OL-ASSE : derby par-ci, derby par là

Dimanche 30 mars, le stade de Gerland accueille le 108e derby entre l’Olympique Lyonnais et l’AS Saint-Etienne. La rivalité entre les deux clubs est vieille de soixante-deux ans. Souvent mouvementée, elle n’en demeure pas moins passionnée. Bonne lecture.

 

Woehl premier buteur d’un derby

28 octobre 1951. Lyon b. Saint-Etienne 4-2.
En 1946, Lyon et Saint-Etienne s’étaient quittés sur un score nul de 3 à 3. Un résultat qui précipitait un peu plus les Rhodaniens vers la Division 2. Mais Lyon n’était pas encore l’Olympique Lyonnais mais le Lyon Olympique Universitaire (LOU). Le 3 août 1950, l’Olympique Lyonnais voit le jour.

Le 28 octobre 1951, le stade municipal de Gerland accueille le premier derby dans l’histoire des deux clubs que sont l’Olympique Lyonnais (OL) et l’Association Sportive de Saint-Etienne (ASSE). Historique. A cette occasion, l’engouement est réel comme le relate le journal L’Equipe du 26 octobre 1951 :

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Oscar Heisserer, l’entraîneur lyonnais, lance dans le grand bain le jeune Bonvin chargé de marquer le stratège et meneur de jeu stéphanois Kees Rijvers. Du côté stéphanois, Jean Snella place l’ailier droit René Alpsteg au poste… d’arrière droit. En revanche, il se prive des services de Tamini, natif de Lyon mais aussi de Leduc et Dececco alors que Cuissard est toujours indisponible. Jean Rigal, membre du comité de sélection de l’équipe de France, assiste à cette rencontre. Deux heures avant la rencontre, la pluie s’invite à la fête et tombe sur le stade sans discontinuer. Malgré cet aléa de la météo, 17 252 spectateurs s’acquittent du précieux sésame. Les deux équipes, certes voisines mais néanmoins rivales, jouent un football de bonne qualité.

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Le gardien stéphanois s’empare du ballon devant Fernandez et Ninel sous l’œil attentif de Domingo.

Un triplé pour Woehl

Les deux inters lyonnais, Pierre Flammion et Fritz Woehl, marquent ce match de leur empreinte. Ce dernier entre même dans la grande histoire des derbys en inscrivant, à la 23e minute, le premier but de l’histoire des derbys. Celui que l’on surnomme « le Tank » pour sa vélocité s’offre même un triplé. Côté stéphanois, l’expérience d’Alpsteg en défense n’est pas une franche réussite. Nola, le seul des trois Brésiliens sur le terrain, paraît lent malgré une technique certaine.

L’OL remporte la première édition d’un match entre deux villes séparées seulement par cinquante-huit kilomètres.

Buts.- Lyon : Woehl (23e, 36e et 83e, s.p.), Dupraz (63e) ; Saint-Etienne : Rijvers (44e), R. Alpsteg (66e).
Lyon : Lergenmuller – Grillon, Rodriguez, Bonvin – Juillard, Tichy – Woehl, Flammion- Ninel, Dupraz, Roland. Entr.: Heisserer.
Saint-Etienne : Ferrière – R. Alpsteg, Huguet, Fernandez – Bini, Domingo – Ferry, Rijvers – Haond, Nola, L. Alpsteg. Entr. : Snella.

 

     Lyon a gagné le 42e derby
                                                 Saint-Etienne le 69e

 

Le fanion du100e derby. Photo : Musée des Sports.
Le fanion du100e derby exposé au Musée des Verts. Photo: Musée des Verts.

 

Chiesa séduit l’ASSE mais signe à l’OL

La saison 1968-69 n’est pas encore terminée que l’ASSE, comme la majorité des clubs, prépare déjà la saison suivante.

Un nom revient avec insistance : Serge Chiesa. Lors d’une rencontre amicale contre l’AS Montferrandaise (CFA), le petit international Juniors avait séduit le staff stéphanois.

Le 15 avril 1969, L’Equipe titre :

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Le vendredi 25 avril, les Verts disputent une rencontre amicale contre le Partizan Belgrade, l’un des meilleurs clubs de Yougoslavie. A cette occasion, Albert Batteux veut voir à l’oeuvre le petit numéro 8 contre les Yougoslaves. Robert Herbin abandonne le temps d’un match son poste d’inter droit au profit du jeune international de Clermont-Ferrand.

L'Equipe du 25 avril 1969
L’Equipe du 25 avril 1969

Les 10 000 spectateurs de Geoffroy-Guichard comprennent très vite le choix de l’ASSE pour ce jeune joueur talentueux. Principale attraction de cette rencontre, il fait étalage de ses qualités techniques. Sa pointe de vitesse laisse plusieurs fois sur place les joueurs yougoslaves. Ses passes millimétrées à destination de Revelli ou Keita ne trompent pas. Le public séduit scande son nom. Ses coéquipiers d’un jour ne tarissent pas d’éloges à son encontre. L’ASSE s’impose 3-1.

L'Equipe du 26 avril 1969
L’Equipe du 26 avril 1969

Alors Chiesa à Saint-Etienne ? Malgré les propositions alléchantes des dirigeants stéphanois, rien n’est signé.

Mais le 29 avril, coup de tonnerre. L’Equipe annonce en Une :

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Angers, club pensionnaire de Division 2, domine son championnat en compagnie d’Angoulême et prépare son retour parmi l’élite. Comme Saint-Etienne, le club de l’Anjou a fait de Serge Chiesa l’une de ses priorités. L’un de ses dirigeants a fait le déplacement en Auvergne pour discuter d’un éventuel transfert avec son mentor et entraîneur, Jules Sbroglia… qui a joué à Angers dans les années 50.

L’OL entre dans la danse

Mais c’était sans compter sur un troisième club qui lui aussi porte un intérêt certain pour l’Auvergnat. L’Olympique Lyonnais entre dans la danse et les arguments déployés par le club rhodanien séduisent Serge Chiesa.

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Courtisé par Saint-Etienne, le jeune Chiesa donne sa préférence à l’OL.

Le 14 mai, il se déplace à Lyon en compagnie de son père et de son entraîneur. Si les trois hommes assistent au match qui oppose Lyon à Valenciennes le soir même, c’est bien pour parler transfert avec leurs homologues lyonnais qu’ils ont fait le déplacement. Les pourparlers sont bien engagés et un accord de principe est sur le point d’être trouvé. De son côté, Roger Rocher déclare qu’il ne fera aucune surenchère pour ce transfert.

Le lendemain, L’Equipe annonce le transfert définitif du jeune espoir français à Lyon.

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 Le staff stéphanois est déçu. Albert Batteux tente une dernière tentative et déclare que « Chiesa à Saint-Etienne serait un titulaire à part entière. » Pierre Garonnaire, de son côté, n’y croit plus et se tourne vers la Hollande où Kees Rijvers, ex-gloire des Verts des années 50, lui a signalé quelques jeunes talents.

Dans son édition du 27 mai, L’Equipe titre :

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Dans son papier, Jacques Etienne rapporte les propos de Roger Rocher : « Tant que rien n’est signé, l’espoir reste permis, nous a-t-on dit. Les dirigeants de Lyon ont laissé entendre au père de Chiesa que son fils ne jouerait pas en pros chez nous, et qu’il avait, par conséquent, tout intérêt à le faire venir à l’Olympique Lyonnais. C’est un argument qui ne tient pas. Pourquoi gagerions-nous un garçon d’une telle valeur, pour en fin de compte le laisser sur la touche. Chiesa nous intéresse et nous ferons tout dans toute la mesure du possible pour qu’il vienne à Saint-Etienne. »

Serge Chiesa lors d'un derby
Serge Chiesa lors d’un derby. En arrière-plan, Salif Keita.

Finalement, le samedi 31 mai, tard dans la soirée, le transfert de Serge Chiesa trouve son épilogue. Il s’engage pour quatre ans avec l’OL et signe le premier contrat à temps en France malgré d’ultimes propositions de Saint-Etienne et Marseille. Pour Chiesa, la proximité de Lyon et Clermont-Ferrand et les retrouvailles avec ses copains de l’équipe de France Juniors, notamment Bernard Lacombe ont joué en faveur du club lyonnais.

Dans le Miroir du Football d’août 1971, il déclare : « De Montferrand, club évoluant en CFA, au professionnalisme, je savais que le pas à franchir ne se limitait pas à une signature sur le bas d’un contrat. Une période d’adaptation allait m’être nécessaire mais je la voulais la moins longue possible. L’effectif riche en vedettes de Saint-Etienne m’aurait contraint à faire antichambre dans la réserve tandis qu’à Lyon, mes chances d’être immédiatement titulaire étaient plus conséquentes. Pour s’adapter, il faut jouer. J’ai donc signé là où je serais sur les terrains… Je ne le regrette d’ailleurs nullement. »

Serge Chiesa a joué quatorze saisons à l’OL. A ce jour, il détient le record de derbys disputés avec trente participations (dont deux en Coupe). Il devance Yves Chauveau (26) et Robert Herbin (25).

« Le derby, ça ne s’explique pas, ça se vit »
Fleury Di Nallo

 

Entente OL-ASSE contre la Hongrie

6 juin 1956. Sélection Lyon-Saint-Etienne-Hongrie : 3-7.
Pour clore la saison 1955-56, la Ligue du Lyonnais a réussi un coup de maître : réunir le temps d’un match les joueurs de l’ASSE et de l’OL pour affronter la Hongrie, finaliste de la Coupe du monde 1954.

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Les deux capitaines : René Domingo pour l’entente Lyon-Saint-Etienne et Ferenc Puskas pour la Hongrie entrent sur la pelouse du stade Gerland.

Pour ce match inédit, les entraîneurs des deux clubs, Jean Snella pour Saint-Etienne et Lucien Troupel pour Lyon, ont retenu leurs meilleurs éléments, principalement des internationaux A et B auxquels ils ont joint les deux étrangers : le Suisse Jacky Fatton (OL) et le Hollandais Kees Rijvers (ASSE). Sur le papier, l’équipe stéphano-lyonnaise a fière allure. Le mardi 5 mai, aux alentours de 14 heures, c’est l’effervescence à la gare de Perrache à Lyon. Le train en provenance de Paris arrive enfin à quai. Puskas et ses coéquipiers descendent du wagon avec vingt-quatre heures de retard. Mais qu’importe, ils sont bien là.

L'Equipe du 7 juin 1958
L’Equipe du 7 juin 1958

Battus à Bruxelles quelques jours plus tôt, la sélection hongroise ne fait pas cette fois dans la demi-mesure. Parmi les 14 000 spectateurs qui garnissent les tribunes de Gerland, Paul Nicolas et Pierre Pibarot, respectivement directeur de l’équipe de France et entraîneur fédéral, ont fait le déplacement.

La traditionnelle poignée de mains entre René Domingo et Ferenc Puskas avant ce match inédit.
La traditionnelle poignée de mains entre René Domingo et Ferenc Puskas avant ce match inédit.

Mais il ne fallait pas arriver en retard : après sept minutes de jeu, les Hongrois mènent déjà 3-0 grâce à des buts de Machos (1ère), Mouynet (5e, c.s.c.) et Domingo (7e, c.s.c.). Ils surclassent les Français dans tous les compartiments du jeu et inscrivent un quatrième but par Hidegkuti sur un bel exploit technique (23e). Ferry réduit le score (36e) avant que le capitaine Domingo ne l’imite avant la pause (43e). Le score est lourd mais logique à la mi-temps.

Claude Abbes, le gardien de la sélection, n'est pas à la fête.
Claude Abbes, le gardien de cette sélection, n’est pas à la fête. Après sept minutes, les Hongrois mènent 3-0.

A la reprise, Puskas enfonce un peu plus le clou et inscrit un cinquième but (47e). Les rentrées de Knayer, Ninel et Mekloufi impulsent un nouveau souffle à cette équipe. Cela se concrétise par un superbe but du Suisse Fatton (59e). Mais les Hongrois ne veulent pas revivre leur mésaventure de Bruxelles le dimanche précédent (défaite 5-4) et Tichy, coup sur coup (81e et 83e) porte le score à 7-3. Puskas a joué pendant une heure tandis que Kocsis, réclamé par le public, a foulé la pelouse la dernière demi-heure du match.

Buts.- Hongrie : Machos (1ère), Mouynet (5e, c.s.c.), Domingo (7e, c.s.c.), Hidegkuti (23e), Puskas (47e), Tichy (81 et 83e) ; Sélection Lyonnais : Ferry (36e), Domingo (43e), Fatton (59e).
Sélection Lyon-Saint-Etienne : Abbes (Alberto) – Mouynet, Dececco, Novak (Wicart) – Domingo (Ninel), Ferry (Knayer) – Foix, Antonio (Mekloufi), Schultz, Rijvers, Fatton. Entr. : Snella et Troupel.
Hongrie : Geller (Ilku)) – Karpati, Teleki, Lantos – Palotas, Szojka (Berendi) – Budai, Machos (Kocsis), Hidegkuti (Tichy), Puskas, Fenivessy. Entr.: Titkos.

 

« Le public de Lyon était plus sévère »
                                                                 Kees Rijvers

 

 

Le derby s’invite à « Télé-Dimanche »

PARIS/ROUBAIX

 23 mars 1969. Lyon-Saint-Etienne : 1-2.
Le dimanche 23 mars, le football fait son grand retour sur le petit écran. Dans le cadre des accords foot-TV signés entre la Fédération Française de Football et l’ORTF, « Télé-Dimanche » retransmet en direct à partir de 16 h 30 la deuxième mi-temps du derby au stade de Gerland. C’est la première fois qu’un match du championnat de France est retransmis à la télévision. Les commentaires sont assurés par un jeune téléreporter : Michel Drucker. Au début de la retransmission, il annonce que le coup d’envoi est retardé. En effet, la clé du vestiaire des Stéphanois a été égarée. Pour faire patienter les téléspectateurs, il interviewe deux joueurs blessés : Fefeu et Di Nallo, respectivement joueurs de l’ASSE et de l’OL.

Vidéo INA :

http://player.ina.fr/player/embed/I08144990/1058813/0d738dc1a75988da48900212e15cb897/560/315/0/148db8

 

« J’aime ce derby, car il y a à la fois du respect et de l’amour vache »                                

                                                                   Robert Duverne

 

 

La der…bye ! de Domenech

Le 9 septembre 1977. Lyon-Saint-Etienne : 2-2.
Lyon accueille les Verts. Ce soir-là, Raymond Domenech dispute son dernier match sous le maillot lyonnais. De 1970 à 1977, il a disputé 15 derbys. Joueur de caractère, il a marqué ces rencontres par ses interventions souvent musclées et ses sorties verbales « fleuries ». Pour son dernier match à Gerland, il s’échauffe avec le numéro 13 correspondant au numéro de son placard de vestiaire.

Raymond Domenech quitte l'OL après un
Raymond Domenech quitte l’OL après un match nul lors du derby (2-2).

 

« Ces matches dépassent largement le strict cadre
du football
 »
                                                              André Lerond

 

« Mamie » Toutain n’avait jamais vu ça !

Le 9 septembre 1980. Lyon-Saint-Etienne : 1-1.
Chaque derby disputé à Lyon voit des records de spectateurs tomber. Le 23 mars 1977, 38 439 personnes assistent à la victoire des Verts 2-0. Le 9 septembre de la même année, ce sont 39 851 spectateurs qui assistent au match nul 2-2 entre Lyonnais et Stéphanois.

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But de Jacques Zimako (44e) pour les Verts.

Trois ans plus tard, jour pour jour, l’OL reçoit l’ASSE. Dès le mercredi, la vente de billets à la brasserie de « l’Ours Blanc » à Lyon bat son plein. A midi, toutes les places sont vendues. A 71 ans, « Mamie » Toutain, la patronne du lieu situé au pied de la gare de Perrache, n’avait encore jamais vu ça. Bien connue des joueurs comme Bernard Lacombe ou l’Uruguayen Maneiro chez qui il trouva refuge à son arrivée à Lyon. Cela fait plus de trente ans qu’elle vend des billets et sert la cause des « Rouge et Bleu ».

Pendant de longues années, « Mamie » Toutain ne ratait pour rien au monde un déplacement de l’OL. Les stades de France n’avaient aucun secret pour elle.

Des problèmes de santé l’ont privée ce 9 septembre 1980 d’assister à un nouveau derby entre les « Bleu et Rouge » et les Verts. Si le match se termine par un nouveau match nul, 48 852 personnes garnissent le stade de Gerland. Un nouveau record !

 

« J’ai toujours voulu battre Lyon, même quand j’étais gamin »
                                                         Georges Bereta

 

 

Water-foot à Gerland

23 mars 1977 : Lyon-Saint-Etienne : 0-2.
Ce 23 mars, il valait mieux se rendre au stade de Gerland avec parapluie. Un quart d’heure avant le coup d’envoi, les 42 000 personnes sont suspendues à la décision de M. Kitabjian de faire jouer ou non la rencontre. L’orage qui s’abat sur Lyon rend le terrain impraticable. Le match a pourtant lieu. Les hommes de Robert Herbin, fraîchement éliminés par Liverpool en Coupe d’Europe, en ont vu d’autres. Larqué de la tête (61e) et Rocheteau (88e) font trinquer leurs voisins Lyonnais.

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Le stade Gerland transformé en piscine. Bernard Lacombe tente un crochet sur Christian Lopez, le défenseur stéphanois.

 

 

« La culture du derby m’a servi à devenir champion du monde »
                                                               Aimé Jacquet

 

 

Rollerball à Gerland

13 octobre 1971. Lyon-Saint-Etienne : 2-0
Un derby n’est décidément pas un match comme les autres. La rivalité est prononcée, la suprématie régionale tourne parfois au règlement de compte. Le 13 octobre 1971, on dénombre pas moins de sept joueurs blessés : quatre dans le camp stéphanois (Sarramagna, Keita, Larqué et Bereta) et trois dans celui des Lyonnais (Ravier, Trivic et Mihajlovic).

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Jean-Michel Larqué, balle au pied, échappe à Raymond Domenech et Serge Chiesa.

25 octobre 1975. Lyon-Saint-Etienne : 0-0.
Quatre ans plus tard, le 25 octobre 1975, le match tourne en véritable bagarre de rue. Robert Wurtz, le très spectaculaire arbitre, souffrant, est à deux doigts de s’évanouir en première mi-temps. Les grosses fautes se succèdent, les coups bas pleuvent. Maneiro, en grande forme, sèche Janvion et tente de lui asséner un coup de pied au visage… Piazza, lui aussi à terre, se fait cracher au visage par Mariot. Janvion, cède sa place à Santini.

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Les Stéphanois terminent la partie à dix après la sortie sur blessure de Patrick Revelli. Robert Wurtz, en fin de match est à nouveau pris d’un malaise. Les 33 148 spectateurs étaient venus voir un match de football, c’est à une partie de rollerball qu’ils eurent droit. Les Verts repartent finalement de Lyon avec le point du match nul 0-0. Le président Rocher , à la fin du match, accuse l’entraîneur lyonnais d’avoir incité ses joueurs à produire un tel spectacle. Pas mécontent du résultat vu le contexte, il décide alors de doubler la prime de match. Le quotidien L’Equipe du 27 octobre montre en Une Patrick Revelli quitter le terrain sur blessure aidé par le staff stéphanois.

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Saint-Etienne-Sochaux : Llense, un « dauphin » chez les Verts

Saint-Etienne reçoit Sochaux dimanche après-midi pour le compte de la 30e journée. Le 10 avril 1939, à l’occasion de leur première confrontation à Geoffroy-Guichard, le gardien stéphanois s’appelait René Llense. L’occasion de revenir sur une carrière bien remplie. Il aurait eu 101 ans le 14 juillet prochain. Le 21 décembre 1958, Michel Tylinski se fracture la jambe dans un choc avec le Sochalien Edimo. Il met un terme à sa carrière. Bonne lecture.

 

René Llense, un « Dauphin » à Saint-Etienne

Nous sommes en 1951, le 11 novembre précisément. Un match de deuxième division oppose Béziers à Toulon. Claude Abbes, le jeune gardien biterrois, alité avec plus de 40 de fièvre, ne peut tenir sa place. Pour ce match, il est remplacé au pied levé par un certain… René Llense. A 38 ans, l’entraîneur de Béziers n’hésite pas une seconde à rechausser les crampons. Toulon s’impose 2-0 mais qu’importe, c’était aussi ça René Llense.

FRANCE-BELGIQUE (5-3)
René Llense

Né le 14 juillet 1913 à Collioure dans les Pyrénées-Orientales, il quitte la région dès 1920 pour s’installer au pied du mont Saint-Clair à Sète. C’est dans la ville de Georges Brassens qu’il effectue ses premiers pas de footballeur. Son coeur balance entre le foot et le rugby. Il joue ses premiers matches au poste d’arrière droit.

A douze ans, il intègre la deuxième équipe Juniors du FC Sète. Un jour, le gardien de but titulaire de l’équipe Juniors se blesse à l’entraînement. M. Picottin, son entraîneur, lui demande de garder les buts. Il a alors quatorze ans. Sa bonne prestation fait qu’il ne les quittera jamais. A seize ans et demi, il débute dans l’équipe première du FC Sète qui dispute un tournoi international à Nancy. Il se permet même le luxe d’arrêter un penalty. Mais le club de Georges Bayrou laisse mûrir le jeune Llense. Frondas, le gardien titulaire, conserve encore quelques temps son poste. Il est donc remplaçant.

En parallèle du football, il travaille dans une maison d’exportation de vins d’Algérie, de Tunisie et du Maroc. Il participe au premier championnat professionnel en 1932-33 avec les Dauphins du FC Sète. Il s’entraîne deux fois par semaine passant du statut d’amateur à celui de professionnel avec, au passage, un salaire multiplié par trois. En 1932, René Llense devient le titulaire du FC Sète qui règne sur la planète football de France.

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René Llense, le gardien de l’équipe première du FC Sète.

En 1934, il accomplit une saison exceptionnelle avec les Dauphins sétois. Le 6 mai, il remporte la Coupe de France contre l’Olympique de Marseille à Colombes (2-1). Le capitaine des « Vert et Blanc » s’appelle alors Yvan Beck. Après un dernier tir olympien, le gardien sétois garde le ballon du match en souvenir qu’il cache sous son pull, tricoté par sa mère. Sous les yeux d’Albert Lebrun, président de la République, il fait un tour d’honneur.

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Le 20 mai 1934, une défaite de l’OM en match en retard donne le titre au FC Sète. Le club de René Llense réalise le doublé Coupe-Championnat. Une première en France. Ce double trophée rapporte à chacun des joueurs 50 F., ce qui représente une somme importante pour l’époque. Dans la foulée de ce doublé, George Kimpton, le sélectionneur français, le convoque pour la Coupe du monde mais en tant que suppléant d’Alex Thépot, le gardien titulaire.

Avec le FC Sète, René Llense réussit le doublé Coupe-Championnat en 1934.
Avec le FC Sète, René Llense réussit le doublé Coupe-Championnat en 1934.

Première sélection avec les Bleus à Rome

Le 17 février 1935, il dispute son premier match international à Rome contre les Italiens vainqueurs de la Coupe du monde en 1934. D’ordinaire, si rassurant, le gardien sétois n’est pas très à l’aise dans ses cages. Paralysé par la pression d’une première titularisation, les Italiens en profitent et marquent deux buts dans le premier quart d’heure.

René Llense connaît sa première sélection avec l'équipe de France le 17 février 1935 en Italie à Rome.
René Llense connaît sa première sélection avec l’équipe de France le 17 février 1935 contre l’Italie à Rome.

Le gardien sétois est un adepte du WM (3-2-2-3). Il préfère voir l’attaquant axial le plus loin possible de ses cages. Il impose donc ce système à ses défenseurs, ce qui lui évite les situations difficiles comme les tirs masqués ou les cafouillages. Pourtant, lors d’un France-Hollande (1-6) le 12 janvier 1936, il encaisse six buts au Parc des Princes, le pire souvenir de sa carrière internationale.

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Saint-Etienne accède à la Division 1

En 1938, l’AS Saint-Etienne accède à la première division nationale. Les Stéphanois affichent leurs ambitions : recruter de très bons joueurs pour jouer les premiers rôles. Pierre Guichard se lance dans une politique de vedettariat appelée alors « l’équipe des millionnaires ». Le gardien stéphanois André Guillard qui participe à la montée, se fait vieillissant et Favier n’apporte pas toutes les garanties pour évoluer à l’étage supérieur. Les dirigeants stéphanois se lancent alors à la recherche d’un gardien expérimenté.

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René Llense, un gardien international chez le promu stéphanois.

Un Méridional et un Ch’ti dans le Forez

René Llense, auteur de bonnes prestations avec Sète, est recruté par Pierre Marey. Ce méridional est petit et râblé mais possède une excellente détente. Il précède l’arrivée d’un autre joueur de talent : Jean Snella. Les deux hommes se connaissent bien pour avoir évolué ensemble au Bataillon de Joinville.

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A son arrivée à Saint-Etienne, René Llense, comme chaque joueur stéphanois, a reçu ce fascicule d’avant-saison (photo Musée des Verts).

A Saint-Etienne, il s’acclimate très bien à sa nouvelle vie, découvre un environnement différent et s’entraîne sous les ordres de l’Anglais William Duckworth. Ses coéquipiers s’appellent Tax, Pasquini, Rich ou Odry. L’équipe du président Guichard effectue un bon début de parcours, sa cote de popularité grandit au fil des matches.

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L’ASSE 1938-39 : Debout : de g. à d. : Marey (secrétaire), Odry, Snella, Casy, Llense, Rolhion, Biéchert, Hummemberger. Accroupis : de g. à d. : Pasquini, Tax, Beck, Hess, Roux.

A la fin de cette première saison en Division 1, Saint-Etienne termine à une honorable 4e place. Llense dispute 30 matches. Le club possède la meilleure défense du championnat avec 35 buts encaissés. L’année suivante, il confirme ses bonnes dispositions et connaît de nouvelles sélections avec l’équipe de France.

Le 14 novembre 1938, Saint-Etienne dispute un match de Coupe de France contre le FC Bagnols. L’anecdote racontée dans le Miroir des Sports du 22 novembre 1938 vaut le détour.

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Le 4 décembre 1938, il est sélectionné chez les Bleus pour disputer un match contre l’Italie à Naples. A cette occasion, son grand ami Jean Snella, l’accompagne pour honorer sa première sélection. Ce sont les deux seuls Stéphanois appelés. Si Snella refuse cette sélection, Llense, habitué des rendez-vous tricolores, honore celle-ci.

 

Dernière sélection en Bleu contre la Pologne

Il connaît une dernière fois les joies de l’équipe de France le 22 janvier 1939. La France s’impose devant la Pologne 4-0 (amical).

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Sur ses onze sélections avec les Bleus, il en obtient seulement deux durant son séjour à Saint-Etienne.

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Le 22 janvier 1939, René Llense connaît sa dernière sélection avec les Bleus contre la Pologne (4-0).

 

Coup d’arrêt avec la Seconde Guerre mondiale

En 1939-40, la Seconde Guerre mondiale interrompt brutalement sa carrière. Les joueurs stéphanois mobilisés sont éparpillés dans toute la France. Le championnat se dispute alors en trois zones : Nord, Sud-Ouest et Sud-Est dont fait partie Saint-Etienne (zone libre). Il reprend le championnat avec les Verts en 1940 malgré les sollicitations de Toulouse ou Sète, son ancien club, et participe au championnat joué en zone libre avec l’ASSE. En 1940-41, il dispute à la première finale jouée par l’ASSE : la Coupe de France zone NO disputée à Marseille et perdue contre Toulouse. Parallèlement, il passe ses diplômes de moniteur sportif. Conformément aux nouvelles réglementations de Vichy, il doit justifier d’une activité en dehors du football.

Peu avant le début de la saison 1941-42, il est nommé dans un lycée stéphanois en qualité de professeur d’éducation physique. Ce qui ne l’empêche pas de participer aux championnats dits « de guerre » avec l’ASSE.

 

Joueur de « Lyon-Lyonnais »

En 1943, le Commissariat général dirigé par le colonel Pascot nationalise les joueurs professionnels et crée un championnat interrégional qui met fin aux zones. Les joueurs stéphanois sont donc appelés à jouer pour l’équipe de « Lyon-Lyonnais ». La septième ville de France perd ses meilleurs joueurs. René Llense est réfractaire comme quatre autres Stéphanois dont Jean Snella. Finalement, il participe à ce championnat interrégional avec Calligaris, Rich, Rodriguez et Rolhion. Pierre Guichard, en désaccord avec ces mesures, démissionne de son poste de président.

La saison 1944-45 n’est pas à la hauteur de ses espérances.

En 1945-46, il n’est plus titulaire mais assure l’intérim d’Ignace Tax, l’entraîneur des Verts, parti à Paris suivre une formation d’entraîneur. Cette dernière saison au club, il joue avec l’équipe réserve stéphanoise.

En juillet 1946, les inséparables René Llense et Jean Snella participent au stage d’élève-entraîneur organisé par la Fédération Française de Football.

Jean Snella.
Jean Snella accompagne René Llense au stage d’élève-entraîneur à Reims.

Premiers pas d’entraîneur à Toulon

Il débute la saison 1946-47 comme entraîneur-joueur de Toulon. Le dimanche 22 octobre, il rechausse les crampons quelques matches pour compenser les blessures. L’ancien gardien de but se transforme alors en… centre-avant. Le 20 octobre, contre Metz, il inscrit deux buts.

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L’Equipe du 22 octobre 1946.

Llense : un avant-centre pas comme les autres…

Le 17 décembre de cette même année, il récidive en Coupe de France contre Monaco. Il contribue grandement à l’élimination des joueurs de la Principauté. Décidément, l’un des meilleurs gardiens français des deux dernières décennies est en passe de devenir leur meilleur ennemi.

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L’Equipe du 12 février 1947

Fin juin 1947, il quitte Toulon pour s’occuper de l’équipe de Vichy qui évolue dans le Championnat de France amateurs.

A l’intersaison 1950, il quitte Vichy pour le Puy-de-Dôme. Il prend en charge l’équipe du CS Puy-Guillaume.

 

A Béziers, il découvre Claude Abbes

Un an plus tard, le club de Béziers lui confie son équipe, alors pensionnaire de deuxième division. C’est lui qui remarque Claude Abbes et le signale aux dirigeants stéphanois. Le futur gardien signe chez les Verts en 1952. Cette même année, il quitte l’Hérault pour la Savoie et Saint-Jean-de-Maurienne. Il est employé par la société Péchiney dans le secteur des oeuvres sociales. En parallèle, il dispense des cours de football, natation et ski.

Claude Abbes, recommandé par René Llense à l'ASSE.
Claude Abbes, recommandé par René Llense à l’ASSE.

Llense Junior chez les Verts

Bien que retiré du monde du football, en 1956, il confie son fils, alors âgé de 18 ans et promis à un bel avenir, à son fidèle ami Jean Snella, entraîneur de Saint-Etienne. Il intègre l’équipe Juniors des Verts au poste d’inter droit.

Mais le football lui manque. Il se verrait bien reprendre en mains un club. En juillet 1970, on peut lire dans FranceFootball :

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Pigiste au Midi Libre

En 1976, René Llense prend sa retraite Et se retire à Sommières, une petite cité médiévale située entre Nîmes et Montpellier. L’année de l’épopée des Verts, il devient correspondant au journal Le Midi Libre. A Sète, un stade porte le nom de René Llense.

Il garde une haute estime de l’AS Saint-Etienne. Et pour cause, chez les Verts, on n’oublie pas ses anciens glorieux. Tous les ans, le club lui souhaite son anniversaire. Le 14 juillet prochain, René Llense aurait eu 101 ans.

MAGAZINE LLENSE

 

 

 Première à Geoffroy-Guichard

Ce 10 avril 1939 après-midi, Saint-Etienne et Sochaux se rencontrent pour la pour la première fois de leur histoire en Division 1 à Geoffroy-Guichard. Si les Stéphanois sont handicapés par les absences de Rolhion et Rich, Sochaux, de son côté, doit composer sans Courtois et Mattler. Soit deux absences préjudiciables de chaque côté. L’absence de ce dernier se fait ressentir. Pourtant ce sont les francs-comtois qui ouvrent le score dès la 3e minute par Petersen. La réplique est immédiate. A la 9e minute, Hès égalise. Bien que Cabannes n’ait pas son rendement habituel, Tax dans un rôle de meneur n’hésite pas, quand l’occasion se présente, à tenter sa chance. En seconde mi-temps, les Verts ajoute un second but par Pasquini sur un centre de Roux. L’infortuné sochalien Williams est impliqué sur les deux buts stéphanois. Le score en reste là. Saint-Etienne met fin à une belle série de victoires des Sochaliens et conforte sa quatrième place au classement.

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Carrière terminée pour Michel Tylinski 

Ce dimanche 21 décembre 1958, Saint-Etienne reçoit Sochaux à Geoffroy-Guichard. Jean Snella, l’entraîneur stéphanois, déplore le probable forfait de Ferrier, revenu blessé d’un match avec l’équipe de France Militaires à Sarrebruck le mercredi précédent. Richard Tylinski, toujours blessé est remplacé par Cassado, et par au jeu des chaises musicales, c’est Michel Tylinski qui occupe le poste d’arrière droit.

Les 9 847 spectateurs présents à Geoffroy-Guichard assistent à un match plaisant. Njo-Lea (42e) répond à Stopyra (26e). Les deux équipes regagnent leurs vestiaires sur un score de parité à la mi-temps. En deuxième mi-temps, les Stéphanois Oleksiak (63e), Braizat (65e) et Goujon (74e) assurent une avance confortable à leur équipe malgré la réduction du score par le Sochalien Mille sur coup de pied arrêté (69e).

Edimo inconsolable

Cette avalanche de buts reste pourtant comme anecdotique. Alors qu’il reste une poignée de secondes à jouer, Michel Tylinski, dans un choc avec Edimo s’écroule. Il est évacué illico-presto sur un brancard. Au coup de sifflet final, Edimo, l’auteur involontaire de ce terrible accident, accoure en larmes vers Michel Tylinski. Ce dernier, extraordinaire de courage, réconforte le Sochalien. La scène est dramatique. Le père des frères Tylinski, présent au match, n’arrive pas à consoler Edimo. Le Stéphanois est emmené en urgence à l’hôpital. Le diagnostic est impitoyable : double fracture ouverte tibia-péroné. Alors que le blessé est déjà sur la table d’opération, à Geoffroy-Guichard, dans le vestiaire, l’ambiance est pesante. La désolation se lit sur tous les visages, stéphanois comme sochaliens. Un dernier but sochalien est marqué dans l’indifférence. Les Verts viennent de gagner un match (4-3) mais surtout de perdre un coéquipier.

Michel Tylinski lors d'un Saint-Etienne-Lens
Michel Tylinski met un terme à sa carrière en 1958 à la suite d’un choc avec le Sochalien Edimo.

Paris-SG-Saint-Etienne : soirs de premières

Dimanche soir, le Paris-SG reçoit l’AS Saint-Etienne au Parc des Princes pour le compte de la 29e journée de championnat de Ligue 1. En 1977, Jean-Michel Larqué, en conflit avec Robert Herbin, son entraîneur à l’AS Saint-Etienne, quitte les Verts pour embrasser la carrière d’entraîneur au PSG. Un an plus tard, Laurent Paganelli, jeune prodige du football français, fait ses premiers pas en Division 1 au Parc des Princes. Il est âgé de… 15 ans et 309 jours. Un record. Enfin, en 2006, Ilan illumine le stade de la Porte de Saint-Cloud d’un but venu d’ailleurs. Bonne lecture.

 

Larqué : un Vert à Paris

15 003. C’est le nombre de spectateurs qui ont vu pour la dernière fois Jean-Michel Larqué disputer un match de Division 1 avec l’AS Saint-Etienne. Ce 28 avril 1977, l’ASSE vient de faire match nul avec le Stade de Reims (0-0) à domicile. Personne n’imagine alors qu’on ne reverra plus l’emblématique capitaine des Verts avec l’équipe professionnelle stéphanoise. Ni lui-même qui annonce dans L’Equipe du 2 mai 1977 avant un futur déplacement à Nice que l’ASSE va jouer « un match à quatre points ». Pourtant, le mardi 3 mai L’Equipe titre :

Larqué herbin c la guerre

Convoqué dans le bureau de Robert Herbin le jeudi matin à son arrivée à l’entraînement, le milieu de terrain stéphanois apprend de la bouche de son entraîneur qu’il ne fera pas partie du déplacement sur la Côte d’Azur. Depuis le match retour à Liverpool, l’entraîneur des Verts lui reproche des performances décevantes, notamment sur le plan défensif. Larqué s’en défend en expliquant qu’il n’a jamais été un demi défensif, contrairement à Bathenay et Synaeghel, plus habitués à ce type de poste.

Jean-Michel Larqué capitaine des Verts.
Jean-Michel Larqué, le capitaine des Verts, est en conflit avec son entraîneur Robert Herbin.

Premières frictions entre Larqué et Herbin

Durant cette saison 77, le climat au sein de la maison verte n’est pas des plus sereins. L’élimination en quarts de finale de la Coupe des Clubs Champions laisse apparaître des dissensions. Robert Herbin a souvent cherché la bonne formule tactique… en vain.
L’éviction du Palois n’est pas la première de la saison : après une lourde défaite à Sochaux (4-0) le 5 février, le « Sphinx » avait déjà écarté son capitaine. Raison invoquée : le joueur devait souffler après les efforts fournis pour revenir à son meilleur niveau après son opération du genou droit. Il ne fera son retour dans le onze de départ que lors d’un déplacement à Rennes le 26 février, soit cinq jours avant la réception de Liverpool en quarts de finale aller de la Coupe des Clubs Champions. Ce soir-là, Herbin lui confie le rôle d’avant-centre. Pas vraiment habituel pour lui.

Larqué contre Liverpool

 

Dans son édition du 8 mars, L’Equipe annonce que la paix est signée entre Herbin et son joueur.

paix signée

Après la victoire contre le Paris-SG (1-0) trois jours auparavant, les deux hommes se sont expliqués. Le 16 mars, les Verts se déplacent à Liverpool pour défendre le petit but d’avance inscrit par Dominique Bathenay quinze jours plus tôt en quarts de finale de la Coupe des Clubs Champions. Les Verts, dans une ambiance des grands soirs, sont éliminés par Keegan et sa bande 3-1.  Jean-Michel Larqué, capitaine de l’ASSE depuis le départ de Georges Bereta pour l’OM en 1975,  dit définitivement adieu à la Coupe d’Europe.

Vidéo de Liverpool-Saint-Etienne dans une ambiance incroyable.

Contre Liverpool, à Anfield, Jean-Michel Larqué (avec Merchadier) joue son dernier match européen avec Saint-Etienne. Ici, il dispute un ballon de la tête à John Toshack.
Contre Liverpool, à Anfield, Jean-Michel Larqué joue son dernier match européen avec Saint-Etienne. Ici, il dispute un ballon de la tête à John Toshack.

Revenons à ce mois de mai 77. Larqué accuse le coup. C’en est trop : c’est officiel : malgré une dernière année de contrat à honorer, il souhaite terminer la saison et partir. Des rumeurs l’envoient à Bordeaux, ce qui le rapprocherait géographiquement de son Pays Basque natal.
Après les affaires Bosquier-Carnus, Keita et Bereta, Larqué devient à son tour le personnage central d’une « affaire » à la stéphanoise. Pour ce dernier, si l’on parle beaucoup de la politique des jeunes de l’ASSE, on évoque beaucoup moins de celle des « Vieux ». Il prend comme référence le Real Madrid qui sait préparer le « troisième âge » de ses joueurs, ce qui en fait un grand club.

 

Un capitaine en réserve

En attendant, celui qui a obtenu son diplôme d’entraîneur l’été précédent à Vichy, va donc aider les jeunes du centre de formation à obtenir le titre de champion de France de Division 3.
Herbin a remplacé dans le groupe Larqué par Larios mais cela ne change pourtant rien aux performances de son club le week-end suivant puisqu’il s’incline à Nice 2-0. Roger Rocher, en vacances dans sa maison sur la Côte d’Azur, s’est entretenu avec Larqué par téléphone. Pourtant, le soir du match à Nice, il déclare à L’Equipe : « On ne va pas faire de comparaison avec le Real Madrid. Le Real a peut-être payé son sentimentalisme. La réussite de Saint-Etienne est basée sur une qualité d’ambiance, de rapports personnels, et j’y tiens, mais aussi une exigence dans les performances. Sinon l’épopée des Verts en Coupe d’Europe n’aurait jamais existé ! »

Le 6 mai, dans L’Equipe, Larqué dévoile quelques bribes de son entretien avec le président Rocher :

A ROCHER de décider

Larqué, joue donc en équipe réserve. Après une victoire contre Troyes et une autre contre Viry-Châtillon où il a pu constater sa cote de popularité, Herbin n’a nullement l’intention de le réintégrer dans le groupe professionnel. Les déclarations virulentes du milieu de terrain à l’encontre de son entraîneur par médias interposés ne sont pas faites pour apaiser le climat.
Saint-Etienne dispute un quart de finale aller de Coupe de France à Sochaux (1-1), L’Equipe du 13 mai sous forme d’encadré titre :

Larqué c'est presque fini

Le 17 mai, il assiste en tribune de presse à la victoire des Verts contre Sochaux (3-1) qui les qualifie pour les demi-finales et surtout au centième match des Verts sans connaître la moindre défaite à Geoffroy-Guichard.

 

Premiers contacts avec Paris

Le 26 mai, L’Equipe fait état de contacts entre Larqué et le Paris-SG qui vient d’achever le championnat à la 9e place de Division 1. Daniel Hechter, son président, est à la recherche d’un entraîneur en remplacement de Vasovic. Il dresse une short-list parmi lesquels figurent en bonne place Lucien Leduc, l’entraîneur de Monaco et … Jean-Michel Larqué, en disgrâce avec l’ASSE. Si l’entraîneur de Monaco était choisi, cela permettrait à Larqué de poursuivre sa carrière de joueur encore un ou deux ans avant d’endosser celle d’entraîneur.
La question est de savoir si Larqué endossera la casquette d’entraîneur ou s’il continuera de jouer tout en entraînant l’équipe. Dans sa tête, Larqué est prêt à jouer encore trois ans.

 

Contrat de 3 ans au Paris Saint-Germain

Dans son édition du 3 juin 77, L’Equipe annonce que Larqué va s’engager pour 3 ans avec le Paris Saint-Germain.
Il vient de passer deux jours dans la capitale pour discuter des modalités de son contrat. Avant de reprendre l’avion pour Saint-Etienne, en tant qu’amateur de tennis, il s’est octroyé un petit détour par la Porte d’Auteuil et Roland-Garros, où il a assisté au match Ramirez-Panatta. Un endroit qui devrait lui être bientôt familier.
De retour à Saint-Etienne, il reprend le chemin de l’entraînement sous les ordres de Robert Philippe, le coach de l’équipe réserve. Professionnel jusqu’au bout, il souhaite décrocher avec ses camarades le titre de champion de France de troisième division. Un petit but et une victoire contre Poissy (5-0) et l’objectif est atteint. Les Verts disputeront la finale contre Nantes.

En championnat, Jean-Michel Larqué joue son dernier match contre Poissy.
En championnat, Jean-Michel Larqué joue son dernier match contre Poissy.

Pendant ce temps, les professionnels stéphanois s’imposent deux fois contre Nantes en demi-finales de la Coupe de France et se qualifie pour une septième finale à Paris.

 

Le dernier titre d’un capitaine

Tandis que ses ex-partenaires s’apprêtent à rejoindre Paris pour y disputer la finale le 18 juin, Larqué, lui, se prépare à disputer son dernier match sous le maillot vert… à Nantes. Il veut partir sur une bonne note et même si un titre de champion de Division 3 n’a pas la même saveur qu’une finale de Coupe de France, le professionnel obéit à ses obligations jusqu’à leur terme. Après une double confrontation (3-2 pour les Verts  à l’aller grâce à trois buts de Sarramagna), les Verts s’imposent au stade Marcel-Saupin 3-1. Mission accomplie pour le numéro 10 des Verts. Il met un terme à son chapitre stéphanois avec un nouveau trophée.

Les Verts champions de France de Division 3

Finale retour au stade Marcel-Saupin : 3 541 spectateurs.
Buts.- Nantes : Bassi (24e) ; Saint-Etienne : Schaer (25e), Boury (56e et 89e).
Nantes : Desrousseaux – Madani, Benion, Fenillat, Bidard – Vendrely, Steck, Bassi – Lacombe, Triantafilos, Gadocha. Entr.: Zaetta.
Saint-Etienne : Dugalic – Borel, Modeste, Lacuesta, Deschamps – Vesir, Larqué, Larios – Derigon (Fournier, 71e), Schaer, Boury. Entr.: Philippe.

 

Nommé entraîneur à 29 ans et 10 mois

Le 18 juin, les hommes de Robert Herbin disputent la finale de la Coupe de France contre Reims au… Parc des Princes. La dernière occasion pour eux d’accrocher l’Europe via la Coupe des Coupes. Les deux clubs comptabilisent 15 titres de champion de France et 7 Coupes. Un stade que Jean-Michel Larqué aura l’occasion de côtoyer régulièrement puisqu’il a été choisi par Hechter pour diriger  le Paris-SG. Il lui donne également les pleins pouvoirs, y compris dans le recrutement. Hechter prend un risque en confiant les rênes du club à un entraîneur qui n’a encore jamais entraîné. Certes, il est sorti major de sa promotion d’entraîneur en juillet 1976 mais a tout à prouver dans cette fonction. Aimé Jacquet avait 35 ans et 6 mois quand il a pris en main la section professionnelle de l’OL en 1976, et Robert Herbin, 33 ans et 4 mois en 1972 quand il a succédé à Albert Batteux. Ce dernier a remporté la Coupe de France avec Reims en 1950 en tant que joueur avant de succéder le soir même à Roessler, son entraîneur. Batteux avait alors 31 ans. Alors Larqué entraîneur à 29 ans et 10 mois pourquoi pas !

 

Privé de finale de Coupe de France

Il souhaite engager des vedettes pour faire vibrer le Parc. Ironie du sort, c’est contre Reims qu’il a disputé son dernier match en pro en championnat avec les Verts. Quel plus bel hommage pour lui avant d’embrasser une carrière d’entraîneur que de jouer et gagner la finale de la Coupe de France contre… Reims. Robert Herbin ne lui laisse pas cette chance. Il regarde les Verts s’imposer devant les Rémois des tribunes. La page est définitivement tournée.
Le 21 juin 1977, alors qu’il n’a toujours pas signé son contrat avec le Paris-SG, il prend place pour la première fois sur le banc de son nouveau club à l’occasion du Tournoi de Paris. A bientôt 30 ans, une nouvelle carrière débute pour celui qui avait redonné espoir à Saint-Etienne et à la France du football un soir de… 17 mars 1976 en inscrivant un magnifique coup-franc contre le Dinamo Kiev. Il part de Saint-Etienne en laissant de beaux souvenirs.
Le vendredi 15 juillet 1977, il dirige son premier entraînement avec le Paris-SG. A l’instar de ce qui a été instauré au Bayern Munich, le nouvel entraîneur parisien estime que la préparation de ses nouveaux joueurs est insuffisante et leur impose trois entraînements quotidiens. Comme s’il voulait imposer d’emblée son « image de marque ».

PSG
Jean-Michel Larqué quitte l’AS Saint-Etienne pour le Paris-SG où il endosser la casquette d’entraîneur.

Malgré cette cadence, le début de saison du PSG version Larqué n’est pas à la hauteur des espérances. L’absence d’un organisateur au milieu du terrain se fait cruellement sentir, le petit Lyonnais Serge Chiesa a refusé de rejoindre la capitale. Larqué décide donc de rechausser les crampons et endosse du coup la casquette de joueur-entraîneur. A 30 ans, il peut rendre encore bien des services sur le terrain.
Un autre problème se pose pour le PSG : la Fédération Française de Football (FFF) lui demande de trouver un entraîneur-instructeur conformément aux règlements, Larqué ne possède pas ce diplôme et doit par conséquent trouver un prête-nom. Pierre Alonso occupe cette fonction.
En janvier 1978, suite à une affaire de double billetterie, le couturier parisien quitte la présidence du club parisien. Il est remplacé par Francis Borelli. Le PSG termine le championnat à la onzième place.

 

Bathenay : un deuxième Vert au PSG

En août 1978, Dominique Bathenay, son ex-partenaire à Saint-Etienne, le rejoint dans la capitale après la Coupe du monde en Argentine. Fin août, Jean-Michel Larqué décide de quitter son poste d’entraîneur pour se consacrer uniquement à celui de joueur. Comme un certain… Robert Herbin avant lui, qui avait rechaussé les crampons un 3 juin 1975 contre Troyes (5-1, avec un but de Herbin sur penalty) alors qu’il avait abandonné son statut de joueur à la fin de la saison 1972.

Un an après Jean-Michel Larqué, Dominique Bathenay rejoint le PSG à son tour.
Un an après Jean-Michel Larqué, Dominique Bathenay rejoint à son tour le PSG.

L’entraîneur rechausse les crampons

Le début de championnat du PSG n’est pas bon : le club parisien compte trois défaites après cinq journées. Le 22 août, Larqué officie une dernière fois à Nice (3-1) avant de laisser la place sur le banc à Pierre Alonso. Il n’est pas heureux dans cette fonction et le fait savoir à son président Francis Borelli. Douze mois après avoir endossé l’habit d’entraîneur, il redevient simple joueur avec pour entraîneur celui qui était son adjoint. Une première.

debout de gauche à a droite : bernard (daniel) / redon (philippe) / renault (eric) / pilorget (jean marc) / adams (jean pierre)  assis de g a d : brisson (francois) / justier (lionel) / larque (jean michel) / bianchi (carlos) / m pele (francois) / dalheb (mustapha)
Le PSG version 77 :  Debout : de g. à d. : Bernard, Redon, Renault, Pilorget, Adams.
Accroupis de g. a d. : Brisson, Justier, Larqué, Bianchi, Mpelé, Dalheb.

Le 25 août, le Paris-SG accueille Saint-Etienne. L’Equipe du jour titre :

Bathenay larqué le défi

Pour sa grande rentrée, le désormais ex-entraîneur Larqué joue cinquante-cinq minutes et s’il ne possède pas encore le rythme pour tenir un match entier, il impose sa patte sur le match. Les spectateurs n’ont pas les yeux fixés sur l’ancien capitaine des Verts. Mais sur un jeune Stéphanois qui fait ses grands débuts en professionnel (voir par ailleurs). Les deux équipes se quittent sur un score nul d’un but partout.

Jean-Michel Larqué à l'entraînement (avec Carlos Bianchi à sa droite)
Jean-Michel Larqué à l’entraînement (avec Carlos Bianchi à sa droite)

Au terme de la saison, le PSG perd deux nouvelles places et termine à une très décevante 13e place.
Larqué décide alors de mettre un terme à sa carrière professionnelle le 2 juillet 1979 alors qu’il est encore sous contrat avec le club parisien.
Il reste au club en tant que manager général avant de le quitter définitivement au début de l’automne 1980 pour embrasser une carrière de commentateur sportif sur Antenne 2 au côté de Thierry Roland.
Clin d’oeil de l’histoire : le 5 mars 1980, Saint-Etienne reçoit Mönchengladbach à Geoffroy-Guichard en Coupe de l’UEFA.Ce soir-là, dans le Forez, Thierry Roland est au micro assisté d’un débutant dénommé Jean-Michel Larqué.

 

 

Paganelli : de Montaigu au Parc des Princes

Depuis 1973, la ville de Montaigu organise un « mini Championnat d’Europe » qui rassemble des footballeurs en herbe âgés de 13 à 14 ans issus de clubs professionnels ou non des quatre coins de l’Europe. C’est grâce notamment à ce tournoi que la FFF a décidé de créer une sélection nationale catégories minimes.
Ce week-end de Pâques d’avril 1977, un jeune minime d’Avignon attire particulièrement l’attention. Le garçon s’appelle Laurent Paganelli et possède un talent indéniable. Avec la sélection des minimes, il remporte le tournoi avec brio.

 

Un but pour une Coupe

Le samedi 18 juin 1977, Saint-Etienne et Reims jouent la finale de la Coupe de France au Parc des Princes. A 18 heures, le lever de rideau met aux prises les minimes de Méditerranée à ceux d’Alsace. Dans les rangs sudistes, Ceccarelli garde les buts mais c’est encore Paganelli qui éclabousse la finale de toute sa classe. Après un passage en revue de la défense alsacienne, il inscrit le seul but de cette finale (60e). Quelques heures plus tard, les Verts s’imposent devant Reims 2-1 et s’adjugent leur sixième Coupe de France.

Dans son édition du 20 juin, L’Equipe titre :

PAGA A LA 60e

Le samedi 8 octobre, au Parc des Princes, en lever de rideau du match amical France-URSS, l’équipe de France Cadets (garçons ayant moins de seize ans dans l’année en cours) rencontre son homologue du Pays de Galles. Georges Boulogne, son responsable depuis deux ans, convoque deux Laurent : Roussey et… Paganelli, le benjamin de la troupe. La rencontre se dispute sous l’oeil attentif de Pierre Garonnaire, le recruteur des Verts. Une nouvelle fois, le jeune Paganelli étonne les spectateurs.

 

Le petit Mozart du Parc

La France partage les points avec les Gallois (1-1) mais une nouvelle fois, il se transforme en chef d’orchestre de l’équipe française. Il égalise à la 62e minute pour les jeunes Bleus. Paganelli, ce soir-là, est le seul joueur qui ne soit pas licencié dans un club professionnel. Issu d’une famille très impliquée dans le rugby, l’Avignonnais, alors âgé de 8 ans, se casse un bras un jour à l’école de rugby de la ville. S’il met un temps de côté la pratique de ce sport, en revanche, il peut s’adonner au football avec les copains à l’école. Finalement, il opte définitivement pour le ballon rond.
Joueur de la Maison des Jeunes et de Culture d’Avignon (MJC), il fait preuve d’une grande maturité puisqu’il entraîne la section pupilles du club. Plus pour très longtemps puisqu’il vient de signer un contrat de non-sollicitation avec l’AS Saint-Etienne. Il rejoindra dans le Forez, des joueurs comme Lestage ou Roussey avec qui il joue déjà en sélection. Pierre Garonnaire a convaincu le père du jeune prodige, cheminot de métier, et M. Blum, son éducateur à la MJC, de rejoindre Saint-Etienne, qui n’est qu’à deux heures d’Avignon. Il devance des clubs comme le PSG ou Nice également intéressés par le jeune Avignonnais.

Laurent Paganelli et Laurent Roussey
Laurent Paganelli et Laurent Roussey, deux jeunes talent à l’AS Saint-Etienne.

 

Quand Platini donne la leçon

Le 8 février 1978, les cadets nationaux se déplacent avec l’équipe de France A à Naples en Italie, en amical. Si la bande à Platini obtient un match nul (2-2), les Cadets s’imposent quant à eux 2-1. Paganelli inscrit le but victorieux à quatre minutes de la fin… sur coup franc. Le lendemain, sur le stade de Fuorigrotta, le maître en la matière, Michel Platini, alors joueur de l’AS Nancy-Lorraine, fait une démonstration à deux de ses « élèves » : Roussey et Paganelli.
En mai, Les Verts de Robert Herbin terminent le championnat à une peu habituelle 7e place.

 

L’ASSE rajeunit ses cadres

Pour la première fois depuis quatre ans, les Verts ne participent pas à une coupe d’Europe.
L’entraîneur stéphanois laisse partir quelques joueurs qui ont contribué aux succès du club : Bathenay rejoint Larqué au Paris-SG, Synaeghel part à Metz, Patrick Revelli file à Sochaux et son frère Hervé rejoint la Suisse et Le Chenois dans un rôle d’entraîneur-joueur. Enfin, Merchadier signe à Nancy. Une page se tourne. Au rayon des arrivées, Larios revient de Bastia fort de son expérience européenne avec le club corse, Lacombe quitte le voisin lyonnais et Elie arrive de Lens.

Rocher entouré de Larqué (à gauche) et Hervé Revelli (à droite). Les deux hommes
Roger Rocher entouré de Larqué (à gauche) et Hervé Revelli (à droite). Les deux hommes ont quitté le club. Les Verts tournent une page.

Premier entraînement pour Paga avec le groupe pro

Le 28 juin, c’est la rentrée des classes. Robert Herbin dirige l’entraînement. Dans son groupe, il incorpore le jeune Paganelli. Au cours d’un match d’entraînement, avec toute l’insouciance de ses 15 ans, il impressionne l’entraîneur stéphanois. Jamais un joueur aussi jeune n’avait fait naître autant d’espoirs. Mais, fidèle à ses habitudes, Roby observe.

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Paganelli fait ses premiers pas avec l’équipe réserve des Verts.

Les voyages forment la jeunesse et les Verts

Le 21 juillet, les jeunes du centre de formation s’envolent pour l’Île de la Réunion. En novembre 1977, Roger Rocher, en voyage d’affaires sur l’île de l’océan indien, avait promis au président de la Ligue de football de la Réunion d’envoyer son équipe réserve. Les Wolff, Roussey, Lestage, Rampillon, Garande, Colleu, Zanon ou encore Oleksiak sont du déplacement. Bien sûr, Guy Briet, l’entraîneur a également convié Paganelli à ce voyage. Deux victoires et un nul ponctuent cette expédition.

Laurent Paganelli et son coach de l'équipe réserve, Guy Briet.
Laurent Paganelli et son coach de l’équipe réserve, Guy Briet.

Test probant contre le FAR du Maroc

Le 15 août, Herbin programme une rencontre amicale contre l’équipe des Forces Armées Royales du Maroc pour compenser la mini-trêve imposée par le match international amical : France-Anderlecht. Dans l’optique du prochain derby contre le voisin lyonnais entraîné par Aimé Jacquet le vendredi qui suit, il veut voir à l’oeuvre les remplaçants ainsi que deux joueurs qui brillent avec l’équipe réserve : Laurent Paganelli (15 ans) et Patrice Garande (17 ans).

 

Soirée des premières au Parc

Le 25 août, les Verts se déplacent à Paris pour y affronter le Paris-SG d’un certain Jean-Michel Larqué qui a revêtu son habit de joueur à cette occasion. Robert Herbin convoque Laurent Paganelli pour ce grand rendez-vous. Le Parc des Princes, il connaît déjà pour y avoir évolué déjà trois fois, mais c’était avec les cadets nationaux. 47 000 spectateurs garnissent le stade de la Porte de Saint-Cloud. Au coup d’envoi, il est remplaçant. Mais l’attraction de ce match est la grande rentrée de Larqué, l’ex-capitaine des Verts, en tant que joueur du PSG. Dans la semaine, il a délaissé son habit d’entraîneur pour rechausser les crampons. Il n’a rien perdu de ses qualités techniques. Son coéquipier Carlos Bianchi apprécie l’apport de son désormais ex-entraîneur.

 

15 ans et 309 jours

L’autre fait marquant de ce match se situe à la 46e minute : A la Paganelli, le « bizuth » de cette soirée, fait sa première apparition en Division 1. A 15 ans et 309 jours exactement, il remplace Dominique Rocheteau, victime d’une élongation. Un gamin parmi les grands, les spectateurs du Parc n’ont d’yeux que pour lui.

Laurent Paganelli fait ses premiers pas en Division 1 au Parc des Princes contre le PSG.
Laurent Paganelli fait ses premiers pas en Division 1 au Parc des Princes contre le PSG.

Dans un papier d’ambiance, Bernard Dolet, l’un des envoyés spéciaux du quotidien L’Equipe, décrit parfaitement l’ambiance qui entoure cette soirée.

QUAND LES COEURS BALANCENT DOLET
Laurent Paganelli détrône ainsi l’autre Laurent, Roussey, qui avait débuté le 25 février 78 en Division 1 à l’âge de 16 ans et 68 jours.
Parisiens et Stéphanois se quittent sur un score nul de 1-1, Bathenay (39e) répondant à Rocheteau (37e), le premier buteur des Verts à l’extérieur de la saison.

Paris Saint-Germain-Saint-Etienne : 1-1 (1-1).
Buts.- Paris-SG : Bathenay (39e) ; Saint-Etienne : Rocheteau (37e).

Paris-SG : Baratelli – Pilorget, Morin, Renaut, Lokoli – Bathenay, Adams, Larqué (Lemoult, 57e) – M’Pelé, C. Bianchi, F. Brisson. Entr.: Alonso.

Saint-Etienne : Curkovic – Janvion, Piazza, Lopez, Repellini – Larios (Modeste, 67e), Santini, Elie – Rocheteau (Paganelli, 46e), L. Roussey, Zimako. Entr.: Herbin.

 

 

Trente-cinq ans d’attente

Depuis leur première confrontation en championnat au Parc des Princes le 27 février 1972, les Verts ne se sont jamais imposés dans la capitale. Jusqu’à ce 25 février 2007 et la victoire 2-0 contre un PSG qui lutte pour ne pas descendre en Ligue 2.

Grâce à cette victoire historique des hommes d’Ivan Hasek, les Verts sont plus que jamais candidats aux places européennes. Ils attendaient ce moment depuis… 35 ans. Certes, ils avaient bien battu le PSG le 27 février 1972, mais le match se déroulait au stade Bauer à Saint-Ouen. Le Parc des Princes était alors en travaux. Depuis, les Verts avaient essuyé seize revers et glané huit nuls.

 

Ilan soulève le Parc

On joue la 32e minute. L’ASSE mène 1-0 grâce à une tête de Damien Perquis sur un centre de Sablé. Sur la première occasion de son équipe, le défenseur stéphanois, au point de penalty, devance Armand et trompe Landreau (1-0).

Mais le plus beau est à venir. Il reste une poignée de secondes quand Feindouno centre côté gauche au second poteau pour Gomis. Ce dernier remise de la tête sur Ilan. Dos au but, le Brésilien, aux six mètres, lève le ballon sur son contrôle orienté et, d’une magnifique reprise acrobatique croisée, trompe le portier parisien. Les Verts mènent 2-0 à la mi-temps. Il vient d’inscrire l’un des plus beaux buts de la saison.

Vidéo : le chef d’oeuvre d’Araujo Ilan :

http://youtu.be/clGFCMs58g4

 

 

Antoine Cuissard : un mareyeur breton à Saint-Etienne

Dimanche 9 mars à 17 heures, le FC Lorient accueille l’AS Saint-Etienne au stade du Moustoir pour le compte de la 28e journée de championnat. Aujourd’hui, je vous emmène à la rencontre de la famille Cuissard. De Caroline, la grand-mère, vendeuse de poissons aux halles de Saint-Etienne et fondatrice du FCL, à Antoine, le petit-fils, mareyeur à Lorient et joueur international à Saint-Etienne. Bonne pêche.

 

Dans la famille Cuissard, on est poissonnier de génération en génération. Jugez plutôt : Jacques Coste, le père de Caroline Cuissard, fondatrice du FC Lorient, travaillait à la mine avant de se lancer dans l’activité poissonnière. Sa fille, avant de quitter le Forez pour la Bretagne, vendait du poisson à Saint-Etienne.

 

Mais qui était Madame Cuissard ?

Dans les années 20, Caroline Cuissard tient un étal de poissons dans les halles de la ville de Saint-Etienne dont elle est originaire. Mais son principal fournisseur est un couple de Lorientais d’un âge avancé. N’ayant aucun repreneur pour leur activité de mareyage, ils proposent à Madame Cuissard de reprendre l’affaire. Cette dernière, à court de moyens financiers, hésite. Finalement, les mareyeurs bretons qui souhaitent ardemment la reprise de leur affaire par Madame Cuissard en qui ils ont une pleine confiance, acceptent quelques arrangements pour régler la succession.

L’affaire conclue, elle quitte Saint-Etienne et ses Halles et rejoint la cité de pêche de la côte bretonne de l’Atlantique.

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Les anciennes halles de Saint-Etienne et la colline Sainte-Barbe.

Madame Cuissard : du poisson au ballon rond

A la tête de sa nouvelle activité, elle décide de fonder avec plusieurs mareyeurs de l’Estacade, en 1925, une équipe corporative de football qui a pour nom « La Marée Sportive. » L’emblème de ce nouveau club est un poisson : le grondin.

Un an plus tard, devant le succès de cette équipe corporative, Caroline Cuissard et Joseph, son fils, décident d’aller plus loin. Le club fondé un an avant passe du statut corporatif au statut amateur. Dans l’arrière-salle du café Eon, rue Carnot, à Lorient, Jean Cuissard , un cousin de la famille, signe les premiers statuts. Le 2 avril 1926, le Football Club Lorientais (FCL) est né. Le grondin laisse la place au merlu, poisson jugé plus noble s’il en est, mais aussi parce qu’il est l’un des plus vendus en Bretagne. Sa fondatrice met alors à la disposition de son club un parc, propriété qu’elle possède au coeur de la ville. Afin de réaliser quelques économies, elle donne des vieux filets de chalut en guise de filets de but.

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En bonne mère de famille, Madame Cuissard couve ses joueurs, les réunit chez elle, les invite à dîner après les matches et allant même jusqu’à leur procurer du travail dans l’entreprise familiale. Le club comprend alors 5 membres de la famille de sa fondatrice : 3 Cuissard, 1 Nioche et 1 Goujon. Au point que le FCL était surnommé le « Famille Cuissard Lorient ».

 

Antoine Cuissard fait ses classes à Lorient

Comme Caroline Coste, sa grand-mère paternelle, Antoine Cuissard, le petit-fils, est né à Saint-Etienne le 19 juillet 1924. Néanmoins, il quitte rapidement la région stéphanoise avec ses parents à l’âge de 2 ans pour rejoindre une partie de la famille en Bretagne.

Licencié comme pupille à l’âge de 9 ans au FC Lorient, le jeune Antoine joue dans le club familial jusqu’à l’âge de 14 ans. Footballeur élégant et rapide, il se fait très vite remarquer.

 

Retour à Saint-Etienne

En 1944, il repart dans sa ville natale où il aide sa famille qui tient une… poissonnerie. Il propose ses services à M. Marey, un dirigeant influent de l’ASSE, et signe sa licence dans le club de première division qui joue alors les premiers rôles dans son championnat. Il occupe le poste d’inter droit (aujourd’hui appelé milieu offensif) et devient rapidement l’un des piliers de cette équipe entraînée par Ignace Tax.

C’est au cours d’un match à Geoffroy-Guichard contre Strasbourg qu’il remplace son coéquipier Amar, blessé, au poste d’arrière central. Cela ne lui pose aucun problème puisqu’il excelle également en défense.

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L’AS Saint-Etienne 1947-48 : debout : de g. à d. : Firoud, Fernandez, A. CUISSARD, Jacquin, Calligaris, Huguet. Accroupis : de g. à d. : Lauer, Hanus, Alpsteg, Jacowsky, Rodriguez.

 Cuissard, un Vert chez les Bleus

En 1946, Tax lui confie même le rôle de demi-centre, un poste inhabituel pour lui. Cela ne perturbe nullement le joueur qui est alors qualifié d’interchangeable. Toujours est-il que ses bonnes performances ne laissent pas indifférent Gaston Barreau, le sélectionneur de l’équipe de France, qui le convoque le 6 avril pour affronter la sélection nationale de Tchécoslovaquie à Colombes. Antoine Cuissard, seul Stéphanois appelé, fait partie des quatre nouveaux « bleus » avec Grillon, Prouff et Leduc. A 21 ans et 8 mois, il est le plus jeune joueur de cette sélection.

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Première sélection en équipe de France pour Antoine Cuissard (le premier en tête) lors du France-Tchécoslovaquie à Colombes le 6 avril 1946.

 

Pour la première fois de son histoire, la France s’impose devant les Tchèques 3-0. Dans les buts adverses, le gardien se nomme Karl Finek, un géant d’un mètre 96 et futur coéquipier de Cuissard à Saint-Etienne. S’il ne marque pas ce jour-là, le Stéphanois est à créditer d’un match sérieux. M. Valousek, le vice-président de l’équipe tchécoslovaque, ne tarit pas d’éloges au sujet de Cuissard : « En lui, vous possédez un élément excessivement précieux (…) Il s’imposera progressivement et deviendra un grand demi-centre. » D’autres rendez-vous internationaux suivront.

Vidéo de l’INA du match France-Tchécoslovaquie (3-0) le 6 avril 1946.

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Cuissard : meilleur demi-centre français

Début juin, Saint-Etienne termine le championnat de Division 1 à une brillante deuxième place derrière Lille. Quelques jours plus tard, le quotidien L’Equipe établit le bilan de la saison et place Cuissard comme le meilleur demi-centre français.

Fin juin, Jean Snella, son coéquipier à l’ASSE, suit un stage fédéral à Reims avec comme objectif d’obtenir ses diplômes d’entraîneur.

Jean Snella fait ses premiers pas d'entraîneur au FC Lorient.
Jean Snella quitte l’AS Saint-Etienne et effectue ses premiers pas d’entraîneur au FCL.

Snella et Cuissard : un duo stéphanois chez les Merlus

Le 28 juin 1946, L’Equipe annonce : « Cuissard à Lorient ». Il pourrait être accompagné de Jean Snella dont le nom a été soufflé par le petit-fils à sa grand-mère. Mais le néo-entraîneur ne veut pas s’aventurer seul dans une région et un club dont il ne connaît rien. Il s’engage donc avec les Merlus en compagnie de « Tatane ».

Ce départ du Stéphanois pour Lorient fait l’effet d’une bombe. En pleine gloire internationale, il quitte la Division 1 pour aller jouer en Division d’Honneur.

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Le 4 juillet, L’Equipe rencontre le Stéphanois ou plutôt le néo-Lorientais qui, de retour dans le Morbihan, se consacre pleinement à l’activité familiale.

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Le lendemain, Max Urbini, pour le journal L’Equipe, se déplace à Lorient pour essayer de comprendre les motivations qui ont poussé Antoine Cuissard à quitter Saint-Etienne pour rejoindre la Bretagne. Extraits :

« Je viens de démissionner de Saint-Etienne et de signer une licence au FC Lorientais. Cette décision est définitive. Je l’ai prise il y a trois semaines pour des raisons majeures. Ma grand-mère a besoin de moi pour assurer la bonne marche de notre grosse affaire de mareyage. (…) Je reviens ici, également au FC Lorientais que fondèrent en 1926 mon père et ma grand-mère. N’oubliez pas que j’étais seulement réfugié à Saint-Etienne où j’ai refusé de signer un contrat professionnel. Je devais un jour ou l’autre, revenir à Lorient. »

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Le nouveau mareyeur effectue donc la saison 1946-47 dans le Morbihan. Sous la houlette de Jean Snella, son nouvel entraîneur, il s’entraîne deux ou trois fois par semaine. Dans la Ligue de l’Ouest, il est incontestablement la vedette au point que son nom figure sur les affiches d’avant-match en gros caractères. A ses débuts à Lorient, il occupe le poste d’arrière central avant de retrouver un poste d’inter droit plus conforme à ses aspirations. A 22 ans, s’il renonce momentanément au professionnalisme, il espère continuer à jouer pour le maillot frappé du coq.

Le 17 mars 1947, Gaston Barreau communique sa sélection pour affronter le Portugal dix jours plus tard à Colombes. Le lendemain, L’Equipe annonce au Lorientais sa sélection.

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Le demi-droit déclare sitôt l’annonce de la bonne nouvelle : « Je n’y croyais plus guère à cette sélection. (…) J’espère justifier ma sélection contre le Portugal. En tout cas, je ne quitterai le terrain qu’après avoir donné le meilleur de moi-même et je ne serai content que si je n’ai plus la force de délasser mes chaussures après la rencontre… et après la victoire. »

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Antoine Cuissard (le deuxième en partant de la gauche) malgré son statut d’amateur, continue de garder la confiance de Gaston Barreau, le sélectionneur français.

Un p’tit tour au Moustoir et puis s’en va…

Alors qu’Antoine Cuissard dit « Tatane » (surnom donné par un cousin) réalise une très belle saison à Lorient, au printemps, la presse stéphanoise annonce le retour de l’enfant prodigue.

Au terme de sa saison bretonne, comme il l’avait plus ou moins annoncé en quittant Saint-Etienne, il revient dans le Forez, avec pour principal objectif de disputer la prochaine Coupe du monde. Il confie dans l’édition du quotidien L’Equipe du 20 juin 1947 : « Si je retourne en équipe pro, ce ne peut être qu’à Saint-Etienne. Ceci pour plusieurs raisons. Je vais là-bas pour installer et développer une affaire de marée que ma grand-mère a l’intention de monter. (…) La Coupe du monde approche. Il faut y songer« .

La signature de l’international à Saint-Etienne est effective aux alentours du 20 juillet. A Vannes, il paraphe un contrat professionnel de cinq ans moyennant la coquette somme de 5 millions de francs et par-là même abandonne donc son statut d’amateur.

FranceFootball daté du 7 août 1947 lui consacre sa Une :

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De retour à Saint-Etienne, il n’occupe pas le poste d’arrière central comme avant son départ mais bien celui de demi-droit, dans un rôle plus ou moins de finisseur.

Footballeur professionnel oui, mais il n’oublie pas de temps à autres, d’aller donner un coup de mains à son oncle qui tient dans la halle de la ville un magasin dont l’enseigne s’appelle « Maison Cuissard. »

René Alpsteg, arrivé dans le Forez la même année que son grand ami, le prend même comme modèle. Il faut dire que Cuissard prend une part importante dans le jeu de son équipe. Il n’oublie cependant pas Lorient où il passe tous ses étés.

Au printemps 1949, un autre rejeton de la famille pointe le bout de son nez : il s’appelle Nioche, il a 15 ans et vient de s’imposer aux éliminatoires de la Loire du Concours du Jeune Footballeur. Son père, oncle de Tatane, était l’un des meilleurs avant-centres de Lorient.

 

Christiane Cuissard, plus populaire que son père ?

Mais à Saint-Etienne, c’est une demoiselle de deux ans qui est en passe de voler la vedette à son international de père : Christiane, la fille d’Antoine. Chaque match à domicile de l’ASSE, elle procède au tirage de la tombola réservée aux acheteurs du programme édité par l’Amicale des Supporters stéphanois, ce qui la rend très populaire auprès du public de Geoffroy-Guichard.

A la fin de cette saison 1949-50, l’AS Saint-Etienne termine à la 11e place de Division1. Cuissard, plutôt efficace les saisons précédentes, évolue à un poste plus reculé et par conséquent, n’inscrit qu’un seul petit but.

Antoine Cuissard
Antoine Cuissard n’inscrit qu’un seul but en 1949-50. Une statistique peu conforme pour celui qui a pour habitude d’inscrire une dizaine de buts par saison.

Sélectionné à plusieurs reprises en équipe de France, il ne connaît pas les joies de la phase finale de la Coupe du monde puisque les Bleus sont éliminés dès les éliminatoires.

En juillet 1950, le club attend de la municipalité stéphanoise qu’elle lui octroie une subvention de 3 millions de francs en plus d’un prêt de 7 autres millions. Demande qui lui est refusée. Furieux, les dirigeants placent l’ensemble de l’effectif sur la liste des transferts.

 

Les vacances de Monsieur Cuissard

« Tatane » repart en Bretagne pour y passer ses vacances, et bien que toujours stéphanois, malgré les sollicitations de Sochaux qui souhaiterait s’assurer ses services, il décide de prolonger son séjour dans le Morbihan. Ce qui n’est guère du goût de Pierre Guichard, qui a repris les rênes du club.

Antoine Cuissard prolonge ses vacances à Lorient.
Antoine Cuissard prolonge ses vacances à Lorient.

Snella rentre au bercail

Mi-août, tous les joueurs sont sur le pont. Mais un changement majeur s’opère au sein du club stéphanois. Tax n’est plus l’entraîneur des Verts. Il est remplacé par un certain… Jean Snella de retour de Lorient où il avait fait ses premières armes d’entraîneur.

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Jean Snella, l’homme fort de Saint-Etienne, au côté d’Albert Batteux dans la tribune de Geoffroy-Guichard.

La saison 1951-52 ne lui est guère favorable. « Tatane » connaît quelques problèmes de santé qui l’éloignent des terrains. Il ne dispute qu’onze matches. Il porte le maillot de l’ASSE une dernière fois le 17 février contre Sochaux (4-1), achevant ainsi sa carrière stéphanoise.

Antoine Cuissard dispute son dernier match contre Sochaux le 17 février 1952.
Antoine Cuissard dispute son dernier match contre Sochaux le 17 février 1952.

L’ASSE termine 9e du championnat. C’est alors qu’Antoine Cuissard émet à ses dirigeants des envies d’ailleurs. Comme en 1950, la municipalité stéphanoise ne verse aucune subvention au club phare de la ville, alors que le club, a besoin de liquidités pour renforcer sa ligne d’attaque peu performante la saison écoulée. Pour cela, ils songent à un échange Cuissard-Bengtsson avec Nice. Une proposition qui ne laisse pas insensible le club de la Côte d’Azur qui proposent au club forézien la somme de 6,5 millions de francs. Un chiffre jugé insuffisant les dirigeants stéphanois.

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Antoine Cuissard, comme à son habitude, part en vacances à Lorient. Mais fin juillet, une rumeur ne l’envoie plus à Nice, mais dans un autre club de la Côte d’Azur : Cannes. Mais comme en 1950, le Breton prolonge ses vacances au bord de l’océan Atlantique.

L’Equipe du 29 juillet annonce son transfert à l’AS Cannes, club de seconde division, où il souhaite jouer au football mais aussi ouvrir… une poissonnerie.

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Finalement, dans son édition du 13 août 1952, L’Equipe annonce qu’un accord est conclu entre les deux clubs pour le transfert définitif d’Antoine Cuissard moyennant la somme de 8,5 millions de francs.

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Mariage d’amour pour l’enfant du pays

Après plusieurs saisons à Nice (1953-55) où il remporte la Coupe de France contre l’OM en 1954, soit le seul trophée de sa carrière. Il termine sa carrière à Rennes où il joue jusqu’en 1959. Après l’Îlle-et-Vilaine, il regagne le Morbihan et Lorient, cette fois en qualité d’entraîneur en 1959-60.

A la bleu Méditerranée, Antoine Cuissard a toujours préféré l’océan Atlantique de ses parents et de ses grands-parents.

Lorient s’ouvre au professionnalisme et confie son équipe à un jeune entraîneur qui connaît parfaitement la maison. La boucle est ainsi bouclée.

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Antoine Cuissard, au milieu de ses joueurs, revient à Lorient en 1959 pour entraîner les Merlus et faire progresser le club.

Antoine Cuissard quitte le football

Le 12 mai 1960, le quotidien L’Equipe annonce :

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Pour conclure ce récit d’un joueur dont les allers et retours entre Lorient et Saint-Etienne ont ponctué une grande partie de sa jeunesse, une dernière anecdote racontée par ce personnage aussi attachant qu’imprévisible : « Ma grand-mère avait aussi un magasin à Saint-Etienne que j’ai d’ailleurs tenu un moment, et de temps en temps, elle disait à ses fils, donc mes oncles : « Il faut absolument que j’aille voir comment marche mon magasin de Saint-Etienne. » Et elle partait les laissant là. A vrai dire, elle venait à Saint-Etienne parce qu’elle savait qu’il y avait ce-jour-là un match intéressant ».

Passion quand tu nous tiens…

 

 Sa fiche signalétique

Antoine Cuissard, né le 19 juillet 1924 à Saint-Etienne.

Clubs successifs : Saint-Etienne, Nice, Rennes comme joueur ; Rennes, Lorient, AC Ajaccio, Vevey (Suisse), Rennes comme entraîneur.

Il achève sa carrière en 1978.

Postes : arrière central, demi-centre ou avant-centre.

Palmarès : vainqueur de la Coupe de France avec Nice en 1954.

Sélections : 27 dont 1 en tant que capitaine.

Le 3 novembre 1997, quelques jours après Roger Marche, un autre grand international, Antoine Cuissard décède à Saint-Brieuc.

La Ville de Saint-Etienne lui a rendu hommage : tout près du stade Geoffroy-Guichard, une rue porte le nom d’Antoine Cuissard.

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Pour l’anecdote : la famille Cuissard possède une particularité : trois joueurs descendants de Madame Caroline Cuissard ont évolué en équipe de France. Ses petits-fils, Antoine Cuissard (27 sélections) et Yvon Goujon (11) et son arrière petit-fils, Yannick Stopyra (33) ont porté le maillot frappé du coq.