Abedi Pelé : rendez-vous manqué(s)

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La saison 2013-2014 a rendu son verdict : les Verts ont terminé à une très honorable quatrième place. L’équipe de Christophe Galtier est qualifiée pour la Ligue Europa. Les dirigeants stéphanois s’activent déjà pour constituer leur effectif en vue de la saison prochaine. En 1986, le club présidé par André Laurent, accédait à la Division 1. Un jeune Ghanéen, quasi inconnu en France, débarquait à Geoffroy-Guichard pour un essai. Récit.

Pelé signe Chez les Verts !

Il s’appelle Pelé, il porte le même numéro dix, c’est la nouvelle recrue des Verts. Plus petit que son illustre homonyme, un brin chétif, ce joueur — qui vient du Ghana — a néanmoins fortement impressionné le public grenoblois. Voilà un garçon qui pourrait devenir la coqueluche de Geoffroy-Guichard.

Le 13 mai 1986, l’hebdomadaire FranceFootball annonce la signature d’Abedi Pelé à l’AS Saint-Etienne.

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Abedi Ayew Pelé, un artiste au service du football.

Abedi Ayew Pelé est né officiellement le 5 novembre 1964 à Accra au Ghana. Mais pour lui permettre de disputer la Coupe d’Afrique des Nations en 1982, on le vieillit de deux ans. A l’école, dans la cour de récréation, il dribble déjà comme le grand Pelé. Un brin individualiste, ses camarades l’appellent « Pelé, Pelé » pour qu’il lâche un peu le ballon. C’est comme cela qu’Abedi Ayew devient Pelé. Son nom est officiellement inscrit sur son passeport par décision du chef de l’Etat ghanéen, le capitaine Rawlings.

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Abedi Pelé avec le drapeau du Ghana sur les épaules.

Comme beaucoup de joueurs africains, celui qui fut la révélation de la CAN en Libye en 1982 rêve de jouer en Europe. Le vieux continent, il l’a déjà découvert en novembre 1985 lors d’un essai infructueux à Nantes. A l’époque, Robert Budzinski, le directeur sportif des Canaris, recherche le futur remplaçant de Vahid Halilhodzic mais le Ghanéen n’a pas le profil pour remplacer le buteur nantais. Il rentre au Ghana.

Du Real Tamale United à Saint-Etienne

Au mois de mai 1986, c’est à Saint-Etienne que le Black Star débarque sur les conseils et encouragements de Gérard Dreyfus, le correspondant à Radio France International en Afrique (RFI). Cette fois, pas de taxi comme un certain Salif Keita en 1967 mais le TGV qui relie la gare de Lyon à celle de Châteaucreux. Le grand Salif était arrivé seul, Abedi, lui, est accompagné de Christian Duraincie, un manager parisien.

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Abedi Ayew Pelé après un premier essai infructueux à Nantes, tente à nouveau sa chance à Saint-Etienne.

Pierre Garonnaire l’accueille à son arrivée dans le Forez. Dès le lendemain, il dispute un match avec l’équipe réserve. Il inscrit deux buts. Lors des séances d’entraînement, il démontre l’étendue de son talent. Il côtoie des joueurs comme Castaneda, Kurbos ou Milla, l’attaquant camerounais des Verts. Malheureusement pour Pelé, Roger Milla ne parle pas un mot d’anglais alors que Pelé ne converse que dans la langue de Shakespeare.

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A l’entraînement comme en match, Abedi Pelé fait le spectacle.

S’il convainc les dirigeants stéphanois durant son essai, ces derniers devront débourser la modique somme de 50 000 F. pour s’attacher ses services.
En cette année de Coupe du monde mexicaine, le championnat de France comme la plupart de ceux européens, a donné son verdict dès fin avril. Pour faire rentrer un peu d’argent frais dans les caisses des clubs, les organisateurs du Loto Sportif et la Ligue nationale relancent la Coupe de la Ligue. Tous les clubs inscrits en D1 et D2 en 1985-86 sont invités à y participer.
Henrik Kasperczak, s’il ne peut encore disposer de Dimitrov et Slavkov, ses deux recrues bulgares, entend bien voir à l’oeuvre celui qui enchante par ses « dribbles et gris-gris » à l’entraînement.

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S’il ne participe pas au premier match contre Le Puy (2-0 devant 2 997 contre plus de 42 000 en championnat pour ce même adversaire…), en revanche, il est titulaire contre Grenoble au stade Lesdiguières. Sa prestation ne passe pas inaperçue comme le relate L’Equipe du 12 mai 1986.

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Le week-end suivant, c’est jour de derby à Saint-Etienne. Les Verts reçoivent leur voisin lyonnais. Canal Plus, à défaut de Mondial, est partenaire de la Coupe de la Ligue et retransmet le match en direct. Oleksiak (Metz), Milla (Montpellier) et Bellus (Toulouse) font leurs adieux au public de Geoffroy-Guichard. Pelé, de nouveau titulaire au milieu, entend bien briller devant les caméras de la chaîne cryptée et montrer l’étendue de son talent au public stéphanois. Un derby revêt toujours un parfum particulier.

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L’Equipe du 19 mai 1986

Devant 3 750 spectateurs, les Verts s’imposent 2-0 et se qualifient pour le deuxième tour de cette compétition. Durant les soixante-douze minutes qu’il passe sur le terrain, Pelé l’altruiste, fait l’étalage de ses qualités et dompte la balle. Visiblement, l’ASSE tient là un véritable artiste. Suffisant, pour signer un contrat chez les Verts ?
A croire que non. Christian Duraincie, l’homme dépêché par Garonnaire, est chargé d’annoncer la mauvaise nouvelle au Ghanéen. Saint-Etienne veut réussir son retour en Division 1. Pour cela, son recrutement s’est porté sur deux joueurs étrangers expérimentés et au talent reconnu : les Bulgares Georgi Dimitrov (capitaine de sa sélection) et Georgi Slavkov (ancien Soulier d’Or). Garonnaire pense que les deux joueurs de l’Est constituent une sécurité pour le club. Abedi Pelé peut rester dans le Forez mais il commencera la saison en Division 3. Très déçu, il refuse poliment la proposition et reprend le TGV à destination de Paris en compagnie de Duraincie.

Parizon le rattrape au vol

Les Chamois Niortais viennent de boucler leur première saison en Division 2. Patrick Parizon, ancien joueur de la « maison verte », cherche un milieu offensif capable d’occuper le flanc gauche pour la saison à venir. « Papa » qui a gardé de solides attaches à Saint-Etienne, était de passage dans la ville pour une transaction immobilière. Il en profite pour faire un tour à Geoffroy-Guichard où les joueurs s’entraînent. Il découvre un jeune Africain à l’entraînement. Il se renseigne sur ce joueur inconnu à ses yeux. Mais les frères Duraincie préfèrent placer leur jeune poulain dans une écurie de Division 1. L’entraîneur niortais laisse tomber.

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Patrick Parizon, l’entraîneur des Chamois Niortais (le deuxième en partant de la droite), grâce à sa bonne entente avec Pierre Garonnaire, a su attirer Abedi Pelé dans les Deux-Sèvres.

Le 19 mai, lors du match contre Lyon, un éducateur des Chamois Niortais, devant son poste de télévision, découvre, à son tour, Abedi Pelé. Surpris par la qualité du joueur, il en avertit l’entraîneur. Quelques semaines plus tard, Parizon, à nouveau de passage dans le Forez, apprend de la bouche de Pierre Garonnaire que l’ASSE n’avait pas conservé le petit Ghanéen. Le recruteur des Verts, voyant Parizon intéressé par le profil du joueur, le met aussitôt en relation avec les frères Duraincie. Bien que le joueur soit réfractaire à évoluer en Division 2, il concède à venir faire un essai à Niort. Auteur de grosses prestations en amical, notamment contre La Rochelle à Mauzée-sur-le-Mignon où il inscrit un but d’un ciseau retourné en pleine lucarne, le Ghanéen paraphe un contrat de deux ans avec le club deux-sévrien.

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Abedi Pelé s’apprête à déborder Fiard sous les yeux d’Eric Cantona lors d’un 32e de finale de Coupe de France contre Auxerre à Tours.

Sa renommée passe par Niort

A Niort, Abedi Pelé montre ses vrais talents et enchante par sa virtuosité technique. Les Chamois font la course en tête la majeure partie de la saison et accèdent à la Division 1. Régulièrement abonné aux 5 étoiles de FF, il termine la saison à trois longueurs de son coéquipier et capitaine Pascal Gastien. Au cours de cette saison, il inscrit 14 buts, loin derrière Tony Kurbos, l’ex-Vert (22 buts avec Mulhouse) et délivre une bonne demi-douzaine de passes décisives. Il a réussi son pari : se faire connaître aux yeux du grand public. La Division 1 lui tend les bras.

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Abedi Pelé au milieu de ses coéquipiers niortais : de g. à d. : Belabde, Augustin, Pelé, Ammanallah et Gladines.

Saint-Etienne, en Division 1, termine 16e (33 points) à deux points du premier relégable, Sochaux. Les deux Bulgares, quant à eux, connaissent des fortunes diverses. Dimitrov a justifié pleinement sa réputation de défenseur expérimenté. La défense des Verts n’a encaissé que 32 buts, ce qui en fait l’une des meilleures du championnat. Le Bulgare termine en tête des étrangers aux étoiles de FranceFootball.

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Georgi Slavkov, recruté pour faire trembler les filets, n’aura inscrit le moindre le but durant la saison 1986-87.

En revanche, l’attaque n’a pas été très prolifique : seulement 27 buts inscrits. Slavkov, souvent blessé, ne dispute que 18 matches sous le maillot vert pour aucun but marqué.

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Vogue la galère

A la surprise générale, le Ghanéen ne connaît pas la Division 1 avec Niort. La faute à une grosse mésentente concernant une prolongation de contrat avec le président Figari. Ce dernier souhaite prolonger le contrat de Pelé de trois ans mais à des conditions financières qui ne correspondent pas au salaire demandé par le joueur. Le joueur part en vacances dans son pays natal. A son retour, il reprend l’entraînement avec ses anciens et nouveaux partenaires dont Juan Andres Larres, un jeune Uruguayen. Les Chamois se retrouvent avec trois étrangers hors CEE (Amanallah est en attente de sa naturalisation française). Pelé, une nouvelle fois, se retrouve dans la peau du troisième étranger. Figari menace même de le faire jouer en DH à Niort s’il reste au club. On est à la limite du gag.

Le Paris-SG, qui lui a fait les yeux doux, l’a supervisé plusieurs fois dont une en Coupe de France contre Auxerre à Tours, a laissé tomber l’affaire. Niort demandait 8 MF, les dirigeants du PSG en proposaient 4. Patrick Parizon, de son côté, ne souhaite pas le départ de son joueur. Il sait ce que peut apporter son meilleur élément à son équipe en Division 1. Son président ne veut rien entendre et c’est finalement à Mulhouse (D2) qu’il est prêté. Cela ressemble à une punition pour Abedi. La caractériel président Figari décroche son téléphone et propose son joueur au président Goerig. Ce dernier croit même à un canular : « Te fous pas de ma gueule ! », lui dit-il. Trois jours après cet appel, le petit Ghanéen se retrouve dans l’Est de la France. En Alsace, il se morfond. Ce n’est pas une invitation du Bayern Munich à venir disputer une mi-temps contre Liverpool qui lui redonne le moral. A la trêve, l’OM de Tapie l’engage comme joker. mais comme à Saint-Etienne un an et demi auparavant, le club phocéen compte déjà deux étrangers. Cette fois, ce ne sont pas deux Bulgares mais deux Allemands : Allofs et Förster. A l’entraînement, débordant d’énergie, il veut prouver sa valeur mais agace, dérange même. Ses relations avec Jean-Pierre Papin et les deux étrangers, entre autres, ne sont pas des meilleures. Tapie et Hidalgo pensent que les choses vont s’aplanir et fondent de gros espoirs sur le Ghanéen.

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Abedi Pelé, après six mois à Mulhouse, signe à Marseille.

Les Verts pensent à … Pelé

Il commence pourtant la saison 1988-89 avec l’OM mais souhaite quitter la Provence au plus vite. Ca tombe bien, Saint-Etienne, orphelin du Marocain Mustapha El-Haddaoui, pense à recruter un milieu de terrain. Herbin revenu au club un an plus tôt, doit faire face à la méforme de certains de ses joueurs-cadres et compte également quelques titulaires blessés. Il doit également gérer le « cas Castaneda », évincé de sa place de titulaire et candidat à un départ après quatorze ans de bons et loyaux services. Le début de championnat est très décevant : après cinq journées, l’ASSE ne compte aucune victoire pour seulement 2 points au compteur. Le club envisage donc de prendre un joker. Le choix de ne pas recruter un véritable meneur de jeu à l’intersaison semble être une erreur.

Le vendredi 12 août, la venue de l’OM à Saint-Etienne en championnat est l’occasion pour les dirigeants stéphanois de sonder leurs homologues olympiens sur le cas Pelé. Mais ce dernier ne fait pas partie du déplacement à Geoffroy-Guichard. Pierre Garonnaire se souvient du passage du Ghanéen à Saint-Etienne deux ans plus tôt. C’est la mort dans l’âme qu’il avait dû renoncer à ce joueur pétri de talent. Abedi Pelé a le profil pour jouer à l’ASSE, encore faut-il qu’il obtienne sa naturalisation assez rapidement. Les dirigeans olympiens, de leur côté, ne sont pas opposés à un départ du joueur.

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Laurent Fournier, l’une des recrues stéphanoises de l’intersaison.

Dans L’Equipe du 16 août 1988, Herbin consent : « On parle depuis quelques jours de contacts avec le Marseillais Pelé. C’est nouveau, je le répète ! S’il faut engager quelqu’un, autant que ce soit maintenant, en effet. Sera-ce Pelé ? Il faut pousser l’analyse plus à fond. Sa possible venue a été évoquée, ce dernier week-end, du fait de la visite de l’OM. Pelé a des qualités intéressantes méritant examen. Celui-ci sera fait dès que le programme sera fait. »

Pelé encore barré par deux étrangers  à l’ASSE

Le 20 août, les Verts s’inclinent une nouvelle fois devant Monaco à domicile. A l’issue du match, André Laurent, le président stéphanois, doit faire face à la grogne venant des tribunes. D’ordinaire peu enclin à consulter son horoscope, le président stéphanois le regarde de plus près ces derniers temps. On lui avait prédit un mois d’août très difficile, cela se confirme. Son club est 19e. Il en profite néanmoins pour faire une mise au point : « Ce ne sera probablement pas Pelé parce que nous avons déjà deux étrangers et un dossier de naturalisation en souffrance avec Chaouch. »
Les Verts renoncent donc une nouvelle fois à engager le Ghanéen. Lille, par l’intermédiaire de Bernard Gardon (un ancien de la « maison verte ») devenu directeur sportif du LOSC, propose 4 MF à Bernard Tapie pour son joueur. Pelé fait une nouvelle fois ses valises direction le Nord.
Il était écrit que Pelé ne signerait donc jamais chez les Verts.

Thierry CLEMENCEAU

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Abedi Pelé assiste au jubilé d’un ex-Stéphanois : Joseph-Antoine Bell. A sa droite, Jean-Pierre Cyprien, joueur de l’ASSE de 1990 à 1994.
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Saint-Etienne-Ajaccio : Jour de fête

 

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Samedi soir, l’AS Saint-Etienne accueille l’AC Ajaccio pour le compte de la 38e et dernière journée du championnat de Ligue 1. Après sa belle victoire à Nantes, en cas de victoire, les hommes de Christophe Galtier espèrent monter sur la troisième marche du podium. Mais ils ne sont pas les seuls maîtres de cérémonie.

En 1967, les Verts d’Albert Batteux n’avaient pas fait de sentiment en s’imposant 4-0, trois jours après leur élimination en Coupe des Clubs Champions contre le Benfica d’Eusébio. Ce jour-là, un joueur faisait ses grands débuts au stade Geoffroy-Guichard : Salif Keita. En 1999, les hommes de Robert Nouzaret reçoivent les Corses. S’ils ne peuvent faire mieux qu’un match nul (2-2), ils retrouvent la Division 1. Enfin, tous les taxis mènent à Geoffroy-Guichard. Salif Keita et Adrien Ponsard ne diront pas le contraire… Bonne lecture.

 

Intouchables

Dimanche 3 décembre 1967. Saint-Etienne-Ajaccio : 4-0.
Trois jours après sa courte victoire contre Benfica (1-0), insuffisante pour la qualification en Coupe des Clubs Champions, les Verts reçoivent l’AC Ajaccio en championnat.

En quittant le stade le vendredi matin, Albert Batteux fait la moue. Le match musclé contre les Portugais a laissé des traces. En effet, pas moins de six de ses joueurs sont blessés. Le docteur Nicolas et le soigneur Minasso s’évertuent donc à soigner les éclopés, à savoir N’Doumbé, Bereta, Bosquier, Mitoraj, Jacquet et Revelli. Batteux ne peut également oublier que Herbin est toujours blessé. Seul rayon de soleil dans ce paysage obscurci pour l’entraîneur stéphanois, la naissance de sa petite fille. Il est grand-père pour la première fois.

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Pour Bernard Bosquier et quelques joueurs stéphanois, le match contre Benfica a laissé des traces.

C’est donc une équipe très éprouvée qui affronte l’AC Ajaccio. Les joueurs Corses, de leur côté, sont à Saint-Etienne depuis le jeudi. Ils ont profité de ce séjour pour assister au match contre Benfica. Albert Muro, l’entraîneur ajaccien, et ses hommes en ont aussi profité pour superviser leurs adversaires du week-end.

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Document : Musée des Verts

Des absences compensées

9 002 spectateurs ont fait le déplacement, malgré le froid, pour voir les Verts disputer leur troisième match en sept jours. Après Metz (4-0) et Benfica (1-0), quel sort allaient-ils réserver à Ajaccio ? Bien qu’handicapée par l’absence d’un tiers de son équipe (Herbin, Jacquet, Fefeu et Revelli), l’équipe stéphanoise joue d’entrée de jeu avec détermination. Les rares velléités ajacciennes sont contenues sans grande difficulté par le duo Bosquier-Durkovic.

La jeunesse au pouvoir

Au milieu, deux jeunes joueurs se font remarquer : Jean-Michel Larqué et Francis Camerini. Seulement âgés de 20 ans, les deux complices de l’équipe de France Juniors alimentent en bons ballons leurs attaquants dont un certain Salif Keita. Le Malien effectue contre Ajaccio ses grands débuts à Geoffroy-Guichard. Rapide et doté d’une technique hors pair, il fait souffrir ses adversaires.

Salif Keita affronte sa sélection avec les Verts.
Contre Ajaccio, Salif Keita effectue son premier match à Geoffroy-Guichard, son deuxième sous le maillot vert.

Dès la 25e minute, sur un centre millimétré de Bereta, Mitoraj ouvre le score de près (1-0, 25e). Les tentatives de Larqué et N’Doumbé font passer quelques frayeurs aux Ajacciens. Après la pause, Keita continue son festival. Après une série de dribbles qui laissent deux défenseurs corses sur place, il embarque Baratelli et loge la balle au fond des filets (2-0, 54e). Quatre minutes plus tard, c’est au tour de Larqué, d’un tir canon, d’envoyer Baratelli chercher le ballon au fond des filets (3-0, 58e).

Mekloufi dans un jour « sans »

Si Mekloufi, le capitaine des Verts, se montre particulièrement maladroit dans la finition, Bereta, ne se fait pas prier pour dribbler à son tour trois défenseurs ajacciens et y aller de son petit but (4-0, 75e). Après une telle démonstration de puissance et d’efficacité, les champions de France s’installent confortablement en tête du championnat. Comme à son retour de Lisbonne deux semaines plus tôt, les Verts se sont imposés aisément sans trembler.

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Albert Batteux, félicite Georges Bereta et Salif Keita, deux des buteurs stéphanois.

Keita réussit ses débuts à « G.G. »

Cette rencontre a surtout montré que l’ASSE possède un réservoir de jeunes performants et de qualité. N’Doumbé pour son second match de la saison n’a pas déçu. Jean-Michel Larqué a fait apprécier sa belle technique et sa vision du jeu a fait merveille. Quant à Francis Camérini, incorporé au Bataillon de Joinville, il jouait son premier match avec les Verts cette saison. L’ex-transfuge du Cavigal de Nice (comme Herbin) semble avoir atteint la maturité. Enfin, le jeune malien Salif Keita, pour ses grands débuts en match officiel à Geoffroy-Guichard, a séduit. Deux mois après avoir foulé pour la première fois la pelouse du stade en lever de rideau. Ses dribbles dévastateurs et son but annoncent des jours heureux.

Buts.- Mitoraj (25e), Keita (54e), Larqué (58e), Bereta (74e).
Saint-Etienne : Carnus – Durkovic, Mitoraj, Bosquier, Polny – Larqué, Camerini – N’Doumbé, Keita, Mekloufi, Bereta. Entr.: Batteux.
Ajaccio : Baratelli – Vanucci, Brucato, Devaux, Moise – Risso, Girod – Munoz, Sansonetti, Marcialis, Touré. Entr.: Muro.

 

Un taxi pour Geoffroy-Guichard

Après sa prestation de grande classe contre Ajaccio, Jean-Paul Oudot, l’envoyé spécial dans le journal L’Equipe, retrace, dès le mardi 5 décembre, l’arrivée de Salif Keita à Saint-Etienne.

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L’Equipe du 5 décembre 1967

Vidéo INA  : Albert Batteux évoque l’arrivée de Salif Keita à Saint-Etienne. Il loue aussi ses grandes qualités.

 

 

Nuit d’ivresse

1er mai 1999. Saint-Etienne-Ajaccio : 2-2.

Le 24 avril, Saint-Etienne quitte le stade Francis Le Basser avec un sentiment de frustration. Malgré leur match nul (1-1) à Laval, les hommes de Robert Nouzaret ne peuvent encore officialiser leur accession parmi l’élite. Lille vient en effet de s’imposer à Ajaccio (2-0). Bien qu’ils possèdent onze points d’avance sur les Nordistes ( 4e), les Verts ne sont pas encore assurés du sacre. Il faut donc attendre une semaine supplémentaire.

Objectif remontée

Pour la fête du muguet, l’équipe entraînée par Robert Nouzaret accueille… l’AC Ajaccio. Dans L’Equipe du 25 avril, l’entraîneur stéphanois a prévenu : « Plus le droit de décevoir« . Un petit point suffira aux Stéphanois pour retrouver sa place parmi l’élite. Le président Bompard surenchérit : « Il nous manque mathématiquement un point, cela nous autorise donc à un nul en quatre matches. Si on ne marque pas ce point, on ne mérite pas de monter en D1, mais on va le marquer. »

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Le président Alain Bompard attend l’officialisation de la remontée en Ligue 1 depuis plusieurs semaines.

Pour préparer la venue des Corses à Geoffroy-Guichard, Nouzaret a même programmé un match amical contre Dijon en Côte d’Or le mardi soir. Une rencontre finalement annulée pour éviter toute pression inutile. La dernière victoire à domicile remonte au 20 mars contre Lille (3-2). Depuis, Nice est venu s’imposer dans le Chaudron (2-0), ce qui a quelque peu refroidi les ardeurs. Ajaccio, de son côté, reste sur trois revers à l’extérieur. En début de semaine, l’attroupement devant les guichets du stade laisse présager que le match se jouera à guichets fermés.

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Les fans des Verts se sont arrachés les derniers billets pour participer à ce Saint-Etienne-Ajaccio.

Côté stéphanois, Nestor Subiat (7 buts), claqué à Laval, manque à l’appel. C’est Samba N’Diaye (arrivé de Nantes au Mercato d’hiver) qui est appelé à le suppléer pour former le duo d’attaque avec Patrick Revelles (actuel meilleur du club avec 12 buts).

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Les supporters stéphanois ont répondu présent pour cette grande soirée au stade Geoffroy-Guichard. Ils étaient 35 350 à soutenir leurs protégés.

L’ambiance des grands soirs

Ce 1er mai 1999, le stade Geoffroy-Guichard est plein à craquer pour célébrer ses héros. 35 350 supporters sont prêts à s’enflammer pour le moindre exploit, la moindre envolée des siens. Les drapeaux s’entremêlent, les chants résonnent comme aux plus beaux jours. Tous espèrent la consécration. C’est sûr, cette fois, les petits hommes Verts ne peuvent gâcher la fête. Sarr s’y emploie dès la 6e minute. Sur un corner de Revelles, il place sa tête hors de portée de Klein, le portier ajaccien (1-0, 6e).

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Les joueurs sortent du tunnel du stade de Geoffroy-Guichard, Patrick Guillou et Lucien Mettomo en tête.

A la 25e minute, Faderne égalise suite à une belle glissade de Janot (1-1, 25e). Malgré des tentatives de Sablé, Ferhaoui ou N’diaye, les Verts ne parviennent pas à « corser » l’addition avant la pause. Les supporters, durant ce quart d’heure de pause, peuvent découvrir « La marche verte« , un nouvel hymne à la gloire de leurs protégés, entonné par deux chanteurs locaux.

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Gilles Leclerc, l’expérience au service des Verts.

Au retour des vestiaires, les Verts veulent offrir la victoire à leurs supporters, pour les remercier d’avoir toujours été là dans les moments difficiles depuis trois ans. Ils ont souffert avec leurs joueurs sans pour autant les abandonner.

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Le capitaine stéphanois Kader Ferhaoui mène ses troupes vers la Division 1.

Revelles envoie les Verts au paradis

Il faut attendre la 84e minute : Revelles, accroché par Maroselli, obtient un penalty. Il se fait lui-même justice et délivre le « peuple vert » (2-1e, 84e). Ce n’est pas l’égalisation de Prso (2-2, 89e) qui change le cours de l’histoire. Certes, les Verts n’ont pas gagné, mais qu’importe. Ils obtiennent l’essentiel : leur billet pour la Division 1.

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Les Verts retrouvent la Division 1. Les Stéphanois se congratulent.

A trois journées de la fin, ils ne peuvent plus être rejoints par Lille, battu à domicile par Amiens (1-0). L’AS Saint-Etienne connaît donc sa troisième remontée en Division 1 de son histoire après celles de 1963 et 1986.

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Scène de liesse au coup de sifflet final.

Au coup de sifflet final, c’est la délivrance. Les supporters envahissent la pelouse, s’embrassent, communient avec leurs joueurs. Une trentaine de personnes finissent même aux urgences du CHU de Saint-Etienne pour avoir escaladé les grillages posés pour la Coupe du monde un an plus tôt.

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Les joueurs stéphanois communient avec leur fidèle public.

Jusqu’au bout de la nuit

Les Magic Fans, habitués de la tribune Nord, ne s’y étaient pas trompés, eux qui avaient déployé avant le match une banderole sur laquelle on pouvait lire : « La légende est de retour« . Pour les joueurs, le staff et de nombreux supporters, la nuit est courte : dîner et Karaoké lancent les festivités. Un peu plus tard dans la nuit, les joueurs arrosent la montée dans un établissement nocturne de la ville.

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Gérard Soler (de dos) tombe dans la bras de Robert Nouzaret, l’entraîneur stéphanois.

Les réactions se succèdent

Les réactions sont nombreuses dans le monde français du football. A commencer par les ex-Verts. Dominique Rocheteau : « Cette saison, j’ai vu les Verts une fois à Geoffroy-Guichard, c’était contre le Red Star. C’était fabuleux. J’ai retrouvé l’ambiance stéphanoise. ». Pour Dominique Bathenay : « Cela fait plaisir à la France entière (…) Je suis content pour tous ceux qui ont fait des efforts depuis deux ans. »

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Bertrand Fayolle est l’une des grandes révélations stéphanoises de la saison avec Adrien Ponsard.

Michel Platini : « C’est bien pour Saint-Etienne, pour les Stéphanois, pour la région. Là-bas, le foot est une vraie tradition. » Pour Daniel Leclercq, l’entraîneur de Lens : « Saint-Etienne, c’est un stade et une passion qui méritent la D1. ». Enfin, pour Bernard Bosquier : « Je suis très heureux pour cette ville car elle manquait au foot français. »

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Explosion de joie dans le vestiaire stéphanois après le match nul entre les Verts et Ajaccio (2-2), synonyme de remontée en Division 1.

De Kader à Adrien

Le trio Bompard-Soler-Nouzaret a donc réussi son pari : l’alchimie entre les trentenaires (Captain Ferhaoui en tête, Leclerc, Fichaux, Robert ou encore Subiat) et les « enfants du pays » tels Adrien Ponsard (natif de Firminy) débarqué du Puy alors en Division d’Honneur, Bertrand Fayolle, chauffagiste de son métier quelques temps avant, arrivé de l’Etrat, également pensionnaire de DH, sans oublier l’infatigable international Juniors Julien Sablé et le besogneux Patrick Guillou, idolâtré par Geoffroy-Guichard. Après avoir connu la relégation en 1996, frôlé le dépôt de bilan et la descente en National, ce 1er mai, c’est toute une ville qui a retrouvé sa fierté.

Buts.- Saint-Etienne : Sarr (6e), Revelles (84e, s.p.) ; AC Ajaccio : Faderne (25e), Prso (89e).
Saint-Etienne : Janot – Guillou (Zanotti, 75e), Leclerc, Mettomo, Potillon – Ferhaoui (cap.), Sablé, Fichaux, Sarr – Revelles, N’Diaye (Ponsard, 69e). Entr. : Nouzaret.
Ajaccio : Klein – Toursel, Burle (cap.) (Bibi, 19e), Maroselli, Colling, Féron – Petit, De Luca (Prso, 56e), Bonnal, Granon – Faderne. Entr.: B. Gentili.

 

Un taxi pour Geoffroy-Guichard (2)

A l’instar de Salif Keita, l’histoire d’Adrien Ponsard est peu banale. Encore joueur de l’USF Le Puy en 1998, le jeune attaquant de l’AS Saint-Etienne passe de la Division d’Honneur à la Division 2 en moins d’un mois. Le meilleur buteur du dernier championnat d’Auvergne (30 buts lors de sa dernière saison en Haute-Loire) profite d’un concours de circonstances incroyable.

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Adrien Ponsard, du Puy à l’ASSE.

Après un stage d’avant-saison à Albertville, les hommes de Robert Nouzaret peaufinent leur préparation au Puy-en-Velay. Adrien Ponsard sert de chauffeur aux joueurs stéphanois. Tous les matins, il les emmène de leur hôtel au centre d’entraînement et vice-versa. Durant ce séjour, Robert Nouzaret, en guise de remerciements, accepte de disputer un match amical contre l’équipe locale au stade Massot. Adrien Ponsard se fait alors remarquer en inscrivant un but à Jérôme Alonzo. L’attaquant Nestor Subiat étant indisponible suite à claquage à une cuisse contre Valence, les dirigeants foréziens, sur les conseils de Maurice Bouquet et Alain Blachon, alors entraîneurs du Puy et ancien milieu des Verts, proposent un contrat pro d’un an à « Titi » Ponsard. Une telle aubaine ne se refuse pas.

ST ETIENNE- NICE
Adrien Ponsard, devenu en quelques mois, la coqueluche de Geoffroy-Guichard.

A 23 ans, il fait ses grands débuts avec l’ASSE le 22 août 1998 contre Guingamp (0-0) à Geoffroy-Guichard en remplacement de Fabrice Lepaul à l’heure de jeu. Mais c’est au stade de l’Aube contre Troyes, une semaine plus tard, qu’il inscrit son premier but en professionnel (1-1). Au fil des matches, il devient la coqueluche du public stéphanois. A la boutique des Verts, les maillots floqués « Ponsard » s’arrachent comme des petits pains. Assurément, Saint-Etienne a déniché un oiseau rare.

 

Courts métrages

Le prix du danger

Le 6 août 1969, Saint-Etienne accueille Ajaccio en championnat. A la mi-temps, les Verts mènent 2-0 grâce à des buts signés Hervé Revelli (10e) et Samardzic (15e).  En seconde mi-temps, M. Poncin, l’arbitre du match, interrompt une première fois la rencontre. Hervé Revelli, blessé dans un choc avec un défenseur ajaccien, est évacué hors du terrain.

Quelques minutes plus tard, Bernard Bosquier, le défenseur stéphanois, envoie un boulet de canon hors de portée de Dominique Baratelli, le gardien corse. Pourtant, l’homme en noir refuse le but de « Bobosse ». En effet, en même temps qu’il armait sa frappe, M. Poncin siffle. Stupéfaction dans les tribunes. une bouteille en verre, en provenance des tribunes atterrit sur la pelouse.  Malgré ce contre-temps, les Verts, grâce à un nouveau but de Bereta (87e) s’imposent 3-1.

A la fin du match, Charles Paret, le secrétaire du club stéphanois, explique : « Voilà une bouteille qui nous coûte cher. Elle nous prive d’un but et nous vaudra une amende de 500 F. » C’est le tarif… Et s’il y a récidive, l’amende sera portée à 2 000 F. »

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Document : Musée des Verts

 

 The artist

Le 3 décembre 1967, Salif Keita réchauffe les spectateurs du stade Geoffroy-Guichard en produisant un véritable récital pour son premier match devant son public. Les Verts s’imposent 4-0 avec un but du grand Salif.

Le 19 juin 1971, le Malien se transforme cette fois en magicien. Saint-Etienne est à la lutte avec l’OM pour le titre de champion de France à une journée de la fin. Josip Skoblar et Salif Keita se tirent la bourre pour l’obtention du titre de meilleur buteur de Division 1.

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Georges Bereta déborde Marius Trésor, le défenseur ajaccien. L’ailier gauche stéphanois est l’un des principaux pourvoyeurs de ballons de Keita.

Pour leurs adieux à domicile, les Stéphanois accueillent les Ajacciens. Keita, rejoint le Marseillais en tête du classement en inscrivant quatre buts. Bien aidé par ses coéquipiers, il réalise une véritable performance. Avant le dernier round, Keita et Skoblar sont à égalité avec 41 buts chacun. Le record de Gondet qui était de 36 buts (1966), tombe. L’écart entre les deux premiers et le troisième n’a jamais été aussi grand (16 buts).  Après sa performance, Keita reçoit nombre de lettres en provenance d’Afrique où l’on peut lire sur les enveloppes : « Salif Keita, le dieu Saint-Etienne« .

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Salif Keita réussit quatre buts et rejoint Josip Skoblar en tête du classement des buteurs de Division 1.

Au terme de ce championnat 1970-71, Marseille remporte le championnat et Skoblar termine meilleur buteur avec 44 buts devant… Salif Keita (42). Après 22 journées, le Yougoslave de Marseille avait pris une avance confortable de 7 buts (25 contre 18). Mais le Malien de Saint-Etienne revient dans son sillage en inscrivant le 24 mars 4 buts contre les Corses de… Bastia. C’est donc la dernière journée qui les a départagés.

Le 3 juillet 1971, Salif Keita reçoit le premier Ballon d’Or africain décerné par FranceFootball.

Vidéo INA : La remise du Ballon d’Or à Salif Keita.  http://youtu.be/e2Nyj0kjtXY

Th. Clemenceau

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Document : Musée des Verts.

Nantes-Saint-Etienne : la belle affiche

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http://museedesverts.fr/

 

Samedi soir, Saint-Etienne se déplace à Nantes pour le compte de la 37e et avant-dernière journée du championnat de Ligue 1. En 1962, les Verts jouaient leur premier match dans le stade Malakoff rebaptisé plus tard Marcel-Saupin. Après la Coupe du monde en Angleterre, la FFF fait appel à un duo inédit pour relancer les Bleus : Jean Snella et José Arribas. Enfin, c’est au stade Marcel Saupin que Jean-Michel Larqué effectue ses premiers pas en professionnel. Bonne lecture.

Première au stade Malakoff

9 septembre 1962. Nantes-Saint-Etienne (0-4).

Ce 9 septembre 1962, Nantes accueille pour la première fois de son histoire Saint-Etienne. Cette quatrième journée de championnat de Division 2 provoque sur les bords de la Loire un véritable engouement. En cette belle soirée de fin d’été, le stade Malakoff accueille12 706 spectateurs parmi lesquels, Henri Guérin, le sélectionneur national. Les Stéphanois ont à coeur de se rattraper après leur défaite à Béziers (1-3) alors que ces mêmes Biterrois avaient subi la loi des Nantais (0-3) une semaine plus tôt. Wicart, l’entraîneur forézien est inquiet. Pour ce déplacement, il est privé de Herbin, Oleksiak, Bordas et Foix, soit autant de joueurs de métier. Les hommes de Wicart s’engagent rapidement dans la partie.

Stade Malakoff à Nantes.
Stade Malakoff à Nantes.

Balboa, buteur d’entrée

Dès la 2e minute, Balboa ouvre le score sur une ouverture minutieuse de Faivre (0-1). Il ne faut pas plus d’un quart d’heure pour voir Mitoraj accentuer l’avance des Verts (0-2, 16e). A la 29e minute, Baulu s’amuse des défenseurs nantais pour placer un tir qui laisse Eon sans réaction (0-3). Après une demi-heure de jeu, la cause est entendue. Bien regroupés autour de leur gardien Philippe, les défenseurs stéphanois ne laissent que très peu de chances aux attaquants nantais.

Faivre clôture la marque

A la 76e minute, une combinaison entre Faivre et Baulu permet au premier d’aggraver la marque (0-4). Le public nantais, mécontent de cette humiliation, invective les siens et applaudit Baulu, revigoré par la présence du sélectionneur. René Ferrier, l’international stéphanois, continue d’alimenter son quatuor d’attaque en bons ballons. Fidèle à sa réputation, il montre une nouvelle fois ses qualités à Guérin. En revanche, ce dernier devra encore patienter pour un autre Stéphanois, Georges Polny.

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René Ferrier, auteur d’un très bon match sous les yeux du sélectionneur.

Les Verts se relancent

Domingo et les siens, au stade Malakoff, contrairement à Béziers, ont joué sur leur vraie valeur. Cela laisse augurer d’un avenir prometteur. La mine réjouie du président Rocher et du masseur Minasso, l’ex-soigneur de Roger Rivière, en disaient long sur les possibilités de leur équipe. Grâce à cette victoire, Saint-Etienne revient à un point du Havre, le leader. L’opération « remontée en Division 1 » est commencée.
Nantes : Eon – Bout, Gonzalès, Fiori – Suaudeau, Le Chenadec – Couronne, Lhomme, Blanchet, Guillot, Boukhalfa. Entr.: Arribas.
Saint-Etienne : Philippe – Polny, Tylinski, Courbon – Domingo, Biscarrat – Baulu, Mitoraj, Faivre, Ferrier, Balboa. Entr.: Wicart.

 

 

Jean Snella et José Arribas au chevet des Bleus

Ce samedi 3 septembre 1966, le leader Saint-Etienne ne peut faire mieux qu’un match nul contre Bordeaux (1-1) lors de la 4e journée de Division 1. Dans le même temps, dans le derby breton, Nantes s’impose devant Rennes (1-0). Les Nantais détrônent les Verts sur la plus haute marche du podium. Après quatre journées de championnat, les deux équipes comptent le même nombre de points (7) mais la formation de José Arribas compte un petit but de plus (+ 6 contre + 5) que celle de Jean Snella.

Henri Guérin sur la sellette

Mais, au même moment, un autre match se joue à la Fédération Française de Football. En effet, cette dernière, après vingt-quatre heures de débats, scelle le sort d’Henri Guérin qui occupe le poste d’entraîneur-sélectionneur des équipes de France depuis le 12 juillet 1964. L’ancien entraîneur de Rennes et Saint-Etienne paie ses mauvais résultats à la tête de la sélection. L’équipe de France a raté sa Coupe du monde sur le sol anglais. Adepte du « béton », Guérin ne fait pas l’unanimité auprès de ses joueurs, notamment auprès de Robert Herbin qui fustige ce système de jeu. La FFF souhaite que cette fonction soit dorénavant occupée par un entraîneur de club.

Henri Guérin assis sur le banc du Stade Rennais.
Henri Guérin paie la mauvaise Coupe du monde des Tricolores.

Arribas et Snella plébiscités

Le choix se porte en premier lieu sur José Arribas, l’entraîneur du FC Nantes. Mais l’homme est pudique, voire discret. Le second choix se porte sur Jean Snella. L’entraîneur stéphanois a les qualités et les capacités pour diriger la sélection. N’était-il pas de l’expédition en Suède avec les Bleus de Paul Nicolas et Albert Batteux ? Un an avant, à la question de savoir s’il serait prêt à prendre en mains l’équipe de France, Snella avait répondu : « Non. Je reste fidèle à mon club. » Aujourd’hui, la donne n’est pas la même puisque Snella prendrait en charge l’entraînement de la sélection tout en conservant son poste à l’ASSE.

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L'Equipe du 9 septembre 1966
L’Equipe du 9 septembre 1966

« Pour ne pas se dérober » Dans l’esprit de Jean Snella, les choses sont très claires : s’il n’était pas candidat avant Guérin, il ne le sera pas davantage après la mission qu’il vient d’accepter. Tout comme il n’aurait pas accepté sans l’aide d’Arribas. Dans son esprit, entraîner un club absorbe à 100 % celui qui en a la charge. Il ne veut nullement négliger l’une ou l’autre de ses fonctions. Enfin, s’il est là pour rendre service, il considère que sa vie est bien à Saint-Etienne. Tout comme son homologue stéphanois, Arribas, arrivé d’Orly et sitôt emmené rue de Londres, au siège de la FFF, s’engage pour « ne pas se dérober » devant la situation d’urgence mais cela reste à titre provisoire. Et comme Snella, l’un n’aurait pas accepté sans l’autre.

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Jean Snella (à gauche) et José Arribas (à droite), les nouveaux sélectionneurs français.

Deux hommes pour une même cause

Sitôt leur nomination effective, les deux hommes se mettent au travail, se téléphonent pour effectuer un premier tour d’horizon. Snella ne souhaite pas de stages de longue durée. Pour lui, les joueurs qui arrivent en sélection sont déjà en bonne condition physique et s’ennuient au bout de quelques jours.

Une de L'Equipe du 16 septembre 1966
Une de L’Equipe du 16 septembre 1966

Onze minutes à l’aéroport de Lyon

La première liste des co-entraîneurs Tricolores est affinée dans le bar restaurant de l’aéroport de Bron à Lyon. En effet, le 15 au soir, José Arribas revient de Nice via Monaco où son équipe a disputé un match ; Snella, accompagné de Roger Rocher, son président, fait le déplacement jusqu’à l’aéroport pour rencontrer l’entraîneur nantais. La rencontre dure onze minutes. Ils confrontent leur liste et se mettent d’accord sur 25 noms dont une majorité de Nantais et quelques Stéphanois, comme convenu. Snella estime que l’équipe nantaise possède de bons joueurs qui devraient former l’ossature de l’équipe de France.

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José Arribas, co-entraîneur des Bleus.

Le 18 septembre, Saint-Etienne se déplace à Rennes pour y disputer un match de championnat. La veille, Jean Snella fait un crochet par la Loire-Atlantique. Au menu : assister au match Nantes-Sochaux et surtout rencontrer Arribas pour affiner leur première liste. Le lendemain, à Rennes, c’est Arribas qui se déplace dans l’Ille-et-Vilaine pour finaliser définitivement la liste. A la fin de leur entrevue, les deux hommes donnent une conférence de presse impromptue devant un parterre de … cinq journalistes.

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L’Equipe du 20 septembre 1966

Première liste pour Budapest

Le 19 septembre, à 19 h 25, Jean Snella communique la composition de l’équipe de France qui doit affronter la Hongrie le 28 à Budapest. Cette première formation de l’ère Snella-Arribas est à dominante « nantaise ». Deux joueurs vont connaître leur baptême du feu : le Nantais Jean-Claude Suaudeau et le Stéphanois Hervé Revelli. Son nom avait déjà été couché par Henri Guérin pour participer à la Coupe du monde en Angleterre. Mais l’ailier droit de Saint-Etienne, tout juste âgé de vingt ans, était resté dans le Forez. Son replacement au centre de l’attaque par Snella, fait de lui le meilleur buteur du championnat avec 5 buts. Contre la Hongrie, il sera associé à Gondet, l’avant-centre nantais. Des Nantais qu’il connaît assez peu pour les avoir affrontés qu’une seule fois en championnat. A ses débuts à Saint-Etienne, en provenance de Gardanne, Hervé connaît des moments de doutes, voire de détresse morale. Jean Snella est là pour le rassurer, lui redonner confiance et le protéger.

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Hervé Revelli, le novice, dans le vestiaire entre José Arribas (à gauche) et Jean Snella (à droite)

La France, malgré la défaite, retrouve le moral

Au Nepstadion de Budapest, pour la première fois de son histoire, l’équipe de France inaugure l’ère du tandem avec Jean Snella et José Arribas. Le blond stéphanois, né en Pologne, a passé une partie de sa jeunesse dans le Nord de la France. Le brun nantais, natif du Pays Basque espagnol, a fui l’Espagne pour le Sud-Ouest après la guerre civile espagnole. L’équipe de France s’incline 4-2 mais les deux hommes ont le mérite d’avoir redonné confiance à des garçons qui en manquaient cruellement dès qu’ils enfilaient le maillot tricolore. D’abord malmenés, les Bleus sont revenus deux fois au score par Gondet (25e) et Revelli (58e).

HONGRIE- FRANCE
Philippe Gondet, l’un des deux buteurs français.

Ils ne succombent qu’en toute fin de match. Le buteur stéphanois lancé dans le grand bain de la Division 1 par Snella un an plus tôt, a impressionné tout le monde à Budapest. Sa clairvoyance et ses qualités athlétiques ont séduit.

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Hervé Revelli, buteur pour sa première sélection.

Arribas et Snella démissionnaires

Malgré cette première encourageante, le 30 septembre, le quotidien L’Equipe titre en Une : « Arribas et Snella démissionnaires proposent Leduc comme « patron » de l’équipe de France ». Leurs réticences à poursuivre l’aventure connaît un nouvel épisode. Le 7 octobre, la commission responsable de l’équipe de France adjoint aux co-entraîneurs Albert Batteux, alors entraîneur à Grenoble. Ce dernier connaît bien la maison pour avoir entraîné l’équipe nationale de février 1955 à juin 1962. Adjoint de Paul Nicolas, directeur de l’équipe, il conduit les Bleus à la troisième place de la Coupe du monde 58 en Suède.

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Albert Batteux assis à côté de Jean Snella.

Batteux contacté

Si Jean Snella avait convaincu Arribas de l’aider dans sa tâche de relancer l’équipe de France, cette fois, c’est Arribas qui conduit le Stéphanois dans son sillage afin de quitter les Bleus. Les deux hommes ne peuvent cumuler les fonctions d’entraîneur national et de clubs. Le 8, le Nantais prend un peu de recul tout en restant à la disposition de Snella. Il est imité dès le lendemain par Batteux. Le Stéphanois continue donc seul l’aventure encore trois matches : contre la Pologne (2-1) au Parc des Princes puis contre la Belgique à Bruxelles (1-2) et au Luxembourg (3-0). Début décembre, il retrouve son bureau de Geoffroy-Guichard et Saint-Etienne où il vit depuis dix ans. Sa mission est terminée. Il laisse la place à Just Fontaine.

 

Débuts professionnels pour Jean-Michel Larqué

Ce 26 mars 1966, Nantes reçoit Saint-Etienne en championnat. C’est l’occasion pour le public nantais de découvrir un jeune joueur stéphanois dont la seule notoriété est d’être international Juniors. Ce soir-là, à Marcel-Saupin, Jean-Michel Larqué fait ses grands débuts en professionnel. Arrivé à Saint-Etienne en début de saison, il rejoint le lycée du Portail Rouge où il prépare son professorat d’éducation physique. Découvert par Pierre Garonnaire, le recruteur de la maison verte, alors qu’il jouait en Promotion d’Honneur, le jeune Larqué était convoité par Toulouse. Il choisit Saint-Etienne parce qu’il vient de réussir son examen au CREPS de Voiron. Il aurait pu tout aussi bien opter pour Lyon ou Grenoble mais sa préférence va au club du président Rocher.

OSCAR BYRRH
Son intelligence tactique et son aisance technique impressionnent ses aînés tels que Herbin, Mekloufi ou encore Pierre Bernard. . Tous voient un futur grand joueur. Certains n’hésitent pas à voir en lui, un futur Herbin. Pourtant, ses débuts en CFA avec Saint-Etienne ne sont guère convaincants. L’ex-Palois, buteur à deux reprises avec l’équipe de France Juniors à Charleroi contre la Belgique se fait également remarquer quelques jours plus tard en lever de rideau d’un France-Italie.
Dès le mois d’octobre 1965, Jean Snella, l’entraîneur des professionnels, vante ses qualités. Il le fait jouer contre le Dukla de Prague et le FC Bologne (1-3). Cela permet au public de Geoffroy-Guichard de découvrir l’étendue de ses qualités et notamment son excellente tenue de balle. Son match plein contre les Italiens lui vaut d’être convoqué par Jean Snella pour la première fois à Nantes. Mais pour jouer, il doit aussi compter sur l’autorisation de son père qui ne souhaite pas que le jeune Larqué délaisse ses études.

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Jean-Michel Larqué (accroupis, le deuxième en partant de la gauche) au sein d’un effectif stéphanois riche en individualités.

A Marcel-Saupin, les hommes d’Arribas infligent une correction à son hôte stéphanois : le futur champion de France s’impose 5-0. Malgré cette cruelle désillusion, les meilleurs joueurs ne sont pas les chevronnés Mekloufi ou Herbin, mais les deux ailiers N’Doumbé et … Larqué. FranceFootball lui attribue la note de 5, soit la note maximale de son équipe. Il aurait pu marquer mais l’un de ses tirs s’écrase sur la barre transversale.

La date-clé

28 avril 1984.  Les chocs entre Nantais et Stéphanois ont donné lieu aux plus belles soirées à Marcel-Saupin. Le calendrier a voulu que le dernier match dans le vieux stade nantais, construit en 1937, oppose les Canaris aux Verts de Saint-Etienne. Les hommes de Suaudeau ont vaincu des Verts barragistes (1-0). C’est sur cette dernière victoire nantaise que les lampions du stade Marcel-Saupin se sont éteints.

Th. Clemenceau

Vidéo INA :

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Saint-Etienne-Montpellier : parfum d’Europe

Dimanche 4 mai, l’AS Saint-Etienne reçoit Montpellier pour le compte de la 36e journée du championnat de Ligue 1. Du SOM au MHSC, retour sur les différents noms que le club a portés au cours de son histoire. En 1938, Saint-Etienne reçoit Montpellier pour la première fois. Retour sur ce match. En 1984, un Lion indomptable signe dans le club dirigé par André Laurent. Enfin, en février 2000, le petit Brésilien Alex, lors d’un match entre Saint-Etienne et Montpellier, inscrit le 3 000e but des Verts. Bonne lecture.

 

Du SOM au MHSC : une histoire de noms

Au lendemain de la Première Guerre Mondiale, la ville de Montpellier se dote d’un club de football digne de ce nom. En effet, en 1919, le Stade Olympique Montpelliérain (SOM) voit le jour. Il change de nom en 1926 pour devenir Sports Olympiques Montpelliérains puis en 1941 l’Union des Sports Olympiques Montpelliérains.

Ce club connaît son heure de gloire en 1929 lorsqu’il remporte la Coupe de France contre Sète (2-0), une des plus grandes équipes du moment. Le club montpelliérain fait également partie des vingt premières équipes du premier championnat professionnel en 1932.

En 1944, l’équipe de Montpellier récupère le nom de SOM et ce jusque sa dissolution en 1970, après vingt-cinq ans de résultats très chaotiques marqués malgré tout par quelques coups d’éclats. Refusant la disparition du football de haut niveau dans une ville de l’importance de Montpellier, Pierre Fournier, avec quelques inconditionnels, fonde en 1970 le Montpellier Littoral Sport Club.

Pensionnaire de division 2 durant deux saisons, il tombe cependant très vite dans l’anonymat pour évoluer en Division d’Honneur du Sud-Est. Parallèlement, un homme, dont le nom reste encore aujourd’hui incontournable dans le milieu du football montpelliérain, fait son apparition : Louis Nicollin. Il déploie toute son énergie pour soutenir une modeste équipe corporative, l’A.S. Paillade (nom d’un quartier populaire de Montpellier) mais qui vole de succès en succès.

Le 5 novembre impulsion de son président, retrouve progressivement les chemins de la gloire en remontant en Division 1 en 1981.

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Scène de joie entre Georges Frèche et Louis Nicollin, le président de Montpellier.

En 1989, le club change une nouvelle fois d’appellation pour prendre sa dénomination actuelle, le Montpellier Hérault Sport Club (MHSC).

 

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Saint-Etienne-S.O. Montpellier : 2-1.
Ce 8 septembre 1935, ce match entre l’AS Saint-Etienne et le Sports Olympiques Montpelliérains à Geoffroy-Guichard est une première entre les deux clubs. Le début du match est équilibré même si les Stéphanois prennent régulièrement l’ascendant sur leur adversaire. Les Somistes résistent bien grâce à leur gardien Cros. Il faut attendre la demi-heure de jeu pour voir les Stéphanois ouvrir le score sur penalty par Tax (1-0, 30e). Quelques minutes plus tard, ce même Tax inscrit un second but sur une passe de Polge. Les hommes de Duckworth regagnent les vestiaires avec deux buts d’avance. Peu après le quart de jeu de la seconde mi-temps, les Montpelliérains, désireux de refaire rapidement leur retard, obtiennent à leur tour un penalty pour une faute de Kowacs. Ebner en profite pour réduire le score (2-1, 62e). Malgré les assauts des visiteurs, le score ne bougera plus. Si les Verts s’étaient imposés largement devant Reims (6-1) lors de la première journée, ce dimanche, seule la victoire est belle.

Saint-Etienne : Guillard – Kowacs, Caraboeuf – Charbit, Rivers, Rolhion – Polge, Beck, Varinier, Tax, Langiller.
S.O. Montpellier : Cros – Fassbind, Gumei – Campo, Dupont, Kaucsar – Amezieux, Bonnet, Ebner, Galinie, Roux.

 

Roger Milla : un Lion à Saint-Etienne

Albert-Roger Miller est né le 20 juin 1952 à Yaoundé au Cameroun. Malgré cette identité inscrite sur son passeport, il se fait appeler Roger Milla.

En 1977, l’idole du Tonnerre de Youndé rêve de gloire et d’argent. Quand M. Pouille, le président de Valenciennes le contacte et lui fait quelques promesses, le Ballon d’Or africain 76 se laisse tenter par l’aventure mais à une seule condition : continuer à participer aux matches avec le Cameroun. Une vaste opération de souscription lancée par les supporters valenciennois permet l’arrivée du joueur. Il signe un contrat de non-sollicitation avec l’équipe entraînée par Jean-Pierre Destrumelle.

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Roger Milla sous le maillot de Valenciennes.

Mais l’idole d’un pays déchante vite. Dans le Nord, il joue avec l’équipe amateurs. Aussi, pour évoluer en Division 1, il doit demander et obtenir l’assimilation à la nationalité française. Son premier salaire est de 3 000 F et il loge dans un studio près de la gare de la ville. En 1978, le Polonais Maszyck repart dans son pays libérant ainsi dans l’équipe la deuxième place pour un étranger. Milla continue l’aventure avec V.A. mais cette fois en professionnel et un contrat de trois ans à la clé avec un salaire nettement revalorisé. Son toucher de balle n’est pas sans rappeler par moments celui d’un certain… Salif Keita. Il considère l’ex-panthère stéphanoise comme le meilleur joueur africain de tous les temps.

Salif Keita affronte sa sélection avec les Verts.
Salif Keita, l’idole de Roger Milla.

Premier trophée A la fin du championnat, Milla repart au Cameroun passer ses vacances. A son retour, le talentueux mais fantasque Camerounais est tout près de s’engager avec l’OGC Nice mais il apprend que Monaco s’intéresse à lui. Il n’hésite pas une seconde et quitte le Nord pour le club de la Principauté qui rachète ses deux années de contrat. A vingt-sept ans, il comprend vite qu’il va devoir lutter d’arrache-pied pour gagner une place de titulaire. Malgré sa persévérance, il ne s’impose pas aux yeux de Gérard Banide qui le laisse souvent sur le banc. L’argentin Delio Onnis brille de mille feux et laisse peu de place à Milla. Il va de désillusion en désillusion mais il s’accroche. Battant de nature, il participe tout de même à la finale de Coupe de France remportée par Monaco contre Orléans (3-1). Bien que remplaçant, il participe à la fête au Parc des Princes.

MONACO
Milla, sous les couleurs monégasques, remporte la Coupe de France.

De la Principauté à l’île de Beauté

Sa situation à Monaco ne le satisfait pas. Le club de la Principauté reçoit des offres de Marseille, Nancy ou Montpellier. A l’ASM, on lui conseille de tenter sa chance dans une équipe où il pourrait exprimer pleinement son talent. Milla comprend le message cinq sur cinq. Mais c’est à Bastia qu’il pose ses valises. Il signe un contrat de deux ans. La première partie de saison est difficile pour lui. Il n’inscrit qu’un petit but face à … Saint-Etienne en championnat. Pire, à la fin des matches aller, il perd sa place de titulaire.

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Milla à Bastia pour relancer une carrière en dents de scie.

Milla marque, les Verts trinquent

Si Milla n’a pas un caractère toujours docile, sur un terrain, il reste néanmoins un élément d’exception. Au Cameroun, beaucoup pensent qu’il est l’un des joueurs les plus doués de tous ceux qui ont porté le maillot de la sélection. Sur l’île de Beauté, il remporte une nouvelle Coupe de France contre… les Verts de Saint-Etienne de Michel Platini (2-1) au Parc des Princes. Devant 50 000 spectateurs, il marque un but d’anthologie.

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Milla, au côté de Marcialis, soulève la Coupe de France. Bastia s’impose devant Saint-Etienne (2-1) au Parc des Princes.

Pourtant, il ne participe pas à la fête organisée en Corse. Dès le lendemain du match, il repart pour son Cameroun natal. et participe à la Coupe des Vainqueurs de Coupe.

 

Vidéo INA : le but de Roger Milla lors de la finale de la Coupe de France.

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La saison 1981-82, Milla se fait remarquer par ses nombreuses absences au sein du club corse. Sa principale préoccupation est de qualifier le Cameroun pour la Coupe du monde en Espagne et ainsi participer avec les Lions Indomptables à la grande fête espagnole. Depuis une défaite des hommes d’Antoine Redin le 7 novembre 1981 à Saint-Etienne (0-3), Milla a disparu de la circulation, ne réapparaissant en Corse le temps de régler quelques affaires. Il effectue son retour un mois plus tard. Malgré ces frasques, il participe en 1982 à la Coupe du monde en Espagne avec la sélection des Lions Indomptables. Pendant la compétition, il prolonge de deux nouvelles années son bail avec Bastia pour un salaire mensuel de 30 000 F, soit dix fois plus qu’à ses débuts. Au début de la saison 1983, Roger Milla connaît un début de saison difficile. Antoine Redin, son entraîneur, se prive même de ses services pour un déplacement à Geoffroy-Guichard. Cette même année, il obtient la naturalisation française.

 

Milla, une recrue de choix pour les Verts

Fin avril 1984, l’ASSE sort à peine de l’affaire de la caisse noire. La descente en deuxième division a créé un véritable traumatisme pour le club et la ville toute entière. Il faut renouveler l’effectif, retrouver un sponsor maillot. Tout est à reconstruire. Henrik Kasperczak, le nouvel entraîneur des Verts, a pour mission de remettre le bateau ivre à flot. Pour cela, il planche sur le recrutement pour la saison à venir. S’il songe à un retour dans la maison verte d’un certain … Christian Lopez, il espère attirer un attaquant axial pour remplacer Pascal Carrot parti à Valence et Carlos Diarte. Roger Milla, en fin de contrat avec Bastia fait partie des quatre-vingt quatre joueurs de Division 1 libres à partir du 30 juin.

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Henrik Kasperczak, le nouvel entraîneur des Verts, attend beaucoup de Milla.

Premiers contacts avec les Verts

C’est du Cameroun où il séjourne pour ses vacances qu’il apprend par la radio que le club du président Laurent souhaite s’attacher ses services. André Laurent lui envoie un télégramme pour que le Camerounais le contacte rapidement par téléphone. Ce dernier, après deux rendez-vous manqués avec le joueur, voit l’international camerounais débarquer à Saint-Etienne le samedi 7 juillet. Dans la foulée, il appose sa signature pour deux ans. L’idée d’évoluer en Division 2 ne le dérange pas plus que ça. Sitôt son contrat signé, Milla repart au Cameroun pour préparer avec la sélection olympique de son pays natal les Jeux Olympiques de Los Angeles.

Roger Milla est attendu comme le messie à la pointe de l'attaque des Verts.
Roger Milla est attendu comme le messie à la pointe de l’attaque des Verts

Panthère des Associés du mois de septembre

Le 17 août, pour son premier match au stade Geoffroy-Guichard (son deuxième avec le maillot vert), il s’illustre en inscrivant les deux buts contre Valence (2-1). Il s’agit alors de ses 44e et 45e en championnat depuis qu’il est en France (6 avec Valenciennes en 1978-79, 2 avec Monaco en 1979-80) et 35 avec le maillot bastiais (1980-84). Sa saison est lancée. Si marquer des buts n’est pas une obsession chez lui, en revanche, cela demeure son principal objectif.

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L’AS Saint-Etienne 1984-85 : debout de g. à d. : Oleksiak, E. Clavelloux, Primard, Gilles, Ferri, Castaneda (cap.). Accroupis : de g. à d. : Bellus, Daniel, Ribar, Milla, Peycelon.

Ses bons débuts en Vert sont récompensés par la « Panthère » du mois de septembre décernée par les supporters Associés de l’AS Saint-Etienne. Dans le Forez, Milla se refait une santé. Un homme est important à ses yeux : Henrik Kasperczak. L’entraîneur polonais lui accorde une grande confiance et Milla le lui rend bien.

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Kasperczak voue une grande confiance en Milla, son attaquant camerounais.

Milla, chouchou des supporters stéphanois

Il participe grandement à la bonne saison des Verts. Ils se retrouvent même en tête du championnat à quelques journées de la fin grâce à une victoire de… Lyon à Nice. Mais le 4 mai, une défaite des Verts à Montpellier (1-0) anéantit les espoirs de remontée directe. Les hommes de Nouzaret viennent de mettre fin à une série de vingt-trois matches sans défaite des Stéphanois (Coupe-championnat). L’ASSE termine deuxième derrière Nice. L’avant-centre camerounais a inscrit vingt-deux buts en championnat, et termine meilleur buteur de son club. En Coupe de France, après avoir éliminés Nice en trente-deuxièmes de finale, et Lens en seizièmes, c’est Lille qui subit la loi du vieux Lion indomptable. Ce 11 mai , il inscrit l’unique but des Verts devant 47 747 spectateurs ivres de bonheur. Ce soir-là, le lion rugit au point d’avouer après le match : « Le public stéphanois est bien le plus chaleureux de France. Du reste, tenez, ici, je me crois parfois à Yaoundé. »

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Roger Milla, l’idole du peuple Vert

Saint-Etienne s’incline au match retour dans le Nord (0-2). En pré-barrages, les coéquipiers de Castaneda tombent devant Rennes (0-2) à domicile. Le rêve d’une remontée en Division 1 un an après l’avoir quittée s’évanouit. Pourtant, cette saison est annonciatrice de jours meilleurs : le public est revenu nombreux au stade et les finances sont redevenues saines. Milla y est aussi pour quelque chose.

Premiers contacts avec Montpellier

Au printemps, Louis Nicollin, le président de Montpellier, établit des contacts avec Roger Milla au grand dam de son entraîneur Robert Nouzaret qui voit cette arrivée d’un mauvais oeil. Estimant qu’il n’est toujours pas payé à sa juste valeur, Milla annonce aux dirigeants stéphanois ses contacts avec le club montpelliérain. Il ne cache pas que si Saint-Etienne veut le conserver, il faudra revoir à la hausse les conditions financières. Après plusieurs échanges aigre-doux, y compris par voie de presse interposée, le 30 mai, Roger Milla se met verbalement d’accord avec le président Laurent pour un transfert à Montpellier moyennant 600 000 F. Un bon contrat l’attend dans l’Hérault avec une reconversion au Cameroun dans la société de Nicollin pour son après-carrière. Saint-Etienne prend contact avec divers attaquants pour pallier un éventuel transfert de l’idole du peuple vert.

André Laurent rompt les négociations

C’est M. Peybernes, le secrétaire général de la Paillade et non Louis Nicollin qui effectue le déplacement dès le lendemain, chèque en main, pour négocier le transfert. Le président des Verts, déjà furieux que des contacts aient eu lieu avec le joueur sans en être averti, change d’avis et refuse tout transfert du Camerounais. Même s’il n’a coûté que la modique somme de 50 000 F pour son transfert de Bastia à Saint-Etienne, c’est bien dans le Forez que sa cote a explosé.

Pourtant, début juin, Eric Bellus, l’ailier gauche des Verts, devant le refus d’une augmentation de salaire des dirigeants stéphanois, demande lui aussi à être placé sur la liste des transferts. Les dirigeants stéphanois anticipent alors ces velléités de départs aux avant-postes et  recrutent deux attaquants : Tony Kurbos, l’avant-centre de Metz, encore auréolé de ses exploits en Coupe d’Europe contre Barcelone et Jürgen Milewski, un ailier de Hambourg.

Fin juin, pour la reprise de l’entraînement, les dirigeants stéphanois craignent de ne voir Roger Milla au stade Geoffroy-Guichard. En grand professionnel qu’il est, le Camerounais est bien présent et s’entraîne avec fougue, ce qui le rend encore plus sympathique aux yeux des supporters présents.

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Roger Milla (avec Gilles Peycelon) est au rendez-vous à l’entraînement.

Deux hommes pour une place

La saison reprend. Roger Milla, en septembre n’évolue pas à cent pour cent de ses possibilités. En effet, le Camerounais n’a pas la tête au football. L’état de santé de sa mère le perturbe énormément. De plus, son association avec Kurbos n’est pas au rendez-vous. Début octobre, les hommes de Kasperczak prennent les rênes du groupe A de Division 2. L’objectif n’a pas changé : remonter en première division. Aux prises avec Alès une bonne partie de la saison, ils tiennent le cap fixé par leurs dirigeants et terminent premiers.

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Roger Milla, véritable fer de lance de l’équipe stéphanoise.

Montpellier revient à la charge

Après deux ans de purgatoire, l’ASSE retrouve la Division 1. Début avril, on évoque des rumeurs de départ. Milla, en fin de contrat, est contacté par les Chamois Niortais de Patrick Parizon mais aussi par… Montpellier qui revient à la charge. Finalement, il s’engage avec le club du président Nicollin pour deux saisons.

Th. Clemenceau

 

L’anecdote : « Banco ! »

La scène se passe le 9 avril 1988. Louis Nicollin, le président de Montpellier, se demande bien comment il va annoncer à son attaquant Roger Milla qu’il ne souhaite pas lui renouveler son contrat. Milla, jamais à court de répartie, lance alors à son président : « Si je marque trois buts contre Saint-Etienne, vous me gardez un an de plus ? » Surpris, « Loulou » lance : « Banco ! »
Sur les coups de 22 h 30, Milla, dans le vestiaire montpelliérain, rappelle sa promesse à son président. La Paillade vient d’écraser les Verts 5-0 avec trois buts de… Milla.

 

Le chiffre  : 3 000

Le 16 février 2000, les hommes de Robert Nouzaret reçoivent Montpellier au stade Geoffroy-Guichard. Dans un match aux multiples rebondissements, un fait historique est à souligner. Il se situe à la 38e minute : le petit brésilien Alex Dias inscrit le 3 000e but de l’AS Saint-Etienne en Division 1. L’ASSE, par la même occasion, est le premier club professionnel à atteindre cette barre mythique.

Le tout premier but de l’ASSE en Division 1 a été inscrit par Pasquini le 4 septembre 1938 à Fives. Le 1 000e, c’est René Ferrier qui l’a inscrit à son palmarès. Quant au 2 000e, il est l’œuvre d’Hervé Revelli. Il détient le record absolu du club avec 175 réalisations pour 318 matches joués avec le maillot vert, devant Salif Keita (125 en 149 matches) et Rachid Mekloufi (125 en 274 matches).

http://www.youtube.com/watch?v=VEJxO_S8bxY

ST ETIENNE-LYON
Alex Dias, marque l’histoire des Verts en inscrivant le 3 000e but de l’AS Saint-Etienne en Division 1.

La photo : tout schuss

ST ETIENNE-MONTPELLIER (4-1)
9 février 2013. Saint-Etienne-Montpellier : 4-1. Fabien Lemoine, comme tous ses coéquipiers, s’active pour déblayer le terrain recouvert de neige. Le match ira finalement à son terme.