Ainsi parla Robert Herbin à Jacques Chancel

Le mardi 23 décembre 2014, Jacques Chancel, 86 ans, présentateur de l’émission Radioscopie dont la première a eu lieu le 5 octobre 1968 sur France Inter, puis du Grand Echiquier sur Antenne 2 (de 1972 à 1989) s’est éteint. Georges Brassens, Serge Gainsbourg, Annie Girardot ou Bernard Blier, entre autres, sont passés au micro de Jacques Chancel dans sa célèbre émission culturelle radiophonique. Les entretiens avec ce grand amateur de cyclisme étaient un passage incontournable pour les personnalités de l’époque.

Le 17 mars 1976, à 17 heures, soit trois heures trente avant le début du quart de finale retour de Coupe d’Europe contre le Dynamo Kiev, Robert Herbin, l’entraîneur stéphanois, se confiait à Jacques Chancel. Aujourd’hui, je vous en propose quelques extraits.

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Jacques Chancel : « Dans trois heures trente, le match. Enervé ?
Robert Herbin : 
« Je me suis aperçu que je devenais mauvais lorsque je me laissais gagner par l’énervement et, à plus forte raison, par la colère. La haine ? Connais pas, sinon, quelquefois, quand je reçois des lettres d’insultes anonymes (ça m’arrive). La violence ? Ce n’est pas le genre de la maison.

– Confiant ?
– Comme on peut l’être quand on sait, par expérience, que les équipes aux rouages les mieux huilés peuvent perdre subitement de leur superbe si elles sont tant soit peu bousculées.

– Un métier le football, vraiment ? Si c’était à refaire ?
– Je referais sûrement la même chose, mais je m’arrangerai tout de même pour étudier plus attentivement le solfège. Mon père est professeur au Conservatoire de Nice et je crois que dans le domaine qui est le sien, il ressent des joies aussi grandes que celles que je peux moi-même connaître. Mais le football est aussi un art et les footballeurs sont des créateurs. Du moins, à mes yeux. C’est bien pourquoi je lui ai sacrifiés, en partie, mes études. Mais vous savez tout se rattrape : je bouquine, je visite les musées, je me promène dans la nature. Mon livre de chevet ? Le dictionnaire ! Non, ce n’est pas une blague ! Au début, c’était pour l’orthographe (pas toujours parfaite), mais, maintenant, c’est pour le plaisir. Un jour, je ferai, peut-être, le tour du monde en bateau. Ravi de savoir, Jacques Chancel, que depuis quelques années, les sportifs s’expriment aussi bien que certains savants ou certains politiciens…

– Un homme, ça n’a pas de prix. Comment peut-on faire du commerce sur le dos d’un homme qui joue au football ?
– En football, on ne joue pas en « play back ». Les vedettes de la chanson chantent sur du velours et gagnent infiniment mieux la vie. Qui s’en indigne ? Il faudrait que les gens puissent vivre au sein d’un club pour comprendre réellement ce qu’est un footballeur digne de ce nom. En tout cas, à Saint-Etienne, le football n’est pas un commerce. C’est bien pourquoi j’y suis resté.

– Le trac ?
– Surtout au moment de composer l’équipe. Il faut savoir bannir tout sentiment et ne penser qu’à l’équipe dans son ensemble. Or, ça ne se voit peut-être pas, mais je suis assez sentimental. Et ce n’est pas toujours facile d’expliquer à un joueur pourquoi on ne l’a pas choisi, surtout quand il s’agit d’une intuition.

– Ces joueurs qui s’embrassent… En rugby, on est plus sobre.
– Je trouve ce genre de réaction tout à fait légitime. Contrairement à ce que l’on croit, ces embrassades sont parfaitement spontanées. Une sorte de délivrance. Parfois, de mon banc de touche, j’ai envie d’y participer.

– Et si le succès vous tournait le dos ?
– Je crois que Saint-Etienne est armé pour le succès, mais, également pour l’échec dans la mesure où nos structures sont suffisamment solides pour ne pas nous enliser dans un déclin définitif. Ici, je crois qu’on peut toujours aller de l’avant et c’est bien pourquoi j’ai préféré songer d’abord à une équipe de club plutôt qu’à l’équipe nationale. Cela dit, je pense que l’équipe nationale n’a pas joué sur sa vraie valeur toutes ces dernières années.

– Votre vie privée ?
– Je la protège de toutes mes forces. Mais je veux bien vous dire que, rentré à la maison, nous ne parlons pas football, ma femme, ma fille et moi. Ma femme accepte pourtant de venir aux matches maintenant que je n’entre plus sur le terrain. Ma fille veut devenir journaliste.

– La vieillesse ?
– A l’entraînement, avec mes joueurs, je me sens encore aussi jeune que ceux qui ont dix ans de moins que moi. Je vais essayer de continuer dans cette voie. »

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« Quand on donne quelque chose de beau au public,
il est capable de l’accueillir. »
Jacques Chancel

 

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Saint-Etienne « champion de Noël »

Depuis dimanche, les joueurs de l’AS Saint-Etienne sont en vacances. Cette trêve leur permettra de passer Noël en famille. Cela n’a pas été toujours le cas. Le 25 décembre 1956, les joueurs de football de Division 1 disputaient la dernière journée des matches aller. Une victoire face à Nîmes suffisait aux Stéphanois pour l’obtention du titre honorifique de « champions d’automne ». Récit.

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René Ferrier, Une de France Football, 19 décembre 1956.

Le 2 septembre 1956, l’équipe de Saint-Etienne bat Lens 3-1 (3e j.) et s’empare de la première place du classement mais ex aequo avec Sedan. Dès la 4e journée, un succès à Nancy (7-1) lui assure seule le fauteuil de leader. Elle ne l’a plus quitté depuis.

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L’Equipe, 22 décembre 1956.

Avant de recevoir Nîmes, les hommes de Jean Snella ont inscrit 48 buts dont 47 lors des douze premières journées. Néanmoins, depuis quatre rencontres, Eugène Njo-Léa et ses coéquipiers ont du mal à trouver le chemin des filets et n’ont marqué qu’à une seule reprise, à Valenciennes (1-1, 15e j.). Si le fléchissement de Saint-Etienne est évident, il n’est pas non plus catastrophique.

Eugène Njo-Léa, premier buteur de la rencontre (au premier plan) assis à côté de René Ferrier, auteur d'un match solide.
A Valenciennes, les Verts n’ont pu faire mieux que match nul (0-0). René Ferrier (le deuxième en partant de la gauche), mis au repos par Jean Snella, était absent pour la première fois de la saison.

« Mekloufi n’était pas dans un bon jour »

« Ne dramatisons pas, dit Jean Snella. Il y a eu un fléchissement, je ne le nie pas, mais nous remontons le courant. » Après le match nul contre Toulouse (0-0), Pierre Faurand, le président de l’ASSE, trouvait une autre explication à ce mutisme des attaquants stéphanois. « Mekloufi n’était pas dans un bon jour. Militaire, il fait actuellement ses classes qui ne sauraient constituer une préparation aux rigueurs de la compétition. Depuis son incorporation, nous n’avons plus vu de buts « à la Rachid ». »

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Malgré ce match nul, les Verts sont toujours les leaders de la Division 1 avec 24 points. Ils possèdent deux longueurs d’avance sur Lens et trois sur Reims.

BOBET ET MEKHLOUFI A L'EQUIPE
Rachid Mekloufi (ici en compagnie de Louison Bobet) n’a pas le rendement escompté depuis qu’il est incorporé au Bataillon de Joinville où il effectue ses classes.

Ce 25 décembre, Jean Snella et ses hommes l’attendent depuis des semaines. En ce jour de Noël, ils reçoivent Nîmes et en cas de victoire, ils seraient sacrés champions d’automne. Certes, ce titre n’est qu’honorifique mais il récompenserait une magnifique première partie de saison.

Les célibataires réveillonnent chez les joueurs mariés

Pour bien préparer ce rendez-vous, l’entraîneur stéphanois avait pensé organiser une mise au vert dans un hôtel de la banlieue stéphanoise. Mais il s’est ravisé et a même proposé une idée très originale. Il a demandé aux joueurs mariés que sont Abbes, Rijvers, Lefèvre, Domingo, Wicart et Michel Tylinski d’inviter leurs jeunes coéquipiers célibataires à réveillonner avec eux.

Mekloufi ne fait pas partie des joueurs retenus. Kees Rijvers, le petit stratège hollandais, blessé à un mollet, est incertain. S’il devait renoncer, Snella intégrerait Fouillen, qu’il connaît bien depuis ses premiers pas en minimes à Lorient et qu’il a fait venir à Saint-Etienne à l’intersaison. Enfin, Oleksiak fait sa rentrée dans le onze stéphanois.

Claude Abbes, recommandé par René Llense à l'ASSE.
Jean Snella a invité Claude Abbes (au premier plan) et quelques-uns de ses coéquipiers mariés à inviter les joueurs célibataires à passer le réveillon en « famille ».

Les Nîmois, défaits à Sochaux (1-3) lors de la dernière journée, sont arrivés dans la cité stéphanoise après un détour par Lyon. A défaut de réveillonner en famille, comme de tradition, Kader Firoud, l’entraîneur des Crocodiles, a improvisé un bon repas mais sans commune mesure avec les bonnes tables dressées les veilles de Noël.

Nîmes, peu à l’aise à l’extérieur, Firoud a décidé de remplacer Bandera par Bettache. Son demi droit Laffont, qui souffre d’une élongation, est lui suppléé par Schwager. Enfin, le jeune Salabert, 19 ans, pur produit de la formation nîmoise, a toujours la confiance de son entraîneur.

 A Noël, c’est jour de foot à Saint-Etienne

En Angleterre, le boxing day se déroule le 26 décembre. Cette tradition victorienne perdure depuis 1888, date de la création de la Ligue anglaise. En France, ce n’est pas dans la coutume de jouer au football le 25 décembre. Cela n’a pourtant pas empêché les 8 160 spectateurs, sitôt les agapes du réveillon de Noël digérées, de prendre le chemin du stade Geoffroy-Guichard.

MAGAZINE ST ETIENNE
Le public stéphanois a répondu présent pour fêter les futurs champions d’automne.

Kees Rijvers montre la voie

Kees Rijvers, l’organisateur d’une équipe retrouvée, se transforme en buteur et montre la voie à ses coéquipiers. Dès la 16e minute, Eugène Njo-Léa, la perle noire stéphanoise, remonte le ballon pour Fouillen qui le transmet au petit stratège hollandais. Rijvers, à vingt-cinq mètres, déclenche un tir qui laisse Ferrand, le gardien gardois, sans réaction (1-0, 16e).

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Kees Rijvers, le maître à jouer des Verts, complètement retrouvé, montre la voie à ses coéquipiers en ouvrant le score dès la 16e minute.

Les hommes de Snella dominent les débats, bien aidés par des défenseurs adverses peu impliqués. Sur une nouvelle attaque stéphanoise, Njo-Léa sert Fouillen qui transmet le ballon à Lefèvre. L’attaquant stéphanois dribble Bettache et, après un contrôle, envoie le ballon hors de portée de Ferrand (2-0, 27e).

Dix minutes plus tard, Rijvers s’amuse de Balarguet par ses crochets et contre-pieds, joue en une-deux avec Lefèvre avant de frapper au but. Le ballon trouve Venturi sur sa route, mais Njo-Léa, qui a bien suivi, réussit le troisième but et son dix-septième de la saison (3-0, 37e).

Vexés, les Nîmois tentent de réagir une première fois par Kominek avant que Rahis, d’une belle frappe, frôle le montant droit d’Abbes.

Eugène Njo-Léa ouvre le compteur-buts d'une rencontre riche en réalisations.
A la 37e minute, Eugène Njo-Léa, le buteur stéphanois, inscrit son dix-septième but de la saison.

Au terme de cette première mi-temps, le public stéphanois a retrouvé l’équipe flamboyante qui caracolait en tête du classement au mois de septembre. Kader Firoud, peu satisfait de la prestation de ses joueurs, a fait trembler les murs des vestiaires nîmois pour tenter de les secouer. La colère de l’ancien Stéphanois de l’après-guerre (1945-48) ajoutée au relâchement coupable des Stéphanois donne l’impression que les Gardois peuvent inquiéter l’actuel leader.

Coup dur pour René Ferrier

A la 69e minute, René Ferrier, sur lequel Jean Snella fonde de grands espoirs, est victime d’un claquage. C’est la mort dans l ‘âme qu’il doit quitter le terrain. Le coach stéphanois procède alors à quelques ajustements dans son équipe. C’est ainsi que Njo-Léa occupe le poste d’inter droit et Oleksiak celui de demi droit. Enfin, René Domingo, le valeureux capitaine des Verts, remplace Ferrier au poste de demi-gauche.

Cette réorganisation semble quelque peu perturber les Stéphanois. Malgré cela, les tentatives de Ziack, Rahis et Kominek échouent sur une défense stéphanoise pourtant aux abois.

Il faut attendre la 85e minute pour voir les Verts s’assurer un large succès. Bien servi par Rijvers, Njo-Léa, en position d’ailier gauche, brosse son ballon et inscrit dans un angle impossible le quatrième but des siens (4-0, 85e).

L’AS Saint-Etienne championne d’automne 1956-57. Debout (de g. à d.) : Wicart, Peyroche, R. Tylinski, Abbes, Domingo, M. Tylinski. Accroupis (de g. à d.) : Rijvers, Mekloufi, Goujon, Ferrier, Njo-Léa.

Les Verts sont sacrés champions d’automne

Cette victoire met fin à une série de quatre matches sans victoire. Au terme de ces matches aller, Saint-Etienne est sacré champion d’automne avec 26 points. Cela ne s’était pas vu depuis la saison 1949-50 où Lille avait empoché 28 points. Au cours de cette même saison, les Nordistes avaient marqué la bagatelle de 52 buts. A mi-parcours de cette saison 1956-57, les Verts font aussi bien avec 52 réalisations (soit 2,60 de moyenne par match). Ils possèdent également la meilleure défense avec 20 buts encaissés, soit un peu plus d’un par match.

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L’Equipe, 27 décembre 1956.

Les Verts sont champions d’automne mais, fidèle à ses habitudes, Jean Snella a le triomphe modeste. Dans le vestiaire, il déclare : « Nous remontons la pente, et pendant que j’y pense, on ne tient peut-être pas assez compte du fait que Saint-Etienne a reçu neuf fois et s’est déplacé huit fois, tandis que Lens a reçu dix fois et a joué sept fois sur terrain adverse. Pas mal ce petit bilan, hein ? » Pas très loin de son entraîneur, Pierre Faurand, muni de son appareil radio-récepteur miniature, cherche à savoir si Toulouse avait encaissé un but à Sochaux. C’est le cas et malgré la victoire des Toulousains (3-1), le président stéphanois est un homme heureux. Champions d’automne, meilleure attaque, meilleure défense, Saint-Etienne a vraiment vécu une belle première partie de saison.

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L’Equipe, 27 décembre 1956.

 Thierry CLEMENCEAU

« Quand on donne quelque chose de beau au public,
il est capable de l’accueillir. »
Jacques Chancel

 

 

L’ASSE vous souhaite de bonnes fêtes de fin d‘année par ASSE

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Inauguré le 20 décembre 2013, le Musée des Verts fête aujourd’hui son premier anni-Vert-saire. A l’occasion de cette journée spéciale, découvrez le premier musée consacré à un club de football en France ou redécouvrez le comme vous ne l’avez jamais vu grâce à des visites spéciales organisées toute la journée du samedi 20 décembre 2014.

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Saint-Etienne-Evian-T.G. : la rédemption des Verts

Ce dimanche 21 décembre 2014, Saint-Etienne accueille Evian-Thonon-Gaillard pour le compte de la 19e et dernière journée des matches allers de la Ligue 1. Le 26 octobre 1984, les Verts recevaient Thonon-les-Bains, l’équipe surprise du début de saison en Division 2. Bonne lecture.

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L’AS Saint-Etienne 1984-85 : debout (de g. à d.) : Oleksiak, E. Clavelloux, Primard, Gilles, Ferri et Castaneda (c.). Accroupis (de g. à d.) : Bellus, Daniel, Ribar, Milla et Peycelon.

Saint-Etienne débute la saison 1984-85 en Division 2. Cela ne lui était plus arrivé depuis la saison 1962-63. Début août, les pronostics vont bon train pour la remontée immédiate en Division 1. Deux clubs ont les faveurs des spécialistes. Le premier d’entre eux, l’Olympique Lyonnais, est entraîné par l’ex-entraîneur mythique des Verts, Robert Herbin. Le club rhodanien compte dans ses rangs deux anciens Stéphanois : Félix Lacuesta et Jean-François Larios. Le second club, Nice, s’est renforcé en conséquence avec les arrivées de Dominguez, Gemmrich et Dalheb.

Saint-Etienne et Nîmes outsiders

Derrière ces deux équipes, Saint-Etienne et Nîmes font figure d’outsiders. Les Verts ne souhaitent pas végéter en D2 avec le risque de s’y enliser. Malgré la crise qui a secoué les Verts, même en Deuxième Division, le club conserve un certain standing. Si sur le terrain, l’ASSE souhaite repartir du bon pied, en revanche, en coulisses, André Laurent, le président de l’ASSE, s’active pour retrouver une assise financière qui lui fait toujours défaut.

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L’Equipe, 21 octobre 1984.

Pour tenter de remettre son navire à flot, le président stéphanois, a confié l’équipe première à Henrik Kasperczak en provenance de Metz. L’entraîneur polonais aux 62 sélections a pour mission de redorer un blason abîmé par la crise qui a secoué le club stéphanois depuis le printemps 1982.

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France Football, 14 août 1984.

Malgré les renforts de Gilles (OM), Cangini (Metz), Moyroud (Villefranche) et de l’international camerounais Roger Milla, les débuts dans cette division 2 sont plus difficiles que prévus.

France Football, 14 août 1984.
France Football, 14 août 1984.

Thonon, l’équipe surprise

La grosse surprise du début de saison provient de Thonon. Le club haut-savoyard a le vent en poupe et sa place dans le premier tiers du classement n’est pas usurpée. Après une remarquable carrière en Coupe de la Ligue qui lui a permis d’atteindre les quarts de finale (battus par Monaco, 1-2), Lucien Muller, l’entraîneur monégasque a décelé de la qualité chez son adversaire d’un soir : « J’ai découvert une formation qui me semble de taille à rivaliser avec les meilleures équipes de Division II et qui paraît en tout cas aussi bien armée que Nice le grand favori. » L’équipe dirigée par Canzio Capaldini, le remplaçant de Jean-Pierre Carayon, compte une véritable armada internationale : le Tchèque Ondrus, le Polonais Lazurowicz, le Yougoslave Nikolic, l’Espagnol Espareil et le Chilien Zurita.

Thonon-les-Bains peut compter sur Gilles de Rocco, un gardien expérimenté au service de la Division 2.
Thonon-les-Bains peut compter sur Gilles de Rocco, un gardien expérimenté au service de la Division 2.

Thonon est donc armé pour faire souffrir les meilleurs et l’appétit venant en mangeant, s’est découvert des ambitions somme toutes raisonnables. « Nous visons la sixième place » avance M. Perracino, le successeur de M. Fossard à la présidence du club. Capaldini, lui, se veut plus mesuré : « Finir 8e ne serait déjà pas si mal ». Deux anciens Stéphanois se sont croisés à l’intersaison : Patrick Parizon a tourné la page thononaise alors que Dominique Vésir a posé ses valises sur les bords du lac Léman.

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Henrik Kasperczak, ici à l’entraînement, tente d’insuffler un nouveau souffle à ses joueurs.

Kasperczak joue les superviseurs

Avant de recevoir l’actuel 3e du groupe B de la Division 2, Saint-Etienne est méfiant. Les Haut-Savoyards viennent en effet de s’imposer 4-1 contre Cannes et restent à l’affût d’un éventuel faux-pas du leader niçois. La défaite à Sète (1-0) lors de la dernière journée de Championnat n’a pas atteint le moral d’Henrik Kasperczak. Il s’est efforcé toute la semaine de redonner confiance à ses joueurs. Dès son retour de Sète, il a repris la route pour aller assister au match opposant Thonon à Cannes. « Une équipe de Thonon qui m’a impressionné par sa force collective telle que je la conçois, dit-il. Certes, elle sera privée de deux de ses meilleurs joueurs suspendus mais je crois que nous devrons nous méfier d’elle malgré cela. » Ondrus et Augustin suspendus, Zurita blessé, la tâche s’annonce difficile pour Thonon.

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7 720 spectateurs seulement ont fait le déplacement pour voir Thonon, l’une des meilleures équipes du moment, dans un stade Geoffroy-Guichard qui sonne creux. Ils n’auront pas à le regretter. Dès la 7e minute, Roger Milla, sur une belle ouverture de Daniel, ouvre la marque pour Saint-Etienne. Après avoir purgé ses trois matches de suspension après son exclusion lors du derby Saint-Etienne-Lyon : 0-0, 8e j., la nouvelle coqueluche des supporters stéphanois est bien le leader d’attaque qu’attendait Kasperczak.

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Roger Milla, souhaite faire profiter Saint-Etienne de son expérience pour faire remonter le club en Division 1.

Bellus double la mise

Plus entreprenants, les Verts multiplient les initiatives et Bellus est tout près de doubler la mise pour les siens (11e). Les coéquipiers de Castaneda dominent outrageusement et ce même Bellus, encore bien servi par Daniel, ne laisse pas passer l’opportunité de doubler la mise pour les Stéphanois (2-0, 20e).

Quatorze minutes plus tard, les Stéphanois  toujours par Bellus assomment définitivement les Montagnards (3-0, 34e). Bien que la cause semble entendue, les hommes de Kasperczak ne veulent pas s’arrêter en si bon chemin et Ferri (35e et 43e) puis Daniel (42e) sont tout près d’alourdir une addition déjà bien corsée. Dominique Vésir, pour son grand retour au stade Geoffroy-Guichard, est remplacé à la pause par Girard.

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Eric Bellus, auteur de deux buts en première mi-temps, a souvent porté l’estocade devant les buts de Gilles de Rocco, le gardien thononais.

En deuxième mi-temps, les Haut-Savoyards se reprennent quelque peu mais la marque ne bougera plus. Le seul point négatif de la soirée pour Kasperczak concerne la blessure de Gilles Peycelon. Après s’être fait marcher sur le bras, une fracture du cubitus a nécessité la pause d’un plâtre.

« Rien à dire »

Après cette défaite, Canzio Capaldini ne cherche pas d’excuse : « Rien à dire, sinon que le remplacement forcé de Ondrus, Augustin et Zurita par trois joueurs manquant de compétition nous a manifestement beaucoup coûté. » Gilles de Rocco, le gardien thononais, malgré ses trois buts encaissés, s’estime presqu’heureux : « Franchement, lorsque j’ai vu que nous étions menés 0-3 au bout d’une demi-heure, et voyant que nous ne cessions de reculer face à une équipe stéphanoise très entreprenante, j’ai eu peur que nous n’entrions au bout du compte dans le Livre des records ! »
Chez les Verts, le ton est plus joyeux. « C’est bien pour nous, dit Thierry Oleksiak. Reste maintenant à obtenir à l’extérieur le résultat qui nous permettra de franchir un nouveau palier de notre résurrection. »

Avec cette victoire, les Stéphanois remontent à la 9e place du Groupe B de Division 2. Si l’attaque est encore loin de son rendement maximum avec seulement 12 buts inscrits en autant de rencontres, en revanche, l’ASSE possède la meilleure défense avec 7 buts encaissés.

 Thierry CLEMENCEAU

Saint-Etienne-Thonon-les-Bains: 3-0. Buts : Milla (7e), Bellus (20e et 34e).
Saint-Etienne : Castaneda (cap.) – E. Clavelloux, Oleksiak, Gilles, Ferri – Daniel, Peycelon (Primard, 58e), Ribar – Sanchez (Cangini, 71e), Milla, Bellus. Entr. : Kasperczak.
Thonon-les-Bains : De Rocco – Buhlmann, Aguilar, Bajeot (cap.), Covac – Mastroïanni, Martinez (Faure, 62e), Vésir (Girard, 46e) – Rossi, Tréand, Dufour. Entr. : Capaldini.

 

Retrouver également :

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L'AS Saint-Etienne 1938-39
L’AS Saint-Etienne 1938-39

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Inauguré le 20 décembre 2013, le Musée des Verts fête aujourd’hui son premier anni-Vert-saire. A l’occasion de cette journée spéciale, découvrez le premier musée consacré à un club de football en France ou redécouvrez le comme vous ne l’avez jamais vu grâce à des visites spéciales organisées toute la journée du samedi 20 décembre 2014.

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depuis son ouverture le 20 décembre 2013. Et vous ?

Ivan Curkovic, Amabassadeur à vie de l’ASSE, en visite le 22 décembre 2013 : «L’ASSE est un grand club, qui oeuvrait à ce projet depuis une dizaine d’années. Au final, ce travail collectif a permis de donner vie à un endroit magique qui sera un atout supplémentaire pour la ville et la région

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En compagnie d’Ivan Curkovic lors de l’inauguration du Musée des Verts, le 20 décembre 2013, soit un an jour pour jour.

Aimé Jacquet, Ambassadeur à vie de l’ASSE, en visite le 20 décembre 2013 : « La création du Musée des Verts est une idée géniale, quelque chose d’exceptionnel. En le visitant, j’ai ressenti pas mal d’émotions. La joie de revivre tous ces grands moments mais aussi de revoir en images des personnes qui ont marqué l’histoire de l’ASSE.  Les racines sont maintenant indélébiles et cela permettra aux nouvelles générations de s’identifier

Jean-Michel Larqué, Ambassadeur à vie de l’ASSE, en visite le 20 décembre 2013 : « Souvent, dans tels endroits, on voit des trophées exposés les uns à côté des autres. Ici, c’est totalement différent, les lieux allient modernité et souvenir. Ils permettent de revivre de A à Z l’histoire de l’ASSE. Le Musée des Verts enracine encore un peu plus l’ASSE dans la ville, dans la région et même en France. »

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Ivan Curkovic et Aimé Jacquet, deux ambassadeurs à vie de l’ASSE au Musée des Verts.

Bernard Pivot, Président de l’Académie Goncourt, en visite le 17 mai 2014 :  « C’est un musée très moderne. A la fois d’avant-garde et de la nostalgie. J’ai trouvé très amusant l’écran dans le pare-brise de la voiture de Curkovic. Et je suis épaté par la mémoire du conservateur Philippe Gastal. Ce musée est fascinant et admirablement fait. J’ai appris des tas de choses »

Christian Prudhomme, Directeur du Tour de France, en visite le 17 juillet 2014: « Je suis né en 1960, j’ai pris de plein fouet l’épopée des Verts et la légende de l’AS Saint-Étienne. J’ai beaucoup appris durant la visite. J’avais plein de questions. L’ASSE a-t-elle toujours joué en vert ? C’est un exemple, il y a tant à découvrir sur ce club. Lorsque Dominique Rocheteau et moi nous sommes rencontrés à Paris pour parler de cette étape à Saint-Étienne, je lui ai bien entendu confirmé que nous viendrions au Musée des Verts. C’était un passage obligé. »

Vincent Duluc, journaliste à L’Equipe, en visite le 17 octobre 2014: « Que le premier musée consacré à un club de foot réside à Saint-Etienne, c’est logique par rapport à la passion. Le club est une culture à Saint-Etienne. Dans une ville où il y a un musée de la mine, c’est normal qu’il y ait aussi un musée du foot. Ce sont les deux identités de la ville. Je regrette que les stades français ne soient pas assez personnalisés. A l’étranger, le stade fait partie de l’identité du club. Quand on y entre, on y voit des photos d’anciens joueurs. Pendant longtemps, en France, le foot a été méprisé par nos élites intellectuelles. Pas par nos élites industrielles, qui ont même parfois permis son développement, comme par exemple à Saint-Etienne avec le groupe Casino. »

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Nice-Saint-Etienne : Haute tension pour un titre

Ce dimanche 14 décembre 2014, l’AS Saint-Etienne se déplace à Nice pour le compte de la dix-huitième journée de Ligue 1. Après leur élimination en Ligue Europa jeudi, les Verts sauront-ils rebondir sur la Côte d’Azur ? Le 11 mars 1976, entre leurs deux confrontations face au Dynamo Kiev, l’ASSE se rend à Nice pour y disputer l’une des rencontres les plus importantes de la fin de cette saison de Division 1. Récit.

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L’AS Saint-Etienne 1975-76 : debout (de g. à d.) : Curkovic, Janvion, Piazza, Farison, Bathenay, Lopez et Synaeghel. Accroupis (de g. à d.) : H. Revelli, Rocheteau, Larqué et P. Revelli.

Les Stéphanois sont revenus de Simféropol défaits mais pas abattus. Avant de penser au match retour contre le Dynamo Kiev, Robert Herbin et ses hommes doivent songer à leur futur déplacement à Nice pour ce qui constituera le grand choc de la Division 1. Le jeudi matin, pour le traditionnel décrassage, Ivan Curkovic est le premier de l’expédition en Crimée à arriver au stade Geoffroy-Guichard. Bien que convoqué à 10 h 30 comme l’ensemble de ses partenaires, le gardien stéphanois est arrivé dès 9 heures. A 31 ans, le gardien yougoslave fait preuve d’une conscience professionnelle irréprochable. Comme toujours.

Fatigués par leur périple européen, Robert Herbin a accordé une journée de repos à ses joueurs le vendredi.

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Oswaldo Piazza, dédicace le ballon du match contre le Dynamo Kiev (0-2) avant de reprendre l’avion pour la France.

A Saint-Etienne, la neige sévit depuis plusieurs jours. Devant cet aléa de la météo, l’entraîneur stéphanois, habitué aux frimas de l’hiver, doit se contenter d’une séance physique ponctuée d’un petit match de basket.

Herbin supervise Sarramagna

Le dimanche après-midi, Herbin et Rocher se rendent au stade Geoffroy-Guichard pour assister à la victoire de la réserve stéphanoise contre Juvisy (3-1). Tout comme les 1 500 spectateurs, un record pour une rencontre de Division 3 à Saint-Etienne, les deux hommes sont venus assister au grand retour de Christian Sarramagna. Blessé à un genou depuis le 4 août lors du match amical gagné par les Verts contre Penarol de Montevideo (3-2), le Basque effectue une excellente rentrée. Herbin a la confirmation que Sarramagna est prêt pour le déplacement à Nice. Patrick Revelli, touché à une cheville contre Kiev, a donc un successeur tout désigné.

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France Football du 9 mars 1976.

Ce retour compense la perte pour trois mois de Jean-François Larios, victime d’une entorse du genou à l’entraînement. Pour le grand espoir du football stéphanois, sa saison est d’ores et déjà terminée.

Les Niçois au sommet de leur forme

A Nice, la venue de Saint-Etienne se prépare avec le plus grand sérieux. L’attaquant Marc Molitor fait son grand retour à la pointe de l’attaque. Autre rentrée attendue par Vladko Markovic, l’entraîneur de l’OGCN, Jean-François Douis qui a purgé sa suspension de deux matches. Absent lors des matches aller et retour en Coupe de France contre Bordeaux, sa réintégration compense l’absence de Jean-Pierre Adams qui souffre toujours d’une déchirure musculaire au quadriceps gauche. Contre les Verts, le jeune Henri Zambelli le remplacera. La victoire des Niçois à Bordeaux ajoute un attrait supplémentaire à ce choc entre les deux grands du Championnat.

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L’Equipe du 10 mars 1976.

Sur la Côte d’Azur, ce sommet de la Division 1 entre Saint-Etienne (1er avec 37 points) et Nice (3e avec 34 pts) connaît un beau succès populaire. Devant l’engouement que sucite ce match, le bureau de location du club a dû ouvrir ses portes plus tôt que prévu. Les demandes affluent bien sûr des Alpes-Maritimes mais également du Var ou de Corse.

Markovic fait confiance au jeune Toko

Le mardi, Markovic a convoqué seulement quatre joueurs au Parc des Sports. La raison en est toute simple : « Notre jeune avant-centre Toko est un excellent joueur de tempérament mais il manque encore d’expérience. » En appelant Baratelli, Huck et Katalinski, Markovic souhaite accélérer la progression de sa perle tchadienne. Titulaire à la pointe de l’attaque niçoise depuis un mois, cet attaquant athlétique pêche encore par maladresse. Contre les Verts, il sera épaulé par Molitor à droite et le jeune Daniel Sanchez à gauche.

Le face-à-face Katalinski-Curkovic

L’un des atouts essentiels de Nice se nomme Josip Katalinski. De 4 ans le cadet d’Ivan Curkovic, le défenseur central niçois, surnommé « Skija », connaît son compatriote sur le bout des doigts. « Nous avons été tour à tour partenaire et adversaire, selon que cela se passait avec la sélection nationale ou au sein de nos clubs respectifs. Je me souviens qu’au match aller (1-1), Curkovic avait été remarquable. Et si les Stéphanois ont encore une toute petite chance en Coupe d’Europe, c’est à lui qu’ils le doivent. » Malgré l’amitié qui le lieu au gardien stéphanois, il aimerait bien enfin inscrire à Curko son premier but de la tête. Depuis son arrivée en France, il a inscrit une dizaine de buts. « A Zeleznicar, se rappelle-t-il, je tournais à la cadence de 15 à 20 buts, dont au moins la moitié de la tête. »

Ce jeudi, Curkovic espère bien faire encore tousser son ami, lui qui fume un paquet de cigarettes au quotidien. Le gardien stéphanois ne tarit pas d’éloges sur son ami : « Katalinski est un peu plus jeune que moi. Une autre génération, je connais surtout le super-joueur, son palmarès parle pour lui.»

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L’Equipe du 11 mars 1976.

Le mercredi, veille du match, les joueurs azuréens sont confinés dans la résidence du « Petit Palais » sur la colline de Cimiez pour se préparer dans le plus grand calme.

La quiétude avant le vacarme ? Markovic espère que son équipe sera soutenue par le public niçois : « Pour ce match capital pour nous, si nous voulons disputer la saison prochaine une Coupe européenne, nous avons absolument besoin de l’appui total de nos supporters et je compte beaucoup sur leurs encouragements pour transcender encore davantage notre équipe. »

La semaine de vérité des Verts

A Saint-Etienne, Larqué et ses coéquipiers se sont préparés dans la neige et le froid qui sévissent aux portes du Forez. Ces quelques jours ont permis d’oublier la défaite contre le Dynamo Kiev pour se replonger au plus vite dans le Championnat. Pour les Verts, débute une véritable semaine de vérité.

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Une du quotidien L’Equipe du 11 mars 1976.

Du beau monde au stade du Ray

Robert Herbin, formé au Cavigal de Nice, reçoit la visite de son père. Roger Rocher, lui, est arrivé au stade du Ray accompagné de sa mère qui réside à Cannes. Elle assiste pour la première fois à un match de l’AS Saint-Etienne présidée par son fils. Plusieurs figures du football sont présentes dans la tribune officielle. José Arribas et Robert Budzinski, respectivement entraîneur et directeur sportif nantais, venus pour superviser les Verts que Nantes doit affronter quelques semaines plus tard. Les Marseillais Robert Buigues, Jules Zvunka et René Charrier sont également présents.

Le record de spectateurs ne tombe pas

Jeudi 11 mars. Il est 20 h 30, ce premier choc au sommet de l’année 1976 a déplacé 19 394 spectateurs. Peut-être plus. Plus une place sur les terrasses des immeubles environnants du stade n’est disponible. En revanche, le record de spectateurs pour un match de l’OGC Nice à domicile n’a pas été battu. Le précédent date du 11 mai 1952 et un Nice-Racing Club de Paris qui avait attiré 22 740 spectateurs au stade du Ray.

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Christian Sarramagna fait son retour dans l’équipe de Robert Herbin. Il remplace Patrick Revelli, blessé, à la pointe de l’attaque stéphanoise.

Le premier quart d’heure est un véritable feu d’artifice. La première fusée est l’œuvre de Piazza mais un tacle de Guillou écarte le danger. Nice, sous l’impulsion de son excellent trio au milieu composé de Huck, Guillou et Jouve, donne le change. En trois minutes, Katalinski, Toko puis Jouve mettent à contribution Curkovic qui voit dans la foulée son poteau droit renvoyé un tir terrible de Zambelli. A leur tour, les Niçois illuminent le terrain de leurs fusées « rouge et noir ». Sarramagna, sur son aile gauche, alterne les permutations et distille des centres travaillés pour Hervé Revelli ou Rocheteau.

Au fil des minutes, Saint-Etienne prend l’ascendant sur son adversaire et Jouve n’hésite pas à employer la manière forte pour stopper Dominique Rocheteau, l’ailier droit stéphanois. Le match est vivant, les deux équipes se créent de nombreuses occasions, Toko et Sanchez sont des dangers permanents pour Curkovic.

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Josip Katalinski, l’attaquant de Nice met à contribution Ivan Curkovic, son compatriote yougoslave.

Premier tournant du match

On joue la 43e minute, Janvion charge Katalinski par derrière et lui fauche le pied d’appui. L’action se déroule dans la surface de réparation mais M. Wurtz, l’arbitre de la rencontre, ne bronche pas et laisse se dérouler l’action. C’est la stupéfaction dans le camp niçois.

Au terme des 45 premières minutes, M. Wurtz et ses assesseurs regagnent les vestiaires sous les huées du public.

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Toko, la perle tchadienne de l’OGC Nice, sème la panique dans la défense stéphanoise.

Deux minutes après la reprise, Bathenay, après un raid solitaire, crucifie les Aiglons et leur gardien Dominique Baratelli d’un tir magnifique (0-1, 47e). Pour les Azuréens, ce but constitue une grosse injustice. Les esprits s’échauffent quelque peu et Toko commet une grosse faute sur Oswaldo Piazza. Quelques minutes plus tard, le même Toko profite cette fois d’une passe judicieuse de Molitor pour lober un Curkovic peu inspiré (1-1, 62e).

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Gérard Janvion, le défenseur stéphanois, tente de forcer la décision. Sans succès.

Rocheteau, maltraité une partie du match par Douis, tire la patte. Pour le préserver en vue du match retour contre Dynamo Kiev, Herbin le remplace par Santini (63e).

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L’Equipe du 12 mars 1976.

Les Niçois veulent la victoire alors que les Verts se contenteraient du match nul. Après Rocheteau, c’est au tour de Sarramagna de subir les foudres de Jouve. L’ailier gauche stéphanois se relève avec la plus grande des difficultés.

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Dominique Rocheteau s’est bien démené sur son aile droite mais est sorti diminué au stade du Ray.

Deuxième tournant du match

Alors que l’on s’achemine vers la fin du match, les Niçois lancent une ultime attaque. Sur un centre de l’excellent Huck, Lopez détourne le ballon du poing et prive ainsi Toko d’une belle occasion de but. Tout le stade l’a vu et attend que M. Wurtz, pourtant considéré comme le meilleur arbitre français, désigne le point de penalty. Il n’en est rien. Les protestations des joueurs niçois et du public en colère n’y changent rien.

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Josip Katalinski voulait marquer de la tête un but à Curkovic. Ce ne sera pas pour cette fois.

Jean-Michel Larqué, tout près de l’action, se prend la tête à deux mains et crie à son défenseur :

« Mais tu es fou ! Qu’est-ce qui t’a pris ? »

Réponse de Christian Lopez :

« C’est un (mauvais) réflexe. »

Le score ne change plus. Les deux équipes restent ainsi sur leurs positions.

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Robert Wurtz, l’arbitre international de la rencontre, connaît une sortie un peu agitée.

Comme au terme de la première mi-temps, M. Wurtz et ses assesseurs quittent la pelouse dans une atmosphère houleuse. Roger Rocher, la pipe entre les dents, écoute la foule invectiver ses joueurs qui regagnent les vestiaires. Pierre Garonnaire, à côté de son président, semble plutôt gêné : « Ce sont les aléas du Championnat. Ces mauvaises décisions jouent une fois pour et une fois contre la même équipe. »

M. Loeuillet, le président niçois, ne cache pas son courroux à l’encontre de l’homme en noir : « Je ne dis pas que M. Wurtz a fait preuve de malhonnêteté, mais en nous privant de deux penalties flagrants, il a tout bonnement tué le Championnat. »

Sitôt la douche prise, le trio arbitral quitte le stade du Ray dans un fourgon cellulaire par une porte dérobée. Il en va de même pour les joueurs et l’encadrement stéphanois.

Au soir du 17 octobre (10e journée), Nice comptait huit points d’avance sur l’AS Saint-Etienne. Les dirigeants azuréens, prudents, ne voulaient pas entendre parler du titre de Champion de France : « Attendez le match retour contre Saint-Etienne et nous saurons alors si nous serons champions de France. » Ils ne croyaient pas si bien dire.

Au terme de la 38e journée, Saint-Etienne remporte son troisième titre consécutif (le neuvième), Nice termine deuxième à… 3 points.

Thierry CLEMENCEAU

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Plus de 60 000 visiteurs ont parcouru le Musée des Verts depuis son ouverture le 21 décembre 2013. Et vous ?

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Dynamo Kiev-Saint-Etienne : voyage en terre inconnue

Ce jeudi 11 décembre 2014, l’AS Saint-Etienne retrouve la Ligue Europa. Après leur série de victoires en Championnat, les Verts de Christophe Galtier se déplacent en Ukraine pour y affronter Dniepropetrovsk. Le 3 mars 1976, Herbin et ses hommes se déplaçaient à Simféropol pour y affronter le Dynamo Kiev en quarts de finale aller de la Coupe d’Europe des Clubs Champions. Je vous propose de revivre ce long périple en Crimée. Bonne lecture.

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L’AS Saint-Etienne au coup d’envoi à Simféropol : de g. à d. : P. Revelli, Synaeghel, H. Revelli, Larqué (c.), Rocheteau, Bathenay, Lopez, Piazza, Farison, Janvion et Curkovic.

Le 14 janvier 1976, la brume matinale recouvre la ville de Zurich et le soleil a bien du mal à percer. Pourtant, une certaine chaleur règne dans les salons de l’hôtel Atlantis où se déroule le tirage au sort de la Coupe d’Europe.

« Benfica ou Kiev nous conviendrait bien ! »

Les représentants de Split, Benfica, du Bayern Munich, du PSV Eindhoven de Kees Rijvers ou encore du Real Madrid attendent impatiemment de connaître leur adversaire. L’AS Saint-Etienne, également présente, est représentée par MM. Fiéloux et Arnaud. Comme la saison précédente, l’ASSE est qualifiée pour les quarts de finale de la Coupe des Clubs Champions. Il faut remonter à la saison 1962-63 et le Stade de Reims pour retrouver trace d’un club français qualifié à ce niveau de la compétition.

« Kiev ? Formidable »

En attendant que les premières boules sortent du chapeau, les deux représentants stéphanois ne cachaient pas leur préférence : «Benfica ou Kiev nous conviendrait bien !» M. Bangerter, membre de l’UEFA, commence alors le tirage : premier duel : Benfica-Bayern Munich. «M….» s’exclame M. Arnaud. La suite du tirage satisfait les deux émissaires stéphanois : Dynamo Kiev – Saint-Etienne. « Formidable, s’écrie le même Arnaud. C’est bien ce que nous souhaitions, et de plus, nous jouerons chez nous le match retour. » 

M. Ryashentsev, le représentant ukrainien, s’approche alors de Me Fiéloux un peu embêté : «Le 3 mars, nous ne pourrons peut-être pas jouer à Kiev, car il risque de faire froid et de neiger.» Réponse du représentant des Verts : « Mais à Saint-Etienne, nous sommes dans la même situation. L’an dernier, au mois d’avril, contre le Bayern, nous avons dû jouer sur la neige.»

« Tous les adversaires sont de grande valeur « »

Roger Rocher, Robert Herbin et Jean-Michel Larqué ne sont pas à Zurich. Les trois hommes sont réunis dans le grand salon du stade Geoffroy-Guichard. Le tirage enfin connu, l’entraîneur stéphanois lâche : « A ce stade de l’épreuve européenne, tous les adversaires sont de grande valeur, alors pourquoi craindre ou préférer l’un plus que l’autre ?»

Robert Herbin, Roger Rocher et Pierre Garonnaire attendent le tirage au sort de la Coupe d'Europe des Clubs Champions.
Robert Herbin, Roger Rocher et Pierre Garonnaire attendent le tirage au sort de la Coupe d’Europe des Clubs Champions.

Le Dynamo Kiev compte dans ses rangs le dernier « Ballon d’Or de France Football » : Oleg Blokhine. Cela ne semble nullement impressionner Jean-Michel Larqué : « Il paraît que c’est un véritable ailier gauche, mais nous avons Janvion.» Le capitaine des Verts fait référence au match retour contre Split et la partie fantastique qu’avait livrée le Martiniquais face à Surjak.

Le président Rocher y va lui aussi de son petit couplet : «Nous n’avions pas encore affronté le football russe. Ce sera une excellente occasion de progresser encore. Notre tâche sera très difficile mais à Saint-Etienne tout est possible… Y compris un record de recette. En attendant, allons manger en rêvant de notre possible qualification, et du réputé caviar que nous pourrons déguster à Kiev…»

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L’Equipe du 6 février 1976.

L’adversaire connu, les dirigeants stéphanois ne perdent pas de temps pour établir une feuille de route à Pierre Garonnaire.

Garonnaire reprend la route

Le 10 février, accompagné de M. Duraincy, « persona grata » auprès de la Fédération du football soviétique, le globe-trotter stéphanois rencontre les membres de la commission du haut commissariat aux Sports du pays. Ils s’entendent sur le lieu de la rencontre : Simféropol, la capitale de la Crimée, est retenue… Dès le lendemain, Garonnaire, accompagné de M. Alexis Paramonov, membre de la Fédération d’URSS, se rend sur le futur lieu de la rencontre pour y découvrir la ville, le stade et réserver un hôtel pour la délégation stéphanoise.

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Pierre Garonnaire (ici avec Roger Rocher) est chargé d’organiser le voyage des Stéphanois en Ukraine.

Depuis 1941, la Crimée n’a pas connu d’hiver aussi rude. A moins de trois semaines du début du printemps, il n’y a aucune certitude pour que le match puisse se dérouler à Simféropol. Pierre Garonnaire croise les doigts et espère qu’il n’a pas fait ce long voyage pour rien.

En passant par Mostar

Le surlendemain, après un crochet par Moscou, l’homme à tout faire des Verts s’envole pour Mostar. Dans la ville natale d’Ivan Curkovic, il voit la sélection soviétique s’imposer devant Zagreb au Tournoi Marjan.

A Split, cette même sélection, composée de huit joueurs de Kiev, s’incline contre la Yougoslavie (3-0) en finale. Comme il en a pris l’habitude, Garo repart à Saint-Etienne avec un film en poche.

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L’Equipe du 18 février 1976.

De retour à Saint-Etienne, Garonnaire aligne sur son bureau du stade Geoffroy-Guichard les 62 passeports des joueurs, dirigeants, officiels et journalistes qui s’envoleront pour Simféropol.

A Simféropol, le stade ressemble à celui de Chorzow

Il dresse un premier bilan de son séjour loin de la ville située au pied du Forez. «Lorsqu’on a décidé que le lieu du match à Simféropol où la température était plus clémente (- 10 degrés), l’on me désigna un hôtel de luxe, le « Moscou » où nous logerons tous. J’ai pu heureusement isoler les joueurs du reste de la délégation afin qu’ils soient tranquilles. J’ai vu le stade où se jouera le match. Il ressemble à celui de Chorzow (40 000 places). La pelouse était recouverte de dix centimètres de neige mais on m’a assuré qu’elle ne tarderait pas à disparaître.»

Le plus long déplacement des Stéphanois

Avant ce long déplacement en Crimée, le plus long que les Stéphanois n’aient eu à disputer en Coupe d’Europe, les Verts disputent une dernière rencontre de Championnat contre Lille. Valéri Lobanovski, l’entraîneur de Kiev est présent. Il est accompagné de M. Laurenceau, un enseignant du lycée stéphanois « Le Portail Rouge ». Ce dernier sert de traducteur à l’Ukrainien. Ensemble, les deux hommes assistent à la victoire du leader de la Division 1 (3-1).

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L’Equipe du 23 février 1976.

Lobanovski repart dans l’avion du FC Nantes

Sitôt le match terminé, Lobanovski rejoint Lyon avant de s’envoler à destination de Nantes. Il prend possession de l’avion des Canaris, de retour de Bastia, qui fait une escale à Lyon avant de rejoindre l’Ouest de la France. A bord de l’appareil, il en profite pour converser avec Robert Budzinski et peut-être compléter les notes qu’il a déjà prises sur son adversaire.

Le Dynamo Kiev se prépare à Nantes

Le 24 février, les dirigeants et joueurs stéphanois s’envolent à leur tour en direction de Nantes. Le FCN a conclu un match amical contre le futur adversaire des Verts au stade Marcel-Saupin. A 19 h 30, le bus des Verts s’immobilise devant la tribune E du vieux stade nantais. Roger Rocher, en bon président, descend le premier suivi de toute la délégation. La petite vingtaine de Stéphanois s’installe dans la tribune qui leur est spécialement réservée.

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La Une de L’Equipe du 25 février 1976.

Au terme d’un bon match nul (1-1), le grand Oleg Blokhine avoue après coup : « Saint-Etienne ne nous reconnaîtra pas les 3 et 17 mars prochain ! » Kiev aurait-il caché son jeu aux Stéphanois? Robert Herbin livre ses sentiments sur ce qu’il a entrevu :

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L’Equipe du 25 février 1976.

Présenté comme un épouvantail, cette équipe du Dynamo Kiev n’est pas invulnérable. Les Stéphanois en sont désormais convaincus et se disent qu’ils ont une chance de se qualifier pour les demi-finale de la grande Coupe d’Europe.

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« Il n’y a plus de place pour moi, le président ! »

Le jeudi 26 février, Roger Rocher est inquiet. Avant de s’envoler pour Cologne afin de superviser une dernière fois le Dynamo Kiev, Pierre Garonnaire vient de lui apprendre que les autorités soviétiques ne toléraient seulement que 23 passagers dans l’avion qui atterrirait à Simferopol. Or, l’ASSE a prévu d’emmener… 144 personnes. « Et pourtant, nous avions frété un « Tupolev ». 23 personnes, y compris les 17 joueurs, l’entraîneur, les soigneurs, le docteur; il n’y a même plus de place pour moi, le président ! »

L’autre mauvaise nouvelle vient de Gérard Janvion. Frappé par un deuil familial, il s’est envolé pour la Martinique. Herbin ne sait pas encore s’il pourra compter sur son joueur.

Pour clôturer la série des mauvaises nouvelles, Hervé Revelli, l’avant-centre stéphanois, est victime d’un léger accident de la route.

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L’Equipe du 1er mars 1976.

Kiev à court de compétition ?

Le dimanche 29 février après-midi, Herbin invite ses joueurs à visionner le film du match amical disputé par Kiev à Cologne. Garonnaire n’est pas revenu d’Allemagne les mains vides. Encore une fois, cette rencontre -la dernière des Ukrainiens- laisse un goût d’inachevé à l’entraîneur stéphanois : « Une fois de plus, l’équipe de Kiev, après avoir mené à Cologne par 2-0 puis 3-1, s’est laissé rejoindre en fin de match, ce qui laisserait supposer qu’elle ne peut pas encore tenir la grande cadence pendant 90 minutes. C’est peut-être là qu’est notre chance. »

« Trimbaler mes 80 kilos pendant toute la partie…»

Ivan Curkovic, qui s’attend à être très sollicité en Crimée, n’en perd pas une miette : « J’ai notamment remarqué les centres brossés de Vieremiejev. Quand il est sur l’aile gauche, il centre au deuxième poteau. Quand il est sur l’aile droite, il centre au premier. »

Oswaldo Piazza, quant à lui, part un peu dans l’inconnu : « Avec ce que nous avons vu à Nantes et ce que Garonnaire a ramené de Yougoslavie et de Cologne, une erreur est à éviter : le marquage individuel. Je ne pourrai suivre un gars comme Kolotov partout… Il m’emmènerait jusque dans ses dix-huit mètres. Trimbaler mes 80 kilos pendant toute la partie à ce régime-là, très peu pour moi. »

Oswaldo José Piazza, un Argentin à Saint-Etienne.
Oswaldo Piazza, le défenseur argentin des Verts, s’attend à un début de soirée difficile face aux attaquants  ukrainiens.

L’heure du départ a sonné

Le 1er mars, l’heure du départ a sonné. Réunis dès 7 heures du matin devant le stade Geoffroy-Guichard, les seize joueurs et le staff stéphanois s’envolent à 10 heures (et non 9 h 30 comme prévu) de l’aérodrome de Lyon-Satolas. Janvion, de retour le samedi après-midi, fait partie du voyage tout comme le docteur Poty. Outre son rôle de médecin, Roger Rocher compte sur lui pour mettre à profit ses connaissances en russe et servir ainsi d’interprète à la délégation stéphanoise.

Les supporters ne sont pas non plus en reste. La Coupe d’Europe, eux aussi y ont pris goût. Toute la ville vit au rythme de «ses» Verts. Pas moins de 1 150 supporters s’apprêtent à faire ce voyage lointain. Jamais un club français n’avait déplacé autant de supporters à l’étranger pour un match de Coupe d’Europe. Et pourtant, l’organisation de ce voyage ne s’est pas faite sans mal.

France Football du 2 mars 1976.
France Football du 2 mars 1976.

La surprise des douaniers

Deux heures trente plus tard, à leur arrivée à Kiev, les Stéphanois impressionnent les douaniers soviétiques. Comme convenu, M. Mure, le cuisinier de l’ASSE, est du déplacement. Il a emmené diverses denrées parmi lesquelles du lait, des fruits et légumes, de la viande, des féculents, du fromage et même un peu de vin.

Ensuite, ils rejoignent la ville de Simferopol. A 15 h 30 (heure française), Rocher et sa troupe prennent possession du « Moscou », l’hôtel réservé par Garonnaire où deux étages leur sont réservés.

La Une de L'Equipe du 3 mars 1976.
La Une de L’Equipe du 3 mars 1976.

A Simféropol, loin de tout, les Stéphanois préparent dans la plus grande sérénité ce rendez-vous européen. Enfin presque. Les lits mis à leur disposition sont beaucoup trop petits pour eux. Oswaldo Piazza, préfère, quant à lui, dormir à même le sol.

Hervé Revelli fête son 25e match de Coupe d’Europe

Robert Herbin ne laisse guère de doute sur la composition de son onze de départ. Il a décidé de titulariser Hervé Revelli à la pointe de l’attaque avec deux ailiers : Rocheteau et Patrick Revelli. En Crimée, le cadet des Revelli fêtera son 25e match de Coupe d’Europe.

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Hervé Revelli (avec son frère Patrick), fête son 25e match de Coupe d’Europe.

Si Saint-Etienne avec les frères Revelli et Rocheteau, entre autres, compte des joueurs de talent en attaque, le Dynamo Kiev n’a rien à lui envier. Avec Blokhine et Onichenko, les défenseurs stéphanois auront fort à faire pour neutraliser ces deux phénomènes. Oleg Blokhine est un attaquant complet dont la vitesse de course est un atout non négligeable alors qu’Onichenko participe davantage au jeu.

L'Equipe du 3 mars 1976.
L’Equipe du 3 mars 1976.

L’éclairage est défaillant

La veille du match, une tempête de neige doublée d’un épais brouillard laisse craindre le pire. Les conditions difficiles n’empêchent pourtant pas les joueurs stéphanois de s’entraîner. A la fin de cette ultime séance, les dirigeants de l’ASSE demandent à ce que l’éclairage du stade soit digne d’un match de Coupe d’Europe. En effet, seul un projecteur sur cinq fonctionne et les lux manquent singulièrement de puissance. Leur requête est acceptée.

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Roger Rocher (à droite) et Robert Herbin (à gauche) bravent le froid de la Crimée.

De même, il n’a pas été prévu de tribune de presse pour les cinquante journalistes qui ont fait le déplacement jusqu’en Crimée. Rocher fait alors des pieds et des mains pour qu’on leur installe une tribune provisoire qui puisse non seulement les abriter mais aussi leur permettre de couvrir l’évènement.

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Les joueurs stéphanois arrivent dans le stade de Simféropol pour y disputer le quart de finale aller de la Coupe des Clubs Champions.

Les réacteurs envoient des courants d’air chaud

Il est 17 heures ce mercredi 3 mars. Les Verts sont prêts pour le combat. Dans le vieux stade de Simféropol, 40 000 spectateurs dont un millier d’Ukrainiens et un autre bon millier de Stéphanois garnissent l’enceinte. Le froid sibérien, la neige qui borde le terrain à peine réchauffé par des courants d’air chauds provenant de gros réacteurs terminent de planter le décor.

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Les 22 acteurs de la rencontre pénétrent un le terrain boueux de Simféropol.

Le cérémonial est digne des grandes rencontres internationales : outre les échanges de bouquets de fleurs, la fanfare entonne la Marseillaise et l’hymne soviétique, ce qui ne manque pas de surprendre les onze Stéphanois. M. Clive Thomas, l’arbitre gallois, est arrivé au petit matin à Simféropol. Fatigué par le voyage, il siffle le premier coup d’envoi.

DYNAMO KIEV-ST ETIENNE
40 000 spectateurs ont bravé le froid pour assister à ce quart de finale aller.

Konkov frappe le premier

Les Stéphanois débutent bien la rencontre mais les actions les plus dangereuses sont à mettre à l’actif de Kiev par Burjak (12e), Onitchenko (13e) ou encore Blokhine (15e). La défense française subit mais s’en sort à moindre mal jusqu’à la 21e minute.

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Konkov inscrit le premier but pour le Dynamo Kiev à la 24e minute.

Sur un corner de Matvienko, Konkov récupère le dégagement du poing de Curkovic à 25 mètres et place un tir tendu que le dos de Bathenay dévie malencontreusement dans le but stéphanois (1-0, 21e). Ce but ne semble pas déstabiliser les Verts qui réagissent par Hervé Revelli de la tête. (24e). La mi-temps intervient sur ce score de 1-0 pour le Dynamo Kiev.

DYNAMO KIEV-ST ETIENNE  (2-0)
Sur le terrain boueux de Simféropol, Larqué, Janvion et Lopez mènent une dure bataille face à Blokhine et Onichenko.

Blokhine ne laisse aucune chance à Curkovic

On joue la 54e minute : Vieremiejev tire un coup franc renvoyé par le mur stéphanois. Le ballon revient dans les pieds de Blokhine qui fait trembler les filets de Curkovic pour la seconde fois (2-0, 54e). Ce deuxième but récompense la domination des Ukrainiens. Ce Dynamo Kiev-là ne ressemble nullement à celui qui s’est produit à Nantes ou à Cologne.

DYNAMO KIEV-ST ETIENNE  (2-0)
Ivan Curkovic s’incline pour la deuxième fois de la soirée à la 54e minute sur une belle frappe d’Oleg Blokhine.

Herbin injecte un peu de sang frais et remplace Janvion par Repellini puis Patrick Revelli par Schaer (75e). En fin de rencontre, Vieremiejev, encore lui, envoie une frappe de mule que Curkovic dévie comme il peut. Le pire est évité. M. Thomas siffle la fin de ce quart de finale aller que le Dynamo Kiev remporte sans contestation possible. La générosité et la solidarité des joueurs stéphanois n’auront donc pas suffi à contenir les attaquants ukrainiens.

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Robert Herbin (à gauche) ) et Roger Rocher (à droite) répondent aux questions des journalistes après le match.
EQ 4 MARS
L’Equipe du 4 mars 1976.

Claude Abbes : « Rien n’est perdu »

Ce 3 mars, entre 17 h et 18 h 45, Saint-Etienne est une ville morte. Tous les Stéphanois sont devant leur poste de télévision. Les usines ont fermé plus tôt pour permettre à leurs employés de regarder le match. Parmi ceux-là, Claude Abbes, l’ancien gardien international des Verts durant une décennie (1952-1962), croit toujours à une qualification des Verts : «Rien n’est perdu. J’ai pu constater au cours des dernières vingt minutes que cette défense de Kiev qui avait paru impériale les trois quarts du match s’est par la suite affolée lorsqu’elle a été pressée par les Stéphanois et a même dû user de moyens illégaux. Elle ne sera donc pas imbattable à Saint-Etienne. J’ai confiance pour le 17 mars.»

EQ 4 MARS RESIGNATION
L’Equipe du 4 mars 1976.
DYNAMO KIEV-ST ETIENNE  (2-0)
Gérard Farison, blessé, est soutenu par son capitaine Jean-Michel Larqué.

Cette défaite à Simféropol n’est pas sans rappeler les échecs subis par les Verts dans les mêmes circonstances à Munich devant le Bayern en 1969 (0-2), à Split devant Hajduk (1-4) et à Chorzow devant Ruch (2-3) en 1975. A chaque fois, ils ont su renverser des montagnes pour décrocher une qualification pour le tour suivant.

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La délégation française ne s’éternise pas en Crimée. Arrivés à 4 heures du matin au stade Geoffroy-Guichard, les joueurs se dispersent un à un dans la nuit stéphanoise. Le 17 mars, ils ont à nouveau rendez-vous avec l’histoire.

Thierry CLEMENCEAU

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Dominique Rocheteau, surveillé de très près par les défenseurs du Dynamo Kiev, tentent de percer le rideau de fer ukrainien.

Revivez le match retour contre le Dynamo Kiev

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ST ETIENNE-DYNAMO KIEV

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Plus de 60 000 visiteurs qui ont parcouru le Musée des Verts depuis son ouverture le 21 décembre 2013. Et vous?

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Saint-Etienne-Bastia : coup de foudre pour un titre

Ce samedi 6 décembre 2014, l’AS Saint-Etienne reçoit le Sporting Club de Bastia. Le 21 mai 1975, Herbin et ses joueurs recevaient les Corses dans leur antre de Geoffroy-Guichard. Un point suffisait pour les sacrer Champions de France. Récit.

 

Le 17 mai 1975, Saint-Etienne profite de la trêve internationale pour disputer le premier de ses deux matches en retard de Division 1. Elle s’impose devant Nice (2-0) et se projette dans la confrontation à venir contre Bastia cinq jours plus tard. A deux journées de la fin du championnat, un match nul avec les insulaires leur suffirait alors pour conserver leur titre de Champion de France. Pour bien préparer cette rencontre, Robert Herbin, l’entraîneur stéphanois, accorde deux jours de repos complet à ses hommes .

Herbin récupère ses blessés

Le lundi matin, il retrouve ses joueurs au stade Geoffroy-Guichard. Sarramagna, Farison et Bathenay reviennent de blessure tout comme Yves Triantafilos, guéri de sa tendinite aux adducteurs. En revanche, il ne peut compter sur Alain Merchadier qui souffre de la cuisse droite.

Yves Triantafilos le Stéphanois.
Yves Triantafilos revient de blessure.

A la veille d’une fin de saison très chargée pour les Verts, Herbin apprécie de disposer de la quasi-totalité de son effectif même si l’abondance de joueurs n’est cependant pas sans lui poser quelques soucis : « Nous sommes quinze et comme je ne peux en faire jouer que onze, il y en a donc quatre qui devront se faire une raison ». Pour la réception de Bastia, Bathenay et Farison, jugés à court d’entraînement, seront remplacés par Santini et Repellini.

EQ 22 MAI 1975
L’Equipe du 22 mai 1975

Le mardi 20 avril, à l’issue de l’ultime séance d’ entraînement, Herbin annonce la titularisation du droitier Dominique Rocheteau en lieu et place de Christian Sarramagna… à l’aile gauche. Mais pour les attaquants stéphanois, la grosse satisfaction ne vient pas de Saint-Etienne mais de Bastia ou plutôt de Montrond-les-Bains, ville thermale située près de la cité stéphanoise où l’équipe corse a établi ses quartiers.

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Pour ce déplacement à Saint-Etienne, Pierre Cahuzac, l’entraîneur bastiais, doit composer sans son rugueux défenseur allemand, Paul-Ferdinand Heidkamp.

Paul-Ferdinand Heidkamp, absent

En effet, la formation corse ne pourra compter sans son Allemand Paul-Ferdinand Heidkamp, sorti sur blessure à la 75e minute à Bordeaux (0-1). Réputé pour être un joueur rugueux, Bastia perd là un sérieux atout. « Je ne sais pas encore comment je vais remplacer Heidkamp qui est le pilier de notre défense. Il est probable que ce soit Broissart qui tienne le poste. » Sauf que l’ancien milieu de terrain stéphanois (1969-1973) souffre d’une cheville et sa participation au match reste incertaine.

Christian Lopez avec Jacques Santini lors d'une séance d'étirements à Geoffroy-Guichard.
Christian Lopez avec Jacques Santini lors d’une séance d’étirements à Geoffroy-Guichard.

Malgré ses tracas de dernière minute, Bastia se déplace à Saint-Etienne sans la moindre pression comme le souligne Pierre Cahuzac : « Notre objectif au début de la saison, c’était de nous qualifier pour les quarts de finale de la coupe de France et nous voici en demi-finale. Avec une bonne place en Championnat, notre objectif est dépassé. »

Larqué et Lopez appelés chez les Bleus

S’il y en a deux qui espèrent une victoire contre les Corses, ce sont bien Jean-Michel Larqué et Christian Lopez. Appelés chez les Bleus par Stefan Kovacs, ils doivent s’envoler pour Reykjavik le vendredi 23 mai pour y affronter l’Islande en match qualificatif pour le Championnat d’Europe mais les deux Stéphanois se verraient bien prendre l’avion auréolés d’un nouveau titre de Champion de France.

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Musée des Verts.

L’orage menace

Le 21 mai, malgré un gros orage et une pluie battante, 12 152 spectateurs garnissent les tribunes du stade Geoffroy-Guichard pour assister au sacre des leurs. José Broissart, Bastiais depuis deux saisons, se rappelle au bon souvenir de son ancien public. L’ancien Stéphanois refroidit même un peu plus une atmosphère déjà bien fraîche. Dès la 12e minute, il centre pour son attaquant Jacky Vergnes lequel, d’une pichenette, loge la balle hors de portée de Curkovic. (0-1, 12e).

Ce but récompense une équipe corse jusque-là dominatrice. Les Verts tentent de réagir mais les frappes de Jean-Michel Larqué et de Patrick Revelli n’échappent pas à la vigilance de Marc Weller, le gardien bastiais. C’est sur cet avantage pour Bastia que M. Wurtz, l’arbitre, renvoie les vingt-deux acteurs aux vestiaires.

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Jean-Michel Larqué, le maître à jouer des Verts, se démène mais reste sans réussite.

José Broissart, l’ancien Vert

Dès le début de la seconde mi-temps, les hommes de Herbin tentent de refaire leur retard mais ils bafouent quelque peu leur football. A ce jeu-là, ils s’exposent à quelques contres rondement menés par un certain… José Broissart. Ce dernier, omniprésent, tire un corner pour Neuman, qui, dans la confusion générale, inscrit un second but (0-2, 70e). Les Verts sont douchés par ce scénario qu’ils n’avaient nullement imaginé.

Il reste un quart d’heure de jeu. Cahuzac décide alors de faire souffler Broissart en le remplaçant par Claude Papi. Trois minutes plus tard, Vergnes manque d’un rien le but du 3 à 0 et le point du bonus qui récompense les victoires acquises par un écart minimum de trois buts.

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Hervé Revelli tente d’inquiéter Marc Weller, le gardien bastiais.

Le coup de tonnerre

Il reste dix minutes à jouer et l’orage, qui n’a cessé de s’abattre sur le stade, provoque une panne d’électricité. Les joueurs rentrent aux vestiaires et quelques spectateurs, déçus par la tournure des évènements, quittent le stade. Sans doute, ne veulent-ils pas assister à la fin de règne de leurs joueurs dans leur antre où les Verts n’ont plus perdu depuis le 23 mars 1973 et une défaite contre Nantes (1-2).

Après vingt-cinq minutes d’interruption, la lumière rejaillit. Les joueurs reviennent sur la pelouse pour finir enfin ce match. Moins d’une minute après la reprise, Synaeghel, au milieu de plusieurs joueurs, profite d’une passe de Larqué pour réduire le score (1-2, 82e).

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Oswaldo Piazza, le défenseur argentin, d’une tête rageuse, égalise pour les Stéphanois.

Dix minutes pour un titre

Etrangement revigorés par ce but, les Verts se sentent pousser des ailes. Larqué, très actif sur le côté gauche, centre pour le robuste Piazza qui, d’une tête rageuse, trompe le gardien bastiais pour la seconde fois en deux minutes (2-2, 84e). Les Stéphanois tiennent le point qui fait d’eux les Champions de France 1974-75. Les Bastiais sont désabusés et les signes de fébrilité perceptibles.

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Pierre Repellini, auteur du troisième but des Verts, assure définitivement le titre aux Stéphanois.

Rien ne semble désormais résister aux Verts. Repellini, monté aux avant-postes, trompe une troisième fois l’infortuné Weller (3-2, 86e). C’est fini, Saint-Etienne remporte son huitième titre de Champion de France. Bien malin celui qui peut dire si sans cette panne d’électricité, les Stéphanois auraient arraché la victoire.

22 MAI 1975 UNE
Une de L’Equipe du 22 mai 1975.

« Nous avons pris une bonne leçon de football ! »

« Eh bien voilà, nous avons remporté notre huitième titre de Champion de France et pourtant pendant quatre-vingts minutes, nous avons pris une bonne leçon de football ! » Après cette folle soirée, Robert Herbin savoure ce succès même s’il a longtemps pensé que le ciel n’était décidément pas avec les Stéphanois.

L'Equipe du 23 mai 1975
L’Equipe du 23 mai 1975

Les 13 000 fidèles du stade Geoffroy-Guichard n’ont pas eu à le regretter. A une exception près peut-être… Le préfet de la Loire, M. Cousier, marié à une Bastiaise- n’a pas attendu le retour de la lumière pour quitter l’enceinte stéphanoise et annoncer la victoire… des Corses à son épouse. Pourtant, il aurait dû se rappeler que durant cette saison 1974-75, les Verts n’en étaient pas à leur coup d’essai comme en atteste le renversement de situation contre le Paris-SG (3-2) en championnat puis l’exploit contre Split (1-4, 5-1) en Coupe d’Europe.

EQ 21 MAI 1975
L’Equipe du 21 mai 1975

Pour Roger Rocher, c’est un titre tous les deux ans

Pour Roger Rocher : « Cette dramatique manquait à notre extraordinaire saison. Ce titre récompense la saison la plus pleine que nous ayons jamais connue. Il nous ouvre de nouvelles perspectives. » Le président stéphanois est d’autant plus heureux qu’en quatorze ans de présidence, il vient de s’octroyer son septième titre. « C’est-à-dire un titre tous les deux ans » déclare-t-il fièrement.

Extrait de L'épopée 1974-75.
Extrait de L’épopée 1974-75.

La saison de tous les records

A l’issue de ce Championnat, Saint-Etienne a remporté son huitième titre de Champion de France en réalisant un exploit sans précédent, le coup parfait sur son terrain : 19 matches, 19 victoires. Les Verts terminent avec 9 points d’avance sur Marseille (58 contre 49). Meilleure attaque (70 buts), meilleure défense (39 buts encaissés), les Verts ont réalisé à quatre reprises au cours de cette saison magnifique trois victoires consécutives.

Lopez et Larqué reprennent la route

Après la panne salvatrice qui a engendré la folle soirée stéphanoise, Jean-Michel Larqué et Christian Lopez rejoignent la sélection tricolore auréolés d’un nouveau titre. Ce qu’ils ne savent pas encore, c’est que la route qui mène à Saint-Germain-en-Laye est tout aussi semée d’embûches que le match qu’ils ont disputé la veille contre Bastia.

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Thierry CLEMENCEAU

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Montpellier-Saint-Etienne : une victoire sur fond de crise

Ce mercredi 3 décembre 2014, l’AS Saint-Etienne se déplace à Montpellier à l’occasion de la seizième journée de Ligue 1. Le 2 avril 1982, les Verts de Robert Herbin, à la lutte avec Monaco pour l’obtention du titre de Champion de France, se déplaçaient dans l’Hérault. Roger Rocher, le président stéphanois, ouvertement contesté par une partie de la direction du club, renonçait à ce déplacement pour mieux préparer sa défense. Récit.

 

Le vendredi 2 avril 1982, l’AS Saint-Etienne se déplace à Montpellier. Impliqués dans le sprint final pour décrocher un nouveau titre de champion de France, toujours en course en Coupe de France, les Verts restent sur une excellente série dont le joyau est l’écrasante victoire face aux Girondins de Bordeaux (5-0) lors de la 32e journée. Deuxième de Division 1 à un point de Monaco, ce déplacement dans l’Hérault, en d’autres temps, aurait fait la Une des quotidiens spécialisés. Mais depuis le 1er avril, le club aux dix titres de Champion de France est plongé dans la tourmente. Roger Rocher, président de l’ASSE depuis vingt-et-un ans, à huit jours près, est contesté par plusieurs membres du conseil d’administration du club emmenés par André Buffard, le représentant des Associés et Henri Fiéloux, l’ancien vice-président. Les opposants reprochent à Roger Rocher sa gestion d’exercice déficitaire, le secret qui entoure sa rémunération présidentielle ou encore un comportement d’ensemble jugé «tyrannique». La prochaine réunion du conseil d’administration prévue le lundi 5 avril promet d’être houleuse.

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L’Equipe, 2 avril 1982.

C’est dans ce climat délétère que les Verts de Robert Herbin préparent le déplacement à Montpellier. Le jeudi 2 avril, l’ultime séance d’entraînement des joueurs stéphanois débute avec quelques minutes de retard. L’entraîneur stéphanois, en conférence de presse avec Roger Rocher, était invité à commenter un éventuel départ du club de son président. Puis, aux alentours des dix heures, l’homme à la pipe s’entretient avec celui qu’il avait promu entraîneur de l’ASSE fin mai 1972 en remplacement d’Albert Batteux. Enfin, Rocher s’adresse aux joueurs pour leur demander de ne pas se laisser perturber par les affaires internes du club. Il leur demande également de se concentrer sur le prochain match à venir.

Janvion, Nielsen et Roussey absents

Herbin, après s’être entretenu avec Raoul Nogues, Laurent Paganelli et Philippe Millot, dirige une séance d’entraînement raccourcie par tous ces évènements. L’entraîneur stéphanois décide alors d’apporter quelques changements à son équipe. Benny Nielsen et Laurent Roussey blessés, Gérard Janvion suspendu pour quatre matches suite à son expulsion contre Bordeaux (5-0), Herbin envisage de replacer Nogues au milieu de terrain en lieu et place de Thierry Oleksiak. Paganelli sera associé à Johnny Rep à la pointe de l’attaque.

ST ETIENNE
Pour le déplacement à Montpellier, Laurent Paganelli effectue son retour dans le onze stéphanois.

La Paillade rêve d’un exploit

Le club héraultais du président Nicollin occupe une peu envieuse avant-dernière place au classement et n’a d’autre alternative que la victoire pour assurer son maintien en Division 1. Pour cela, Jacques Bonnet, promu entraîneur en lieu et place de Kader Firoud à la trêve hivernale, ne pourra compter sur Christian Sarramagna, l’ancien pensionnaire de la maison verte. Le petit gaucher se plaint de douleurs aux adducteurs et débutera donc la partie sur le banc de touche. Autre contrariété pour Bonnet, le forfait de son gardien titulaire Formici, absent en raison d’une distorsion des ligaments du genou, blessure contractée à l’entraînement.

« C’est une équipe complète »

Victor Trossero, l’avant-centre pailladin, n’imagine d’autre alternative que la victoire pour continuer à y croire. Au sujet de Saint-Etienne, il ne tarit pas d’éloges : «C’est une équipe complète. Les joueurs qui la composent ne se regardent pas pour faire des passes, orchestrer des mouvements. Comment ne pas redouter quelqu’un dans la formation stéphanoise ? Il faudrait être complètement inconscient pour négliger qui que ce soit.»

Une première pour Roger Rocher

Pour la première fois depuis qu’il est président de l’ASSE, Roger Rocher n’a pas effectué le déplacement avec son équipe. Alors qu’en coulisses, se trame une véritable révolution de palais, les joueurs, arrivés à Montpellier le vendredi matin, se concentrent uniquement sur le match à venir. Les comptes, c’est uniquement sur le terrain qu’ils veulent les régler.

MAGAZINE ST ETIENNE
Roger Rocher (ici avec Pierre Garonnaire) n’a pas effectué le déplacement à Montpellier avec son équipe.

Lopez ne veut penser qu’au terrain

«Notre intention à tous est de ne pas nous mêler d’un litige qui ne nous regarde en aucune façon, martèle Christian Lopez. Nous n’avons pas à prendre position, ni à nous mêler de près ou de loin à ce qui se passe dans les coulisses du stade Geoffroy-Guichard. Notre devoir à nous est de songer seulement au football.»

La Mosson veut encore y croire

Au stade de la Mosson, ce vendredi 2 avril 1982, 12 562 spectateurs parmi lesquels Ernest Vaast, l’ancien joueur du Racing, se sont donnés rendez-vous. Tous veulent croire que leur équipe peut encore se maintenir au sein de l’élite.

Platini sollicité de toutes parts

Michel Platini, le maître à jouer des Verts, dispute l’un de ses derniers matches sous les couleurs stéphanoises. Tantôt annoncé au Paris-SG, tantôt à l’Inter Milan, voire au FC Sochaux selon le quotidien régional L’Est Républicain en guise de «poisson d’avril», la dernière rumeur envoie l’international français aux Girondins de Bordeaux. Mais avant de voguer vers d’autres horizons, il souhaite ajouter une ou deux lignes à son palmarès.

ST ETIENNE-BORDEAUX (5-0)
Le 27 mars, lors de la venue des Girondins de Bordeaux au stade Geoffroy-Guichard, les supporters stéphanois ont manifesté pour que Michel Platini prolonge son séjour en Vert.

En lever de rideau, le Variétés Club de France a régalé l’assistance en disposant d’une équipe locale. L’équipe de Jacques Vendroux où évoluait le rugbyman Richard Astre et l’ex-Marseillais Jacky Novi, s’est largement imposée 4-0 grâce à un quadruplé de l’inusable Nestor Combin.

Michel Vautrot au sifflet

Il est 20 h 30, Michel Vautrot, l’arbitre français, désigné pour la Coupe du monde en Espagne, donne le coup d’envoi. Les Verts ont 90 minutes pour oublier les évènements des dernières 24 heures et rester au contact du leader monégasque. Montpellier, emmené par son capitaine Jacques Santini, autre ancien stéphanois des années 70, ne se laisse pas impressionner et Luizinho sans un sauvetage désespéré de Lopez est tout près d’ouvrir le score. Quelques minutes plus tard, le duo Trossero-Luizinho oblige cette fois Gardon à dégager son camp à l’emporte-pièce.

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Luizinho, l’attaquant pailladin, tente d’échapper à la vigilance de Bernard Gardon.

Les poteaux ne sont pas carrés, mais…

Les Verts laissent passer l’orage et à la 17e minute, Platini adresse une longue ouverture en direction de Battiston. Sur le flanc droit, le défenseur stéphanois envoie un missile qui trompe Deplagne. 1-0 pour les Verts ? Non, la chance sourit une première fois à Deplagne qui voit le ballon s’écraser sur son poteau.

Cinq minutes plus tard, Platini, très en verve, délivre un ballon à destination de Johnny Rep. Le Hollandais ajuste sa tête et croit ouvrir le score. Deplagne, décidément dans un bon jour, est sauvé une nouvelle fois par son poteau droit. Les Verts jouent de malchance veulent croire que la chance va finir par leur sourire.

MONTPELLIER-ST ETIENNE (0-1)
Michel Platini, le numéro 10 des Verts, a parfaitement tenu son rôle d’animateur et de distributeur.

On joue la 35e minute. Platini, passeur malheureux quelques instants auparavant, se présente seul devant le gardien héraultais après un une-deux avec Gardon. Son lob quasi parfait, heurte la base du poteau gauche de Deplagne. Incroyable… mais vrai. Pour la troisième fois en dix-huit minutes (17e à la 35e), les Verts viennent de frapper le poteau.

Lopez surgit à point nommé

A la reprise, Castaneda est tout près de se faire surprendre par un tir de trente mètres signé Trossero (49e). Les Verts, supérieurs dans le jeu, réagissent par Platini (46e et 51e) sans plus de succès.

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Victor Trossero, l’ancien attaquant nantais, ne donne pas sa pleine mesure sous le maillot montpelliérain.

54e minute : c’est le moment que choisit Christian Lopez pour se lancer lui aussi à l’abordage. Sur une action bien amorcée par le jeune Lestage, Johnny Rep, d’une passe millimétrée, trouve la tête de Lopez. Le capitaine stéphanois loge le ballon hors de portée du gardien héraultais (0-1, 54e). L’ASSE est enfin récompensée de ses efforts. Les Pailladins tentent bien de réagir mais les Verts, forts de leur expérience, tiennent le résultat jusqu’au coup de sifflet final.

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Jean-François Larios, auteur d’une excellente première mi-temps, est dans tous les bons coups.

L’AS Saint-Etienne vient de vivre une semaine cruciale sur le plan sportif. Avec trois victoires pour autant de matches, elle est prête pour le sprint final avec Monaco.
Ces deux points pris à l’extérieur suffisent au bonheur de Robert Herbin. «L’essentiel est d’avoir montré que physiquement et psychiquement, nous étions bien repartis. Parallèlement, il était important de démontrer que les résultats de l’équipe n’ont rien à voir avec les histoires de coulisses dont on parle beaucoup trop en ce moment.»

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Raoul Nogues, avec la hargne qui le caractérise, est un poison permanent pour la défense montpelliéraine.

« On reparlera de la Paillade »

Avec cette défaite, Montpellier, désormais bon dernier de Division 1, a sans doute laissé passer sa dernière chance de maintien. Louis Nicollin, le président de la Paillade, ne cache pas sa déception : «Rien à dire, les garçons, se sont battus avec une vaillance louable. On reparlera de la Paillade, croyez-moi, dans les années à venir. Et pour ce qui est de la fin de la saison en cours, je vous prie de croire qu’il va y avoir de la lessive et pour cause : certains de nos joueurs professionnels nous ont trop déçus ! »

CONFERENCE DE PRESSE ROCHER
Roger Rocher est invité à s’expliquer devant ses détracteurs. Il sait aussi qu’il peut compter sur de nombreux supporters.

Rocher face à ses détracteurs

Comme prévu, le lundi 5 avril, Roger Rocher, le président stéphanois, a rendez-vous avec le conseil d’administration de l’AS Saint-Etienne. Il est d’ailleurs attendu de pied ferme par ses opposants. Ils arrivent tour à tour au siège du club et à 20 h 32, Rocher délivre les réponses aux questions posées par ses opposants.

CONFERENCE DE PRESSE ROCHER

Après quatre heures quarante-cinq de débats, les journalistes présents sont invités à prendre place dans la salle de conférence. Devant le parterre de micros et photographes, Me Fiéloux, membre du comité d’honneur et de patronage, lit le communiqué suivant : «Le conseil d’administration de l’Association sportive de Saint-Etienne s’est réuni le 5 avril 1982. Les membres de ce conseil qui l’avaient désiré ont posé au président Rocher un certain nombre de questions, notamment celles parues dans la presse. Les réponses ont été données, les engagements qui ont été pris par M. Rocher ont entraîné le conseil à poursuivre ses travaux sans qu’il soit nécessaire de procéder à un vote. En conséquence, le conseil d’administration continuera à œuvrer dans sa composition actuelle et dans le meilleur intérêt de l’Association sportive de Saint-Etienne.» Roger Rocher reste donc à la barre de l’ASSE en attendant l’assemblée générale le 26 juillet…

Thierry CLEMENCEAU

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