progresser le club lorrain. En trois ans, son bilan est plutôt flatteur : la première année, Nancy remonte en Division 1, la suivante, il se classe à une huitième place synonyme de bon maintien. Aujourd’hui, au stade Yves-du-Manoir de Colombes, Mario Zatelli emmène ses joueurs pour y disputer la finale de la Coupe de France. L’ascension du club nancéien est fulgurante.

Une finale remplie d’amertume

A Saint-Etienne, en ce printemps 1962, on déchante. Certes, les Stéphanois sont qualifiés pour la finale de la Coupe de France, mais aussi relégués en Division 2. Le mardi 27 avril, la lourde défaite des Verts à Lyon (0-4) scelle définitivement le sort d’Henri Guérin, son entraîneur en poste depuis la fin août 1961. François Wicart, ancien joueur de l’ASSE, entouré d’un directoire de cinq membres, dont deux joueurs (Rijvers et Domingo) est chargé d’assurer l’intérim. Ce n’est pas la première fois que l’ancien défenseur des Verts prend en charge l’équipe professionnelle de l’ASSE. En 1960, après le licenciement de René Vernier, il avait déjà dû jouer les pompiers de service.

Cette relégation ne réjouit nullement Zatelli : « La relégation de Saint-Etienne n’a pas arrangé nos affaires. Nos adversaires vont tout mettre en œuvre pour sauver leur saison en remportant la Coupe. Il y va du prestige du club, mais surtout du standing personnel des très bons joueurs que compte cette équipe. On parle beaucoup des blessés de l’AS Saint-Etienne. Il m’étonnerait fort que le 13 mai, les Rijvers, Baulu et autres Herbin, ne trottent pas comme des lapins. »

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Photo : Roger Krieger, L’Equipe, 10 mai 1962.

Zatelli, l’homme des finales

Mario Zatelli n’a jamais perdu une finale. En 1938, alors qu’il évolue au poste d’avant-centre à l’Olympique de Marseille, il tombe malade la veille de la finale contre Metz.

« Les dirigeants olympiens étaient consternés, raconte Zatelli avec sa verve bien méridionale.  » Le pôvre, il ne pourra pas jouer « . Bastien, le capitaine de l’époque, accourt alors à mon chevet. J’entends encore le grand rouquin s’écrier : « Mario, il jouera… ou il crèvera ! » Mario a joué et l’OM s’est imposé 2-1.

En 1953, alors qu’il occupe le poste de directeur technique à Nice, il réussit le doublé Coupe-Championnat. A 49 ans, le méridional ne souhaite pas faire démentir le proverbe qui dit : « Jamais deux sans trois » Après la victoire de Nancy contre Metz en demi-finale (1-0), il exhibait fièrement dans le vestiaire une image porte-bonheur de Notre-Dame de la Garde. Inutile de dire qu’à Colombes, elle sera encore enfouie dans une des poches de son veston.

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Photos : L’Equipe, 12 mai 1962.

A Nancy, c’est l’effervescence

A la Brasserie de la Paix située dans le centre-ville de Nancy, la fièvre gagne chaque jour un peu plus le siège des inconditionnels du FCN. L’engouement pour cette finale est tel que toutes les places allouées au supporters lorrains se sont envolées en quelques jours.

Un train spécial, une quarantaine de cars et de nombreuses voitures particulières sont prêts à déferler sur Colombes. Les « Rouge et Blanc » seront alors portés par quelques 7 000 âmes venues de toute la Lorraine. Assaillis comme il se doit par la télévision, la radio, les photographes avides de clichés, c’est dans ce climat euphorique et néanmoins perturbant que Zatelli prépare l’évènement.

L'Equipe, 10 mai 1962.
L’Equipe, 10 mai 1962.

Contre mauvaise fortune bon cœur

A Saint-Etienne, l’engouement n’a pas la même saveur. Au Parc des Princes, les Verts ont arraché leur qualification pour la finale aux dépens d’Angers (1-0). Les 5 000 à 6 000 fidèles du stade Geoffroy-Guichard n’ont pas daigné effectuer le déplacement jusqu’à Colombes. Ils seraient même prêts à échanger cette place en finale contre une place de dix-septième en Division 1 synonyme de maintien. Encore sous le coup de la colère due à la descente de leur club en Division 2, ils ont la rancœur tenace et ne sont pas prêts à pardonner même pour une finale de Coupe de France. Pour mieux montrer leur désaveu, le train spécial qui devait partir de Saint-Etienne a été annulé faute de candidats. Seuls cinq à six cars seulement prendront le chemin de Colombes.

« Que voulez-vous, bougonne Charles Paret, le secrétaire général du club, nous sommes dans la situation délicate d’un père de famille qui marie sa fille et qui vient de perdre sa femme. » Sur les 90 finalistes de la Coupe de France qui se sont succédé depuis… 1918, Saint-Etienne est le club qui comptera donc le moins de supporters à Colombes pour les y encourager.

Le curé et le maire de Colombes avec les Verts

Cette désaffection n’inquiète pourtant pas Jean-Claude Baulu, l’enfant de Colombes : « Nous n’aurons guère de supporters de Saint-Etienne, mais vous verrez que toute la population de Colombes, le curé et le maire en tête, seront avec nous. Toute ma famille est originaire de Colombes, ne l’oubliez pas. » René Ferrier, le défenseur stéphanois, y va également de son couplet : « Du moment que Baulu est là, tout est possible. A lui seul, il fait autant de bruit que cinq cents supporters ! » Baulu, le porte-bonheur stéphanois a inscrit 7 des 12 buts de son équipe en Coupe de France.

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Licence de Jean-Claude Baulu, saison 1961-62. Musée des Verts.

L’ailier droit stéphanois est peut-être le plus préparé des Stéphanois à cette finale. Né à Courbevoie, il a grandi à Colombes. Le 30 octobre 1961, il s’y est même marié. Lors de la cérémonie religieuse, le Révérend-Père Dupé ajoute un post-scriptum à son prêche : « Rendez-vous avec votre femme pour les vêpres du troisième dimanche de Pâques. »

Le couple est au rendez-vous de la paroisse. Et il ne sera pas le seul. Toute la noce est reconstituée, avec une ribambelle de quémandeurs qui assaillent depuis un mois le restaurant du père Baulu à la gare de l’Est.

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France Football, 8 mai 1962.

Hervé Collot, le pitre nancéien

De l’équipe nancéienne qui s’apprête à disputer cette finale contre Saint-Etienne, Hervé Collot est le seul rescapé de celle perdue par Nancy face à Lille (1-2) en 1953. Celui qui était le plus jeune joueur sur le terrain fait aujourd’hui figure d’ancien au FCN. Zatelli accorde à son joueur amateur une confiance aveugle et n’avait pas hésité à lui confier le brassard de capitaine en l’absence de Brezniak.

Dans le vestiaire, s’il est écouté par ses partenaires, il demeure autant un farceur qu’un animateur incomparable. « C’est moi qui tiens le rôle de pitre. Il en faut un car le FC Nancy, c’est une équipe, mais c’est aussi un certain climat d’optimisme et de camaraderie, une façon de concevoir avec bonne humeur et sourire le métier de footballeur. Et cela compte dans ses succès actuels au moins autant que les systèmes de jeu et la valeur intrinsèque de chacun d’entre nous. »

Vidéo INA : les préparatifs de la finale

 A Saint Etienne : entraînement sous la direction de François Wicart ;
à Nancy : vente des billets et entraînement de l’équipe (sujet muet).

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Saint-Etienne privé de son éminence grise

Le 9 mai, à Saint-Etienne, François Wicart dirige le dernier entraînement avant le grand départ pour Colombes. Tout se passe pour le mieux jusqu’à ce que Kees Rijvers, le petit stratège hollandais des Verts s’écroule, victime d’un claquage à la cuisse gauche. Pour lui, la finale est d’ores et déjà terminée. Son métier et sa vision du jeu vont cruellement faire défaut. En bon professionnel, le blessé de la dernière heure déclare un brin fataliste : « Il vaut mieux pour mes camarades que cela se soit produit aujourd’hui plutôt que dimanche sur le terrain du stade de Colombes au cours de la finale. » Le malheur des uns fait souvent le bonheur des autres, a-t-on coutume de dire. Jean Oleksiak se retrouve donc propulsé titulaire au poste d’ailier gauche. En revanche, le jeune Polny, auteur d’une bonne fin de saison, est sacrifié au profit de Sbaiz. Cassado reprend, quant à lui, sa place d’arrière droit.

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Kees Rijvers, le Hollandais des Verts, s’est blessé lors du dernier entraînement. Pour lui, la finale à Colombes est d’ores et déjà terminée.

Le vendredi 11 mai, dans la matinée, la délégation stéphanoise embarque dans le train qui les emmène de la gare de Châteaucreux vers la gare de Lyon à Paris. Les joueurs, bien décidés à sauver quelque peu une saison somme toute décevante, ont promis à Roger Rocher, leur président, de défiler dès le lundi, à partir de 18 heures, de la gare au siège du club dans le centre-ville. Ils pourront compter sur le soutien indéfectible de leurs épouses. Invitées par le club, en revanche, elles ne logeront pas au même endroit que leurs maris de joueurs. Ces supportrices pas comme les autres résideront dans un hôtel tout proche de la gare Saint-Lazare.

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Photo : L’Equipe, 12 mai 1962.

Après un dernier entraînement au stade du Pont-Essey, les Nancéiens, eux aussi, sont partis le vendredi, mais dans l’après-midi. Partis de Lorraine avec 23 minutes de retard, le train des « Rouge et Blanc » est arrivé gare de l’Est à l’heure initialement prévue. Hervé Collot, avec son optimisme légendaire, pense alors que les 23 minutes rattrapées étaient de bon augure pour son équipe avant la finale.

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Une de L’Equipe, 12 mai 1962.

Claude Abbes et la Croix de Lorraine

Claude Abbes, le gardien des Verts, redoute les Nancéiens. Mais plus que l’équipe lorraine, c’est la rencontre avec le Général de Gaulle qui l’interpelle : « L’ennuyeux, c’est que nous ne pouvons pas attendre du général De Gaulle qu’il nous soutienne, dit-il, sur le ton de l’amusement. La croix de Lorraine qui orne les maillots de nos adversaires va nous faire un tort terrible… La présence du président de la République, tout le décorum qui entoure cette rencontre, agissent forcément sur les nerfs. Mais à vrai dire, je préfère être trop nerveux que pas du tout… Il faudra surmonter le trac qui ne va pas manquer de nous étreindre. Cette fois, j’espère que nous trouverons à défendre notre victoire jusqu’au bout si jamais le score nous était favorable à trois minutes de la fin… »

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SAINT-ETIENNE.- Ces dix Stéphanois enchaînés les uns aux autres ont juré de se mettre en colère dimanche à Colombes et de remporter la Coupe. De gauche à droite : Herbin, Baulu, R. Tylinski, Guillas, Ferrier, Domingo, Cassado, Liron, Abbes et Oleksiak. – L’Equipe, 12 mai 1962.

Pour Abbes et Domingo, le temps presse

A 35 ans, Claude Abbes n’a plus de temps à perdre. Il estime que cette finale constitue sa dernière chance de remporter ce trophée : « Ca sera cette fois ou jamais. Il nous faudra nous méfier de la vélocité des avants lorrains et surtout de la puissance de tir de Muro. Lors du dernier match que nous avons disputé à Nancy, l’Argentin m’avait marqué un but sur coup de pied arrêté et avait failli en marquer un second dans les mêmes conditions. Ce match se présentera sous un aspect double. Tactiquement, nous allons tenter de résoudre un problème sur lequel nous n’avons pas cessé de buter durant toute la durée de la saison : comment venir à bout d’une défense renforcée ? Je souhaite ne pas connaître une nouvelle fois cette terrible déception qui assaille les joueurs vaincus lorsque ceux-ci regagnent le tunnel conduisant aux vestiaires. »

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René Domingo, Claude Abbes et Richard Tylinski (de g. à d.) sont prêts pour la finale à Colombes.

 

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L’Equipe, 11 mai 1962.

Au coup d’envoi, Abbes, Domingo, Oleksiak, Liron, Ferrier, Herbin et Tylinski, les rescapés de la finale perdue contre Monaco se souviendront que le 15 mai 1960, ils avaient tenu la Coupe de France pendant deux minutes (entre la 86e et 88e) avant de la laisser s’échapper au détriment de Monaco (2-4, après prolongations).

Thierry CLEMENCEAU

Dès demain, revivez la finale de la Coupe de France 1962. 

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