Saint-Etienne-Lyon : une passion débordante

Ce dimanche 30 novembre 2014, l’AS Saint-Etienne reçoit l’Olympique Lyonnais au stade Geoffroy-Guichard. Ce derby s’annonce passionnant entre deux clubs qui occupent le haut du classement. En 1964, les deux formations jouaient les premiers rôles en Division 1. Le dimanche 16 février, l’ASSE, alors leader, recevait l’OL. En cas de victoire, les hommes de Jean Snella augmentaient leurs chances de remporter le deuxième titre de l’histoire du club. Bonne lecture.

 

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Saint-Etienne a mal commencé le mois de février 1964. Battus le 2 en Championnat à Monaco (2-1), les hommes de Jean Snella se sont à nouveau inclinés une semaine plus tard contre Valenciennes (1-2) en seizièmes de finale de la Coupe de France. Au Parc des Princes, les Nordistes, à dix contre onze, ont bouté hors de la compétition les vainqueurs de la Coupe 1962.

Cette élimination a laissé des traces chez les Stéphanois. A commencer par Robert Herbin qui a repris l’entraînement avec une belle bosse sur le tibia alors que Rachid Mekloufi a l’oeil gauche poché. Les deux hommes ont rejoint André Guy et Frédéric N’Doumbé à la salle de soins.

Robert Herbin, auteur d'un match plein.
Le match de Coupe de France contre Valenciennes au Parc des Princes a laissé des traces chez les Stéphanois. Robert Herbin (balle au pied) souffre d’un coup sur le tibia.

Le mardi 12 février, Snella n’est pas là pour remonter le moral des troupes. Il s’est absenté vingt-quatre heures pour aller régler quelques affaires personnelles à Genève. C’est M. Vernay, l’entraîneur des amateurs qui assure la séance d’entraînement.

Rocher remonte le moral des troupes

Roger Rocher, le président stéphanois, comme souvent, est venu prendre le pouls de son équipe. Il constate que le moral des troupes n’est pas au mieux. A cinq jours du match peut-être le plus important contre le voisin lyonnais, il décide de réunir ses joueurs et leur tient le discours suivant : « Je profite de l’absence de Jean Snella pour vous rappeler tout ce que vous lui devez vous, les anciens, qui pouvez poursuivre ou terminer brillamment, grâce à lui, votre carrière, et vous, les jeunes, qui allez conquérir la gloire. Nous ne vous en voulons nullement de votre défaite de dimanche en Coupe. Vous nous avez donné tant de satisfactions cette saison que nous aurions mauvaise grâce de nous plaindre.

Vous êtes encore de solides leaders dans le Championnat, vous devez le rester et améliorer encore votre position. Il faut vous ressaisir et jouer, dès dimanche contre Lyon, avec ce moral de vainqueurs qui vous rendait invincibles. Vous le devez à votre entraîneur. »

Pour l’homme à la pipe : « Notre élimination de la Coupe n’est pas une catastrophe. En effet, sans ce but hors jeu accordé par l’arbitre et qui provoqua notre défaite, nous étions dans l’obligation de rejouer contre Valenciennes jeudi prochain. A trois jours d’un derby toujours difficile contre Lyon et qui le sera plus encore qu’à l’habitude, nos joueurs auraient été handicapés dimanche. »

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En l’absence de Jean Snella parti à Genève régler quelques affaires personnelles, c’est Roger Rocher qui remobilise ses troupes pour aborder le derby contre Lyon dans de bonnes conditions psychologiques.

Derby, le mot est lâché. Pour cette rencontre pas comme les autres, toute la région stéphanoise est en ébullition. Le 13 février 1964, Charles Paret, le secrétaire général du club, dresse un premier bilan des ventes de places. Avec 9 millions d’anciens francs de location déjà engrangés, il prévoit une assistance oscillant entre 35 000 et 38 000 âmes le jour J. Il faut remonter au 24 février 1957 pour trouver trace de la plus grosse affluence au stade Geoffroy-Guichard. Ce jour-là, 30 968 spectateurs avaient assisté au match de Division 1 qui opposait Saint-Etienne à Reims (0-0, 25e journée).

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Le derby suscite toujours une grande passion

Les Lyonnais n’ont pas eu à puiser dans leurs réserves après leur facile victoire face à Forbach (2-0) en Coupe de France. Une chose est certaine : ce derby entre les deux équipes de tête suscite une grande passion dans la cité de la soie. Plusieurs milliers de Lyonnais ont prévu de faire le court déplacement jusqu’au stade Geoffroy-Guichard.
Cet engouement s’explique assez facilement. A l’aube de cette 22e journée de Division 1, l’équipe de Jean Snella est leader du Championnat et compte 27 points. Invaincue à domicile, elle n’a connu que trois défaites à l’extérieur (à Toulouse,  Strasbourg et Monaco). Meilleure attaque de la saison avec 46 buts, André Guy, son meilleur buteur, a fait déjà fait trembler les filets à 18 reprises.

Sa rivale lyonnaise -qui compte un match en plus- est 2e ex aequo (avec Lens et Monaco) avec 25 points. Légèrement moins prolifique (39 buts) son meilleur buteur n’est autre que le Franco-Argentin Nestor Combin (16 buts) qui forme avec son compatriote Angel Rambert, un duo redoutable. Jamais les deux grandes villes voisines n’avaient eu leurs représentants ensemble à la tête du Championnat de France de Division 1 à la veille de se rencontrer.

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De g. à d. : Marcel Aubour, Angel Rambert, Guy Hatchi et Nestor Combin. Ils espèrent une victoire au stade Geoffroy-Guichard pour se rapprocher du leader du Championnat de Division 1.

Richard Tylinski, dernier blessé d’une longue série

Dès le mercredi matin, Jean Snella a repris les rênes de son équipe. Il n’envisage pas de dispositif particulier comme une mise au vert pour préparer cette rencontre qu’il qualifie de «décisive». Déjà privé de son capitaine Domingo et Ferrier, soit deux de ses défenseurs les plus expérimentés, il ne sait pas encore s’il pourra compter sur Richard Tylinski. Se plaignant de la cuisse gauche, le puissant défenseur central des Verts a dû écourter la séance d’entraînement. Sa participation au derby est désormais entre les mains du médecin du club. En cas de forfait de Tylinski, Sbaiz se tient prêt même si Snella a une autre solution : faire reculer Herbin qui aurait alors la lourde tâche de marquer l’avant-centre lyonnais Nestor Combin.

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Jean Snella, l’entraîneur des Verts, au milieu de ses joueurs, va devoir composer son onze de départ sans Richard Tylinski, son défenseur central.

Herbin ou Foix pour remplacer Tylinski

Pour Herbin, ça serait un retour aux sources. International junior, il occupait déjà ce poste de défenseur central. Mais déplacer Herbin comporte le risque de priver Mekloufi d’un partenaire avec lequel il s’entend à merveille. Malgré ces tracas défensifs, Saint-Etienne ne manque pas de solutions. Foix a les faveurs de Snella pour remplacer Sbaiz alors que Polny, incorporé au Bataillon de Joinville, est rappelé pour ce match.

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Ferrier, Domingo et R. Tylinski absents pour le derby, Snella a rappelé Georges Polny (à droite) pour compléter sa défense.

Le record de recette est battu

Côté billetterie, les guichets du stade ne désemplissent pas. Le vendredi, soit 48 heures avant l’évènement, ce sont 12 millions de recettes qui sont enregistrés. Charles Paret, toujours lui, annonce que d’ores et déjà le record enregistré pour la venue des Glasgow Rangers lors de la première participation des Verts en Coupe d’Europe, soit 11 millions d’anciens francs (29 517 spectateurs), a été dépassé.

A match exceptionnel, mesures exceptionnelles. Les dirigeants stéphanois, pour éviter tout débordement, ont multiplié par quatre le service d’ordre. Les installations du stade ont été agrandies, ce qui porte la capacité de celui-ci à près de 40 000.

Record de spectateurs à Geoffroy-Guichard pour la venue de Reims
Pour ce derby entre Stéphanois et Lyonnais, le record de spectateurs pour un match de football au stade Geoffroy-Guichard est battu.

Les Lyonnais se divertissent avec les All Blacks

Côté Lyonnais, Lucien Jasseron a allégé le programme de ses joueurs pour ne prendre aucun risque. Le mercredi, ils ont assisté au match de rugby à Lyon qui a opposé une sélection du Sud-Est aux All Blacks (5-8).

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Lucien Jasseron, l’entraîneur de l’OL, a assisté avec ses joueurs au match amical de rugby qui a opposé une sélection du Sud-Est aux renommés All Blacks.

Contrairement à son homologue stéphanois, l’entraîneur de l’OL a décrété une mise au vert dans les monts du Lyonnais pour éviter les nombreuses sollicitations liées au match. Une victoire en terre stéphanoise effacerait quelque peu la défaite du match aller le 22 septembre 1963 à Gerland (4-5).

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La Une du quotidien L’Equipe du 15 février 1964.

« Allez les Verts ! »

Dimanche 16 février, à 12 h 36, gare de Lyon-Perrache, l’autorail qui relie Lyon à Saint-Etienne s’apprête à quitter la capitale des Gaules rempli de supporters lyonnais. Le préposé au haut-parleur, sans doute un supporter stéphanois, s’écrie alors à plusieurs reprises : « Allez les Verts ! » Le derby est bien lancé.

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Pierre Bernard, le gardien de l’ASSE et de l’équipe de France, retrouve Marcel Aubour, le gardien lyonnais qui est également son remplaçant chez les Bleus.

Double record pour Saint-Etienne

Il est 15 heures. 33 526 spectateurs, dont 7 à 8 000 Lyonnais, se sont massés dans le stade Geoffroy-Guichard, laissant au passage seize millions d’anciens francs (162 938,20 F), ce qui constitue un double record affluence-recette pour l’ASSE. Dès le premier jour de la location, toutes les places assises avaient été achetées, du jamais vu à Saint-Etienne. Comme contre Reims en 1957, plusieurs milliers de chaises ont dû être rajoutées pour satisfaire le plus grand nombre.

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Les supporters lyonnais sont venus par milliers assister au derby entre Saint-Etienne et Lyon.

Plusieurs personnalités locales sont présentes à commencer par M. Graeve, le préfet de la Loire et, bien sûr, les maires des deux villes : M. Pradel pour Lyon et M. Fraissinette, pour Saint-Etienne. Cet engouement des personnalités fait dire à Roger Rocher : « C’est la première fois qu’un si brillant parterre d’autorités assiste à un match ici. Je m’en réjouis, car les pouvoirs publics auront pu se rendre compte de visu de l’énorme popularité du football dans la région et tout ce qu’on peut en attendre

Les Lyonnais débutent le match avec un vent violent contraire. Les cheminées d’usines, fumantes, qui bordent le stade Geoffroy-Guichard, crachent des nuages de fumée rougeâtre.

CHEMINEES
Les cheminées d’usines fumantes qui bordent le stade Geoffroy-Guichard n’avaient jamais connu une telle passion et un tel enthousiasme.

La pendule du stade n’affiche pas encore les cinq minutes de jeu que Lyon obtient déjà un corner. Taberner se charge de l’exécuter. Cassado et Bernard se gênent ce qui contraint le gardien stéphanois à dégager le ballon des deux poings dans les pieds de… Rambert. L’attaquant lyonnais, ravi de l’aubaine qui lui est faite, inscrit le premier but de la partie (0-1, 5e).

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Nestor Combin frappe au but pour essayer de forcer la décision face au leader stéphanois.

Ce coup du sort n’altère pas l’envie d’aller de l’avant des Stéphanois. Dix minutes plus tard, ils obtiennent un bon coup-franc à vingt mètres de la cage d’Aubour. Rachid Mekloufi, d’une frappe puissante, transperce le mur lyonnais et trompe Aubour, malgré un beau plongeon à l’horizontale sur sa gauche (1-1, 15e).

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Rachid Mekloufi, le maître à jouer des Verts, est dans tous les bons coups.

Degeorges marque contre son camp

A la 37e minute, Saint-Etienne obtient un corner que frappe N’Doumbé. Le ballon flottant qui rase la ligne, est effleuré légèrement de la tête par André Guy, ce qui surprend Degeorges, le demi lyonnais, qui prolonge bien involontairement le cuir dans les buts de Marcel Aubour (2-1, 37e). Au stade Geoffroy-Guichard, on ne s’ennuie pas, le ballon voyage d’un but à l’autre, le spectacle est au rendez-vous. L’ambiance survoltée oblige même tantôt Bernard, tantôt Aubour à demander gentiment aux supporters installés derrière leur but à tempérer les jets de pétards.

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C’est la foule des grands jours au stade Geoffroy-Guichard. L’enjeu de ce derby obligent Bernard et Aubour à calmer la ferveur des supporters.

Après 45 minutes de haute facture, M. Bondon, l’arbitre de la rencontre, renvoie les 22 acteurs aux vestiaires sous les applaudissements d’un public ravi du spectacle. Les nombreux spectateurs ne s’y sont pas trompés. Qu’il s’appelle Herbin ou Combin, Aubour ou Bernard, tous ont eu droit à une salve d’applaudissements à chaque belle action ou geste de grande classe. 

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Marcel Aubour, le gardien lyonnais, écarte le danger devant Guy et Herbin.

En deuxième période, les Lyonnais jouent leur va-tout alors que les Stéphanois se contentent de défendre leur petit but d’avance. Bien regroupés autour de l’expérimenté Jacques Foix, ils s’en remettent le plus souvent à leur gardien international Pierre Bernard pour préserver leur avantage.

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Le Lyonnais Rambert échappe à Mitoraj et Sbaiz mais ce sont les Stéphanois qui auront le dernier mot.

Les Verts terminent au courage

Mekloufi, malgré la domination lyonnaise, ne se décourage pas et, bien que malchanceux dans ses tirs, reste le maître à jouer des Verts. Quant à Herbin, son courage est à la hauteur de son talent. D’abord touché à l’arcade droite, il est ensuite victime d’une petite élongation à la cuisse droite qui le handicape pour la fin du match.
Au coup de sifflet final, c’est la délivrance pour les Verts. Herbin, pris dans son élan, envoie le ballon dans les tribunes et fait un spectateur heureux.

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Guy essaie de créer le danger dans la défense lyonnaise. Le Borgne n’est pas à la fête.

La colère de Nestor Combin

Nestor Combin, très déçu du résultat, a bien du mal à cacher sa colère dont Foix a failli faire les frais. Finalement, les larmes du premier furent vite séchées par le réconfort du second. Sans une grande maladresse devant le but par deux fois, le Franco-Argentin aurait pu être le héros de ce derby.

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La Une du quotidien L’Equipe du 17 février 1964.

« Bill » Domingo, hospitalisé dans la polyclinique stéphanoise, victime d’une double fracture à une jambe le mois précédent à Valenciennes en Championnat, a suivi le match à la radio. Aussitôt le coup de sifflet final, il s’est empressé d’appeler au stade Geoffroy-Guichard le président Rocher pour féliciter joueurs et entraîneur.

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L’Equipe du 17 février 1964.

Saint-Etienne s’impose donc dans ce 20e derby entre les deux clubs en Division 1. Il accentue son avance au classement sur l’un de ses plus dangereux concurrents et file un peu plus vers son deuxième titre de Champion de France. L’Olympique Lyonnais, qui n’avait plus connu la défaite depuis le 17 novembre 1963, est désormais relégué à 4 points du leader stéphanois.

Thierry CLEMENCEAU

Buts.- Saint-Etienne : Mekloufi (15e), Degeorges (35e, c.s.c.) ; Lyon : Rambert (5e).
Saint-Etienne : Bernard – Cassado, Sbaiz, Polny – Foix, Mitoraj – Salen, Herbin, Guy, Mekloufi, N’Doumbé. Entr.: Snella.
Lyon : Aubour – Djorkaeff, Polak, Mignot – Degeorges, Leborgne – Dumas, Rambert, Combin, Hatchi, Taberner. Entr.: Jasseron.

 

 Saint-Etienne en 1964

La ville de Saint-Etienne est de nouveau à l’honneur en cette année 1964 grâce à son équipe de football, championne de France pour la seconde fois de son histoire. A cette occasion, les reporters du journal télévisé nous présentent la cité Stéphanoise.

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 L’objet

Le fanion du100e derby. Photo : Musée des Sports.
Le fanion du100e derby. Photo : Musée des Sports.

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C’est le nombre de visiteurs qui ont parcouru le Musée des Verts depuis son ouverture le 21 décembre 2013.

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Hambourg SV – AS Saint-Etienne : Kolossal

Ce jeudi 27 novembre 2014, l’AS Saint-Etienne reçoit Qarabag en Ligue Europa. Le 26 novembre 1980, les joueurs de Robert Herbin écrivaient l’une des plus belles pages de l’histoire européenne du club. Je vous propose de revivre le match aller entre Hambourg et Saint-Etienne. Bonne lecture.

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Programme du match entre Hambourg et Saint-Etienne. Musée des Verts.

Le vendredi 7 novembre 1980, Pierre Garonnaire est à Zurich. Il a été dépêché par le club de l’AS Saint-Etienne pour assister au tirage au sort de la Coupe d’Europe. Peu après midi, dans la salle du conseil de l’ASSE, Roger Rocher apprend par téléphone de la bouche de son envoyé spécial que son club doit affronter le SV Hambourg en huitièmes de finale de la Coupe de l’UEFA. «Nom d’un chien, s’exclame-t-il. C’est la guerre qui recommence !» Puis, reprenant son sérieux, il déclare : «Eh bien, tant pis, de toute façon, ce ne sont pas les premiers Allemands que nous rencontrerons, puisque nous avons déjà dû affronter Nuremberg, Cologne, le Bayern, à plusieurs reprises que nous avons même battu, et Mönchengladbach. Ce sera peut-être l’occasion d’une sorte de revanche sur la saison dernière.» En effet, contre Hambourg, Saint-Etienne disputera son septième match de Coupe d’Europe contre un club allemand.

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Roger Rocher, le président de l’AS Saint-Etienne a appris le tirage au sort de la Coupe d’Europe de la bouche de Pierre Garonnaire, envoyé spécial à Zurich.

Tirage au sort difficile pour les Verts

Au même titre que le Sochaux de Patrick Revelli qui a hérité de l’Eintracht Francfort, l’ASSE vient de tomber sur un très gros poisson. Outre ses cinq titres nationaux, ses deux Coupes d’Allemagne, le HSV a remporté la Coupe des Coupes en 1977 et échoué en finale de la Coupe d’Europe des Clubs Champions contre Nottingham Forest en 1979.

A l’intersaison, Kevin Keegan, l’ancien bourreau anglais des Verts en 1977 avec Liverpool, a quitté le club mais la formation allemande possède de redoutables atouts avec ses trois internationaux allemands Felix Magath, Manfred Kaltz, l’un des meilleurs latéraux droits du monde, et Horst Hrubesch, buteur aux énormes moyens physiques. Mais la sensation à Hambourg, c’est la signature d’une vieille connaissance stéphanoise. Après quatre années passées aux Cosmos New York, Franz Beckenbauer a rejoint Hambourg. Pas encore qualifié, il ne participera pas à la double confrontation contre les Stéphanois.

Garonnaire, l’espion des Verts

La mission de Garonnaire, l’espion stéphanois, ne s’est pas arrêtée à Zurich. Sitôt l’annonce faite à Rocher, il a pris un avion pour Nice, puis un deuxième pour Lyon-Satolas avant de s’engouffrer dans un taxi en direction de L’Etrat. Il prend juste le temps de prendre quelques affaires et de repartir en direction de Hambourg via Lyon-Satolas et Paris. Alors que Stéphanois et Nantais, les deux leaders de Division 1, ne pouvaient se départager (0-0, 17e journée), Garonnaire, lui, voyait les Hambourgeois dominer Leverkusen (2-0) en Bundesliga.

De retour d’Allemagne via Paris au petit matin, il déclare en souriant : «Il y avait bien longtemps que je ne m’étais pas trouvé à la gare de Lyon ! J’en avais perdu l’habitude !»

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Branko Zebec, l’entraîneur de Hambourg, s’est déplacé dans le Gard pour superviser Saint-Etienne.

Le 12 novembre, Robert Herbin et ses hommes se déplacent à Nîmes. Cette 18e journée de D1 est l’occasion pour les dirigeants du HSV de venir superviser son futur adversaire. Un temps annoncé, Günther Netzer a renoncé à effectuer le déplacement laissant seul Zebec, l’entraîneur yougoslave du HSV se faire une première opinion. Seul ? Pas vraiment puisqu’une dizaine de journalistes allemands le suivent jusque dans le Gard. Les Verts s’imposent 1-0 au stade Jean-Bouin et Zebec repart comme il était venu : «Je n’ai pas appris grand-chose ce soir puisque je connaissais les Stéphanois. Néanmoins, j’ai eu la confirmation qu’il s’agit d’une équipe sérieuse et qui ne sera pas facile à manoeuvrer.»

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L’Equipe du 14 novembre 1980.

Trois jours plus tard, Garonnaire et Herbin, accompagnés de deux joueurs, Gardon et Roussey, assistent à la rencontre Stuttgart-Hambourg (3-2). Malgré la défaite du HSV, sa deuxième seulement après celle à Munich, l’entraîneur des Verts reste méfiant : «C’est jouable mais il faudra être fort, très fort car Hambourg m’a laissé une très forte impression à tous les niveaux.»

Les Bleus tombent à Hanovre

Le mercredi 19 novembre, les Bleus de Michel Hidalgo se déplacent à Hanovre pour y rencontrer l’Allemagne. Six Stéphanois sont convoqués. Au Niedersachsenstadion, les Bleus subissent la loi des Allemands et s’inclinent sévèrement 4 à 1. Kaltz marque le premier but sur penalty (6e) et Hrubesch, également auteur d’un but (62e) ont été deux des grands artisans de la débâcle française. Michel Platini, le numéro 10 des Bleus et de l’ASSE n’est pas épargné par Jupp Derwall, le sélectionneur allemand : «Platini joue avec des jumelles et se prend pour un général de division qui lance ses troupes et regarde de loin ce qui se passe.» Pour Netzer : «En l’état actuel des choses, le match du Volkparkstadion promet plus ou moins d’être une formalité

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L’Equipe du 21 novembre 1980.

«Garo» ramène les Stéphanois en avion privé

Pierre Garonnaire a fait le déplacement à Hanovre en avion privé affrété par le club stéphanois pour ramener en deux heures trente les joueurs convoqués en A ainsi que Castaneda (A’). Il a profité de ce match pour superviser une nouvelle fois les joueurs internationaux évoluant à Hambourg. Pour lui : «Ces gaillards-là, on ne les voit jamais trop en action…»

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Les Stéphanois sont prévenus, Horst Hrubesch est en grande forme.

Le lendemain, à l’entraînement au stade Geoffroy-Guichard, les Stéphanois sont encore traumatisés par leur match international de la veille. Herbin, qui a regardé le match à la télévision, confie : «Cette défaite nous aura permis d’étudier le jeu de nos futurs adversaires qui seront bien moins encadrés dans l’équipe de Hambourg qu’ils ne l’ont été dans celle d’Allemagne.»

Saint-Etienne ne sera pas « champion d’automne »

Après cette trêve internationale, l’actualité nationale reprend ses droits. Pour la dernière journée des matches aller de D1, les Verts s’inclinent face à Tours 2-1 et abandonnent ainsi le titre symbolique de « champion d’automne » à leur rival nantais. Jean Castaneda, remplaçant de Curkovic depuis le 12 août et la défaite des Verts à Bastia (2-1), encaisse pour la première fois deux buts dans un même match.

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Depuis le 12 août, Jean Castaneda est le titulaire au poste de gardien de l’AS Saint-Etienne.

«Rectifier le tir au plus vite»

Après cette déconvenue, Gérard Janvion fulmine : «Si l’on joue à Hambourg comme on a joué contre Tours, ce n’est pas deux buts mais huit que nous allons ramasser là-bas. Alors, à nous de rectifier le tir au plus vite, sinon restons ici.» Alexander Ristic, l’entraîneur-adjoint d’Hambourg, présent à cette rencontre, repart rassuré du stade Geoffroy-Guichard.

Ce manque de fraîcheur physique des Stéphanois, particulièrement de ses « Bleus », inquiète quelque peu l’état major de l’ASSE. Roger Rocher tente un début d’explication : «Rendez-vous compte que depuis la fin juillet, où le Championnat a commencé, nos joueurs, qui pour l’essentiel sont engagés sur trois fronts -le Championnat, la Coupe de l’UEFA et l’équipe de France- ont déjà joué plus de trente matches. Et cela en cinq mois.»

Une gifle salutaire ?

Malgré cela, le président stéphanois, qui en a vu d’autres, ne veut pas dramatiser à quelques jours de ce rendez-vous européen important : «Je continue en effet de penser que nous avons les moyens d’éliminer Hambourg. Et je m’appuie sur le fait que Saint-Etienne n’a jamais été aussi dangereux dans le passé que lorsqu’il venait de recevoir une bonne gifle, pour renforcer nos espérances.»

De leur côté, les Hambourgeois ont idéalement préparé leur première manche européenne contre les Verts en éliminant facilement l’équipe amateurs du RW Francfort par 11 à 0 en Coupe d’Allemagne.

Herbin convaincu par Paganelli

Le dimanche après-midi, l’équipe réserve stéphanoise qui évolue en Division 3 s’impose devant Gueugnon (2-1) au stade Geoffroy-Guichard. Herbin et de nombreux joueurs sont présents. Laurent Paganelli, auteur des deux buts de son équipe, convainc l’entraîneur stéphanois. A 16 h 45, il connaît le schéma qu’il adoptera à Hambourg.

«Les joueurs ne se parlent pas beaucoup, c’est bon signe»

Lundi 24 novembre, après la séance d’entraînement matinale, Gérard Janvion sort des vestiaires et lâche : «Les joueurs ne se parlent pas beaucoup actuellement. C’est bon signe. Cela me rappelle l’ambiance qui précédait nos grands affrontements européens des années 75-76.» Entre 11 h 25 et 12 h 20, Garonnaire, Rocher et Herbin s’entretiennent à l’écart des oreilles indiscrètes. Robert Herbin laisse entendre qu’il prépare une surprise aux Allemands. On évoque le repositionnement de Michel Platini au poste d’avant-centre. Info ou intox ?

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L’Equipe du 25 novembre 1980.

Entraînement et séance vidéo

La séance de l’après-midi, axée en partie sur le jeu aérien, se termine par une séance vidéo. Herbin souhaite montrer les images du match Stuttgart-Hambourg ramenées par Garonnaire lors de son déplacement en Allemagne. Gardon est attentif à chaque fait et geste de celui qu’il aura à marquer : le géant Horst Hrubesch.

A Hambourg, Saint-Etienne joue son 60e match de Coupe d’Europe, vingt-trois ans après ses débuts contre les Glasgow Rangers en 1957.

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L’Equipe du 26 novembre 1980.

La délégation stéphanoise s’envole de l’aéroport de Saint-Etienne-Bouthéon le mardi en fin de matinée. Rocher, qui a rendez-vous à midi à l’Elysée, monte dans un autre avion accompagné par Jacques Santini «out» pour Hambourg.

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L’Equipe du 26 novembre 1980.

Les Verts accueillis par Günter Netzer

L’équipage est le même que celui qui a conduit les Verts à Kuopio et à Saint-Mirren. Le chef de cabine se veut rassurant : «Souvenez-vous que je n’ai jamais vu perdre Saint-Etienne.» A leur descente d’avion, Gunter Netzer, dans un parfait costume bleu, accueille ses hôtes français. C’est lui qui est chargé de les mener au Crest Hôtel. Ce mardi, Johnny Rep, le Hollandais de Saint-Etienne, fête ses 29 ans et il est bien décidé à faire trinquer ses adversaires. Bernard Pivot qui a fait le déplacement à Hambourg, est très optimiste dans son pronostic : «Je verrai bien un 2 à 1, et qui sait si ce ne sont pas les Verts qui mettront les deux buts ?»

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L’Equipe du 28 novembre 1980.

La grosse surprise d’Herbin

Il est 19 heures Zebec et Herbin n’ont toujours pas dévoilé leur onze de départ. Ce n’est qu’à 19 h 10 qu’ils rendent leur publics leur onze respectif. L’entraîneur stéphanois a réservé une belle surprise à son homologue allemand en changeant son système de jeu. Jean-Louis Zanon est repositionné arrière gauche, tandis que Janvion monte d’un cran et évoluera au poste de milieu de terrain défensif afin d’apporter de la densité et toute son expérience. Rep, quant à lui, reste en attaque mais Herbin lui demande d’être vigilant aux montées de Kaltz. Ce n’est qu’à 17 heures que Paganelli apprend sa titularisation au poste d’avant-centre. La différence de gabarit entre Hrubesch et Paga suscite de nombreux commentaires. Avec cette réorganisation, Herbin délaisse son 4-4-2 habituel pour un 4-3-3.

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Stéphanois et Hambourgeois sont prêts pour ce huitième de finale aller.

Il est 20 heures. Les deux équipes se présentent devant 37 000 spectateurs arrivés assez tard au Volksparkstadion. L’équipe d’Hambourg, sûre d’elle, espère prendre un avantage certain avant de se rendre quinze jours plus tard à Saint-Etienne. Les Verts, eux, sont prêts pour le défi physique auquel ils s’attendent.

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Les deux capitaines : Horst Hrubesch (HSV) et Christian Lopez (ASSE) à leur entrée sur le terrain.

Hartwig sonne le glas

Le match débute à l’avantage des Allemands, le premier tir est l’œuvre de Jacobs. Mais la première grosse sensation de la soirée n’est pourtant pas celle que les supporters allemands attendaient. Rep, après un «une-deux» avec Platini, s’apprête à frapper le ballon mais Hartwig se détend et prolonge le cuir dans les filets de son propre gardien (0-1, 11e). Hrubesch, promu capitaine en l’absence de Magath, et ses coéquipiers ne sont pas au bout de leurs surprises. Alors que l’on approche de la demi-heure de jeu, Rep, encore lui, obtient un coup franc aux vingt mètres, légèrement à gauche du but allemand. Dans pareille situation, le maître d’oeuvre s’appelle Platini. Le numéro 10 stéphanois trompe Koitka pour la seconde fois de la soirée (0-2, 26e).

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Johnny Rep est à l’origine du premier but stéphanois inscrit par Hartwig contre son camp.

Au Volksparkstadion, les spectateurs allemands sont abasourdis. Hrubesch tente de secouer les siens et se présente seul face à Castaneda mais ce dernier s’interpose sans trembler (29e). Dix minutes plus tard, Larios, bien servi par Battiston, scelle définitivement le sort du match. Le numéro 8 stéphanois parcourt cinquante mètres et s’en va fusiller Koitka pour inscrire le troisième but (0-3, 39e).

HAMBOURG-ST ETIENNE (0-5)
Laurent Paganelli, l’invité-surprise de Robert Herbin, ne fait aucun complexe face aux Allemands.

A cet instant, les « Allez les Verts ! » entonnés par le millier de supporters stéphanois résonnent dans ce stade d’ordinaire acquis à la cause hambourgeoise. Les inconditionnels des Verts s’embrassent à chaque but. Ils n’ont encore jamais connu pareille fête à l’extérieur en Coupe d’Europe. Les exploits des Verts contre Split ou Kiev se sont toujours déroulés au stade Geoffroy-Guichard. Les Allemands rentrent au vestiaires vexés comme si le ciel leur tombait sur la tête. Zebec décide de remplacer Milewski par Wehmeyer.

HAMBOURG-ST ETIENNE (0-5)
Michel Platini, le n° 10 stéphanois, fait taire les critiques.

Deux buts en trois minutes

En seconde mi-temps, Hrubesch par deux fois (49e et 61e) a l’occasion de réduire le score mais échoue par maladresse. Gardon, au marquage de l’Allemand, le neutralise avec brio. Hambourg est incapable d’ordonner son jeu, Rep sauve deux situations dangereuses en défense et applique à merveille le rôle que lui a confié Herbin en bloquant Kaltz dans son couloir. Alors que le public médusé déserte le stade, Zimako, surnommé Zig-Zag, profite d’une longue balle de Battiston pour se lancer dans une série de dribbles et inscrire du pied droit le quatrième but (0-4, 85e).

HAMBOURG-ST ETIENNE (0-5)
Jacques Zimako, le virevoltant néo-calédonien des Verts, inscrit le quatrième but stéphanois.

Le dernier coup de poignard

La messe était entendue depuis longtemps mais Platini, d’un maître-tir de vingt mètres, souhaite qu’elle soit encore plus belle (0-5, 87e). Quand M. Hunting siffle la fin du match, les Stéphanois tombent dans les bras les uns des autres. Euphoriques, ils n’ont pas encore conscience de leur exploit. Ils viennent d’effacer la défaite à Mönchengladbach subie un an plus tôt.

003
A 21 h 45, le tableau d’affichage est éloquent.

Roger Rocher est fier de son équipe : «J’ai eu de grandes déceptions dans le football, mais ce qui est beau, c’est de pouvoir apprécier de telles performances. Nous avons gagné 5-0 en Allemagne contre le vice-champion d’Europe

Jean-Louis Zanon est sur un nuage : «Je ne réalise vraiment pas ce qui m’arrive. Ce fut un match merveilleux pour moi. Au départ, on jouait pour ne pas prendre de but, puis, au fil des minutes, cela a vraiment bien marché pour nous. Quelle belle soirée !»

Zebec, l’entraîneur vaincu lâche : «J’ai trouvé cette équipe stéphanoise beaucoup plus forte et beaucoup plus complète que l’équipe de France que j’avais vu évoluer à Hanovre il y a une semaine.»

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France Football du mardi 2 décembre 1980.

Le lendemain, la presse allemande est cinglante avec les joueurs du HSV. Bild Zeitung titre en Une : « La honte pour Hambourg ». En France, les quotidiens saluent comme il se doit la performance historique de l’AS Saint-Etienne. «Fantastique, Kolossal ou encore prodigieux», il n’y a pas de superlatif assez fort. Le quotidien L’Equipe titre :

27 NOV 80

En découvrant la Une du quotidien L’Equipe, Michel Platini ne peut s’empêcher de faire le commentaire suivant : «Moi, voyez-vous, j’aurais plutôt titré : « 5-0 et chacun à sa place…» Saint-Etienne se rappellera longtemps de son soixantième match de Coupe d’Europe.

Thierry CLEMENCEAU

  Vidéo : Hambourg – Saint-Etienne : 0-5

 

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Nantes-Saint-Etienne : un nul prometteur

Ce dimanche 23 novembre 2014, l’AS Saint-Etienne se déplace à Nantes pour le compte de la 14 journée de Ligue 1. Si aujourd’hui, les deux équipes occupent le haut du classement, fin août 1988, les Canaris alors 6es, accueillaient des Verts qui se partageaient la dernière place du classement avec Caen. Récit.

 

Le 28 novembre 1987, Saint-Etienne, avec Robert Herbin aux commandes, s’impose 3-2 à Nantes au stade de la Beaujoire. Il fallait remonter au 17 mai 1964 et une victoire 3-1 pour voir les Verts l’emporter face aux Canaris.

MONTPELLIER-ST ETIENNE (3-3)
Philippe Tibeuf avait été l’un des auteurs de la belle victoire à Nantes fin novembre 1987.

Les Verts courent après une première victoire

Un peu plus de huit mois plus tard, au soir du 17 août 1988, Robert Herbin a la mine des mauvais jours. Les Verts ne savent plus gagner et viennent d’être humiliés à Bordeaux (5-0, 7e j.). Ils occupent une peu glorieuse dernière place qu’ils partagent avec Caen. En sept journées, la défense stéphanoise a déjà pris l’eau à quatorze reprises faisant d’elle la plus perméable de Division 1. Les coéquipiers d’Alain Geiger devront encore patienter pour connaître les joies d’un premier succès en Division 1. De son côté, le SM Caen de Robert Nouzaret a débloqué son compteur face au leader Toulonnais (2-1). L’ASSE est donc la seule équipe à ne pas avoir encore gagné en Championnat.

PSG-NANTES
Miroslav Blazevic, le nouvel entraîneur nantais.

Les journées se suivent et se ressemblent. Après Lens (2-4, 4e j.) Monaco s’impose au stade Geoffroy-Guichard (1-0, 8e j.) et plonge un peu plus la bande à Herbin dans le désarroi. Le chassé-croisé entre Castaneda et Beaufreton dans la cage stéphanoise n’a pas eu l’effet escompté. Dans le même temps, Nantes, dirigé par Miroslav Blazevic, est revenu de Montpellier avec une éclatante victoire (4-1). Arrivé en début de saison, l’entraîneur yougoslave semble avoir trouvé la potion magique pour emmener les Canaris vers les sommets. L’entraîneur stéphanois cherche toujours la recette miracle.

Des statistiques défavorables

Avec 4 buts inscrits en 8 matches, Saint-Etienne ne marque plus ou très peu. La comparaison avec la saison passée est explicite : en 1987-88, les hommes d’Herbin ont inscrit 54 buts pour 38 matches disputés en D1, soit 1,42 contre 0,5 à ce début de saison. Les Nantais en sont à 1,62.

Les Verts recherchent l’homme providentiel

André Laurent, le président de l’ASSE, aimerait bien renforcer ce secteur défaillant. Abedi Pelé (OM) et deux joueurs du FC Nantes sont dans le collimateur des dirigeants stéphanois : Vincent Bracigliano et Michel Rio. Les tractations semblent même bien avancées avec l’ex-Guingampais mais un problème de dernière minute vient perturber les discussions. Bracigliano, victime d’une rupture des ligaments croisés du genou gauche survenue lors du match des Canaris à Montpellier, vient d’être opéré et son indisponibilité est estimée à environ six mois. Ce coup dur oblige les dirigeants du FC Nantes à revoir leur position… et Pierre Garonnaire à changer son fusil d’épaule.

Le recruteur des Verts ne veut pas perdre de temps et appelle le jeudi matin son homologue nantais Robert Budzinski pour l’avertir qu’il ne donne pas suite à cette piste. L’affaire en reste donc là.

Des Nantais en grande forme

Nantes, c’est justement le prochain adversaire des Stéphanois en Championnat. Le pessimisme des uns tranche avec l’euphorie des autres. Pour combler la trêve internationale sur fond d’affaire «Henri Michel – Eric Cantona», les Canaris se sont imposés 5-1 contre le Racing de Buenos-Aires d’Olarticoechea, l’ancien joueur de la maison jaune et verte. Pas de doutes, ils sont en forme, les Verts sont prévenus.

Michel Rio titulaire contre les Verts

Annoncé un peu trop rapidement comme joker stéphanois, Michel Rio effectue sa rentrée côté nantais. Au milieu de terrain, il est associé à Desailly et Vercauteren.  Herbin, de son côté, doit composer avec de nombreux blessés : Haon, Tibeuf ou encore Courrault. Les Verts évoluent en 4-3-3 avec une attaque composée de Garande, ex-Nantais, Etienne Mendy et le jeune Chicharo.

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L’Equipe du 29 août 1988.

La délégation stéphanoise s’est envolée le jour du match à destination de Nantes. Après quelques frayeurs à l’atterrissage à Nantes dues à un freinage un peu trop violent, qui vit les freins se casser , André Laurent descend le premier, arborant un polo jaune et une veste verte. S’il consent qu’il n’a pas vraiment fait attention à sa tenue vestimentaire, certains pensent qu’il veut conjurer le mauvais sort…

A Nantes, la venue de Saint-Etienne constitue toujours un évènement. Par le passé, les rencontres entre les deux équipes ont souvent donné lieu à des combats âpres et disputés. Près de 25 000 personnes garnissent le stade de la Beaujoire. José Arribas, présent pour ce match, en profite pour saluer Robert Herbin.

Christophe Robert s’écroule

Peu avant le quart d’heure de jeu, Rio, bien décidé à montrer qu’il était mieux qu’un simple joker, lance son attaquant de poche Christophe Robert. Sivebaek, le défenseur danois de l’ASSE, effleure le feu follet nantais qui s’écroule dans la surface de réparation. M. Wurtz, l’arbitre international français, n’hésite pas une seconde et désigne le point de penalty. Vercauteren ne laisse aucune chance à Beaufreton en le prenant à contre-pied (1-0, 15e).

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Robert Wurtz, l’arbitre de la rencontre.

Une nouvelle fois, les Verts doivent courir après le score. Sans un Youm maladroit ou malchanceux, le score serait plus lourd. Les Verts sont abattus, mais le seul but d’écart leur laisse un petit espoir de revenir à la hauteur de leur adversaire.

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Christophe Robert, l’attaquant nantais, est à l’origine du penalty sifflé par M. Wurtz.

Garande se rappelle au bon souvenir des Nantais

En deuxième mi-temps, les Nantais décident de laisser aux Stéphanois le soin de faire le jeu. Ce choix aussi surprenant soit-il, profite à Guy Clavelloux, fauché dans la surface de réparation par Bonalair. Patrice Garande se rappelle ainsi au bon souvenir de son ancien public pour égaliser (1-1, 57e). Le buteur stéphanois a même la victoire au bout du pied en fin de match mais Marraud, le gardien nantais, en décide autrement (82e).

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Patrice Garande, s’est rappelé au bon souvenir du public du stade de la Beaujoire en inscrivant le penalty égalisateur pour le Verts.

Saint-Etienne se contente du match nul même s’il n’a toujours pas remporté la moindre victoire en Championnat.

Thierry CLEMENCEAU

♦ L’anecdote ♦

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♦ La phrase ♦

Aimé Jacquet : « Super ! »

« C’est vrai, « Coco » redevient entraîneur de Nantes ? Alors ça, c’est super ! Suaudeau est fait pour Nantes et c’est un grand technicien. Il l’a prouvé dans la formation et à tous les niveaux. Je suis vraiment très content, d’autant plus que que je ne m’attendais pas a ça. Nous sommes de la même génération. Nous avons suivi la même formation, lui à Nantes, moi à Saint-Etienne. Et la rivalité sportive qui a longtemps opposé les deux clubs a fait du bruit à son époque. Nous partageons la même philosophie, la même sensibilité, avec cette petite différence que Jean-Claude, éduqué par José Arribas, a pu rester dans son club d’origine pour faire passer le message à une autre génération. L’école nantaise est une référence. Il faut bien dire qu’elle avait disparu et je suis sûr qu’avec Suaudeau on va la retrouver. Pour le foot français, en tout cas, c’est une excellente chose. »
                                                                                                        L’Equipe du 30 janvier 1991

♦ Le chiffre ♦

 100

Le 26 juin 1971, Bernard Blanchet, en réussissant le deuxième but nantais contre Saint-Etienne (77e) inscrit le 100e but de sa carrière en championnat professionnel. Ce jour-là, Nantes s’impose 2-1 et termine 3e (46 points) de Division 1. Saint-Etienne se classe 2e (51 points) à 4 points de l’OM, le Champion de France. 

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Merci à Alain Geiger pour sa confiance. Après Johnny Rep, Sur la route des Verts compte un nouveau lecteur.

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Henri Point : l’hommage de Pierre Guichard

En cette période de commémorations, je vous propose de revivre l’inauguration de la tribune Henri-Point, qui a eu lieu il y a 80 ans, presque jour pour jour. Bonne lecture.

Le monde sportif stéphanois en deuil

Le 6 février 1934, le monde du sport stéphanois est en deuil. Il vient d’apprendre la disparition de l’une de ses figures pionnières. Henri Point, âgé de 34 ans, ancien directeur des ventes de Casino, a succombé à une maladie foudroyante. Ses obsèques ont lieu le 10 février.

Dans la matinée, une foule immense se donne rendez-vous devant son domicile. Dans cette assistance, on remarque de nombreux sportifs, en particulier des membres de l’Association Sportive Stéphanoise et de l’Association Sportive de Saint-Etienne. Ils sont venus très nombreux toutes sections confondues (football, athlétisme, basket, rugby).

Durant ses obsèques, un hommage vibrant lui est rendu par Pierre Guichard, président de l’ASSE depuis le 19 mai 1927 et par de nombreuses autres personnalités dont M. Chavanne, président de la Ligue du Lyonnais de Football.

Mais qui est donc Henri Point qui émeut Saint-Etienne et dont le nom reste attaché à une des grandes tribunes du stade Geoffroy-Guichard ?

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Photo : Nos Sports

Avec Pierre Guichard, il crée Nos Sports

Henri Point est le co-créateur de Nos Sports, la revue sportive de Saint-Etienne au cours des années 30. Il est un ami proche de Pierre Guichard (son portrait trône dans son bureau) et a été vice-président de l’ASS puis premier vice-président de l’ASSE après en avoir été secrétaire durant plusieurs années.

Henri Point, comme disent ses proches, c’est « le bon camarade ». Il est rare de le voir pénétrer dans un lieu public sans serrer les mains. D’humeur toujours égale, il n’était pourtant pas prédestiné à s’épanouir dans le sport.

Ce n’est pas dans la section football de l’AS Stéphanoise qu’il s’engage mais au sein de la section rugby. Bien qu’il reconnait d’importantes lacunes dans le domaine technique, ce dont il n’hésite pas à plaisanter, sa persévérance comble rapidement sa méconnaissance de ce sport. Diriger un club sportif demande beaucoup de disponibilité. Trop pour lui qui chaque dimanche, se jure de ne pas assister au match suivant. Et le dimanche d’après, il est présent comme le précédent. Pour se donner bonne conscience ? Non, par professionnalisme et dévouement.

Sa voiture aux multiples usages

Chaque dimanche, avant le match, sa voiture personnelle sert aux retardataires, ce même véhicule se transforme après en ambulance. Avec Henri Point, rien n’est laissé au hasard.

Au cours de sa réunion du 28 septembre 1934, le Comité directeur de l’AS Stéphanoise prend une décision importante.

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La tribune Henri-Point du nom de l’ancien dirigeant de l’AS Stéphanoise et de l’AS Saint-Etienne.

Une tribune porte son nom

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Nos Sports, 5 octobre 1934

En parallèle, pour les célébrations de l’Armistice du 11 novembre 1934, ce même Comité directeur décide d’apposer une plaque commémorative en l’honneur d’Henri Point. Juste avant son inauguration, un hommage lui sera rendu devant la plaque honorant la mémoire des morts du Racing Club Stéphanois et du Stade Forézien Universitaire morts au cours de la Grande Guerre.

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Nos Sports, 16 novembre 1934

Pierre Guichard, ému, honore la mémoire de son ami. Une plaque de marbre est dévoilée et porte en lettres d’argent :

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Nos Sports, 16 novembre 1934

Un an plus tard, son souvenir reste présent dans les mémoires stéphanoises. Une grande épreuve de cross-country portant son nom est organisée par l’Association Sportive Stéphanoise. Athlètes, rugbymen et footballeurs unissent leurs efforts pour contribuer au triomphe du Challenge Henri-Point.

Thierry CLEMENCEAU

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La tribune Henri-Point (à droite) fait face à la tribune d’honneur du stade Geoffroy-Guichard. Photo : Le Livre de l’ASSE, les objets de la légende.

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Saint-Etienne – Monaco : Wohlfarth première

Ce dimanche 9 novembre 2014, l’AS Saint-Etienne reçoit l’AS Monaco pour le compte de la 13e journée de Ligue 1. Trois jours après leur valeureux match nul contre l’Inter Milan (1-1) en Ligue Europa, les hommes de Christophe Galtier auront-ils les ressources nécessaires pour s’imposer et garder le contact avec le haut du tableau ? En 1993, les Verts faisaient leur révolution à la tête du club. Après deux matches sans succès, ils accueillaient Monaco alors entraîné par Arsène Wenger. Récit.

 

L’été 1993, l’AS Saint-Etienne a fait peau neuve. André Laurent a cédé son fauteuil de président à Yves Guichard. Jean-Michel Larqué est revenu à ses premières amours en qualité de manager général. Les deux hommes ont promis de redonner aux Verts leur lustre d’antan.

ST ETIENNE-MONACO
Yves Guichard, le nouveau président de l’AS Saint-Etienne.

Les arrivées de Blanc (Nîmes), Swierczewski (Katowice) et Delpech (Toulouse) n’empêchent pourtant pas un début de Championnat pour le moins chaotique. Le climat au club est empoisonné par l’éviction du gardien Joseph-Antoine Bell, en froid avec Jacques Santini, son entraîneur.

ST ETIENNE-MONACO
Joseph-Antoine Bell, en froid avec Jacques Santini, retrouve sa place de numéro 1 dans les buts stéphanois.

Classé 19e de Division 1 après deux journées, les Verts s’apprêtent à recevoir Monaco et son armada de stars parmi lesquelles Enzo Scifo et Jürgen Klinsmann.

ST ETIENNE-MONACO
L’entraîneur Jacques Santini au côté de François Blaquart, son adjoint à l’ASSE.

Gérald Passi indisponible

Auteur du seul but marqué par les Verts en deux journées, Gérald Passi, blessé à la cheville gauche contre Cannes (1-2, 1re journée), est indisponible jusqu’à l’automne.
La seule bonne nouvelle vient de la signature d’un chasseur de buts. Longtemps courtisé, le Suisse Stéphane Chapuisat, qui appartient au Borussia Dortmund, n’a pu se mettre d’accord avec les dirigeants de l’ASSE.

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France Football du 3 août 1994.

Jacques Santini, qui s’agace de l’absence de cet oiseau rare, s’en explique : « C’était pourtant notre priorité en matière de recrutement, mais soit les joueurs proposés étaient hors de prix, soit nous avons reçu des fins de non-recevoir partout pour les internationaux A, A’ ou Espoirs que nous avons contactés ».

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France Football 3 août 1993.

Finalement, un Allemand, Roland Wohlfarth, transfuge du Bayern Munich, débarque à Saint-Etienne, avec un contrat de deux ans en poche.

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L’Equipe du 3 août 1993.

Pour ce déplacement au stade Geoffroy-Guichard, Arsène Wenger, l’entraîneur monégasque, doit composer avec de nombreuses absences ou incertitudes. Djorkaeff souffre d’une contracture à une cuisse, Enzo Scifo, la recrue belge de l’ASM, est très incertain en raison d’un arrachement osseux. Comme Wohlfarth, Franck Passi, fraîchement arrivé en Principauté, doit lui effectuer ses grands débuts. Klinsmann et Ikpeba sont chargés, quant à eux, de l’animation offensive des « rouge et blanc ».

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Arsène Wenger, l’entraîneur monégasque, a quelques soucis avec son effectif.

Cette rencontre entre Stéphanois et Monégasques, c’est aussi la confrontation entre les deux doyens de la Division 1 : Jean-Luc Ettori (37 ans), d’un côté, Joseph-Antoine Bell (39), de l’autre. A eux deux, ils totalisent soixante-seize ans. Pour l’un comme pour l’autre, l’heure de la retraite sportive n’a pas encore sonné.

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Henrik Kasperczak, l’entraîneur qui a fait remonter les Verts en Division 1 en 1986.

Quelques secondes avant que ne soit donné le coup d’envoi, le speaker du stade a annoncé la présence d’un ancien Vert. Patrick Battiston est venu spécialement de Bordeaux pour superviser Monaco, prochain adversaire des Girondins. Autre tête connue du public stéphanois, le Polonais Henrik Kasperczak. A l’applaudimètre des onze joueurs stéphanois, Wohlfarth reçoit une véritable ovation de la part du public, impatient de découvrir celui qu’ils attendaient comme le messie.

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L’AS Saint-Etienne 1993-94 : debout (de g. à d.) : Moravcik, Swierczewski, Blanc, Despeyroux, Bell, Cyprien. Accroupis (de g. à d.) : Wohlfarth, Moreau, Camara, Delpech, Deguerville.

Enfin, Jean-Michel Larqué, souffrant, n’assiste pas à la rencontre, ce que confirme son président : « Jean-Michel a profité de quelques jours de détente pour subir quelques examens, et se repose actuellement. »

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Les deux Allemands de la rencontre : Jürgen Klinsmann (Monaco) et Roland Wohlfarth (ASSE) qui s’apprête à disputer son premier match en Vert.

Penalty pour Monaco, Blanc expulsé

A Saint-Etienne, les journées se suivent et semblent se ressembler. Après un quart d’heure de jeu, les 21 842 spectateurs présents ce samedi 7 août 1993 au stade Geoffroy-Guichard croient revivre le scénario de la première journée contre Cannes. On joue seulement depuis un quart d’heure et M. Ramos, l’arbitre de la rencontre, désigne le point de penalty pour les Monégasques. Joseph-Antoine Bell, auteur d’un bon match à Nantes (1-0) le week-end précédent, relâche maladroitement le ballon devant Klinsmann à la limite de sa surface de réparation. L’international allemand profite de l’aubaine et frappe au but. Laurent Blanc, dernier rempart de la défense verte, détourne le ballon … du bras.

M. Ramos, bien placé, applique alors le règlement et siffle sans hésiter une seconde le penalty. La sanction ne s’arrête pas là pour les Verts qui voient le directeur du jeu brandir le carton rouge pour Blanc. « C’est le règlement, il n’y a rien à dire, dit le défenseur stéphanois après coup. Je me demande toutefois si Klinsmann ne commet pas une faute sur Bell. Bon, cela dit, il s’agit de ma première expulsion... »

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L’Equipe, 9 août 1993.

Sauvetage de Bell

Le penalty tiré sur la droite de Bell par Klinsmann est détourné par le gardien camerounais qui se rachète ainsi de sa bévue quelques minutes auparavant (15e).

Les Verts jouent à dix

Réduits à dix, les Verts s’apprêtent à souffrir face à l’armada monégasque. Le public de Geoffroy-Guichard vient à la rescousse de ses joueurs et joue son rôle de… onzième homme. A la 27e minute, sur un corner direct tiré par Moravcik, Moreau effleure le ballon de la tête. Cela suffit pour voir les Verts mener au score (1-0, 27e). A la mi-temps, Jacques Santini a des mots avec M. Ramos, ce qui lui vaut d’être exclu du banc de touche. C’est donc de la tribune qu’il donne ses consignes à François Blaquart, son adjoint.

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France Football, 10 août 1993.

Wohlfarth joue une mi-temps

Jean-Philippe Primard remplace Wohlfarth, un peu perdu sur le terrain pour sa première devant son nouveau public. Supérieurs numériquement, les joueurs de Wenger tentent de faire leur retard face à des Stéphanois qui n’ont que leur énergie à leur opposer. Derrière, Cyprien et Moreau se montrent intraitables alors que Moravcik tente de mener quelques contres.

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Enzo Scifo essuie un tacle de Despeyroux.

A la 50e minute, Klinsmann, l’un des Monégasques les plus dangereux, est victime d’un tacle appuyé du Slovaque. Blessé, il cède sa place à Viaud.

Swierczewski assure la victoire

A la 63e minute, Piotr Swierczewski scelle définitivement la victoire des siens (2-0). Avec ce succès remporté aux forceps, l’AS Saint-Etienne s’évite déjà une mini-crise. Bell a démontré à son entraîneur, que malgré ses 39 ans, il peut postuler plus que jamais à une place de titulaire. Devant Monaco, les Verts ont assuré l’essentiel : la victoire.

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Lubomir Moravic et Piotr Swerczewski sont heureux après cette première victoire de la saison.

Thierry CLEMENCEAU

♣ L’anecdote ♣

La prière de Rijvers

Le 9 décembre 1956, le match Saint-Etienne-Monaco (0-1) a donné lieu à un incident peu banal. Au cours de la rencontre, Kees Rijvers eut un mouvement d’humeur de sorte qu’en passant près de l’arbitre, M. Schwinte, il fit entendre quelques mots mal articulés. Or, bien qu’il n’y eut pas de faute vraiment caractérisée, Rijvers fut appelé après le match auprès de M. Schwinte et prié de dire clairement ce qu’il avait dit entre ses dents une demi-heure auparavant.

A bien réfléchir, Rijvers aurait pu faire cette réponse qui a fait jadis la gloire de Michel Fruloso : « Ce que j’ai marmonné ? Mais je récitais une prière à la Vierge. Vous n’allez tout de même pas m’empêcher de prier la Vierge ? »

(Extrait du France Football, 11 décembre 1956)

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Un grand merci à Johnny Rep pour ses encouragements, sa gentillesse et sa grande disponibilité.

Parfum d’Europe

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De passage à Saint-Etienne pour le match de Ligue Europa contre l’Inter Milan jeudi 6 novembre, les deux ex-Verts Johnny Rep (1979-1983) et Alain Geiger (1988-1990) ont visité le désormais incontournable musée des Verts. Philippe Gastal, le conservateur du Musée des Verts, a conquis les deux hommes par ses connaissances et la faculté à vous faire traverser les différentes périodes de l’ASSE.

La vidéo

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Saint-Etienne – Hajduk Split : Les Verts héroïques

Ce jeudi 6 novembre 2014, l’AS Saint-Etienne reçoit l’Inter Milan en Ligue Europa. il y a quarante ans, jour pour jour, les joueurs de Robert Herbin écrivaient l’une des plus belles pages de l’histoire européenne du club. Je vous propose de revivre le match retour entre Saint-Etienne et Hajduk Split au stade Geoffroy-Guichard. Bonne lecture.

Le vendredi 25 octobre 1974, au lendemain de l’écrasante victoire de Hajduk Split contre l’AS Saint-Etienne (4-1) en seizièmes de finale aller de la Coupe des clubs champions , L’Equipe titrait en Une : Georges Bereta : « Se secouer et y croire !  »

Refaire le coup du Bayern

Le 6 novembre, pour poursuivre leur carrière européenne, les Verts de Robert Herbin devront inscrire trois buts sans en encaisser ou s’imposer par 5-1, 6-1… La tâche est certes ardue mais pas impossible. En 1958-59, le Stade de Reims, battu à l’aller 0-2 par le Standard de Liège, s’était imposé au retour 3-0 au Parc des Princes. Même scénario pour Saint-Etienne en 1969 : battus 2-0 par le Bayern à Munich, les hommes de Batteux s’étaient imposés 3 à 0 au stade Geoffroy-Guichard.

ST ETIENNE-BAYERN MUNICH (3-0)
A l’issue de la qualification de Saint-Etienne face au Bayern (3-0), Roger Rocher félicite Bernard Bosquier, le défenseur des Verts.

Le derby comme ultime répétition

Avant de recevoir Hajduk Split pour le match retour, les Verts disputent trois matches de Championnat. Le premier se solde par une victoire écrasante contre Metz (5-0, 13e journée), le second par une défaite à Rennes (1-3, 14e journée) et le troisième par une victoire étriquée mais importante contre le voisin lyonnais (1-0, 15e journée). 24 856 spectateurs seulement assistent à cette dernière rencontre. Il faut dire que faire jouer le derby un vendredi après-midi à 16 heures, à quelques jours pour les deux équipes de matchs européens cruciaux, ne constitue pas la situation la plus propice pour attirer la foule des grands jours.

Ivic est présent pour le derby

Dans les tribunes du stade Geoffroy-Guichard, un spectateur est particulièrement attentif. Tomislav Ivic, venu le matin même en avion de Split, prend des notes avant de repartir pour la Yougoslavie visiblement pas plus inquiet que ça.

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L’Equipe du 2 novembre 1974

Depuis le match aller, Robert Herbin et ses joueurs ont visionné deux fois la rencontre contre Split au magnétoscope. S’ils ont fait le constat que l’arbitrage de M. Babacan ne leur avait été guère favorable, ils savent aussi que pour gagner, ils ne devront compter que sur eux-mêmes.

Le lundi 4 novembre, à l’avant-veille du match, les guichets du stade Geoffroy-Guichard sont pris d’assaut. La défaite sévère du match aller n’a pas refroidi les ardeurs et les supporters espèrent que leurs protégés réaliseront un exploit aussi retentissant qu’en 1969 devant le Bayern.

Herbin programme une séance vidéo à ses joueurs

Après l’entraînement de la matinée, l’entraîneur stéphanois n’a pas la mine des bons jours. S’il est rassuré par l’état du genou de Christian Lopez, en revanche, Osvaldo Piazza, le « roc » argentin, boîte bas. Le derby a laissé des traces. Autre contrariété : Hervé Revelli se plaint de la cuisse gauche. L’après-midi est consacré à une nouvelle séance vidéo. Herbin analyse les phases de jeu qui ont bien fonctionné au match aller mais aussi celles qu’il ne souhaite plus voir reproduire.

ST ETIENNE-HADJUK SPLIT (5-1)
Hervé Revelli (ici aux prises avec Meskovic lors du match aller), se plaint d’une contracture et reste incertain pour le match retour contre Split.

A Split, l’ambiance est plus décontractée. « Nous avons une idée fausse de notre adversaire, déclare Tomislav Ivic. Saint-Etienne, au stade Geoffroy-Guichard, c’est une autre équipe. »

Le lundi, la délégation splitoise s’envole pour la France sans son capitaine Holcer, ni Peruzovic et Jovanic tandis que Zungul, autre pièce maîtresse, est incertain. Mais le grand point d’interrogation concerne le meneur de jeu Oblak qui n’a pas joué contre Sarajevo le dernier match de Championnat.

Hervé Revelli est incertain

Le mardi après-midi, après une ultime séance d’entraînement au stade Geoffroy-Guichard, les attaquants stéphanois travaillent sous les ordres d’Herbin. Hervé Revelli ressent toujours une gêne et sa participation au match demeure incertaine. Les défenseurs sont pris en charge par Robert Philippe. Farison, définitivement « out », sera remplacé poste pour poste par Repellini.

« Nous avons fait une répétition générale, insiste l’entraîneur stéphanois. J’ai remarqué que nous n’exploitions pas assez les coups francs que l’on nous accorde à proximité des buts adverses. Or, il est très possible que nous bénéficions d’un assez grand nombre de coups francs. »

Après la mise en place tactique, la délégation stéphanoise part pour une mise au vert de 24 heures dans la petite ville d’Andrézieux-Bouthéon. Ils séjournent dans le Novotel de l’aérodrome, loin de l’effervescence qui gagne la ville.

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ASSE-Actualités du 5 novembre 1974

Refaire le coup du Bayern

Curkovic et ses coéquipiers sont prêts pour l’exploit. Le souvenir du Bayern Bayern est dans toutes les têtes. Pour eux, la situation est identique. A Munich comme à Split, ils ont été dépassés, humiliés, piétinés. Aujourd’hui, ils veulent laver cet affront. Herbin croit aux chances stéphanoises : « Nous avons revu trois fois le match au magnétoscope et nous avons noté ce qui avait finalement entraîné cette défaite par 4 à 1. »

La ville de Saint-Etienne rêve d’un exploit

Depuis quinze jours, toutes les conversations dans la ville tournent autour de ce match retour. On peut entendre ici ou là : « Pourquoi notre équipe ne gagnerait-elle pas par 3-0 et ne se qualifierait-elle pas pour les quarts de finale ?  »

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L’Equipe du 6 novembre 1974

Mercredi 6 novembre, pour la première fois de son histoire, le club champion de France invite la délégation d’Hajduk parmi lesquels douze journalistes yougoslaves à déjeuner. Ce moment de convivialité, en l’honneur des quarante ans du club, se déroule non pas au Grand Hôtel comme à l’accoutumée mais dans les salons du stade Geoffroy-Guichard.

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France Football du 12 novembre 1974

En 1969, avant le match retour contre le Bayern, Roger Rocher avait alors lancé à ses joueurs : « Si vous gagnez ce soir, vous serez les dieux du stade. » Reste à savoir si les dieux du stade seront au rendez-vous contre Split cinq ans plus tard.

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France Football du 12 novembre 1974

Comme souvent à Saint-Etienne, un lever de rideau est programmé pour faire patienter les 26 381 supporters stéphanois déjà installés dans les tribunes. Le Variétés FC s’incline (1-2) face à l’équipe de L’Etrat, dont l’entraîneur n’est autre que Jean-Michel Larqué.

L’hommage du public à Georges Carnus

Quelques minutes avant le match, le speaker du stade annonce la courte défaite nantaise (2-0) à Ostrava en Coupe de l’UEFA. Rocher, jamais à court de répartie, lance : « Eh bien, puisqu’il n’y a plus que nous, nous voici obligés de vaincre ! » Nombre d’anciens de la maison verte, comme pour chaque grand rendez-vous au stade Geoffroy-Guichard, ont fait le déplacement. Claude Abbes, toujours aussi fidèle, mais aussi André Fefeu, Roland Mitoraj ou encore Aimé Jacquet, venu en voisin. Un autre ancien, vêtu d’un imper beige, se dirige vers le rond central. Georges Carnus, invité par les dirigeants stéphanois à donner le coup d’envoi, reçoit un hommage vibrant de la part des supporters qui ne l’ont pas oublié.

Il est 20 h 30. Les 22 acteurs entrent sur la pelouse du stade Geoffroy-Guichard.
Il est 20 h 30. Les 22 acteurs entrent sur la pelouse du stade Geoffroy-Guichard.

Janvion, la surprise de Robert Herbin

Il est 20 h 30. Les deux équipes pénètrent sur le terrain. Robert Herbin a réservé une surprise à Ivic et ses joueurs : Janvion, la nouvelle arme secrète de l’entraîneur stéphanois, a remplacé Merchadier dans le onze stéphanois. Le jeune Martiniquais est chargé de surveiller de près le redoutable gaucher Surjak.

Un sentiment de révolte

D’entrée, les Stéphanois se ruent à l’assaut des cages de Meskovic. On sent chez eux un sentiment de révolte et de revanche. On joue seulement depuis dix minutes et Hervé Revelli par deux fois manque d’un crampon d’inscrire le premier but réclamé sur l’air des lampions par les supporters. Les Yougoslaves débordés cherchent à gagner du temps par n’importe quel moyen. A la 20e minute, Kurtela prend le ballon à deux mains pour anéantir une attaque stéphanoise. M. Patterson, l’arbitre écossais de la rencontre, fait alors preuve d’une grande mansuétude. A la 25e minute, Piazza, énervé par cette attitude peu sportive, se lance alors dans une chevauchée fantastique, élimine trois joueurs et frappe violemment au but du géant Meskovic qui détourne le tir de l’Argentin.

ST ETIENNE-HADJUK SPLIT (5-1)
Oswaldo Piazza (à droite) écoute les consignes de Robert Herbin, son entraîneur.

Larqué entretient l’espoir

La première demi-heure de jeu vient de s’écouler et les Stéphanois n’ont toujours pas débloqué leur compteur buts. Quelques minutes plus tard, Larqué s’y emploie. A la suite d’une remise de la tête d’Hervé Revelli, il catapulte d’une volée rageuse le ballon dans les filets du gardien yougoslave (1-0, 36e). Les Verts sont enfin récompensés de leurs efforts mais un tiers de leur retard seulement est comblé. Comme au match aller, Surjak tente une échappée solitaire mais se heurte au jeune Janvion. Le remplaçant de Merchadier, à la manière d’un rugbyman, le plaque pour anéantir sa course, ce qui lui vaut un carton jaune (40e). Après quarante-cinq minutes, les Stéphanois regagnent les vestiaires avec un seul but d’avance, ce qui récompense mal la demi-douzaine d’occasions franches qu’ils se sont créées.

ST ETIENNE-HADJUK SPLIT (5-1)
Jean-Michel Larqué ouvre la voie pour les Verts en inscrivant le premier but d’une belle reprise de volée.

L’arbitre écossais est complaisant

En seconde période, les Stéphanois remettent du cœur à l’ouvrage et déploient toute l’énergie nécessaire pour inscrire un deuxième but. Synaeghel (55e) est fauché dans la surface de réparation sans que l’arbitre écossais ne bronche. Les joueurs stéphanois se disent alors qu’ils sont maudits avec les hommes en noir.

Premier tournant du match

Cinq minutes plus tard, la consternation règne dans le stade. Une attaque yougoslave se développe sur l’aile droite, un centre aérien surprend Repellini qui ne peut dégager de la tête. Jovanovic reçoit le ballon et se joue de Lopez pour tromper Curkovic (1-1, 60e). Tout est à refaire pour des Stéphanois anéantis.

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Gérard Janvion, le joker de Robert Herbin, n’a pas déçu face à Surjak.

Deuxième tournant du match

Moins d’une minute après ce coup du sort, Bathenay saute plus haut que Surjak et remet les Verts dans le sens de la marche en trompant de la tête Meskovic (2-1, 61e). Pour le benjamin des Verts (20 ans), il s’agit d’une belle récompense. C’est au tour de Synaeghel de croire à un nouvel exploit des siens. A la 71e minute, il s’infiltre dans la surface de réparation et s’écroule. Cette fois, M. Patterson n’hésite pas une seconde et désigne le point de penalty. « Bérette » le tire en force au milieu sous la barre (3-1, 71e). Les « Allez les Verts ! Allez les Verts ! » résonnent dans le stade. Il reste dix-neuf minutes pour marquer un but. Roger Rocher, très nerveux sur le banc de touche, en casse un morceau de sa pipe légendaire et l’avale !

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Georges Bereta tire le penalty obtenu par Synaeghel et inscrit le 3e but de Saint-Etienne.

Troisième tournant du match

Repellini, à court de compétition, donne des signes de fatigue. Herbin, dans son manteau de fourrure, ordonne à Triantafilos d’enlever son survêtement et d’aller s’échauffer rapidement. A la 72e minute, « Tintin » fait son entrée sur le terrain.

La magie des soirs de Coupe d’Europe

Le « Grec » se place aux avant-postes au côté d’Hervé Revelli alors que Bathenay recule en défense. D’emblée, Triantafilos percute et affole la défense yougoslave. Dix minutes après son entrée en jeu, il fait chavirer tout le stade, avide d’un exploit.

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Robert Herbin en remplaçant Repellini par Triantafilos a réussi son pari.

A la 82e minute, Meskovic, excellent jusque-là, rate son dégagement. Patrick Revelli profite de l’aubaine pour centrer à destination de son frère Hervé. Ce dernier court vers le ballon mais le laisse intelligemment passer pour Triantafilos en embuscade qui déclenche une frappe croisée imparable ((4-1, 82e). Impossible n’est donc pas stéphanois!

ST ETIENNE-HADJUK SPLIT (5-1)
La rentrée d’Yves Triantafilos a été gagnante. En inscrivant le quatrième but des Verts, le « Grec » a remis les deux équipes à égalité sur l’ensemble des deux matches.

Hervé Revelli récupère le ballon au fond des filets et, à grandes enjambées, le ramène dans le rond central en l’embrassant plusieurs fois. Les Verts auront-ils la force de se qualifier avant la fin du temps réglementaire? La fatigue pèse dans les jambes. Christian Lopez, le sent bien et tente de gagner du temps au grand dam d’Ivan Curkovic. Le gardien yougoslave des Verts pense que son équipe peut l’emporter au terme des 90 minutes. Les fidèles supporters y croient plus que jamais tout comme Larqué qui, dans le temps additionnel déclenche une belle frappe sauvée par Meskovic (91e).

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France Football du 12 novembre 1974

Les 22 acteurs doivent jouer l’inévitable prolongation. Janvion, dont le duel avec Surjak a laissé des traces, se tient la cuisse et demande un massage pour calmer ses crampes. Le docteur Poty tente de faire des miracles  mais cela ne suffit pas pour tenir jusqu’à la fin du match. Deux minutes après le début de la prolongation, Herbin décide alors de le remplacer par Santini.

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A la 98e minute, Hervé Revelli, auteur d’une belle tête plongeante, est tout près d’offrir le cinquième but aux Stéphanois.

Dans le premier quart d’heure, les Stéphanois font le siège des buts de Meskovic et les frères Revelli sont tout près de marquer (96e, 98e). L’équipe yougoslave est à la limite de la rupture mais elle tient tant bien que mal.

A la 104e minute, Hervé Revelli récupère un mauvais dégagement de Meskovic, repart à l’assaut des buts du gardien yougoslaves. A vingt-cinq mètres, il est crocheté et obtient un coup-franc. Bereta adresse une passe courte pour Triantafilos qui, d’un tir puissant, trompe Meskovic.

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France Football du 12 novembre 1974

Ils rejoignent le Stade de Reims

Les Verts mènent 5 à 1 et sont en quarts de finale mais il reste seize minutes à tenir. Seize minutes qui durent des heures. Les joueurs stéphanois sont épuisés : Larqué se plaint de l’aine et Bereta finit le match en marchant. Il est 23 heures, M. Patterson siffle enfin la fin d’une partie héroïque. Les Stéphanois viennent d’écrire l’une des plus belles pages européennes de leur histoire. Ils accèdent pour la première fois aux quarts de finale de la Coupe d’Europe des clubs champions. Il faut remonter à la saison 1962-63 avec le Stade de Reims pour trouver une équipe française à un tel niveau de cette compétition.

La reconnaissance de Larqué

Curkovic et Piazza, épuisés, évitent le flot de supporters qui envahit la pelouse et regagnent les premiers les vestiaires. Quant à Larqué et Bereta, morts de fatigue mais aussi de bonheur, ils n’en finissent pas d’être congratulés. Larqué, après un échange de maillots avec un adversaire, s’approche du tunnel et s’arrête devant la tribune officielle. Le bras levé, il salue son président Roger Rocher comme pour mieux lui signifier toute la reconnaissance du travail effectué par ce dernier depuis quinze ans et sa prise de fonction à la tête du club.

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Au terme des cent-vingt minutes, les joueurs épuisés, tentent de regagner les vestiaires.

Herbin : « Mes joueurs sont à féliciter »

Encensé après le match, Robert Herbin répète inlassablement : « Ce sont mes joueurs qu’il faut féliciter. Dorénavant, nous devons tous les respecter. Je me permettrais de dire que la qualification contre Hajduk vient encore de plus loin et que le match de mercredi fut encore plus sublime, plus passionné que celui contre le Bayern. Le rythme a été plus intense, plus soutenu, de la première à la dernière minute, et cela a duré plus longtemps. » Pierre Garonnaire, le recruteur des Verts, bien qu’aphone, raconte à qui veut l’entendre « qu’il l’avait bien dit après la défaite de Split ».

Musée des Verts
Le ballon du match exposé au Musée des Verts.

La revanche de Triantafilos

Pour Yves Triantafilos, encore grippé deux jours avant le match, cette soirée du 6 novembre s’apparente à un véritable conte de fée. Son beau-frère, venu d’Allemagne pour assister au match, lui avait préparé un grog. Bien lui en a pris. « Quel remède, dit cette force de la nature originaire de Sail-sous-Couzan, j’ai dormi dix heures et sué toute ma fièvre. On n’est pas là pour s’écouter pleurer. »

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Triantafilos, en inscrivant son deuxième but de la soirée, qualifie les Verts pour les quarts de finale de la Coupe d’Europe des Clubs Champions.

Réserviste à l’ASSE, il a su attendre son heure. Son expérience internationale avec Olympiakos contre les plus grands clubs européens a été profitable à ses partenaires. C’est lui qui avant la prolongation avait harangué ses partenaires : « Maintenant, il faut les piétiner, leur a-t-il dit. Si on ne se qualifie pas là, on ne se qualifiera jamais. »

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L’Equipe du 8 novembre 1974

Le lendemain, la presse française n’a pas de titres assez forts pour décrire la performance des Verts. Le terme de Chaudron y fait même son apparition. Les journaux yougoslaves, quant à eux, parlent de la « catastrophe » d’Hajduk à Saint-Etienne et saluent la performance de Triantafilos. Le quotidien « La Politique » titre : « Le Grec, l’arme secrète. » Quand il a revu les images de l’exploit au journal de 13 heures, « Tintin » s’est exclamé surpris : « Nom d’un chien, je ne m’étais pas rendu compte de la puissance de mon tir. Mais je me demande bien comment la balle a pu passer à travers ce rideau. Vous avez vu Meskovic ? Il était malade de dépit. »

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L’Equipe du 8 novembre 1974

Saint-Etienne se souviendra longtemps de son vingtième match disputé dans la plus prestigieuse des coupes européennes. Grâce à ce succès retentissant, les Stéphanois ont pu passer l’hiver sereinement en rêvant d’un printemps européen.

Thierry CLEMENCEAU

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La Une de L’Equipe du 8 novembre 1974.

LA VIDEO

 

LE BONUS 

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Lille – Saint-Etienne : Lukacs, un petit tour et puis s’en va

Ce samedi 1er novembre 2014, Saint-Etienne se déplace à Lille pour le compte de la 12e journée de Ligue 1. A cette occasion, le LOSC soufflera ses 70 bougies. En 1936, les dirigeants stéphanois, à la recherche d’un attaquant de grande classe, jettent leur dévolu sur le Lillois Istvan Lukacs, peu en réussite dans le Nord. Bonne lecture.

Les spectateurs stéphanois découvrent Lukacs

Le 4 mars 1934, le stade Geoffroy-Guichard accueille un quart de finale de Coupe de France entre Sète et Amiens. Les Dauphins sétois, où évoluent notamment Beck et le jeune Llense, s’imposent 3 à 0 et se qualifient pour les demi-finales de l’épreuve. Au cours de cet après-midi, les spectateurs présents à Saint-Etienne font la connaissance du Hongrois Istvan Lukacs. Bien qu’isolé et étroitement surveillé à la pointe de l’attaque, il inscrit deux buts de la tête (25e et 87e).

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Istvan Lukacs, l’attaquant du FC Sète, est un joueur complet. Une Miroir des Sports.

L’homme de la finale

Le 8 avril, en demi-finale à Colombes, Sète s’impose 1-0 contre Lille grâce une nouvelle fois à son attaquant Lukacs. Enfin, le 6 mai, lors de la finale à Colombes, Sète l’emporte devant l’OM (2-1) et décroche le premier doublé Coupe-Championnat en France. Menés 1-0, grâce à un but inscrit par l’Olympien Zermani (2e), les Sétois égalisent par leur Hongrois Lukacs (22e) avant de s’imposer grâce à une nouvelle réalisation de leur buteur (75e).

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Istvan Lukacs, en incrivant un doublé permet à Sète de remporter la finale de la Coupe de France. Une du Miroir des Sports du 8 mai 1934.

Lille s’offre le joueur le plus cher du Championnat

La performance du Magyar ne laisse pas indifférents les dirigeants du Lille Olympique.
A la fin de cette saison, ils contactent le buteur de la finale et l’enrôle dans leur effectif. Son transfert dans le Nord fait couler beaucoup d’encre. Lille débourse pas moins de 55 000 francs pour s’attacher ses services. Lukacs devient alors le joueur le plus cher de France. Cependant, l’optimisme fait vite place au pessimisme. Lukacs, en panne de buts, cède au découragement. Les supporters lillois ne reconnaissent plus le buteur sétois et expriment alors leur mécontentement. Sa deuxième saison à Lille n’est guère plus convaincante et un départ semble inévitable pour relancer sa carrière.

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Istvan Lukacs, durant ses deux saisons à Lille, n’a pas réussi à confirmer ses talents de buteur.

Saint-Etienne s’offre Lukacs

En ce début de saison 1936, les dirigeants de l’ASSE  annoncent comme objectif de se classer parmi les deux premiers de Division 2 pour accéder à la division nationale. M. Vago, l’entraîneur stéphanois, malgré des restrictions budgétaires drastiques, possède, malgré tout, un effectif compétitif.

Début septembre, Istvan Lukacs (ex-Sète et Lille) s’engage avec Saint-Etienne. Le club du président Pierre Guichard souhaite relancer l’ancien Sétois.

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Photo : Nos Sports

Lukacs : d’Ujpest à Sète

Lukacs (prononcez « Loukatch »), âgé de 24 ans, est originaire de Budapest. Dans son pays, il débute comme amateur au WSC de Budapest. Réaliste dans l’axe de l’attaque, il signe son premier contrat professionnel avec Ujpest où il demeure durant trois saisons. Cette adresse ne laisse pas indifférent M. Bayrou, le président sétois. Il effectue le déplacement sur les bords du Danube pour enrôler « Pichta », surnom donné par ses amis. Il est accompagné de son coéquipier Marton Bukovi. L’instauration du professionnalisme en France à l’été 33 attire quelques pointures étrangères parmi lesquelles l’Autrichien Hiden (RC Paris) ou le Hongrois Kohut (Marseille).

Durant son année passée sur les bords de la Grande Bleue, Sète s’octroie la Coupe de France et remporte le titre de champion de France. Lukacs termine meilleur buteur avec 28 buts.

A Saint-Etienne, il n’arrive pas en terre inconnue. Il retrouve son ami et ex-coéquipier sétois Yvan Beck qui avait rejoint les rangs ligériens en 1935.

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Photo : Miroir des Sports

Premier match en Vert et déjà trois buts

Lukacs fait ses grands débuts avec le maillot vert le 26 septembre à domicile contre Valenciennes. Malgré la défaite des siens (5-6), le Hongrois réussit ses grands débuts en inscrivant 3 buts. Le 18 octobre, il donne la victoire aux Stéphanois contre Nice (1-0). Une semaine plus tard, il participe à la déconvenue des Verts (1-2) à Boulogne.

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Photo Nos Sports

Lukacs inscrit 7 buts… avec Mulhouse

Début novembre, la trêve imposée par la Coupe de France contraint les dirigeants stéphanois à organiser un match amical contre les Suisses de la Chaux-de-Fonds au stade Geoffroy-Guichard. Les hommes de Vago s’imposent largement par 9 à 2.

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Yvan Beck – Photo : Miroir des Sports

Sollicité depuis plusieurs jours par le FC Mulhouse, il dispute un match amical avec le club alsacien à Besançon qui s’impose devant le RC Franc-Comtois 13 à 0. Lukacs, à cette occasion, inscrit 7 des 13 buts de son équipe. Moins de trois mois après son arrivée à Saint-Etienne, il s’apprête donc à refaire ses valises, ce qui pose problème à la Fédération Française de Football. Cette dernière n’a jamais eu un cas similaire à traiter : la qualification d’un joueur pour trois clubs en une saison. Alors que le départ de Lukacs pour Mulhouse est quasi bouclé, un contretemps de dernière minute vient contrecarrer les plans alsaciens.

5 matches et puis s’en va…

Les dirigeants de La Chaux-de-Fonds, présents à Besançon, avaient fait le déplacement pour superviser le joueur suisse de Mulhouse Buesche. Auteur d’une bonne prestation, les Suisses ne changent pas d’avis. En revanche, ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’était la présence de Lukacs dans les rangs mulhousiens. La bonne entente de ce dernier avec Buesche n’échappe pas aux dirigeants de La Chaux-de-Fonds.

Le 19 novembre, Istvan Lukacs quitte l’AS Saint-Etienne. Avec le maillot vert, il n’aura disputé que cinq matches pour quatre buts inscrits.

Thierry CLEMENCEAU

 

L’anecdote

Le 10 décembre 1967, à l’occasion de la 18e journée de Division 1, les Verts d’Albert Batteux se déplacent à Lille. Depuis quelques jours, ils neige dans le Nord. Pour Salif Keita, c’est une grande première de voir un terrain de football recouvert d’un manteau blanc. Pour le rassurer, Batteux lui lance : « On ne sait jamais, tu es peut-être meilleur sur terrain enneigé que sur terrain sec« . Le Malien, plutôt désavantagé par sa morphologie longiligne sur ce type de terrain, époustoufle néanmoins joueurs et spectateurs de toute sa classe. Les Verts repartent du Nord avec un bon match nul (2-2) et Keita inscrit son petit but d’une belle frappe travaillée à la 56e minute.

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A l’occasion du déplacement de Saint-Etienne à Lille, Keita découvre pour la première fois un terrain recouvert de neige. Cela ne l’empêche pourtant pas d’inscrire le second but des Verts.

 

 La vidéo

Ce samedi 1er novembre 2014, le LOSC fête ses 70 ans. A travers cette vidéo, je vous propose de revivre le cinquantenaire du LOSC.

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